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L'homélie du Père VIOT

HOMELIE DU Père Michel VIOT
Pour la messe, en mémoire du Roi LOUIS XVI

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Saint Jean 5, 25-29.

5 : 25
En vérité, en vérité, je vous le dis, l'heure vient, et elle est déjà venue, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu; et ceux qui l'auront entendue vivront.
5 : 26
Car, comme le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d'avoir la vie en lui-même.
5 : 27
Et il lui a donné le pouvoir de juger, parce qu'il est Fils de l'homme.
5 : 28
Ne vous étonnez pas de cela; car l'heure vient où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix,
5 : 29
et en sortiront . Ceux qui auront fait le bien ressusciteront pour la vie, mais ceux qui auront fait le mal ressusciteront pour le jugement.

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Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.
Ce passage de l'Evangile selon Saint Jean peut être compris de deux manières que bien souvent dans les temps modernes on a opposé. Pour m'expliquer, je partirai d'une question : « Qui sont les morts qui entendent la voix du Fils de Dieu ? » S'agit il de ceux qui gisent dans les tombeaux et ce au sens littéral ? Ou bien cela concerne t’il les morts au sens spirituel, c'est à dire des gens coupés de Dieu parce qu'ils refusent de croire en Jésus Christ son Fils ? Leurs tombeaux ne seraient plus alors que leur vie en ce monde, une vie sans foi.

Ce serait mal comprendre la méthode du 4ème Evangile que de choisir entre ces deux interprétations. Saint Jean, quelques chapitres plus loin, au chapitre 9, parlera d'aveugles, à propos de la guérison de l'aveugle-né. Et il sera autant question dans tout ce récit d'aveugles privés de la lumière physique, que d'aveugles n'ayant pas accès à la lumière spirituelle. Il en va de même ici, les morts se trouvent autant dans les tombes de nos cimetières que dans nos villes et nos campagnes parmi ceux qui vivent sans Dieu. A toutes les époques de l'histoire de ce monde, pareille affirmation a pu être vérifiée. Cela dit, force est d'admettre pour qui est lucide et ne se laisse pas abuser par des mythes fondateurs, fussent-ils ceux d'une société, que depuis deux siècles ce que JEAN-PAUL Il après PAUL VI appelait la culture de mort s'est considérablement développée marquant la société de son empreinte.

Ce qui s'est passé le 21 Janvier 1793 n'en constitue pas la moindre de ces manifestations, bien au contraire. La mort du Roi LOUIS XVI sur l'échafaud n'est pas seulement la mort d'un homme condamné d'une manière inique. Ce n'est pas non plus seulement la mort d'un martyr pour la foi catholique et je reviendrai sur cette question. Et c'est encore moins le dérapage d'un mouvement qui se serait voulu réformateur à son départ et qui aurait ensuite mal tourné. Non, il s'agit, comme l'un des historiens de cette période l'a brillamment écrit de la fin d'un monde, d'un monde qui certes n'était pas parfait mais dans lequel Dieu avait toute sa place. Et cette fin n'a pas commencé à cette date sinistre, son mécanisme était déjà enclenché pour ce qui concerne l'aspect politique dès 1789 et pour le spirituel depuis plus d'un siècle.

Mieux que beaucoup d'historiens spécialistes du 18éme siècle, notre Saint Père le Pape BENOIT XVI a compris cela et le montre très clairement dans sa dernière Encyclique SPE SALVI, « Sauvés dans l'Espérance ». Certes il ne dit pas un mot de LOUIS XVI et n'évoque la Révolution Française qu'en quelques lignes. En revanche, il détaille avec précision la doctrine du philosophe anglais Francis BACON dont l'influence a commencé à s'exercer au début du 17ème siècle. Son rationalisme, son messianisme scientifique devant conduire à une Société d'autant plus parfaite qui niait le péché originel, sa réduction du christianisme a une sagesse humaine préparèrent à la philosophie française des Lumières cause de la Révolution dont le but principal était la destruction du christianisme, condition essentielle pour provoquer d'autres destructions.

Joseph de Maistre avait bien jugé cette période. Dans son essai sur le principe générateur des constitutions politiques, il écrit : « Il ne peut y avoir de véritable impiété qu'au sein de la véritable religion ; et, par une conséquence nécessaire, jamais l'impiété n'a pu produire dans les temps passés les maux qu'elle a produit de nos jours, car elle est toujours coupable en raison des lumières qui l'environnent. C'est sur cette règle qu'il faut juger le 18ème siècle... Or, quoi qu'il y ait toujours eu des impies, jamais il n'y avait eu, avant le 18ème siècle et au sein du christianisme une insurrection contre Dieu ».

Certes la majorité de la France demeurait chrétienne avec dans l'ensemble un bon clergé, comptant bien sûr quelques mauvais sujets. Mais ce que Jean-Jacques ROUSSEAU appelait lui-même « la secte philosophique » régnait sur les esprits dits éclairés et dès 1776 il constatait que celle-ci « Depuis qu'elle s'est réunie dans un corps sous des chefs, ces chefs par l'art de l'intrigue auquel ils se sont appliqués, devenus les arbitres de l'opinion publique, le sont par elle de la réputation, même de la doctrine des particuliers, et par eux de celle de l'Etat ». Si l'on rapproche cela d'autres paroles du même ROUSSEAU dans le contrat social : « Rien n'est plus contraire que le christianisme à l'esprit social ... une société de chrétiens ne serait plus une société d'hommes », et je résume le raisonnement qui suit cette affirmation située au chapitre 17 du Contrat Social : cette société serait trop parfaite ne s'occupant plus des choses de la terre mais du ciel exclusivement, elle ne saurait même plus discerner le mal et encore moins le combattre. Bien évidemment cela ne correspond pas à une vision juste d'une société chrétienne (voir Saint AUGUSTIN). Et cela montre aussi que les révolutionnaires français n'ont pas été aussi fidèles disciples de Jean-Jacques ROUSSEAU comme on le croit souvent puisqu'ils ont déformé sa pensée sur le christianisme. C'est pourquoi la Révolution française a été le fait d'un groupe d'individus farouchement opposés à la foi chrétienne, allant bien au-delà des pensées de Jean-Jacques ROUSSEAU qui n'aurait jamais sans doute cautionné la Terreur.
Quant au Roi, car elle a envisagé de le maintenir, il ne pouvait régner qu'en renonçant à son titre et à son rôle de « Très chrétien », en même temps qu'à une partie de ses pouvoirs. Cette secte philosophique voulait faire taire la voix du Fils de Dieu et enfoncer plus profondément encore dans leurs tombes, les morts, ne serait-ce qu'en en fabriquant d'autres, des deux espèces dont j'ai parlé à propos de l'Evangile de ce jour, morts physiques et morts spirituels. Et elle ne s'en priva pas ! Car les morts causés par la Révolution ne se limitèrent pas au sens physique à l'usage des Guillotines, fusillades et noyades, il faut aussi les compter parmi les victimes des batailles Napoléoniennes et de toutes celles qu'engendrèrent les guerres des nationalités jusqu'au 20ème siècle. Quand aux morts spirituels, aux hommes et aux femmes qui n'entendent plus la voix du Fils de Dieu donnant l'accès à la grande Espérance du Royaume de la vie éternelle, ils sont maintenant de plus en plus nombreux tant en France que dans les pays dits de chrétienté. En très grande partie, la Révolution est donc arrivée à ses fins.

En disant il y a quelques instants que les révolutionnaires avaient envisagé de conserver le Roi sous certaines conditions, j'ai dû surprendre plus d'un d'entre vous, et je veux revenir sur ce point, parce qu'il va du même coup concentrer notre pensée sur celui dont nous honorons aujourd'hui la mémoire : le Roi LOUIS XVI. En 1789, la majorité des révolutionnaires souhaitait garder la royauté. Mais encore fallait il que le Roi servît la Révolution, qu'il acceptât de combattre l'Eglise catholique, qu'il laissât son pays se déchristianiser et ce afin de ruiner toute morale judéo-chrétienne permettant à la bourgeoisie d'imposer le règne de l'argent et d'accélérer l’établissement d'un capitalisme ultra-1ibéral.
On avait d'ailleurs commencé par rendre impossible toute opposition de ce qui serait le futur prolétariat par la loi Le CHAPELIER en interdisant les corporations, en même qu'on prenait la réalité du pouvoir. S'échafauda alors l'inapplicable constitution de 1791 concentrant l'essentiel de l'autorité politique sur une assemblée. Mais il était nécessaire cependant de conserver un Roi ou tout du moins son masque pour pouvoir faire avaler au peuple les pilules amères de la Révolution et surtout la plus contraignante : la domination d'une classe de la société sur toutes les autres. Ce qui était impossible avec l'ancien régime puisque le Roi devait être avant tout un arbitre entre les différentes classes sociales.

LOUIS XVI, parce qu'il haïssait la violence, partageant en partie l'optimiste de son temps et aussi parce qu'il voulait de profondes réformes donna l'impression aux partisans du changement qu'il pouvait devenir le Roi de la Révolution. Il n'avait pas réprimé l'émeute du 14 Juillet 1789, il avait accepté le coup d'état des Etats généraux se transformant en Assemblée Nationale ainsi que la déclaration des Droits de l'homme qui visaient à diminuer son pouvoir au profit de la Nation et préparait l'asservissement de l'Eglise à celle-ci.

Les ultra-conservateurs, partisans de l'ancien régime, partagèrent les sentiments de leurs adversaires, mais avec des conséquences toutes autres. Ils furent certainement les premiers à souhaiter la mort de ce Roi-là.

(...) Louis XVI agissait en diplomate

En fait, on le sait maintenant, LOUIS XVI agissait en diplomate, ce qui était sa façon de faire tant en politique extérieure, et cela est reconnu, qu'en politique intérieure, ce qui certes l'est moins. Il voulait effectivement prendre la tête de la Révolution, mais pour mieux la contenir et éviter des excès qu'il ne prévoyait que trop bien. C'est dans cet esprit qu'il signa la Constitution Civile du Clergé, avec l'accord de ses évêques les plus fidèles à Rome et le silence compréhensif du Nonce Apostolique. Dès ce moment augmenta contre lui, la haine du parti ultra-aristocratique et la méfiance des jacobins qui ne l'avaient sans doute pas cru si habile calculateur. Ce pourquoi, comprenant leur erreur de jugement il commencèrent à préparer l'abolition de la royauté. Ils ne constituaient cependant en 1791 qu'une minorité parmi les révolutionnaires. Mais, par une de ces diableries dont l'histoire a le secret ils se retrouvèrent les alliés objectifs de ceux qui parmi les ultra-conservateurs voulaient la mort d'un Roi jugé trop mou. Je n'ai guère le temps ici de développer les conséquences de cette « alliance objective, source de beaucoup de mystères entourant la chute de la monarchie et les évènements de la grande terreur ». Je dirai simplement que l'anti-christianisme continua à se déchaîner jusqu'à faire voter une loi par l'Assemblée Législative condamnant à la déportation et sans jugement les prêtres réfractaires. Comme catholique, mais aussi comme chef d'état garant de l'application de la Déclaration des droits de l'homme, LOUIS XVI y apposa son veto. Il en savait toutes les conséquences. La veille du 10 Août 1792, il écrivait à son confesseur le Père Hebert, qui sera massacré en Septembre avec 223 autres prêtres : « Je n'attends plus rien des hommes, apportez-moi les consolations célestes ».

Tous ceux qui virent de près la mort du Roi, ce 21 Janvier 1793 furent frappés par son courage et sa tranquillité même HEBERT, représentant de la commune de Paris, un de ses pires ennemis, s'opposa bruyamment à la publication d'un rapport circonstancié sur l'événement car cela « mettrait sous les yeux du peuple l'espèce de fermeté que LOUIS a porté sur l'échafaud ». En effet, il avait même manifesté l'espace d'un instant son autorité royale en faisant taire les tambours d'un seul regard et en criant d'une voix forte : « Je meurs innocent de tous les crimes qu'on m'importe. Je pardonne aux auteurs de ma mort et je prie Dieu que le sang que vous allez répandre ne retombe jamais sur la France ».

Le sang d’un martyr peut certes édifier les consciences et affermir l’Eglise, mais encore faut-il qu’il soit reconnu comme tel ! Enfin, le sang d’un martyr ne peut absoudre que lui-même, pas les autres, et là je songe à la France d’hier, d’aujourd’hui et de demain, tachée de ce sang là. En ôtant la vie au défenseur séculaire de la foi chrétienne, à celui qui avait reçu l’onction pour accomplir ce premier devoir en même temps que pour garantir l’unité de la Patrie, la France porte une lourde responsabilité, car aucun des pouvoirs politiques qui a succédé à LOUIS XVI, et ce, jusqu’à ce jour, n’a osé dire toute la vérité sur ce qui amena l’exécution du 21 Janvier 1793, symbole de tous les crimes de la Révolution. Pour cacher tout cela on n’a pas hésité à truquer l’histoire, voir Jules MICHELET entre autre, ce qui a permis de laisser se poursuivre la déchristianisation.
Aussi n’hésiterai-je pas à comparer la France à la Lady MACBETH de SHAESKPEARE, perdue dans une folie somnambule à cause de son crime. Elle erre la nuit dans son château en essayant d’effacer de ses mains une tâche de sang que nul ne voit sinon elle : « Va-t-en tâche damnée, va-t-en dis-je… quoi, ces mains là ne seront jamais propres… il y a toujours l’odeur du sang… tous les parfums d’Arabie ne rendraient pas suaves ces petites mains ! » Et dans ce tombeau cauchemar Lady MACBETH est restée enfermée. Puisse un jour la France, quel que soit son régime politique, et j’insiste sur ce point, se réveiller de son sommeil de mort et par la grâce de son baptême voir la tâche de sang effacée. Ce sera le signe qu’elle entend de nouveau la voix du Fils de Dieu. Alors elle pourra revivre comme fille aînée de l’Eglise et, en rétablissant l’unité de ses enfants, parler légitimement de sa vocation particulière en ce monde.
Ainsi soit-il.

Notes.

(*1) Essai sur le principe générateur des constitutions politiques de Joseph de MAISTRE. Editions complexes, pages 271-272.

(*2) L’Eglise à l’épreuve de la Révolution. Editions Tequi. Page 48.

(*3) Ibid. page 53.
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