Une rencontre avec Benoît XVI (II)

Suite du récit de Jean Madiran (extrait), voir ici: Une rencontre avec Benoît XVI
Je retiens particulièrement ces propos tenus par le cardinal Castrillon Hoyos, président de la Commission Ecclesia Dei:

"Le Motu proprio sur la messe n'est pas une concession diplomatique ou une rouerie visant à réconcilier les traditionalistes dissidents."
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Je m'en doutais depuis le début (voir ici: Pas de calcul pour le Pape), mais cela va mieux en le disant. Et qu'on ne me parle pas de "langue de bois" vaticane! c'est trop facile...



Article dans "Présent" du 16 octobre
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Lundi 8.

Le cardinal Castrillon Hoyos est le président de la Commission Ecclesia Dei. Comme le Pape, il sait écouter.
Il écoute quand je lui parle un peu de tout ce que nous avons sur le cceur.
Il nous garde plus d'une demi-heure. Cela m'a donné le temps d'évoquer, dans la traduction française du Credo, le scandale du « de même nature » mis à la place du « consubstantiel »... J'ai aussi parlé de la Bible Bayard et d'autres choses semblables, sans oublier la messe tridentine et le Motu proprio.
Le Cardinal nous assure que le Motu proprio sur la messe n'est pas une concession diplomatique ou une rouerie visant à réconcilier les traditionalistes dissidents. Là n'est pas son but principal. Ce qui motive le Pape, nous dit-il, c'est la messe elle-même, en elle-même, pour elle-même. La messe tridentine, aujourd'hui forme extraordinaire du rite romain, doit être considérée comme une forme « normale ». Elle est une richesse spirituelle, liturgique, théologique sans égale et qu'il serait coupable d'abandonner. Elle est un inégalable moyen de sanctification. Quelle joie qu'un tel langage. Il y a longtemps que je n'avais pas entendu un cardinal faire de la sanctification un objectif principal.
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La tradition
En cette audience pontificale, du 3 octobre..., Benoît XVI a prononcé des paroles à l'intention de tous ceux qui étaient là, et, par-delà, au monde entier (c'est la coutume de l'audience du mercredi).
Il a notamment parlé en italien de saint Cyrille d'Alexandrie et de la portée normative de la tradition catholique. C'est un de ces (nombreux) discours du Pape qui ne sont pas traduits en français ou qui du moins ne paraissent pas en France.
Benoît XVI a déclaré:
« Lié à la controverse christologique qui conduisit au concile d'Ephèse en 431, et ultime représentant important de la tradition alexandrine, Cyrille fut appelé plus tard dans l'Orient grec : « le gardien de l'exactitude » - ce qui doit s'entendre comme le gardien de la vraie foi - et même « le sceau des Pères » [de l'Eglise].
« Ces expressions antiques expriment bien le fait, caractéristique chez Cyrille, de sa constante référence aux auteurs ecclésiastiques qui l'ont précédé (surtout Athanase), en vue de montrer la continuité de sa propre théologie avec la tradition. Il s'insère volontairement et explicitement dans la tradition de l'Eglise, en laquelle il reconnaît la garantie de la continuité avec les Apôtres et avec le Christ lui-même. »
Ce propos du Pape doit-il être pris pour un précepte ? Il me semble plutôt qu'il s'agit de l'énoncé objectif d'une vérité. En tout cas il nous indique dans quel esprit Benoît XVI entend gouverner et enseigner.
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Il trouve en Cyrille d'Alexandrie un exemple du comportement catholique : l'accord avec la tradition reçue, le souci de la continuité (et non pas la rupture). La tradition de l'Eglise est le critère et la norme pour toutes les inévitables nouveautés. La diversité de tendance à l'intérieur du catholicisme ne devrait pas consister en une divergence systématique entre traditionnels et progressistes. Assurément il y a « plusieurs demeures dans la maison du Père », mais toutes ont en commun les mêmes principes, la même tradition souveraine, la tradition des Pères de l'Eglise, la seule garantie d'être « en continuité avec les Apôtres » et par là « avec le Christ lui-même ».
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Benoît XVI n'a pas dit que ce critère de discernement s'applique directement à la messe, à la liturgie, au Concile. Mais son discours le suggère, son discours y engage les évêques et chacun de nous en son particulier.