Relations avec les musulmans

Après un billet écrit en novembre dernier Pourquoi Benoît XVI est si prudent au sujet de la lettre des 138 musulmans, Sandro Magister consacre son premier billet hebdomadaire de la nouvelle année ( Le cardinal écrit, le prince répond. Les raisons qui séparent le pape des musulmans) à une interview que le cardinal Jean-Louis Tauran, président du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, a accordée à L’Osservatore Romano du 30 décembre.
Il y est question de ce qui est (déjà!) considéré comme un une échéance importante dans l'agenda du Pape pour 2008: une rencontre, prévue pour le printemps, qui « réunira Benoît XVI et une délégation des 138 musulmans qui ont écrit la lettre ouverte 'Une parole commune entre nous et vous' envoyée au pape et à d’autres leaders chrétiens en octobre dernier .
C’est l’échange de courrier entre Benoît XVI – par l’intermédiaire du cardinal secrétaire d’état Tarcisio Bertone – et l’une des personnalités à l’origine de la lettre des 138, le prince de Jordanie Ghazi bin Muhammad bin Talal, en novembre et décembre derniers, qui a ouvert la voie à cet événement. » (voir plus bas)



Les difficultés sont importantes

Sandro Magister

[En dépit du langage diplomatique optimiste utilisé par le cardinal Tauran, qui se dit "très confiant" et a apprécié les "ouvertures considérables" dont font preuve des groupes importants du monde musulman, ... les difficultés à surmonter sont encore grandes.]
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L’échange de lettres entre le cardinal Bertone et le prince de Jordanie montre bien que les deux parties ne sont pas du tout d’accord en particulier sur un point essentiel: les sujets sur lesquels doit porter le débat.
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La lettre du cardinal Bertone, datée du 19 novembre et rendue publique une dizaine de jours plus tard, propose trois principaux sujets de discussion:
- un respect effectif de la dignité de tout être humain
- la connaissance objective de la religion de l’autre
- l’engagement commun à promouvoir le respect et l’acceptation mutuels entre les jeunes.

Dans son commentaire de la lettre de Bertone, le jésuite égyptien Samir Khalil Samir – un des islamologues les plus écoutés par le pape avec un autre jésuite, l’Allemand Christian W. Troll – a souligné que la lettre des 138 n’est pas claire à propos du premier des trois sujets.

A tel point que certains signataires ont exprimé leur manque total d’intérêt pour une discussion sur la liberté de conscience, l’égalité entre homme et femme et entre croyant et non-croyant, la séparation entre pouvoir religieux et pouvoir politique.

Bref, toutes ces conquêtes des Lumières que l’Eglise catholique a fait siennes mais que l’islam est encore loin d’accepter.

A l’inverse, la lettre du prince de Jordanie au cardinal Bertone, datée du 12 décembre et elle aussi rendue publique une dizaine de jours plus tard, insiste sur le fait que le dialogue entre catholiques et musulmans doit être d’abord "théologique" et "spirituel".
Il doit en outre avoir pour objet – plus que des aspects définis comme "extrinsèques" tels que les commandements de la loi naturelle, la liberté religieuse et la parité entre homme et femme – cette "Parole commune entre nous et vous" qui est au centre de la lettre des 138, à savoir l’unicité de Dieu et le double commandement de l’amour de Dieu et du prochain.



Article en entier ici (chiesa.espresso), ainsi que la lettre du cardinal Bertone au prince de Jordanie Ghazi bin Muhammad bin Talal et la réponse de ce dernier.



Sur ce thème

Sur ce sujet, on relira également avec intérêt la "tribune libre " <Tribune: relations chrétiens-musulmans>, publié sur le site 2007, qui soulignait bien l'ambiguïté (la mauvaise foi?) de l'attitude des musulmans.

Voir aussi:
- Réponse aux musulmans: ce que veut Benoît XVI
- 138 leaders musulmans lancent un appel (John Allen)
- Réactions catholiques à la lettre des musulmans (John Allen)



le dialogue s'avère compliqué!

Conclusion évidente: le dialogue n'est pas simple, avec des interlocuteurs qui ont manifestement d'autres codes éthiques, et d'autres moyens de les imposer... Et qui sont bien décidés à entraîner le Chef de l'Eglise catholique sur un terrain où il ne peut ni ne veut les suivre.
Comme mon correspondant l'écrivait:
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Il ne peut y avoir aucun lien entre l’Islam et le Christianisme au plan dogmatique et spirituel, dans la mesure où notamment, - hors et en sus de toutes les bases théologiques différentes -, l’Islam ne reconnaît pas Jésus+Christ comme étant Dieu, et le Christianisme ne reconnaît pas Mahomet comme un prophète.



La lettre du prince

Je l'archive, dans la traduction qui figure sur le site de Sandro Magister.
A côté du fait qu'on n'a que la parole du prince pour accréditer l'idée (vaguement effleurée) qu'il est vraiment le porte-parole des "138", il est difficile d'ignorer un ton qui, s'il n'est pas délibérément menaçant, évoque un peu une manoeuvre d'indimidation...

>>> La lettre du prince Ghazi bin Muhammad bin Talal



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