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Ma lecture de la lettre aux irlandais

En toute humilité: 21 mars 2010
Quelques éléments de réponse aux critiques des medias.
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Voir ici: Lettre aux Catholiques d'Irlande
Afin de me ménager un temps de réflexion, j'ai passé un assez long moment à lire la lettre pastorale aux catholiques d'Irlande, en version papier, crayon en main.
Après quoi j'ai regardé les premiers commentaires dans la presse.
Des commentaires malheureusement (?) sans surprise.
Bien entendu, la grande majorité des "journalistes" qui s'expriment ne s'est pas donné la peine de la lire, et d'ailleurs elle ne les intéresse pas. De même que dans les textes magistériaux, ils recherchent les mots-clé préservatifs et contraception, plus quelques autres que je crois inutile de rappeler ici, cette fois ils cherchaient honte et [demande de] pardon .
D'un côté, on assiste donc à une répétition exacte de ce qui s'est passé après la visite au mémorial de la Shoah, lors du voyage en Terre Sainte, on pourrait presque recopier tel quel certains commentaires d'alors. En substance, il n'a pas dit assez pour les victimes, c'est trop vague, IL N'A PAS DEMANDÉ PARDON. Je lis par exemple ce titre d'un quotidien populaire:


Pour les procureurs du tribunal des medias, l'Eglise est définitivement sur le banc des accusés. Un point, c'est tout. Et c'est un accusé qui n'a droit a aucune défense, on lui concède tout juste de battre sans fin sa coulpe et de demander pardon à tout le monde, même pour les fautes que ses accusateurs considèrent comme vénielles pour eux-mêmes, même pour celles qu'elle n'a pas commises (tout au plus le Saint-Père a -t-il pu écrire que le problème de l'abus des mineurs n'est pas propre à l'Irlande, ni à l'Eglise, et que le catholicisme a été tout au long de l'histoire une grande force de bien...).

Une lectrice m'écrit, et cela peut consoler, en effet:
On reproche au Saint Père son silence. Pour moi je vois sa sagesse et la Parole de Dieu qui demeure d'actualité...
Il n'y a rien de plus enrageant qu'une personne qui garde silence dans une tempête. Le silence dérange et le silence fait enrager les loups voraces.

L'autre titre qui a été répété en boucle par les medias, et qui contredit en partie le premier (mais peu importe, l'essentiel étant d'humilier le Pape et de le faire passer pour coupable) est "Le Pape a honte". Comme s'il s'agissait d'une faute qui lui était personnelle. Or, Benoît XVI a écrit: [Au nom de l'Eglise], je vous exprime ouvertement la honte et le remord que nous éprouvons tous .
Ce n'est pas exactement pareil.

Honte...

Capture d'écran, actu de Google (Paris-Match)


Enfin, un autre point abordé par les critiques est "Les prêtres impliqués seront-ils dénoncés à la justice?"
Bien entendu, ce n'est pas au saint-Père de se mêler de la justice des hommes. Mais on peut constater qu'il a des mots très durs (inhabituels chez lui), lorsqu'il leur écrit: Vous devez répondre de cela devant Dieu tout-puissant, ainsi que devant les tribunaux constitués à cet effet.
Et aux évêques, il dit: Outre à mettre pleinement en œuvre les normes du droit canonique en affrontant les cas d'abus sur les enfants, continuez à coopérer avec les autorités civiles dans le domaine de leur compétence.
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On peut imaginer a quel point cela a dû être difficile d'écrire une telle lettre, presque la lettre d'un père de famille, au ton très intime, plein de délicatesse et d'affection, et surtout, de prendre sur soi des fautes que non seulement on n'a pas commises, mais qui sont les fruits empoisonnés des dérives que l'on ne cesse de dénoncer depuis 30 ans.

Relisons donc très attentivement les passages -clés (j'utilise la traduction en français du site du Vatican, précédée de la mention assez inhabituelle "Traduction non officielle", qui semblerait indiquer qu'on a su tirer toutes les leçons des expériences passées.)

 


Le Saint-Père commence par remarquer que "comme de nombreuses personnes dans votre pays l'ont observé, le problème de l'abus des mineurs n'est pas propre à l'Irlande, ni à l'Eglise" (n°2).
Puis, il rappelle aux irlandais, et c'est très beau, à quel point ils peuvent être fiers de l'apport du catholicisme à la civilisation et à la culture de leur pays, soulignant que "tout au long de l'histoire, les catholiques d'Irlande se sont révélés une immense force de bien tant dans leur patrie qu'à l'étranger" et aussi que "dans presque toutes les familles d'Irlande, il y a eu quelqu'un — un fils ou une fille, une tante ou un oncle — qui a donné sa vie à l'Eglise" (n°3).

La remarque qui suit vaut pour l'Occident tout entier: "Au cours des dernières décennies, toutefois, l'Eglise dans votre pays a dû affronter de nouveaux et graves défis à la foi, découlant de la transformation et de la sécularisation rapides de la société irlandaise. Un changement social très rapide a eu lieu, qui a souvent eu des effets contraires à l’adhésion traditionnelle des personnes à l'égard de l'enseignement et des valeurs catholiques".
"Au cours de cette période, apparut également la tendance déterminante, également de la part de prêtres et de religieux, à adopter des façons de penser et à considérer les réalités séculières sans référence suffisante à l'Evangile. Le programme de renouveau proposé par le Concile Vatican II fut parfois mal interprété et en vérité, à la lumière des profonds changements sociaux qui avaient lieu, il était très difficile de comprendre comment les appliquer de la meilleure façon possible." (n°4)

Le Saint-Père rappelle sa sollicitude inlassable pour les victimes:
"En plusieurs occasions depuis mon élection au Siège de Pierre, j'ai rencontré des victimes d'abus sexuels, et je suis disposé à le refaire à l'avenir. Je me suis arrêté pour parler avec eux, j'ai écouté leurs récits, j'ai pris acte de leur souffrance, j'ai prié avec eux et pour eux". (n°5)

Puis nous en arrivons à la demande de "pardon", et à l'expression de la "honte" (certains observateurs ont fait remarqué que les mots utilisés dans les traductions sont moins forts que le texte original en anglais: « You have suffered grievously and I am truly sorry. I know that nothing can undo the wrong you have endured. »)

Demande de pardon

n°6. Aux victimes d'abus et à leurs familles

Vous avez terriblement souffert et j'en suis profondément désolé. Je sais que rien ne peut effacer le mal que vous avez subi. Votre confiance a été trahie, et votre dignité a été violée. Beaucoup d'entre vous, alors que vous étiez suffisamment courageux pour parler de ce qui vous était arrivé, ont fait l'expérience que personne ne vous écoutait. Ceux d'entre vous qui ont subi des abus dans les collèges doivent avoir eu l’impression qu'il n'y avait aucun moyen d'échapper à leur souffrance. Il est compréhensible que vous trouviez difficile de pardonner ou de vous réconcilier avec l'Eglise. En son nom, je vous exprime ouvertement la honte et le remord que nous éprouvons tous. Dans le même temps, je vous demande de ne pas perdre l'espérance. C'est dans la communion de l'Eglise que nous rencontrons la personne de Jésus Christ, lui-même victime de l'injustice et du péché. Comme vous, il porte encore les blessures de sa souffrance injuste.

Sévérité pour les coupables

n° 7. Aux prêtres et aux religieux qui ont abusé des enfants

Vous avez trahi la confiance placée en vous par de jeunes innocents et par leurs parents. Vous devez répondre de cela devant Dieu tout-puissant, ainsi que devant les tribunaux constitués à cet effet. Vous avez perdu l'estime des personnes en Irlande et jeté la honte et le déshonneur sur vos confrères. Ceux d'entre vous qui sont prêtres ont violé la sainteté du sacrement de l'Ordre sacré, dans lequel le Christ se rend présent en nous et dans nos actions. En même temps que le dommage immense causé aux victimes, un grand dommage a été perpétré contre l'Eglise et la perception publique du sacerdoce et de la vie religieuse.
Je vous exhorte à examiner votre conscience, à assumer la responsabilité des péchés que vous avez commis et à exprimer avec

Rappel à l'ordre des évêques

n°11 A mes frères évêques

On ne peut pas nier que certains d'entre vous et de vos prédécesseurs ont manqué, parfois gravement, dans l'application des normes du droit canonique codifiées depuis longtemps en ce qui concerne les crimes d'abus sur les enfants. De graves erreurs furent commises en traitant les accusations. Je comprends combien il était difficile de saisir l'étendue et la complexité du problème, d'obtenir des informations fiables et de prendre des décisions justes à la lumière de conseils divergents d'experts. Malgré cela, il faut admettre que de graves erreurs de jugement furent commises et que des manquements dans le gouvernement ont eu lieu. Tout cela a sérieusement miné votre crédibilité et efficacité. J'apprécie les efforts que vous avez accomplis pour porter remède aux erreurs du passé et pour assurer qu'elles ne se répètent pas. Outre à mettre pleinement en œuvre les normes du droit canonique en affrontant les cas d'abus sur les enfants, continuez à coopérer avec les autorités civiles dans le domaine de leur compétence. Les supérieurs religieux doivent clairement en faire tout autant.
...

Reprise en main

(..) après avoir pris conseil et avoir prié sur la question, j’ai l’intention de convoquer une Visite apostolique dans plusieurs diocèses d'Irlande, ainsi que dans des séminaires et des congrégations religieuses. La Visite se propose d'aider l'Eglise locale dans son chemin de renouveau et sera établie en coopération avec les bureaux compétents de la Curie romaine et la conférence épiscopale irlandaise. Les détails seront communiqués en temps utile.


Enfin, avant de conclure par la belle prière qu'il a spécialement composée, le Saint-Père replace sa lettre dans le contexte de l'année sacerdotale:

"En cette Année consacrée aux prêtres, je vous confie de manière toute particulière la figure de saint Jean Marie Vianney, qui eut une compréhension si riche du mystère du sacerdoce. «Le prêtre, écrivit-il, a la clé des trésors du ciel: c'est lui qui ouvre la porte, c'est lui le dispensateur du bon Dieu, l'administrateur de ses biens». Le curé d'Ars a parfaitement compris combien une communauté est bénie quand elle est servie par un prêtre bon et saint: «Un bon pasteur, un pasteur selon le cœur de Dieu, est le trésor le plus grand que le bon Dieu puisse donner à une paroisse et l'un des dons les plus précieux de la divine miséricorde»."