Les oppositions romaines au Pape

Un livre très intriguant de l'Abbé Barthe (22/3/2009)



Je reçois à l'instant le livre de l'Abbé Barthe "Les opposition romaines à Benoît XVI"
C'est un petit livre, qui se dévore d'une traite.
Disponible ici, chez l'éditeur: http://www.hora-decima.fr/...

Il y reprend une série d'articles reproduits fin janvier dans l'Homme Nouveau, et commentés ici: http://benoit-et-moi.fr/2009/... : Intrigues contre Benoît XVI?
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A la lumière des récents évènements, des informations qui prennent un relief saisissant avec les dernières terribles attaques contre le pape: l'Abbé Barthe y analyse avec des arguments sérieux un livre à clés, mi fiction- mi pamphlet, signé d'un certain Olivier Legendre "Confession d'un Cardinal", que j'avais lu au moment de sa premère parution, en 2007, qui vient, bizarrement, d'être réédité juste maintenant, i.e. en pleine bourrasque, et qui m'avait inspiré à l'époque une grande perplexité.
L'Abbé Barthe, à l'évidence, a beaucoup plus de lumières que moi, et répond à certaines de mes interrogations...
>>> Confession d'un cardinal

Le livre est passionnant, car l'Abbé Barthe l'a remis à jour en février, en tenant donc compte des derniers développements, incluant l'affaire Williamson.
Jérôme Prieur, dans Minute, l'avait lu, et en parlait en ces termes:
(article scanné dans l'édition n°2400 du 11 mars dernier):
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Des analyses sérieuses
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L'abbé Claude Barthe est une figure dans l'Eglise actuelle.
Fervent admirateur de Benoît XVI, dont il avait réalisé un entretien choc dans le mensuel « Spectacle du monde », alors que le pape d'aujourd'hui n'était encore que le cardinal Ratzinger, il tient une chronique très suivie dans la revue « Catholica ».
Au fil des articles et des livres, il s'est taillé une réputation de vaticaniste «de droite », occupant une place vide depuis la dernière guerre mondiale et la disparition du chroniqueur Havard de la Montagne et de sa revue « Rome ». Des informations de première main, un sens aigu des enjeux réalistes autour desquels doit se construire l'avenir de l'Eglise, un solide carnet d'adresses, ce sont autant d'arguments qui plaident pour le sérieux des analyses de Claude Barthe.
Son dernier opuscule, Les oppositions romaines au pape, reprend et complète une série de deux articles magistraux parus dans le journal «L'homme nouveau ». Sa thèse? Il existait autrefois les progressistes et les conservateurs; aujourd'hui, le camp conservateur, ultra majoritaire dans l'Eglise, s'est scindé en deux clans qui sont entrés en lutte l'un contre l'autre. Alors que Benoît XVI fait figure de leader naturel des restaurationnistes, beaucoup de cardinaux conservateurs, restés conciliaires dans l'âme, s'opposent à la ligne qu'il représente et retardent, par toute sorte de chausse-trappes, la mise en oeuvre du grand dessein du pape Ratzinger.
On peut accepter ou refuser ces analyses, qui n'ont rien... d'infaillible, mais on pourra difficilement les ignorer. Claude Barthe a été l'un des seuls à annoncer, plusieurs semaines à l'avance, l'élection de Benoît XVI. Sa lucidité fournit certainement une clef pour comprendre l'avenir de l'Eglise, à travers les rivalités de camarillas, qui, aujourd'hui comme au XVI° siècle, se déchirent à belles dents pour des motifs qui n'ont pas grand-chose à voir avec le royaume des cieux.
Joël Prieur
Claude Barthe, Les Oppositions romaines au pape, éd. Nora decima, 66 pp., 6 euros. Commande chez l'éditeur.


Introduction, du site de l'éditeur

http://www.hora-decima.fr/Annexe.php3?id_article=167
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Au fur et à mesure qu’avance le pontificat de Benoît XVI, on voit se déployer sa volonté d’établir avec prudence et ténacité la remise en ordre d’une Église commotionnée depuis près d’un demi-siècle en toutes ses parties. Une remise en ordre, en quels domaines principaux ? Pour demain, beaucoup espèrent une « réforme de la réforme » liturgique, qu’annonce la qualité des célébrations pontificales. Ensuite, certains pensent que pourrait intervenir une « réforme de la réforme » doctrinale des points de Vatican II qui ont trop souvent donné lieu à une « interprétation de rupture ». Mais dans l’immédiat, c’est à une « réforme de la réforme » politique à laquelle on assiste : les hommes « de rupture » sont les uns après les autres remplacés aux postes de responsabilité par des hommes « de continuité », pour reprendre les termes du discours de Benoît XVI à la Curie du 22 décembre 2005, des prélats dans la ligne du pape, théologiens, liturgistes, administrateurs, spécialement sur cet échiquier complexe qu’est la Curie romaine. Pas assez vite ? C’est que la mise en place de l’« herméneutique » de Vatican II la plus concrète et la plus efficace qui puisse être, celle que vont exercer dans les actes des hommes nouveaux en syntonie avec des prêtres et des fidèles qui voudraient tourner la page d’une période désastreuse, rencontre des difficultés et des résistances extrêmement puissantes et déterminées.

À l’étonnement des médias, qui ont inintelligemment annoncé un fiasco pour le voyage en France du pape « intégriste », puis qui n’ont pas plus finement su analyser la portée de sa réussite, Benoît XVI a rassemblé autour de lui un catholicisme nouveau, fait de prêtres « identitaires », de fidèles majoritairement jeunes, de familles manifestement très pratiquantes, dans lequel l’apport de toutes les « forces vives », communautés nouvelles, traditionalismes de toutes sensibilités, écoles catholiques renaissantes, scoutismes, était visiblement majoritaire. Il ne faut cependant pas s’exagérer son importance numérique - la messe aux Invalides rassemblait des prêtres et fidèles venus de la France entière - ni son homogénéité assez indécise, essentiellement faute de pasteurs diocésains et locaux qui lui imprimeraient un dessein réformateur, missionnaire et inévitablement politique. Mais ce catholicisme à visage nouveau montre tout de même une capacité de mobilisation que n’ont plus les autres composantes vieillies et épuisées du corps chrétien. Compte tenu du poids de la modernité à laquelle il ne peut échapper, de l’imprégnation d’un individualisme ravageur, d’un déficit culturel angoissant, de la puissance de la tentation « bourgeoise » qui s’exerce sur lui, aux sens divers - moral, sociologique, idéologique - de ce terme, aura-t-il la force de s’engager dans un processus de réforme de l’Église, dans l’acception traditionnelle de ce mot, avec ses exigences de retour disciplinaire, ascétique, intellectuel, doctrinal, cultuel et esthétique, spirituel ? La transition qu’opère Benoît XVI pour faire sortir l’Église d’un état d’« ouverture », c’est-à-dire de dissolution dans le monde (le monde moderne), et pour lui faire retrouver un état de vraie réforme (d’Ecclesia semper reformanda), est une transition très douce. Il semble en effet, compte tenu de l’état du malade, que la cure ne peut-être qu’homéopathique. Mais ne sera-t-elle pas trop lente pour aboutir ? En tout cas, présentement, ce catholicisme-là, avec ses faiblesses et ses attentes, est parfaitement en phase avec le pape élu en 2005. Mais cette correspondance est comme un arc électrique par-dessus la tête de la plupart des élites ecclésiastiques en place, encore largement enlisées dans les modes de pensée et d’être - ou plutôt de disparaître - d’une interminable crise postconciliaire.

À Rome même, une véritable opposition au pape, un haut personnel ecclésiastique « de rupture », d’autant plus redoutable qu’il se sent menacé, est toujours solidement installé. La levée de boucliers qui a suivi la remise de l’excommunication des quatre évêques consacrés par Mgr Lefebvre - remise suivie par la détestable « affaire Williamson » - a d’ailleurs montré avec quelle force la volonté d’affaiblir le pape avait la capacité de se déployer à l’intérieur même des Palais apostoliques. La rapide esquisse que je vais dresser de cette opposition voudrait seulement attirer l’attention sur une galaxie complexe (évolutive aussi) et sur les mécaniques d’obstruction, de frein et d’antagonisme qu’elle utilise. Un premier chapitre analysera la signification de l’élection pontificale de 2005 ; un second chapitre opérera un certain nombre de coups de sonde dans ce monde très divers de l’opposition ; un troisième chapitre, par l’exemple très concret de l’élaboration d’un tout récent - et très problématique - document concernant les examens psychologiques auxquels peuvent être soumis les séminaristes, montrera comment peuvent s’exercer les procédés d’opposition, en même temps que la complexité des démarcations, qu’on aurait bien tort de réduire à une fracture, fût-ce en l’affinant beaucoup, entre « tradition » et « progressisme ».


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