Mgr Etchegaray s'exprime

Le cardinal Etchegaray vient de publier un livre d'entretiens avec le journaliste Bernard Lecomte (voir ici: Comme un écho: le cardinal Etchegaray ). Son titre est "J'ai senti battre le coeur du monde" (édition Fayard, collection "Témoignage pour l'histoire")
A cette occasion, comme c'est l'usage, il est invité par les grands medias pour en assurer la promotion.
Il a entre autres accordé une interview au Parisien, ce qui ne devrait pas porter à conséquence, les lecteurs de ce journal n'étant pas réputés être des piliers de sacristie.
Mais il a donné son avis sur des sujets prétendus "sensibles". Et en particulier, un des rares sujets relatifs à la religion catholique qui intéressent les journalistes: le célibat des prêtres.
Je n'ai pas trouvé l'article du Parisien, voici le compte-rendu qu'en fait une dépêche de l'agence AFP (11/11/2007):

La question des prêtres mariés "peut se poser", selon le cardinal Etchegaray

La question de l'ordination d'hommes mariés pour répondre au manque de prêtres "peut se poser", selon le cardinal Roger Etchegaray interviewé dimanche dans Le Parisien/Aujourd'hui en France.

"La question peut se poser. Comme cela se passe déjà dans les églises gréco-catholiques", répond le cardinal à la question de savoir si l'ordination d'hommes mariés pourrait être envisagée par l'épiscopat français pour répondre à "la crise des vocations".
"Mais il faut être clair (...) ce n'est pas +la+ solution" à cette crise, ajoute le prélat de 85 ans, vice-doyen du Sacré Collège au Vatican.
Dans l'entretien est également évoquée la récente polémique sur le texte du pape Benoît XVI facilitant la célébration de la messe en latin.
"Le pape a publié ce texte par souci de l'unité de l'Eglise, en souhaitant voir revenir les traditionalistes. On ne sait pas si ça va marcher, attendons", déclare Roger Etchegaray.
Le "motu proprio" du pape Benoît XVI autorisant à nouveau la messe en latin, publié le 7 juillet par le Vatican, est entré en vigueur le 14 septembre.
L'annonce du retour de cette pratique avait suscité beaucoup d'émotion parmi les fidèles, mais dans la réalité peu de prêtres ont été saisis de demandes de messe en latin depuis cette entrée en vigueur.

Même sur le sujet du Motu Proprio, les propos du cardinal témoignent d'un enthousiasme plus que modéré.
Comme d'habitude, c'est la presse italienne qui fait les commentaires les plus intéressants.
Revenant sur l'épisode dans "Il Corriere della sera", Luigi Accattoli écrit (cité dans le Blog de Raffaella):
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« Etchegaray est au Vatican ce que le Cardinal Martini est pour l'ensemble de l'Eglise catholique: une voix libre, de grand prestige personnel, mais d'aucune responsabilité institutionnelle. Dans cette position, on peut s'avancer en terrain découvert, et dire ce que l'on pense
...
Le cardinal Etchegaray est notoirement un libéral. Dans la même interview, il affirme "Dieu ne paut pas être conservateur", et que "le monde est toujours nouveau"
»
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Et un commentaire du même blog ajoute judicieusement:
«Vu la situation de l'Eglise en France, ce n'est peut-être pas le moment de lancer des bombes à retardement, ou de soulever des doutes et des confusions. Faire de la publicité à un livre en train de sortir ne justifie pas tout»

Autrement dit, il est dommage que le Cardinal ait fait passer son ego avant l'intérêt de l'institution qu'il devrait servir. Au besoin, en gardant le silence.

Comme le suggère (avec indulgence) Luigi Accattoli, le cardinal Etchegaray ne représente que lui-même. Autremant dit, ce n'est pas le Pape.
Le Cardinal Ratzinger non plus n'était pas le Pape. Ni Jean-Paul II, ni même celui qu'il est devenu depuis. Mais on peut supposer que ses propos reflètent davantage ceux de l'institution.
On relira avec intérêt ici ( Célibat des Prêtres ) son avis sur ce problème, (un problème qui n'est crucial que pour les journalistes en quête de scoop), tel qu'il est exprimé dans "Le Sel de la Terre" .

Question sur le livre du Cardinal Etchegaray

J'avoue avoir été très intriguée par le livre à clés que je viens de lire, et j'en ai abondamment parlé ("Confession d'un cardinal" ).
Et je me suis interrogée sur l'identité du mystérieux cardinal qui rédige ses Mémoires avec l'aide d'un journaliste.
Il est très possible que ce soit une synthèse de plusieurs personnalités, mais il y a des coïncidences que je persiste à trouver troublantes entre ce cardinal de roman, et cet autre bien réel, ainsi qu'il apparaît à la lecture du livre J'ai senti battre le coeur du monde.

Tous deux sont progressistes.
Tous deux ont vécu le Concile Vatican II comme "experts" et ont rencontré, à cette occasion, le jeune théologien Ratzinger.
Tous deux ont effectué des missions pour Jean-Paul II, ont été au Rwanda, se sont retrouvés à Rome à la tête d'un dicastère, et étaient trop âgés pour participer au conclave qui a vu l'élection de Benoît XVI.
J'en oublie sûrement.
A la nationalité près, cela fait beaucoup de "tous deux", je trouve...

Un dernier détail.
Les deux livres sont publiés respectivement l'un chez JC Lattès, l'autre chez Fayard, deux maisons d'édition qui font partie du même groupe (Hachette). Et pratiquement en même temps, à une semaine près. Bien sûr, le Cardinal Etchegaray conserve une réserve dont son alter ego anonyme peut s'affranchir, et pour cause.
Bizarre, non? A moins qu'il ne s'agisse de deux faces d'un même "travail". Une manière originale de doubler le coeur de cible d'un ouvrage un peu austère.

Je peux me tromper, bien sûr....