Rapprochement catholiques-orthodoxes

Tout à l'heure, je traduisais un article de Peter Seewald, écrit juste avant la visite de Benoît XVI en Autriche (L'ambassadeur spécial de Jésus ), il écrivait ceci:
...le processus de réunification avec l'orthodoxie est quantitativement et qualitativement très prometteur, et à portée de main.
"Nous avons presque tout en commun", s'est réjoui récemment le pape. "Par-dessus tout, nous partageons l'espoir sincère d'unité. Du fond de mon coeur, je prie pour que ce rêve puisse être réalisé prochainement. "

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Le sujet tient, c'est évident, particulièrement à coeur au Saint-Père, voir ici: Dialogue avec les orthodoxes
Un pas décisif, selon Marco Politi, le vaticaniste de La Repubblica, vient d'être franchi.
Ce qui ne veut évidemment pas dire qu'il ne subsiste pas des difficultés de taille, ceci dit afin de ne pas se réjouir trop vite, au risque d'être déçus ensuite.
Article original en italien sur le site de La Repubblica, reproduit sur le blog de Raffaella.


L'affirmation historique dans un document de 46 paragraphes, une vraie "feuille de route".
Reste à étudier le rôle des évêques
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http://www.repubblica.it
Les orthodoxes : "Le Pape est le premier patriarche"
La route s'ouvre vers la réunification
MARCO POLITI

Le Pape est le "premier des patriarches", Rome est le "premier siège", l'Église de Rome "préside dans l'amour". Noir sur blanc un document émanant conjointement de l'Église catholique et des Églises orthodoxes fixe définitivement et de manière sans équivoque le primat du Pontife romain, aplanissant la route vers la réunification des catholiques et des orthodoxes divisés depuis le schisme de 1054.

Le document en question est le fruit du sommet d'octobre à Ravenne, où une délégation catholique conduite par le cardinal Kasper et une délégation pan-orthodoxe conduite par le métropolite Zizioulas du Patriarcat oecuménique de Constantinople, ont jeté les bases pour un approfondissement des questions à résoudre afin de rétablir l'unité.
Il y a 46 paragraphes, une véritable "feuille de route", qui indique le parcours des thèmes à examiner avant de pouvoir déclarer caduques les divisions du passé. Donc, la reconnaissance de la primauté romaine est présente, mais aussitôt, il est précisé qu'il faudra étudier "le rôle de l'évêque du premier siège" dans le domaine de la comunnauté ecclésiale. En d'autres termes, il faudra définir ce qui sont les "prérogatives" de l'évêque de Rome, étant donné que sur ce sujet, les opinions divergent beaucoup.
Le document trace les grandes lignes de trois concepts fondamentaux : communion ecclésiale, conciliarité, autorité. Les deux parties s'accordent sur le fait que l'évêque est le chef de l'Église locale et que personne ne peut se substituer à lui. Toutes deux sont d'accord pour reconnaître que "l'unique et sainte Eglise" se réalise simultanèment dans chaque Église locale, qui célèbre l'eucharistie, et dans la communion de toutes les Églises.

Il y a accord également sur les structures de l'Église universelle. Au niveau local l'autorité est l'évêque. Au niveau régional, un groupement d'Églises reconnaît en son sein un "premier" (protos, en grec). Plus articulée est la question du niveau global : ici les experts auront beaucoup à travailler. Parce que le document affirme qu'au plan universel "ceux qui sont les 'premiers' dans les différentes régions, en même temùps que tous les évêques, coopèrent dans tout ce qui concerne la totalité de l'Église". Et dans ce contexte, il est souligné que "les 'premiers' doivent reconnaître qui est le premier parmi eux".

Mais pour assurer la concorde - scande la "feuille de route oecuménique" - la conciliarité, c'est-à-dire la coopération commune entre tous, est nécessaire. Les évêques chrétiens, est-il dit, ne doivent pas seulement être unis entre eux dans la foi, mais "ils ont aussi en commun la même responsabilité et le même service vis-à-vis de l'Église". Les conciles sont le "moyen principal" à travers lequel s'exprime la communion de l'Église.
En somme, le monde orthodoxe dit clairement que l'évêque de Rome ne peut s'imaginer être un souverain totalitaire, qui décide tout seul ou qui se substitue aux niveaux locaux. D'ailleurs Ratzinger lui-même affirma à de multiples reprises dans le passé que le pontife romain ne peut pas se comporter en "monarque absolu".
Un passage du texte (faisant référence aux autorités régionales) a la tonalité d'un avertissement précis : "Le 'premier' ne peut rien faire sans le consentement de tous".
Le Pontife, d'autre part, est toujours désigné dans le texte comme l'évêque de Rome ou comme l'un des cinq patriarches historiques.

Maintenant il s'agit de Papa Ratzinger. Lui seul peut donner l'impulsion pour aller de l'avant. Pour le 23 novembre le Pontife a convoqué tous les cardinaux du monde pour une réunion, dont l'ordre du jour est précisément l'oecuménisme. Le document catholique- orthodoxe constituera la base du débat.

Entre temps Benoît XVI est en train de réformer le Synode des évêques, c'est-à-dire le parlement consultatif de l'épiscopat mondial qui se tient tous les trois ans : Les Églises Orientales catholiques - pont vers l'Orthodoxie - se verront attribuer davantage de délégués, avec plus de vingt-cinq évêques, il y aura plus d'espace pour la discussion et les groupes de travail seront réformés.
Benoît XVI a manifesté depuis son élection la volonté de faire des "pas concrets" en direction du rapprochement entre les Églises chrétiennes. Mais il y a aussi des difficultés dans le camp orthodoxe.

Le patriarche Alexis de Moscou est récalcitrant à l'idée de reconnaître la primauté du patriarche de Constantinople, Bartolomeo et en même temps, il ne pardonne pas au Vatican l'activité des diocèses catholiques dans l'ex URSS. À Ravenne ses représentants avaient quitté la réunion parce que l'Église orthodoxe d'Estonie s'était jointe au patriarcat oecuménique de Costantinople. (14 novembre 2007)