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Confiteor, ou la paix de l'Eglise

Sous forme d'une pièce de théâtre, un livre brûlant d'actualité de Michel de Jaeghere, écrit il y a 21 ans (22/4/2009)

Je vous ai parlé hier du livre édité par Renaissance catholiques, "La pensée unique". Et plus particulièrement du chapitre écrit par Michel de Jaeghere, sur le "religieusement correct".

Du même auteur, je viens de lire aussi "Confiteor, ou la paix de l'Eglise".

D'abord, voici le résumé de la quatrième de couverture, tel qu'il figure également sur le site:
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Une nouvelle pièce de théâtre (écrite il y a vingt et un ans) qui « colle » à l’actualité...

Un vieil évêque, fondateur de la Fraternité du Christ-Rédempteur, opposé aux innovations conciliaires et sentant sa mort prochaine, hésite à accepter les propositions de « paix de l’Église » que lui fait le cardinal Hoffbauer, préfet du Saint-Office, au nom du pape. La pierre d’achoppement s’avère rapidement être la consécration de nouveaux évêques par Mgr Verdière.

Avec une grande connaissance des arcanes et des mœurs de la curie romaine, Michel De Jaeghere livre un passionnant huis clos, mettant aux prises deux personnalités qui, chacune à leur manière, cherchent à servir l’Église du Christ.

Dans l’ombre le cardinal camerlingue guette, les évêques français s’agitent… Quand la fiction théâtrale rejoint la réalité historique.
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Comme il l'avait déjà fait avecIte Missa Est, dont j'avais parlé ici: http://benoit-et-moi.fr/2008/... , Michel de Jaeghere a donc choisi la forme littéraire de la pièce de théâtre pour nous faire vivre de l'intérieur un évènement "historique":
Sur fond d'intrigues vaticanes (ce qui me gêne un peu, car c'est donner beaucoup de grain à moudre aux ennemis de l'extérieur, mais... c'est peut-être réaliste!), le face-à-face, il y a 21 ans, entre le cardinal préfet du Saint-Office, et un vieil évêque, fondateur d'une fraternité disssidente, dans lesquels on reconnaît sans peine Joseph Ratzinger (alias Hofbauer) et Marcel Lefebvre (alias Verdière).
Cet artifice littéraire rend la lecture plaisante, et même passionnante, par moments (il n'y manque pas la pointe d'humour, avec un des personnages secondaires, le président de la Conférence des Evêques de France, dont l'aspect ahuri adoucit un peu le trio peu sympathique des prélats français manifestement tout acquis aux idées progressistes), mais qui suscite aussi une certaine réticence, puisqu'on met dans la bouche de gens qui existent vraiment (ou qui ont existé) dans le cadre d'un évènement qui s'est vraiment passé, des propos de fiction, qui ne peuvent être que des hypothèses - même vraisemblables (c'est le principe du roman historique, en somme).
MdJ s'en explique, d'ailleurs, dans l'introduction:

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Confiteor ou la Paix de l'Église est une oeuvre de fiction, librement inspirée par un épisode de l'histoire religieuse de la deuxième moitié du XXe siècle. Elle ne prétend pas raconter le détail des faits tels qu'ils se sont réellement passés. Toute ressemblance entre ses personnages et des personnes qui ont réellement existé ne relève certes pas de la pure coïncidence.
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A la forme près (car il ne s'agissait pas d'une pièce) c'est d'ailleurs la démarche de l'effroyable "Confession de Castelgandolfo" signé d'un Pietro di Paoli (auteur aussi du délirant Vatican 2035) qui "relatait" la rencontre en 2005 du pape avec un célèbre théologien souvent cité (pas en bien) ici...Avec cette différence, mais elle est de taille, que MdJ signe de son vrai nom, alors que l'autre s'abrite derrière un lâche anonymat qui lui permet de dire n'importe quoi.

Ces réserves faites, j'ai beaucoup aimé le livre.
Sous sa forme divertissante, il soulève beaucoup de réflexions sur le Concile, la place de l'Eglise dans la société actuelle, les déceptions du pontificat de Jean Paul II (il y a un passage sur Assise qui fait froid dans le dos), et surtout les traditionalistes. En refermant le livre, je peux dire que je les comprends mieux, je respecte ce qu'ils représentent, j'admire leur conviction, et mon opinion sur eux a très sensiblement évolué dans un sens positif.

J'ai scanné quelques passages particulèrement significatifs.

1. Jean-Paul II plébiscité par les medias

(page 173)
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Verdière: Ce n'est jamais bon signe pour un homme d'Église que d'être plébiscité par les magazines. Car leur philosophie est, la plupart du temps, contraire à l'enseignement de l'Église. Moi, j'ai pris mon parti d'y être, systématiquement, traîné dans la boue (j'observe d'ailleurs que vous l'êtes aussi). S'ils venaient un jour à encenser l'un de mes discours ou l'un de mes livres, il me semble que je me relirais avec inquiétude, en me disant: qu'ai je donc bien pu dire qui leur ait laissé croire que je trahissais l'Église ?
Quant aux foules qui ovationnent le pape, elles m'ont d'abord impressionné, moi aussi. Mais je m'étonne que le Saint-Père ne se soit pas interrogé sur un fait étrange : qu'on n'ait jamais noté la moindre inflexion de la pratique religieuse avant et après l'un de ses voyages. Je l'ai observé la première fois qu'il est venu à Paris. Un grand nombre de jeunes sont venus à sa rencontre. Il leur a prêché le retour à la morale de l'Église. Ils ont applaudi à tout rompre les passages les plus réactionnaires de son homélie. Et ensuite? Ensuite, les a-t-on vus rejoindre les effectifs clairsemés des paroisses françaises, mêler leurs têtes brunes et blondes aux têtes blanches qui peuplent nos églises ? A-t-on noté, dans la jeunesse française, un retour aux sacrements, au mariage, un reflux de ce que l'on appelle aujourd'hui, la cohabitation juvénile? Rien de tout cela. Le pape avait offert à la France un beau spectacle, auquel chacun avait participé d'autant plus volontiers qu'on savait qu'il serait sans lendemain, qu'il procurait une joie facile, un peu d'émotion, beaucoup de nostalgie, sans engager l'avenir.

2. L'Eglise dans le siècle, aujourd'hui

L'Eglise ne peut plus se permettre de négliger les apparences (page 180)
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HOFFBAUER:
Que se passerait-il si nous nous décidions à déposer de son siège tel ou tel évêque qui contexte, semaine après semaine tout l'enseignement de l'Église, mais dont les journalistes ont fait eux-mêmes l'évêque de référence, le grand témoin de ce que serait le catholicisme de l'an 2000? Si nous interdisions d'enseignement tel professeur de théologie qui remet en question deux mille ans d'interprétation de l'Écriture au gré de sa fantaisie, mais qui jouit de la réputation d'un nouveau Père de l'Église? Si nous rappelions publiquement aux chefs d'État et aux hommes politiques qui se bousculent à la porte du Saint-Père pour obtenir une audience dont ils escomptent un succès diplomatique, que leur pays bafoue chaque jour de manière criminelle les plus saints principes de la morale naturelle et la doctrine sociale de l'Église?
Nul doute que l'on verrait alors fleurir partout les clichés sur le procès de Galilée, les bûchers de l'Inquisition ou la Saint-Barthélémy. Le nom même de l'Église ne serait plus associé qu'à ceux d'intolérance et d'archaïsme.
...
Le malheur des temps veut que l'Église ne puisse plus se permettre de négliger ses apparences. Elle n'est plus acceptée par l'univers entier comme dépositaire de la sagesse des nations. On peut le regretter. On doit s'y adapter lorsque l'on est en charge de la conduire dans le siècle.

3. Une barque qui prend l'eau de toutes parts

(page 233)
Hofbauer:
Oui, vous avez raison. La barque de Pierre n'est plus qu'un bateau ivre. Elle menace de sombrer, elle prend eau de toute part. Le pape ne veut pas le croire, il continue, comme si tout ce qu'il fait, comme si tout ce qu'il dit avait encore quelque importance. Qui lit encore ses encycliques? De ses discours, chacun ne retient que la page qui lui permettra d'invoquer son autorité au profit de ses propres thèses. Passé le succès de curiosité de ses premières années, sa prédication retentit désormais dans le vide. Quand même sans souci de la réprobation du monde il voudrait réagir, de quelle liberté disposerait-il ? La lèpre a pourri tout l'édifice ; où trouverait-il une relève pour remplacer les évêques indignes, les prêtres découragés, les théologiens hérétiques ?
Êtes-vous satisfait? Oui, vous avez raison, l'Église prend l'eau, elle coule...
...
[En point d'orgue , il y a une scène très belle, troublante mais très improbable: le cardinal choisit le secret de la confession pour révéler à Verdière l'état réel de la barque.]


Pour être aussi complète que je puis l'être:
Présent avait consacré un article au livre, le 5 mars dernier, sous la plume de Rémy Fontaine.
Je l'avais découpé, et je viens de le scanner.

Un livre pour le dire: « Confiteor ou la paix de l’Eglise » par Michel De Jaeghere
REMI FONTAINE
Présent, Jeudi 5 mars 2009
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Au cœur du Vatican, le face-à-face entre le cardinal préfet du Saint-Office et un vieil évêque, fondateur d’une Fraternité dissidente, tandis que dans les couloirs s’agitent les adversaires de toute réconciliation. Telle est la trame de Confiteor ou la paix de l’Eglise, la nouvelle pièce publiée par Michel De Jaeghere chez Renaissance catholique, après son fameux Ite missa est .

On l’aura compris, il s’agit, avec les libertés et les contraintes de la fiction théâtrale, de rejouer le dénouement historique de 1988 par lequel Mgr Lefebvre allait se décider, malgré le protocole d’accord suggéré par le cardinal Ratzinger, à consacrer des évêques contre la volonté du Pape, dans ce qu’il appelait un état de nécessité et une opération survie en plein déluge moderniste.

Opposé aux funestes innovations conciliaires et sentant sa mort prochaine, Mgr Verdière, fondateur de la Fraternité du Christ-Rédempteur, hésite donc à accepter les propositions de pacification que lui fait le cardinal Hoffbauer, préfet du Saint-Office, au nom du Pape. Sur fond d’intrigues et de combinaisons machiavéliques fomentées notamment par le cardinal Casanostra, Camerlingue du Sacré Collège, Mgr Malversini, substitut, et quelques prélats français…

Respectant les trois unités classiques (lieu, temps, action), la pièce qui comprend dix scènes et un finale, constitue un chef-d‘œuvre de synthèse vivante, à la fois historique, psychologique et théologique. C’est bien un drame, « une tragédie » (p. 204) qui se joue, avec un dilemme et un palpitant huis clos, qui nous font davantage penser à Corneille qu‘à Molière, en dépit des personnages pitorresques du second plan (cardinal Toddi, Mgr Grogibus…).

C’est aussi un écho très authentique de ses promenades romaines que livre ainsi Michel De Jaeghere, avec une grande connaissance des arcanes et des mœurs de la curie romaine. Pour avoir été, avec lui, informateur religieux au fameux Synode extraordinaire qui eut lieu à l’occasion des 20 ans du Concile, peu de temps avant cet épisode décisif de 1988, je peux attester que l’ambiance et la ressemblance de ses personnages avec certaines personnes ayant réellement existé ne relèvent pas en effet de la pure coïncidence et que de nombreux détails ou faits incidemment rapportés au cours des dialogues, voire même certaines réparties, ne sont pas totalement inventés…

Au cœur de ce décor romain, il met ainsi aux prises deux personnalités connues qui, chacune à leur manière, cherchent à servir l’Eglise du Christ. Avec le talent et l’impartialité qu’on avait déjà appréciés dans Ite missa est, Michel De Jaeghere donne à chacun ses intentions, ses raisons et ses états d‘âme. C’est l’affrontement, pourrait-on dire, entre l’homme de principes et l’homme de prudence dans un cruel paradoxe de ce temps en forme d’aporie (p. 204) :

— On ne se sanctifie pas en bafouant la discipline de l’Eglise : vous devriez le savoir mieux que personne.

— On ne sauve pas son âme au prix d’un reniement de la doctrine irréformable des saints pères.

Ou encore (p. 192) :

— Dieu vous a donné la grâce de faire partie de l’Eglise enseignante, il ne vous a pas chargé de son gouvernement. Vous n‘êtes pas le pape, Excellence, moi non plus. C’est à lui que nous devons obéissance, même lorsqu’il nous arrive de mal comprendre sa conduite. Il n’y a rien de plus catholique que cette soumission de l’intelligence à la hiérarchie, il me semble. Qu’en serait-il, sans elle, de l’unité de l’Eglise ?

— Quelle signification peut avoir l’obéissance, lorsque le pape dit chaque jour le contraire de ce qu’ont enseigné ses prédécesseurs avant lui ? L’unité de l’Eglise ne se déploie pas seulement dans l’espace, mais aussi dans le temps…

On mesure combien cette pièce allégorique, qui regorge de tels propos, arrive à point nommé après la levée des excommunications des évêques sacrés par Mgr Lefebvre. Elle est, après coup, une mine pédagogique de réflexions sur le processus qui a conduit à ces sacres et à leur sanction : cette interruption volontaire de tradition que s’efforce aujourd’hui de réparer Benoît XVI par la rupture de la rupture et la réforme de la réforme, autrement dit l’« herméneutique de continuité ». Qu’on trouve fondée ou non l’option extraordinaire des sacres, le débat se poursuit aujourd’hui en quelque sorte entre les héritiers de Mgr Lefebvre et celui qui est devenu Benoît XVI, pour savoir si le Saint-Père, par les actes déterminants de son pontificat (07-07-07, 21-01-09 entre autres), n’a pas rendu obsolète cette logique des sacres. Même si tout est loin d‘être réglé, ne propose-t-il pas ainsi de sortir progressivement de l’impasse d’une aporie dans laquelle il n’est jamais bon de demeurer trop longtemps captif, en hors piste canonique, le mieux étant également l’ennemi du bien ?

— Je suis aussi réaliste et je sais qu’il serait déjà beau qu’on nous laisse faire librement l’expérience de la Tradition. pour qu’au moment où s’effondreront les illusions progressistes, Rome puisse trouver en nous les témoins de la Tradition catholique et les ouvriers du redressement de l’Eglise (Mgr Verdière, p. 195).

N’est-ce pas cette possibilité, voir ce « service » (p. 202), qu’offre aujourd’hui le souverain pontife à la FSSPX, dans l’Eglise, sans plus faire « Eglise à part » (Mgr Williamson) ou en restant « en réserve » (p. 203) ? Le dilemme ressurgit pour Mgr Fellay en quelque sorte à l’envers…




Pour terminer, précisons que les deux livres (Confiteor et La pensée unique) sont en vente sur le site de Rnaissance catholique:
http://www.renaissancecatholique.org/

Max e Benedetto (II) Notre Père