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Scandale des abus dans le clergé: attention!

Le gros de la bourrasque semble passé. Mais le Père Scalese nous invite à la prudence face aux périls de la division et de la "domestication" de l'Eglise (29/4/2010)

Le Père Scalese ne s'est pas tellement exprimé, sur le scandale des abus. Il voulait sans doute prendre un peu de recul, pour anlyser les évènements plus sereinement, et surtout, au-delà des faits, en tirer les leçons.
A présent que la bourrasque semble calmée, on pourrait se réjouir, et se dire que la figure du Pape en est sortie intacte, et même grandie (nous parlons ici des gens de relative bonne foi, les autres sont de toutes façons innaccessibles).
C'est bien le cas.
Mais, comme l'indique le titre de son dernier billet, le Père Scalese n'a rien d'un optimiste béat, et il nous invite à faire "attention".
Il énumère les dommages que cet épisode a causés à l'Eglise, et qui pourraient bien avoir des suites. Et parmi eux, il en identifie trois, particulièrement graves:
. Risque de divisions dans l'Eglise. (1)
. Risque de s'adapter à l'esprit du monde, en confondant "transparence" et "vérité"
. Risque d'enrôler la papauté dans les rangs de l'Occident athée. Il cite à ce propos un article d'Antonio Socci (dont j'ai traduit une partie) (2) citant lui-même un article paru dans Il Corriere della Sera de Galli della Loggia, intellectuel italien de tendance libérale)

Mercredi 28 avril 2010
http://querculanus.blogspot.com/2010/04/occhio.html
Attention!
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On dirait que, après la tempête qui s'est déchaînée contre l'Église dans les derniers mois, l'aiguille du baromètre commence à revenir de nouveau vers le beau. Non que tout soit terminé, mais il semble que le pire est passé. Bien que le New York Times continue à lancer ses flèches, désormais, plus personne ne lui donne raison: il est clair pour tout le monde qu'il s'est agi exclusivement d'une campagne instrumentalisée pour attaquer l'Eglise et, en particulier, le pape. Avec cette campagne, "the Old Grey Lady" (la vieille dame grise) a complètement perdu la face et il lui sera très difficile de récupérer un peu de crédibilité. En revanche, la figure de Benoît XVI sort de cette histoire non seulement intacte (toutes les accusations dirigées contre lui étaient sans fondement), mais je dirais encore plus fort. A coup sûr, sa popularité (si elle peut être considérée comme une valeur dans l'Église) n'a pas du tout été affectée; et même, si l'on s'en tient à ses dernières apparitions publiques (en particulier la visite à Malte), elle a augmenté.

Tout va bien, alors?
Eh bien, personnellement, je ne me sens pas tellement tranquille, parce que la popularité n'est pas le seul critère pour juger de la santé de l'Église. Il est vrai que si nous croyons en l'indéfectibilité de l'Eglise, il ne faut pas trop s'inquiéter. L'expérience elle-même nous enseigne que l'Église a passé les tempêtes bien pire au cours des siècles, et s'en est toujours bien sortie, et même les orages sont souvent l'occasion d'une purification et d'un relèvement moral. Cela est vrai; mais, humainement parlant, cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de quoi être inquiets des conséquences que certains phénomènes peuvent avoir dans sa vie. Nous ne pouvons pas nous illusionner que ce tohu-bohu passera sans laisser de trace. Vous allez dire: si cela conduit à une plus grande propreté, à une meilleure cohérence du clergé et des fidèles, il n'y a qu'à se réjouir. Moi, qui commence à n'être plus si jeune et qui pour des raisons professionnelles, ne cesse d'étudier l'histoire, je ne serais pas aussi optimiste.

À mon avis, cet ouragan a déjà fait ses dégâts et, si nous n'y prenons garde, il pourrait en faire de pires.
On dira: qu'est-ce qui est pire? que le mal existe ou qu'il vienne au jour? On ne peut nier que, parmi les prêtres, la pédophilie existait; donc, nous devrions nous réjouir que la dénonciation publique de ce fléau puisse servir à y remédier. Reconnaissons que peut-être dans certains cas, le phénomène a été sous-estimé; mais nous ne pouvons pas nous illusionner de faire le ménage à travers le pilori des médias (car c'est de cela qu'il s'agit): les méthodes de l'Eglise sont autres. Je vais donc essayer de dresser une liste des dommages que, selon moi, cet épisode pourrait causer à l'Église.

1. Durant ces jours, on n'a parlé que d'abus. Je ne sais pas si vous avez remarqué comment le «pouvoir» rester toujours à dicter l'agenda de l'Église: il y a eu le moment où on n'a parlé que de la pilule; puis est venu le temps du préservatif; aujourd'hui, c'est le moment des abus. Et les énergies de l'Eglise sont toutes concentrés à se défendre, à expliquer, à publier des précisions sur chacun de ces sujets, détournant l'attention de ce qui devrait être la principale préoccupation de l'Église: la proclamation de Jésus-Christ et de son Evangile. Comme par hasard, il s'agit toujours de questions morales, de sorte que l'Église, si elle n'y prend garde, risque de tomber dans une manière ou d'une autre dans le moralisme, qui est l'antithèse du christianisme. Pour ne donner qu'un exemple concret, limité, mais significatif: avez-vous remarqué à quel point la rencontre avec les victimes d'abus à Malte (en elle-même excellente) a fini par concentrer toute l'attention des médias, ignorant ainsi tous les d'autres aspects (y compris l'enthousiasme populaire, pourquoi pas?) de cette visite?

2. Nous devons ensuite faire attention aux conséquences imprévues et involontaires de certains prises de position. Je m'explique avec un exemple: quand Jean-Paul II lança les rencontres interreligieuses d'Assise, il l'a fait avec les meilleures intentions, mais qu'est-il resté de ces rencontres dans l'imaginaire collectif? Que toutes les religions sont égales.
Ainsi, aujourd'hui ont été rendu publiques les nouvelles guidelines (lignes directrices) sur la façon de gérer les cas d'abus. Je n'ai aucun commentaire à ce sujet; et même, je les trouve très bonnes. Mais - avouons-le - qu'est-ce qui est passé auprès du grand public? Que, désormais, les évêques sont tenus de signaler les prêtres pédophiles. Faut-il rappeler que les guidelines disent autre chose ("On suivra toujours les dispositions du droit civil en ce qui concerne le renvoi des crimes aux autorités préposées"); tout le monde persistera à penser que les évêques doivent dénoncer leurs prêtres à la magistrature.

3. Un autre dommage qui pourrait se révéler dévastateur, ce sont les divisions au sein de l'Eglise. Chez de nombreux fidèles, l'idée pourrait faire son cemin que, oui, le pape est un gentilhomme, mais les prêtres sont tous pédophiles et les évêques, s'ils ne sont pas pédophiles, sont des complices, dont le seul but est de couvrir, occulter et enterrer. Si on devait arriver à cette conclusion, ce serait la fin de l'Église. Prenons garde à ne pas encourager l'opposition entre le Pape et les évêques, entre le Pape et la Curie, entre l'Eglise d'hier et l'Eglise d'aujourd'hui: les conflits ne servent en aucune manière à l'Eglise. Nous devons savoir que si nous tombons dans ce piège, nous donnons raison aux ennemis de l'Eglise qui ne veulent rien tant que sa division. Prenons garde à ne pas faire du Pape le leader d'un parti et à espérer que dans les diocèses et les dicastères romains seuls des "ratzingeriens" estampillés seront nommés. Mais nous rendons-nous compte qu'en faisant ainsi, on dénature l'Eglise?

4. Un risque encore plus subtile est celui de s'adapter, sans s'en apercevoir, à la mentalité de ce monde. Dans l'anxiété de se défendre, on s'approprie les valeurs du monde, risquant d'oublier celles de l'Evangile. Je donne juste un exemple (qui mériterait bien sûr d'être bien plus approfondi), pour comprendre le problème. On ne cesse de répèter - et nul ne songerait à le mettre en discussion - que dans l'Eglise, il devrait y avoir plus de "transparence" et qu'il est temps d'éliminer à jamais les «couvertures» qui ont jusqu'à présent caractérisé son action. Mais je ne savais pas que la «transparence» (la glasnost de mémoire Gorbatchevienne) était une valeur évangélique (au besoin dans l'Evangile, on parle de vérité, pas de transparence); tandis que dans plusieurs passages de l'Écriture, il est dit que "la charité couvre une multitude de péchés".

5. Mais le pire des risques - d'ailleurs relevé par Antonio Socci (2) - est celui d' "apprivoiser" la papauté; d'enrôler le Pape dans les rangs de l'Occident, comme le disait Ernesto Galli della Loggia. Quiconque connaît un peu l'histoire sait que ce fut là la tentation du pouvoir de toutes les époques: faire du pape le "chapelain" de l'empereur du moment. Cela, on pourra le faire avec les Eglises orthodoxes ou protestants, mais on ne peut espérer le faire avec l'Église catholique, qui, par définition, est universelle. Il est évident que quand quelqu'un aspire à la domination universelle, il finira inévitablement par rencontrer l'Eglise catholique, qui pourrait d'une certaine manière lui barrer le passage. Cela s'est déjà produit et cela continuera à se produire. L'important est d'en être conscient.

Notes

(1) Divisions
Entre le Pape d'une part, et les prêtres et évêques, de l'autre. Mais aussi, on le voit très clairement en ce moment, tentative d'opposer le Pape à la Curie, le cardinal Ratzinger au cardinal Dario Castrillon Hoyos (http://www.lexpress.fr/... on observera que cela vient de Golias, c'est tout dire!) et même Benoît XVI à JP II: John Allen, dans un article sur Dario Castrillon repris par Damian Thompson et le blog italien Messa in latino, se demande ces jours-ci pourquoi le Vatican n'a pas fait toute la lumière sur l'attitude irréprochable du Pape Benoît XVI depuis toujours, dans la luttre contre les abus: parce que, dit-il, pour sauver la réputation de Benoît XVI, il aurait fallu ternir celle de Jean-Paul II.
Mais il faut comprendre (et il me coûte beaucoup de dire cela!) que dans cette affaire, Benoît XVI n'agit pas en tant que prersonne, mais en tant que Pape, i.e. garant de la continuité d'un principe. Attaquer JP II, c'est attaquer la papauté, et c'est la dernière chose que notre Saint-Père souhaite (et cela n'a même rien à avoir avec la fidélité de l'ami). Insinuer, donc, comme le fait plus ou moins Allen, que "Benoît XVI n'a pas de raison de payer pour les fautes commises par d'autres" (et j'insiste: en tant qu'homme, cela ne fait aucun doute que c'est ce qui se passe) , c'est vraiment ne rien comprendre à l'Eglise. Ou bien créer sciemment les divisions.

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(2) Antonio Socci et Galli della Loggia
Article en italien: http://www.antoniosocci.com/...

Les enfants sauvés par Jésus, et Galli ne le sait pas
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Parfois, pour l'Eglise certaines défenses sont plus insidieuses que les attaques qu'elle subit. C'est le cas de l'éditorial d'Ernesto Galli della Loggia dans le Corriere della Sera.
Galli soutient que, sur la question de la pédophilie et du clergé, le nettoyage drastique entrepris par Benoît XVI, "sans regarder personne en face" découlerait d'une adaptation de l'Église à la mentalité moderne de l'occident laïc, qui considère comme mal absolu l'abus des pédophiles.

Il dit: "L'Église a fini par faire sien, rapidement, sans réserve ni déviation d'aucune sorte, le point de vue affirmé (par ailleurs récemment et difficilement, reconnaissons-le) dans la société laïque occidentale."
Galli ajoute: "Il s'agit bien sûr du point de vue de la société occidentale, guère partagé, comme nous le savons, par d'autres sociétés, comme celles islamique ou afro-asiatique". Puis il conclut que l'Occident sera déchristianisée, mais que l'Eglise de Rome est de plus en plus "occidentale".
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[Une thèse qui semble vouloir enrôler le Pape dans les rangs «laïcs»].
Mais, dit Socci, la thèse de Galli, selon laquelle c'est grâce à la mentalité laïque moderne qu'on a commencé à considérer comme criminels l'abus de l'enfance, n'est étayée par aucun argument.
Socci lui oppose un autre article de Messori, traduit ici (Benoît XVI et le silence des «mauvais maîtres»), dans leqel ce dernier affirmait que la pédophilie était "présente de manière non clandestine, quand elle n'est pas louée et recommandée par les philosophes, comme cela s'est produit dans la Grèce antique et comme ce fut le cas dans les années soixante-huit européennes et américaines" - entendant ainsi démontrer que ce n'était nullement l'occident laïc et moderne qui avait prononcé la condamnation unanime et sans condition de la pédophilie.

Du reste, poursuit Socci, il est tristement notoire que dans les coutumes actuelles de la société occidentale, la pédophilie est devenue un phénomène criminel de grande ampleur, et même en augmentation. Il est difficile de soutenir que cet Occident puisse vraiment se présenter comme un maître en fait de condamnation de la pédophilie.
Si le Pape a entrepris de lutter de manière drastique contre ce phénomène obscur, ce n'est pas parce qu'il a rejoint la mentalité du monde, comme l'écrit Galli, mais - au contraire - parce qu'il considère intolérable qu'il y ait des prêtres (rarissimes) qui tombent dans ces vices obscurs et criminels qui viennent du monde (le monde au sens de Jean, comme lieu du "Prince des ténèbres").
En outre, le pape estime que la logique trop souvent suivie jusqu'à maintenant dans les rangs ecclésiastiques (la couverture de certains crimes pour ne pas faire honte à l'Eglise) trahit Jésus-Christ et la mission qu'il a confiée à l'Eglise, en donnant aux loups les agneaux, à savoir les enfants de Dieu les plus petits et sans défense.
Le Pape - à la différence de Galli - sait que, c'est justement grâce à l'irruption du christianisme, que pour la première fois dans l'histoire, la violation de l'enfance est devenue un tabou absolu.
(...)
C'est littéralement Jésus qui a inventé l'enfance, qui a affirmé une fois pour toutes que les enfants sont des êtres humains, et qu'ils sont sacrés et inviolables.
Contrairement à ce qu'écrit Galli, si dans la pensée moderne, la graine de l'humanisme fleurit, c'est l'Eglise qui l'a plantée. Donc, inconsciemment, la presse qui attaque contre la pédophilie, fait une apologie du christianisme.

C'est pour cela que le Pape, au cours des dernières semaines, n'a pas crié au complot, mais a dénoncé le péché plus encore que la presse, il a pleuré avec les victimes et a jugé comme une "grâce" providentielle jusqu'à cette campagne agressive des médias.
Parce qu'il pense que Dieu l'a permise pour purifier Son Eglise et lui faire retrouver Jésus.
Ainsi, l'humilité du pape à Malte, a ému les victimes et a gagné des millions de cœurs. C'est l'étrange victoire de la faiblesse. La «faiblesse» de la foi.



Un éditorial de Giuliano Ferrara, dans Il Foglio Dossier Küng (I)