Les catéchèses
I. Sa vie
II. Dernières années
III. Foi et raison
IV. Oeuvres
V. Les trois conversions
Compléments
Le derby Ratzinger-Martini

Enième épisode ces jours-ci. Un article sur le sujet datant de 2007 (20/5/2008)



Un billet assez étonnant du blog de La Croix, intitulé "Peut-on encore rêver l'Eglise" cite La Repubblica à propos d'un livre qui vient de sortir en Italie, co-écrit par le cardinal Martini.
Citer La Repubblica à propos des affaires de l'Eglise est à peu près aussi incongru que se référer à Marie-Claire pour commenter les cours de la bourse, ou à L'Equipe pour présenter des modèles de tricot!

Le cardinal émérite de Milan, qualifié de prince de l'Eglise (!!), aujourd'hui atteint de la maladie de Parkinson, et retiré à Jérusalem, dont l'article rappelle qu'il fut papabile (une dénomination inventée par les soi-disant "vaticanistes", très dépités de ne pouvoir élire le pape eux-mêmes, puisque, pour donner deux exemples récents, ni Jean Paul 1er, ni Jean Paul II ne le furent), est présenté comme ayant toujours eu "une très grande liberté intérieure".
Par rapport à qui? A quoi?
On lira les raisons de ce jugement flatteur plus bas.
Mais les autres? Que dire, par exemple, du Cardinal Biffi, tout aussi libre, mais au point opposé de l'échiquier "politique" de l'Eglise?
La Repubblica, quotidien gauchiste et anti-clérical dans la même veine que Libération chez nous cite (tiens donc! se seraient-ils convertis?) quelques "bonnes feuilles", selon une politique de marketing bien rôdée.

Et c'est cette phrase-là qui est découpée aux ciseaux dans le blog de La Croix:

« Fut un temps où j’ai rêvé d’une Eglise de la pauvreté et de l’humilité, indépendante des puissants de ce monde. Une Eglise qui laisse de l’espace aux personnes qui pensent autrement, une Eglise qui donne courage, spécialement à celui qui se sent petit ou pêcheur. Mais aujourd’hui, je n’ai plus ces rêves: après 75 ans, j’ai décidé de prier pour l’Eglise ».



En commentaire, mon amie Luisa replace très bien l'article dans son contexte:
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Le journal "Repubblica" et son vaticaniste Marco Politi, apprécient tout spécialement le Cardinal Martini dont ils font fait une espèce d'"anti-pape". Très souvent les paroles du cardinal ont été instrumentalisées, pour des batailles contre le Magistère de Benoît XVI.
Sûrement telle n`était pas l`intention du cardinal Martini, mais comme il n`a jamais démenti les journaux et leurs interprétations, le doute subsiste .
Attendons la traduction du livre, mais dès maintenant je prends le pari, hélas, que les journaux comme Repubblica se feront un plaisir d`extraire les phrases qui montreront, comme ce cardinal aurait fait un bien meilleur pape !
Et je suis sûre, aussi, qu`ils n`auront pas besoin de chercher longtemps pour trouver LA phrase à soutien de leur opinion et qui fera les gros titres de leurs journaux.
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Et un autre commentaire souligne:
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... j'ose espérer tout de même que c'est son grand âge qui l'empêche de se souvenir qu'il a prié pour l'Eglise bien avant l'âge de 75 ans.Sinon ce serait vraiment triste...pour ne pas dire plus...



Consciente de mes limites et ne voulant pas imposer un avis peu autorisé, le mien, j'ai pensé le moment venu de traduire un article de Vittorio Messori datant de l'année dernière, et que je tenais "en réserve".
Même si on ne suit pas de très près la politique intérieure italienne, il est facile de comprendre les circonstances.
Rien de bien nouveau, donc dans les intentions de ces "bonnes feuilles" publiées par le quotidien gauchiste.
Article original en italien sur le site de Messori: http://www.et-et.it/articoli2007/...

Ma traduction:



L'erreur de parler de derby avec Benoît

© Corriere della Sera 17 mars 2007

"Le cardinal Martini: déchirure sur le DICO" : tels étaient hier les titres de plusieurs quotidiens. En réalité, en lisant les articles on constatait que, du Pacs à l'italienne, l'archevêque émérite de Milan n'avait pas parlé, du moins pas explicitement, et que son discours était parti du commentaire d'un passage de la Bible, pendant la messe pour les pélerins ambrosiens à Jérusalem.
En se basant uniquement sur le titre, quelque lecteur aurait pu penser au cas très récent des "lois contre-nature" (avec les guillemets, qu'il convient d'ajouter aux citations textuelles) que Benoît XVI aurait déconseillé de voter dans son exhortation post-synodale sur l'Eucharistie.
Ces jours-là, nous avions été abreuvés d'éditoriaux pensifs et d'exutoires d'humeur en réaction à cette sortie du pape.
Réaction légitime: mais seulement pour ceux qui n'avaient pas lu les 138 pages de ce Sacramentum caritatis, où l'expression "loi contre-nature" ne figure pas; vraiment pas. Et où la référence au DICO n'existe que pour ceux qui peuvent penser que le pontife de l'Église universelle, synthétisant les résultats d'un synode mondial sur l'eucharistie datant de deux ans, adresse un avertissement à nos politiques.

En réalité, pour en revenir aux titres d'hier, on pourrait observer que, depuis longtemps, l'information risque peut-être de tomber dans une sorte de dialectique "de derby" : comme si l'antagonisme entre Milan et l'Inter, entre Rome et le Lazio (ou même entre Prodi et Berlusconi), était transposé dans le duel Martini- Wojtyla et, maintenant, Martini - Ratzinger.

Pendant plus que vingt ans le besoin, ... de trouver partout le schéma "ami-ennemi", a porté un certain système médiatique à imaginer l'archevêque de Milan comme la référence belliqueuse des "progressistes", contre les "phalanges" des dogmatiques "papistes".
Un schéma qui trouve encore sa place maintenant que Jean Paul II est passé à une vie meilleure et que le prélat émérite octogénaire, atteint de la maladie de Parkinson, s'est retiré à Jérusalem, dans l'attente - il l'a dit lui-même - du "dernier appel".

Il y a de quoi rester perplexes en lisant les défis martiniens au magistère papal, après presque un quart de siècle de propos qui oublient que ce fut précisément Jean-Paul II qui détourna le professeurr Carlo-Maria de ses études bibliques et voulut le voir - en l'y maintenant jusqu'à sa mise à la retraite - à la tête du plus important diocèse européen.
Le cardinal me dit un jour en souriant, lors d'un déjeuner dans le palais de la Piazza Fontana: "Depuis que je suis ici, des dizaines de livres portent mon nom, mais moi, en réalité, je n'en ai écrit aucun. Ce sont des "compilations" (sbobinature) de propos que j'ai tenus dans les occasions les plus diverses.
Puis, se faisant sérieux: "Je défie ceux qui me trouvent en désaccord avec le Pape Wojtyla de trouver une seule phrase qui soit en désaccord avec le magistère de l'Eglise".
Un style personnel, certes, un tempérament différent, mais rien qui ait jamais mis en discussion l'obéissance et l'ortodoxie.

Quant à Ratzinger: ce qui a filtré sur le Conclave parle d'un Martini qui, refusant les votes qui initialement s'orientaient sur lui, invita les cardinaux à les reporter sur le Préfet de l'ex- Saint Office.
Entre les deux vieux "ouvriers dans la vigne du Seigneur", il y a toujours eu l'estime qui existe entre des confrères et des spécialistes.
Chacun, ensuite, a accepté les différences caractérielles naturelles et a compris les exigences du rôle de l'autre. Ratzinger, appelé à être gardien de l'orthodoxie - d'abord à la Doctrine de la Foi et ensuite sur le siège de Pierre - et, donc, tenu à réaffirmer avec fermeté les dogmes et les principes éthiques. Martini, appelé à diriger un troupeau de cinq millions de baptisés, préoccupé de pastorale, de rencontre, de dialogue, pour faire passerl'Évangile dans une des métropole postmoderne.
La clarté des principes du Magistère, d'accord ; mais aussi la flexibilité, le réalisme, la patience du pasteur avisé. Tel est le sens des mots qui, plus qu'une "déchirure", voulaient - c'est du moins ainsi que nous les lisons - être un appel en faveur d'une stratégie pour une annonce éthique exigeant au point de sembler dur, snon incompréhensible à beaucoup, aujourd'hui.



Le Pape a désarmé l'aile gauche de l'Église

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