Rencontre avec le Roi d'Arabie Séoudite

Il aura fallu plus d'un an pour que l'on commence à comprendre ce qu'avait voulu dire Benoît XVI lors de sa conférence de Ratisbonne, et qu'une sorte de consensus commence à s'esquisser sur le sujet dans les commentaires. En opposition avec un autre consensus, entièrement négatif, celui-là, qui était la tonalité générale en septembre 2006 (pauvres commentaires!).
Après la visite (souvent incomprise), à la Mosquée Bleue d'Istanbul, ses intentions reviennent au premier plan de l'actualité, successivement avec la lettre des 138 intellectuels musulmans aux dirigeants chrétiens, puis, plus récemment avec la visite du Roi d'Arabie Séoudite.
Tant pis pour ceux qui n'y ont vu que la représentation symbolique de l'Islam conquérant, ou menaçant, en particulier à travers le présent du roi Abdallah. Je crois plutôt qu'il s'agissait de la part des musulmans d'un acte de courtoisie, d'un accusé de réception, d'un gage de bonne volonté et peut-être même d'une invitation au dialogue. Il ne m'appartient pas ici de juger s'ils sont sincères.
On notera d'ailleurs que le communiqué de la salle de presse du Vatican est très elliptique.

Voir ici les articles de John Allen sur le premier de ces deux évènements: Relations avec les musulmans et Réactions catholiques à la lettre des musulmans
La très intéressante réflexion de Marco Tosatti, le vaticaniste de La Stampa, sur son blog, confirme (en toute modestie!) ma propre analyse sur le Le gambit du Saint-Père .

Les faits (VIS)

CITE DU VATICAN, 6 NOV 2007 (VIS).
La Salle-de-Presse a publié en début d'après-midi le communiqué suivant, relatif à la visite du Roi d'Arabie, SM Abdallah bin Abdulaziz Al Saud qui, après avoir rencontré le Saint-Père, s'est entretenu avec le Cardinal Secrétaire d'Etat et le Secrétaire pour les rapports avec les états:

"Ces entretiens cordiaux ont permis d'aborder des sujets chers aux deux parties. Ils ont mis en relief l'engagement dans un dialogue interculturel et interreligieux, destiné à favoriser une coexistence pacifique et fructueuse entre les personnes et les peuples, l'importance de la collaboration entre musulmans, chrétiens et juifs pour la promotion de la paix, de la justice, de la spiritualité et des valeurs morales, pour le bien de la famille tout spécialement".

"Souhaitant la prospérité du pays, le Saint-Siège a tenu à la mention de la présence positive et active des chrétiens en Arabie saoudite. Un échange d'opinion a également intéressé la question médiorientale, en insistant sur la nécessité d'une solution juste aux divers conflits qui affligent la région, en particulier le conflit israélo-palestinien".

Reportage photos

Papacy and the Vatican on Yahoo   


Commentaire de Marco Tosatti


Après tout, c'est peut-être utile de parler clair avec l'Islam
Marco Tosatti, La Stampa
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Après Ratisbonne, nouveaux signes d'attention du monde musulman envers le Pape

Vous vous souvenez de Ratisbonne, quand Benoît XVI cita un empereur byzantin pas particulièrement élogieux envers Mahomet et l'Islam (peut-être l'Empereur avait-il de bonnes raisons) et fut lourdement critiqué, au-delà des pays musulmans, y compris par nos propres partisans du dialogue à tout prix, parce qu'il avait posé le problème du rapport entre l'Islam et la violence?
Aujourd'hui que la poussière des manifestations instrumentalisées dans les pays islamiques est retombée, il est permis de supposer qu'en s'exprimant avec clarté sur un problème réel, Papa Ratzinger a rendu à chacun un bon service. Deux éléments au moins permettent de le supposer.
Primo : la visite, historique au Vatican, du roi d'Arabie saoudite, un des endroits au monde où les droits de l'homme, et le premier d'entre eux, la liberté religieuse, sont le moins respectés. Il est vrai que Benoît XVI ne lui a pas dit de façon claire et nette qu'interdire les prêtres et les Bibles, sous peine de punitions variées, n'est pas exactement le meilleur moyen de montrer que le Coran et l'Islam sont ouverts et tolérants, comme le récitent (encore) quelques amoureux des lieux communs hérités du siècle des Lumières.
Secundo: la lettre que 138 "sages" islamiques de 43 pays ont écrite aux chefs de la chrétienté. Selon un grand expert des rapports entre Islam et le christianisme, le jésuite libanais Samir Khalil Samir, "toute la structure de la lettre repose clairement sur l'amour du Dieu-amour, de l'homme, du prochain. Cette position n'est absolument pas habituelle dans le mode de penser et dans la structure mentale et théologique islamiques. C'est vraiment chrétien, de parler de l'amour de Dieu, alors que c'est une formulation très rare dans la tradition musulmane. Il s'agit donc, d'un acte de bonne volonté, de recherche pour trouver un terrain d'entente commun ". Et, fait encore remarquer le père Samir, c'est la première fois que l'initiative vient du côté islamique.
Question : mais alors, sortir du "politiquement correct", et parler avec clarté au monde musulman, sans masquer les problèmes, ce serait donc utile ?

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