L'Eglise attaquée

http://www.et-et.it/articoli2007/a07b19.htm
Une interview de Messori dans la Stampa, en février 2007, très pessimiste, car l'Eglise est aussi attaquée de l'intérieur, comme il est facile de le voir en France.
Totalement actuelle, aussi: à lire, pour ouvrir les yeux!


Des Gay au Parti socialiste européen et à l'OMS, voici les ennemis de l'Eglise
La Stampa, 19 février 2007, Giacomo Galeazi
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"L'organisation Mondiale de la santé, certains secteurs de la maçonnerie, les associations gay, surtout américaines, les multinationales pharmaceutiques, les puissantes organisations écologistes internationales qui détestent le christianisme par nostalgie paganiste, les cercles "libéraux-radicaux" du politiquement correct.
L'écrivain catholique Vittorio Messori nous explique qui sont les "lobbies" anti-famille ("capable d'influencer le processus législatif") dénoncés par Benoît XVI dans son discours du 17 février aux représentants pontificaux en Amérique latine ( ndt voir ici: Une attention prioritaire doit être accordée à la famille, qui montre des signes de faiblesse sous les pressions de lobbies capables d'influencer de façon négative les processus législatifs. )

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- Qui travaille à contrarier la famille, et d'une façon générale, la perspective éthique catholique?
- L'existence des lobbies dont parle le Saint-Père est évidente.
L'action de ces influents groupes de pression n'est pas dirigée uniquement contre le couple, dans sa perspective chrétienne, mais contre le complexe éthique et moral de l'Eglise dans sa totalité.
L'OMS, sur le thème de la contraception, de l'avortement, du diagnostic prénatal pour l'éliminations des handicapés; plusieurs "sigles" importants de l'environnement, qui voudraient se libérer de l'Evangile par nostalgie païenne; quelques secteurs de la maçonnerie qui, surtout dans les pays latins, sous l'influence française et espagnole, sont hostiles à la morale catholique. Mais les lobbies auxquels se réfèrent le Pape ne sont pas que ceux-là.

- De qui s'agit-il?
- Les grandes organisations homosexuelles, souvent issues du monde anglo-saxon. Les gay, comme toutes les minorités, sont fréquemment querelleurs entre eux, mais, particulièrement aux Etats-Unis, ils surmontent leurs oppositions dans une aversion pratiquement unanime de l'éthique "papiste".
Et puis, il y a la colossale industrie pharmaceutique, le business devenu plus rentable, grâce à l'économie globale, qui obtient des gains formidables par la production de pillules anticonceptionnelles, de préservatifs, et d'autres remèdes et instruments qui contredisent dans les faits les indications de l'Eglise.

- Y-a-t'il aussi des lobbies politiques, qui oeuvrent contre la famille?
- Par dessus tout, des secteurs non négligeables du Parti Socialiste Européen, ce groupe du Parlement Européen qui n'a pas accepté le catholique Rocco Buttiglione comme commissaire uniquement parce qu'il n'a pas caché être croyant, et aussi qui a refusé la mention des racines chrétiennes de l'Europe.
Le premier ministre espagnol est le chef de file presque caricatural de "l'éthiquement correct" dominant à Bruxelles, un radicalisme de masse qui voit dans l'Eglise son ennemi juré...
Les partis de vieille inspiration marxiste se sont transformés en "groupements" libéraux dans lesquels la perspective morale est celle qui relevait de la minorité radicale de Panella (voir ici: http://fr.wikipedia.org/wiki/Marco_Pannella ), et qui est désormais l'inspiratrice de la vulgate hégémonique.
Et la sécularisation devient méfiance, souvent même haine envers le christianisme, désir de fermer une parenthèse évangélique de 20 siècles. Donc, trop longue. Une certaine intelligienza regrette "le mythe du Nazaréen", "du crucifié martyre qui crucifie les hommes" (cf Carducci) qui a envoyé en léthargie un Olympe que l'on voudrait ressusciter avec ses dieux qui ne pouvaient blâmer personne, puisqu'ils étaient les premiers à suivre leurs envies, leurs instincts, leurs plaisirs.

- L'Eglise attaquée?
- Oui, comme toujours, d'ailleurs. Et, dans une perspective voulue par la providence, c'est une chance, car l'Evangile, s'il est vraiment lui-même, divise.
Mais il s'agit d'une Eglise mise en difficulté non seulement de l'extérieur, mais aussi de l'intérieur. Parfois, on a l'impression que le pape est un chef presque sans troupes.
Après le Concile, les catholiques progressistes contestaient ouvertement les institutions ecclésiales, essentiellement sur les thèmes sociaux qui prévalaient alors. Aujourd'hui, on assiste à une sorte de schisme souterrain des croyants qui, sans le manifester publiquement, n'obéissent pas, en privé, aux normes morales de l'Eglise. Si on leur demande, ils se disent "catholiques", ils vont même à la messe, mais ils ne suivent pas les directives sur l'éthique sexuelle et familiale: de l'utilisation des méthodes contraceptives à l'acceptation du divorce, du concubinage, de l'homosexualité et même de l'avortement. De plus, voilà que les intellectuels catholiques signent une pétition au ton dramatique, où Benoît XVI semble une sorte de Pie IX qui veut creuser un fossé entre l'Eglise et la société. De l'autre côté de la barrière politique, ceux qui font des sermons édifiants et se posent en candidats pour la défense, sont particulèrement mal placés.

- C'est-à-dire?
- Il est bien connu que les leader politiques qui se rangent contre le DICO sont tous, mais vraiment tous, dans une situation familiale irrégulière aux yeux de l'Eglise. Parmi ceux qui se déclarent défenseurs de la famille, le seul qui est à sa place, le seul qui pourrait recevoir sans problèmes les sacrements, étant pourvu d'une seule femme qu'il n'a jamais abandonnée, est Clément Mastella; Autrement dit, comble de l'ironie, un représentant de cette "Union" (la coalition au pouvoir alors, avec Romano Prodi) qui a régularisé les "couples de fait", que les "irréguliers" de l'autre bord annoncent vouloir contester à outrance.
Dieu seul, naturellement "sonde les reins et les coeurs", et Lui seul, donc, peut juger. Mais, à vue humaine, les politiciens qui s'alignent pour défendre la famille participent aussi à l'incohérence entre la doctrine et la pratique qui marque tellement le catholicisme aujourd'hui.


Eclairage

L'article s'insère dans le cadre d'un débat passionné "à l'italienne" intervenu en 2007 autour d'un projet de loi sur visant à autoriser les DICO (sorte de PACS). Mais il a évidemment une portée qui transcende les frontières géographiques, et il est totalement transposable chez nous, aujourd'hui.
Voici un article datant d'avril 2007, dans Libération, dont on ne peut douter qu'il est l'une des caisses de résonnance en France de ces lobbies que dénonce Messori.
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Romano Prodi ne parvient pas à imposer le projet de pacs à l'italienne à sa coalition divisée. (jeudi 5 avril 2007)
Par mesure de sécurité, le ministre de l'Intérieur italien vient d'octroyer des anges gardiens à l'archevêque de Gênes. Désigné il y a moins d'un mois président de la conférence épiscopale italienne, le très intransigeant monseigneur Angelo Bagnasco a en effet été placé depuis mardi sous protection policière. La veille, une inscription à la peinture blanche («Bagnasco, honte à toi») avait été découverte sur la façade de la cathédrale San Lorenzo de la capitale ligure.

Croisade. Chef de l'Eglise italienne, le prélat est ainsi en ligne de mire pour avoir pris la tête de la croisade contre les Dico (les pacs à l'italienne) qui est en train de provoquer une petite guerre de religion dans la péninsule et qui divise la majorité de centre gauche de Romano Prodi. Dimanche, dans une homélie, l'archevêque est allé jusqu'à rapprocher la reconnaissance des couples homosexuels à l'inceste et à la pédophilie. Evoquant les Dico et les critères pour juger du bien et du mal, le prélat a lancé : «Si le critère est celui de l'opinion publique générale, il est difficile de prononcer des "non" : pourquoi dire non à l'inceste et au parti des pédophiles aux Pays-Bas.» Tollé chez les laïques, embarras chez les catholiques modérés et les vieux démocrates chrétiens (DC) habitués à plus de distance entre l'autel et l'hémicycle. «Je suis sidérée et une clarification s'impose après ce genre de propos», s'est insurgée la ministre démocrate de gauche (DS) pour l'Egalité des chances, Barbara Pollastrini, l'une des deux rédactrices du projet sur les unions de fait, approuvé dans la douleur en Conseil des ministres le 8 février et actuellement en examen au Parlement.
En réalité, l'intervention de monseigneur Bagnasco n'est que la dernière salve en date d'une bataille menée depuis plusieurs mois par le pape et la hiérarchie catholique. «L'homme politique chrétien qui veut légaliser les unions de fait est incohérent», a en substance fait savoir fin mars la conférence épiscopale. Quelques figures catholiques, comme le cardinal Martini sont intervenues pour souhaiter que l' «Eglise ne donne pas d'ordres». En vain, la ligne tracée pape Benoît XVI est claire : tout Parlement ou gouvernement qui approuveraient des lois «contre nature» deviendraient illégitimes.
En Italie, cette position suscite de fortes lacérations dans la majorité de Romani Prodi qui va de la gauche radicale et laïque aux chrétiens démocrates de la Marguerite et jusqu'à l'Udeur. Le secrétaire national de cette petite formation catholique Clemente Mastella qui est également garde des Sceaux a déserté le Conseil des ministres qui a adopté les Dico. Auparavant, il avait indiqué : «Je m'en fiche si le gouvernement tombe, je ne voterai pas cette loi.»
Romano Prodi est passé outre et a déposé le texte au Parlement avant que la crise gouvernementale, fin février, ne l'oblige à revoir sa position. Sauvé grâce au soutien de Marco Follini, un transfuge centre droit catholique, le président du Conseil a officiellement cessé de présenter les Dico comme une «priorité» de son gouvernement.


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Pour être complet sur le sujet, il convient de rappeler l'épisode de la démission contrainte récente de Mastella du gouvernement de Prodi, dont il était le ministre de la justice, rapporté en ces termes par Libération.
Je ne sais pas ce qu'a réellement fait Mastella, la justice italienne (??) tranchera, mais cela rappelle furieusement l'épisode Buttiglione, évoqué par Messori, et dont on avait beaucoup parlé en France.
(Rappelons aussi que depuis lors, le gouvernement Prodi est également tombé, s'étant vu refuser la confiance du Sénat en février dernier, officiellement sur sa politique étrangère).
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Le ministre de la Justice italien, démissionne pour corruption
(Libération, février 2008)
Il avait menacé plusieurs fois de se retirer du gouvernement de centre gauche de Romano Prodi suite à des désaccords politiques ; il a fini par le quitter, hier, pour une tout autre raison : sa mise en cause dans une affaire de corruption.
Mercredi, Clemente Mastella, le ministre de la Justice italien, avait présenté sa démission au président du Conseil, «pour préserver [sa] dignité et [son] honneur». Sa femme a été soumise à un mandat d’assignation à résidence pour une grosse affaire de pots-de-vin. Mastella, mis en cause pour «concussion, abus de fonction, complicité d’association de malfaiteurs», a confirmé hier sa démission, tout en clamant son innocence. L’ancien ministre est aussi le chef de l’Udeur, un petit parti centriste catholique qui n’a que trois sénateurs. La très étriquée majorité de Prodi, qui va du centre à l’extrême gauche, donne à l’Udeur un rôle clé dans la coalition. Pour le président du Conseil, qui est parvenu de justesse à sauver sa tête lors de votes au Sénat, cette démission est un coup dur. L’ancien ministre de la Justice... a déclaré que son soutien à la majorité ne serait plus automatique - notamment concernant l’Eglise et la politique étrangère -, tout en affirmant qu’il respecterait le programme électoral de la majorité.


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