Benoit XVI et l'environnement

Le Pape vert:
ce lieu commun va devenir un thème incontournable pour les vaticanistes en mal d'inspiration... (voir ici ).
Même s'il prétend, sans indulgence, que le Vatican "multiplie les effets d'annonce "(envers qui?), sachons quand même gré à Hervé Yannou, du Figaro, de reconnaître que Le Pape ne succombe pas à une mode écologique.

Et surtout, que le discours du Saint-Père a une portée plus large que le simple message "sauvez la planète", puisqu'il touche au fond même du respect de l'oeuvre de Dieu : celui de la vie humaine, de sa conception à sa fin naturelle. C'est-à-dire la forme humaine de l'écologie.


Article du Figaro

Benoît XVI place enfin l'environnement au coeur des priorités catholiques
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Hervé Yannou, Correspondant du Figaro au Vatican, 13 septembre 2007

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Au moment où Benoît XVI succédait à Karol Wojtyla, en avril 2005, L'Écologiste, une revue franco-britannique, titra « Habemus papam ecologistum ».
Elle relevait que le théologien Joseph Ratzinger, un Bavarois sensible aux questions écologiques, avait renoué avec ce thème oublié. Alors que les experts internationaux tirent la sonnette d'alarme, Benoît XVI a donc placé l'écologie au coeur des sujets prioritaires de l'Église catholique. Si aucun texte fondateur n'est encore venu la sanctionner, sa doctrine est en train de s'élaborer.

Depuis plus d'un an, le Pape décline un discours qui commence à se faire entendre. Le Vatican veut montrer l'exemple. Le plus petit État du monde a pour ambition de devenir neutre en émission de carbone. Il n'y a sur ses 44 hectares de souveraineté aucune industrie polluante, mais il multiplie les effets d'annonce : panneaux solaires pour alimenter la grande salle des audiences qui jouxte la basilique Saint-Pierre, plantation d'une « forêt climatique du Vatican » en Hongrie, un « puits de carbone » de 7 000 hectares. Aux jeunes Italiens réunis à Lorette au début du mois de septembre, Benoît XVI a surtout demandé d'agir « d'urgence » pour « protéger les équilibres fragiles de la nature » et recréer « un lien fort entre l'homme et la Terre ».

Le Pape ne succombe pas à une mode écologique. Sa problématique relève avant tout de la théologie, du spirituel et de la morale. Pour Benoît XVI, la question environnementale embrasse une très vaste dimension, celle du respect de la vie et de la sauvegarde de l'oeuvre de Dieu : la Création. Contrairement aux Églises orthodoxes, qui ont toujours estimé que les hommes pouvaient entrer en contact avec Dieu à travers la Bible et la nature, l'Église catholique n'a pris que très tardivement le train de l'écologie.

Au cours des mille dernières années, l'Occident chrétien a en effet perdu son lien spirituel avec la nature. Il n'existe qu'un seul saint un peu écologiste : François d'Assise. C'est une exception. Les docteurs de l'Église sont restés quasi muets sur la question. La notion de respect de la Création a été presque totalement perdue au XVIIIe siècle, à la suite de Descartes, qui présentait l'homme comme « le maître et le possesseur de la nature ». Dès lors, la société moderne n'y a plus vu une oeuvre de Dieu à préserver, mais un milieu exploitable par l'homme capable de se substituer à son créateur. Les théologiens ne traitèrent donc pas du rapport de l'homme à son milieu. Au point que certains militants écologistes ont pu avancer l'idée que le saccage de la Terre était lié à la mentalité judéo-chrétienne. Ils défendaient la thèse que si l'homme détruisait son écosystème, c'était parce que la Bible affirmait qu'il devait dominer le reste du monde vivant.

Pour y répondre, Jean-Paul II commença donc à développer une réflexion catholique sur l'écologie. Reprenant ces arguments, il voulut montrer que dans la Bible, le sort de l'homme et celui de la nature sont intimement liés. Dans le jardin d'Éden, l'homme vivait en paix avec Dieu et en harmonie avec son environnement. Après qu'Ève eut mangé la pomme, l'homme perdit d'une part la connaissance de Dieu et d'autre part l'équilibre avec la nature.

Tout se détractait déjà. « Maudit soit le sol à cause de Toi ! À force de peines, tu en tireras subsistance tous les jours de ta vie. Il produira pour toi épines et chardons et tu mangeras l'herbe des champs », lança Dieu au couple pécheur en le chassant du Paradis terrestre (Genèse, 3, 17-18). Le destin entre l'homme et la Terre existait donc bien.

En 1985, le pape polonais marqua son engagement en faveur de la préservation de l'environnement en expliquant à des jeunes réunis à Viterbe, au nord de Rome, que Dieu avait remis entre les mains de l'homme la maîtrise et la gérance de la Terre, créée pour lui, mais pas sa possession. Par la suite, il devait appeler les chrétiens à « une conversion écologique » et signer en 2002, à Venise, avec le patriarche oecuménique de Constantinople, Bartholomé Ier, une déclaration commune pour la sauvegarde de la Création qui n'eut alors que très peu d'échos.

Avec Benoît XVI, ce discours a pris une autre ampleur. Il y a certes la destruction de l'environnement, mais surtout les manipulations génétiques et embryonnaires. Loin du recours aux énergies alternatives, Benoît XVI insiste sur le fond même du respect de l'oeuvre de Dieu : celui de la vie humaine, de sa conception à sa fin naturelle.
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Sur ce sujet, voir aussi: A Loreto, le Pape et l'écologie
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