Quand le Pape fait la leçon aux artistes
Un article plein d'un humour réjouissant sur l'audience prochaine du pape aux artistes, dans Libero (30/10/2009)
On sait que certains d'entre eux, triés sur le volet, seront reçus par le Saint-Père le 21 novembre prochain (Audience prochaine du Pape aux artistes).
Dans ce billet, justement, j'écrivais (pardon, une fois de plus, de me citer, voilà que je fais comme Hans Küng!):
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Ce n'est pas une première.
Il y a tout juste un an, au Collège des Bernardins, c'est précisément ce que le Saint-Père a fait: rencontrer les acteurs culturels.
La plupart des invités n'étaient pas des piliers de sacristie, c'est le moins que l'on puisse dire, tous n'étaient pas des "pointures", loin de là, et je n'en ai guère entendu monter au créneau pour le défendre, lorsque cela aurait été bienvenu. Il n'empêche: tous avaient "intrigué pour en être" ...
On risque de voir la même chose le 21 novembre.
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Bon, je concède bien volontiers qu'il n'était pas nécessaire d'avoir un diplôme de Mage pour en arriver à cette prédiction, et c'est ce que confirme avec un humour assez féroce mais néanmoins réjouissant cet article paru le 28 octobre dans le journal italien Libero.
Au moment où j'écris ces lignes, il m'est difficile de faire des recherches sur les noms cités, je ne les connais pas tous, tant s'en faut; en ce qui concerne les "plasticiens", il s'agit du gratin de l'art contemporain...
Je laisse mes lecteurs curieux consulter Wikipedia, ou autre.
Pour ce qui est de la partie récréative (le "buffet"), rappelons que selon Francesco Colafemmina, rédacteur du blog Fides et Forma, c'est la maison Martini qui est "le sponsor unique de l'évènement" (voir ici: Lu ailleurs -> archives Août-Septembre)
Tout un programme...
Le Pape fait la leçon aux artistes
Martin Deer , dans "Libero"
28/10/09
(ma traduction)
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«Dans un peuple, toujours, le génie éclaire des aspects de l'existence, donnant à chacun et à chacune une conscience plus mûre des évidences et des exigences de base du cœur".
Don Luigi Giussani ne parlait pas de chrétiens, mais il parlait de Giorgio Gaber (ndt: chanteur italien engagé, soixantehuitard de talent, sorte de Jacques Brel italien). De même, Jean-Paul II n'a pas seulement parlé des chrétiens, quand il a expliqué - il y a dix ans - que "l'Eglise a besoin de l'art». Réinventant ainsi la grande question de TS Eliot ( « Est-ce l'humanité qui a quitté l'Eglise ou l'Eglise qui a abandonné l'humanité?"), Jean-Paul II a lancé aux artistes un vérible appel, les invitant à contempler le mystère de la vie humaine: "Nombreux sont les stimuli qui peuvent inspirer votre talent (...). Je vous souhaite à tous d'être atteints par une expérience particulièrement intense d'inspiration créatrice. La beauté que vous transmettez est de nature à susciter l'émerveillement des générations".
Dix ans plus tard, Joseph Ratzinger appelle à son tour le club de la beauté.
Le grand événement aura lieu les 20 et 21 Novembre, mais l'attente se fait déjà très grande. Surtout pour savoir ceux qui en seront, et ceux qui n'en seront pas. Les plus grands artistes du monde vont se retrouver face à face avec le Pape dans la matinée du 21. Aucun intrus, ni parents, ni amis. Seulement les artistes et le Pape.
Le programme est déjà défini: le 20, visite au Pavillon d'Art Contemporain des Musées du Vatican voulu par le Pape Paul VI (cette année marque le 45e anniversaire de la première rencontre historique entre les artistes et le même Montini). Ensuite, buffet (ndt: "no Martini, no party"!!, cf Fides et Forma), puis - le lendemain - le "conclave" dans la Chapelle Sixtine. Pour les accueillir, les musiques du Chœur de la Chapelle Musicale Pontificale "Sixtine" qui exécutera les chefs d'œuvre de Palestrina. Aucune dérogation, dans le plus pur style Ratzinger, pour ceux qui rêvaient de moderniser les adaptations: on ne touche pas à Palestrina, a été la réponse à ceux qui ont proposé des arrangements jugés peu orthodoxes.
Dans la Chapelle Sixtine, toutefois, les places sont ce qu'elles sont. Il est possible que les 480 invitations lancées par Mgr Ravasi, "ministre de la Culture" du Vatican, soient en léger surbooking, de manière à couvrir les éventuelles défections. Il y en aurait déjà eu au moins une. En attendant de démêler le délicat imbroglio des artistes israéliens (de Yeoshua à Grossman), pour qui n'importe quel choix se prêterait à la controverse, , l'écrivain Andrea Camilleri a poliment refusé l'invitation. Comme il est bien connu que ceux qui ont du pain n'ont pas de dents, ils ont été nombreux, aux dires du Vatican, à se manifester pour demander des explications: comment se fait-il que je n'ai pas reçu mon carton d'invitation? Il n'était pas facile d'expliquer qu'il ne s'agissait pas d'un dysfonctionnement de la Poste, mais de simples choix, confiés à un comité restreint qui y a travaillé pendant des semaines.
Une fois encaissée la surprise que l'unique tentative sérieuse pour mettre en place un dialogue laïc sur le sens de l'expérience artistique vienne de l'Église "obscurantiste" et "dogmatique" du "modeste" théologien Ratzinger (dixit Scalfari, Défendre le Pape attaqué ), la grande course a commencé - entre les journalistes, mais aussi les artistes eux-mêmes - pour connaître la "top list" du Club de la beauté. Laquelle, même si elle ne sauvera pas le monde, tient à entrer dans la chapelle Sixtine.
A cette heure, ce qu'il y a de certain, c'est qu'il y aura les cinq catégories de l'art: 1) peintres et sculpteurs, 2) architectes, 3) écrivains et poètes, 4) musiciens et chanteurs, 5) réalisateurs et acteurs de cinéma et de théâtre, photographes, danseurs. La liste, bien sûr, est aussi prête que secrète. Quelques noms, cependant, soit par confirmation des parties concernées, soit par fuites, ont déjà filtré.
Donc: il y aura le sculpteur Arnaldo Pomodoro, le compositeur Ennio Morricone, les réalisateurs Giuseppe Tornatore, Bob Wilson et - peut-être - Liliana Cavani, auteur du célèbre "Galileo", pas très tendre avec l'Église. Parmi les sculpteurs, et ici les noms sont vraiment surprenants, émergent de façon presque certaine les noms de Jannis Kounellis et surtout d'Anish Kapoor, l'artiste indien très coté qui expose en ce moment à la Royal Academy of Arts un canon spectaculaire tirant toutes les 20 minutes des balles de cire rouge qui vont s'écraser sur le mur d'en face.
Pour l'architecture, il devrait y avoir Paolo Portoghesi et Mario Botta. Au chapitre de la musique, ensuite, il reste à éclaircir le mystère Barenboim, qui selon certains, pourrait avoir été "nominé", tandis que Claudio Abbado est presque certain. Riccardo Muti, bien entendu invité, voit la date du 21 tomber au milieu d'un prestigieux "tour de force" (en français dans le texte) américain qui rend presque impossible sa présence à Rome. En fait, le peu de temps entre l'envoi des invitations et l'événement a créé un certain mécontentement.
Tandis qu'on attend Roberto Benigni, reste à dénouer l'énigme Cattelan, injoignable hier. Selon "Panorama", l'auteur très coté d'oeuvres-choc comme celle du Pape Wojtyla terrassé par une météorite, aurait reçu une invitation mais à la mauvaise adresse. Hypothèse pas exactement réaliste, mais toujours utile pour une publicité ultérieure. D'autres noms lourds continuent de circuler. Si le grand Cormac McCarthy a été joint par un appel, il pourrait décider de mettre fin à son exil texan, comme il l'a déjà fait en plusieurs occasions (extrêmement mondaines). Et Jeff Koons? Autre "papabile", de même que Damien Hirst.
Quoi qu'il en soit, l'attente est croissante. D'ici la semaine prochaine, une partie du mystère sera levé. Pendant ce temps, une certitude: le Pape ne veut pas de bons catholiques, il veut de vrais artistes.
© Copyright Libero, 28 octobre 2009.
http://www.libero-news.it/articles/view/587442
