Dans la presse: relations tendues avec Israël

Mini-dossier, et questions

Ces nouvelles parues simultanèment dans la presse, un peu avant de Noël, sont-elles vraiment sans rapport les unes avec les autres?
Cela commence le 17 décembre, dans "Libération", par une anecdote a priori dérisoire, pour se terminer par le marronnier qu'est désormais devenue la cause de béatification de Pie XII.
En passant par ce qu'on pourrait appeler la ritournelle anti-Benoît de son "ennemi intime", Flores d'Arcais, qui, relayé par le Courrier International, se répand contre l'encyclique dans El Pais. (*)

Les questions abordées ne peuvent se comparer par leur importance, mais elles ont clairement un thème commun.

Je me garderai de tout commentaire, car il me semble que les faits parlent d'eux-mêmes



1. Un article de Libération:
Les marchands du temple chassés du Vatican
Eric Jozsef (à Rome)

«Je ne céderai pas, dès demain matin je retourne avec ma caisse de souvenirs sur la place Saint-Pierre !»
Settimio Limentani est furieux, prêt à défier Benoît XVI et la police vaticane.
Et avec lui, les dix autres vendeurs ambulants qui ont été sommés, lundi dernier, de quitter les lieux après des décennies de pratique et quatre siècles et demi de tradition. Ceux que l’on appelle les urtisti - «ceux qui heurtent», parce qu’ils bousculaient les pèlerins avec leurs sacs remplis d’objets - sont en effet les héritiers des juifs romains réduits à exercer ces petits métiers (dont la vente d’objets sacrés près des basiliques romaines) par le pape Paul IV qui enferma, en 1555, la communauté dans un ghetto.
«Moi, je travaille depuis 1975 à Saint-Pierre ; et avant moi, mon oncle ! S’ils me chassent, c’est la fin. Je n’ai rien d’autre», s’indigne Limentani, 45 ans et père de deux enfants. Chaque jour, il se postait avec ses images pieuses, ses chapelets et ses médailles à la frontière entre l’Italie et le Vatican, au pied de la colonnade du Bernin, dans une sorte de limbe administrative. «Il n’y a jamais eu de vraie réglementation, explique-t-il. Avant 1978, nos caisses étaient parfois séquestrées. Sous Jean Paul II, on nous a laissés tranquilles. Pourquoi tout d’un coup, ce nouveau pape qui parle de famille, de travail et d’honnêteté vient nous mettre à la rue ?» Officiellement, pour le décorum de la place. Certains urtisti menacent de s’enchaîner à Saint-Pierre. Les responsables de la communauté juive veulent eux croire en «une médiation».
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2. Dans La Croix:
(Isabelle de GAULMYN, à Rome )
Rome déplore la mauvaise volonté d'Israël vis-à-vis des chrétiens
Le Vatican regrette l’absence de résultat sur la négociation de l’accord juridique et fiscal entre le Saint Siège et Israël
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«Les chrétiens en Terre sainte connaissent une situation de souffrance, même s’ils ne sont pas persécutés. » À quelques jours de Noël, le P. Pierbattista Pizzaballa, franciscain, custode de Terre sainte, c’est-à-dire supérieur des franciscains qui ont en charge les Lieux saints, a voulu, lundi 17 décembre, devant la presse, à Rome, attirer l’attention sur le quotidien de cette minorité chrétienne de 170 000 personnes.
Souffrance, car cette communauté voit son poids démographique décroître chaque année dans la région, du fait de l’émigration des chrétiens qui n’ont plus de perspective sur place.

Avec la construction du mur, a ajouté le P. Pizzaballa, la vie des chrétiens qui habitent en terre palestinienne et travaillent à Jérusalem s’est encore compliquée. Enfin, il s’est inquiété de l’évolution de la situation à Gaza, où les chrétiens commencent à faire l’objet de violences de la part de certains musulmans : « Le Hamas ne contrôle pas tout le territoire, et cela laisse une place à des mouvements islamistes fondamentalistes. »
Le Vatican ne cache plus son exaspération

En Israël même, l’Église catholique continue à souffrir de l’insécurité juridique et des vexations des autorités. Ainsi, les visas des prêtres et religieux en provenance du monde arabe sont accordés au compte-gouttes. « Cela va mieux depuis quelques semaines, reconnaît le custode, car le nonce a haussé le ton, mais il n’y a pas de règles stables. »
Plus généralement, on peut dire que les relations entre le Saint-Siège et l’État d’Israël traversent une passe difficile. Le Vatican ne cache plus son exaspération devant la lenteur des discussions pour parvenir à un accord économique qui devrait stabiliser la situation juridique et financière des institutions catholiques du pays.
La toute dernière réunion de négociation, la semaine dernière à Jérusalem, n’a en effet une fois de plus pas abouti. Comme l’a noté lundi avec amertume Mgr Antonio Maria Veglio, secrétaire de la Congrégation pour les Églises orientales, qui était à la rencontre de Jérusalem, « pour une fois le communiqué officiel, qui ne dit rien comme tous les communiqués officiels, reflète exactement le résultat : rien ».

Les discussions continuent à butter sur le point essentiel, à savoir la fiscalité des institutions chrétiennes. Pourtant, a encore noté Mgr Veglio, « l’Église catholique pourrait arguer de la manne touristique apportée au pays par les pèlerins catholiques. »
C’est en effet la bonne nouvelle de l’année : les pèlerinages ont repris, et connu en 2007 leur meilleure année depuis longtemps : les réservations de nuits d’hébergement ont dépassé celles de l’année du Jubilé.

Quant à Benoît XVI, qui a « un grand désir » de se rendre en Terre sainte, « les conditions ne sont pas réunies, c’est-à-dire la pacification de la situation dans la région et l’envoi par Israël de signaux positifs dans les négociations bilatérales », a estimé le P. Lombardi, porte-parole du Saint-Siège.

3. Dans Le Monde
(dépêche AFP, d'après I Media)
Commission spéciale pour étudier la béatification controversée de Pie XII
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Benoît XVI a créé une commission spéciale pour étudier le dossier de la béatification controversée du pape Pie XII (1939-1958), soupçonné d'être resté insensible au sort des Juifs sous le nazisme, a indiqué mardi l'agence spécialisée I-media.
"Le pape ne veut pas signer et entend garder la haute main sur ce dossier sensible. Le meilleur moyen de suspendre une décision est de créer une commission spéciale", a indiqué une source vaticane pour expliquer ce nouveau délai dans la marche de Pie XII vers la béatification.

"La question de la béatification d'Eugenio Pacelli (Pie XII), en dehors des questions historiques liées à son attitude durant la guerre, relève de la diplomatie actuelle. Sa béatification pourrait faire beaucoup de remous dans une période où les relations avec l'Etat hébreu restent tendues", selon cette source citée par cette agence spécialisée dans l'information religieuse.

I-media rappelle que Benoît XVI a autorisé lundi, entre autres, la promulgation de décrets reconnaissant les vertus héroïques de huit serviteurs de Dieu, première étape dans leur procès en béatification mais que celui de Pie XII n'y figure pas.

Le 8 mai 2007, les membres de la Congrégation pour la cause des saints avaient pourtant voté l'octroi des vertus héroïques au pape de la Seconde Guerre mondiale.

Le rôle de Pie XII est l'objet de polémiques, de nombreux historiens ayant mis en cause le silence et la passivité du pape face à l'Holocauste. Le Vatican a souligné en revanche à de nombreuses reprises ses interventions pour tenter de mettre à l'abri les juifs de Rome lors de l'occupation de la ville par les troupes hitlériennes.

Les relations entre Israël et le Vatican traversent une période délicate et le pape Benoît XVI a "un grand désir" de se rendre en Terre Sainte, mais il attend de la part d'Israël "des signaux positifs" dans les négociations en cours entre les deux Etats, a annoncé le Saint-Siège lundi.

Sur ce sujet

Relations tendues entre le Saint-Siège et Israël
L'Eglise se défend, et défend Pie XII
Vers la béatification de Pie XII - John Allen (partie I)
Vers la béatification de Pie XII (partie II)
Relations entre catholiques et juifs




(*) C'est à peine digne d'être cité:
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Paolo Flores d'Arcais dénonce la croisade de Benoit XVI Le philosophe italien Paolo Flores d'Arcais, rédacteur en chef de la revue MicroMega, s'insurge contre le discours du Pape Benoit XVI dans sa dernière encyclique. "La croisade continue. L'encyclique de Benoit XVI 'Spe salvi', du 30 novembre dernier, ratifie et radicalise l'anathème d'une Eglise catholique contre une modernité coupable de désobéir à Dieu et se précipite à cause de cela dans le désespoir du nihilisme. Tout est dit à présent. Même la démocratie est mensonge si la souveraineté des hommes n'est pas subordonnée à l'impératif de la 'loi naturelle', c'est-à-dire, si la liberté ne coïncide pas avec l'obéissance aux oukases de l'Eglise, unique interprète autorisée de cette loi naturelle et de la volonté de Dieu. La démocratie doit être chrétienne, sinon elle sera inhumaine. Le mystère est finalement résolu. (...) Le Mal, ce sont les Lumières, le projet d'autonomie de l'homme."
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Voir aussi:
PAOLO FLORÈS D'ARCAIS CONTRE BENOÎT XVI
FLORES D'ARCAIS CONTRE LE PAPE