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Icone, ou relique? Explication de texte

Comment le Saint-Père a évacué la prétendue controverse à propos de l'authenticité du Linceul de Turin (3/5/2010)

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Méditation devant le Saint-Suaire

Le Saint-Père a effectué hier un voyage triomphal à Turin.

Dans l'intense méditation prononcée devant le Saint-Suaire, il n'a pas une seule fois prononcé le mot "relique".
Il lui a préféré le mot "icône", qu'il utilise à quatre reprises. Comme il réfléchit profondément à tout ce qu'il dit, il est permis de s'interroger sur ce choix sémantique, et c'est ce que fait le Corriere della Sera dans deux article très intéressants et très érudits.
De quoi évidemment couper l'herbe sous le pied à nos perroquets incultes qui ont immédiatement (mais en vain) mis l'accent sur la "nouvelle controverse" (1)
Cela me remet à l'esprit une remarque de Jeannine (Lettre de Jeannine XI): comment voulez-vous que ces minus l'aiment (ou même le comprennent!). Lui nous parle de Nietzsche, d'absence de Dieu, de Résurrection, de sang, et eux, sans rien connaître à la question scientifique, répondent "entreprises charlatanesques" (1).


I.

Turin: Ratzinger ne définit pas le Saint-Suaire comme "relique", ainsi que le fit Wojtyla
Le pape s'agenouille devant "L'icône du Saint Suaire"
"Elle représente l'obscurité de notre temps"
Gian Guido Vecchi (Il Corriere della Sera)
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Il a fallu un Pape allemand de vaste culture pour citer le Gai Savoir de Nietzsche devant le Saint Suaire.
"Dieu est mort! Et nous l'avons tué", répéte Benoît XVI, et il explique: «Cette phrase célèbre, à bien y regarder, est tirée presque mot pour mot de la tradition chrétienne, nous la répètons souvent lors de la Via Crucis, peut-être sans être pleinement conscient de ce que nous disons» .
Le pontife fixe pendant cinq minutes, à genoux, le tissu de lin, et remue les lèvres en une prière silencieuse avant de partir dans une méditation qui aborde le thème central de son pontificat, la "dissimulation" (nascondimento) de Dieu: "à l'époque que nous vivons, après les deux guerres mondiales , les camps et le Goulag, Hiroshima et Nagasaki, notre époque est devenue de plus en plus un samedi saint".
......

Icône:
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Jean-Paul II en vint à l'appeler "la plus splendide relique de la Passion et la Résurrection". Benoît XVI utilise le même mot que celui choisi par le cardinal Ballestrero (qui fut archevêque de Turin de 1977 à 1989, décédé en 1998), "une icône vénérable du Christ". Comme l'explique l'historienne Barbara Fralle, (ndt: elle était présente aux côtés de Fabbio Zavattero, lors du direct de la RAI, et elle m'a carrément impresssionée!) dans Les Templiers et le Saint-Suaire du Christ, «icône» signifie bien plus qu'une image: et renvoie à la pensée des théologiens du second concile de Nicée (787), pour qui "l'image prodigieuse du Christ est un lieu de contact avec le divin", elle exprime "révérence et stupeur".
Benoît XVI a choisi une expression élevée, mais en même temps respectueuse des opinions différentes, et de la foi.

Il parle d' "un linge sépulcral en tous points semblable à ce que les évangiles nous disent de Jésus", qui "témoigne précisément de cet intervalle unique et irremplaçable dans l'histoire de l'humanité", et parle d'obscurité, mais en même temps de " consolation et d'espérance", de Résurrection: "Il me semble Que, en regardant ce tissu sacré avec les yeux de la foi, nous percevons quelque chose de cette lumière".

Lors de la Messe sur la Piazza San Carlo, dans la matinée, Benoît XVI a rappelé les chômeurs, les personnes vivant seules, les immigrants, les marginalisés.

Dans la soirée, il a visité entre larmes et ovations les malades de Cottolengo. "Je porte dans mon cœur toute l'humanité, avait-il dit devant le linceul de "l'homme des douleurs". Si tellement de personnes, deux millions, viennent pour l'ostension, c'est parce que, dans cette "icône écrite avec du sang ", ils voient "la victoire de la vie sur la mort".
Dans son livre sur Jésus, il cite le Psaume 27, "C'est ta face, Seigneur, que je cherche. Ne me cache pas ta face".

II.

Pourquoi le Pape a appelé le Saint-Suaire "icône" et non pas "relique"
Armando Torno, Il Corriere della Sera
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Le pape Benoît XVI à Turin pour l'ostension du Saint Suaire a parlé d'icône et pas de relique. Dans le célèbre drap, le Pape voit se refléter l'histoire du Christ; et même, la toile permet d'observer, comme dans un miroir, comment nous compatissons à ses souffrances. Les diatribes sur la datation ont donc été laissées de côté. En outre, la référence à Marie, au début de ce mois qui lui est consacré, porte une réflexion sur la foi.
Marie fut du rest la première à reconnaître avec certitude, au-delà de toute preuve, dans le visage humain de son fils celui de Dieu

Il faut maintenant se demander si la distinction aura une suite et si d'autres chapitres de cette histoire millénaire seront écrits.
La "relique" (de "reliquus", reste, résidu) est ce qui reste d'un corps humain ou d'une partie de celui-ci (dans ce cas elle était dite ex ossibus). Au sens large, la tradition catholique nomme aussi ainsi les objets ayant été en contact avec une personne parce qu'ils en avaient absorbé ses «preclare virtù». Il existe une pratique ancienne, née dans les catacombes, qui fait déposer des reliques dans l'autel, lors de l'acte de consécration au culte. Par la suite, elles sont devenues objets d'abus et de commerce, de sorte que le concile de Latran de 1215 punit les trafiquants de peines sévères.

Il est presque superflu d'ajouter que ces pratiques prospéraient partout, et à Rome, on se souvient encore d'un faussaire, le diacre Deusdona (première moitié du IXe siècle), qui expédiaient les corps de gens ordinaires jusqu'en Allemagne, volant les cadavres des cimetières de la ville et les faisant passer pour des martyrs.

Se concluant par les milliers de litiges et dans de nombreuses œuvres littéraires, les reliques se trouvent dans presque toutes les religions, comme preuve, le culte rendu aux poils de la barbe de Mahomet à Bijapur ou le fait que les cendres du corps de Bouddha ont été divisés en huit parties et conservées dans les sanctuaires.
Il s'agit de pratiques très anciennes
(..)
Et il y a plus. Les reliques laïques de personnages contemporains plus ou moins transformés en mythes, s'arrachent sur la Toile. Cela va de la lingerie intime de Marilyn Monroe, au peigne d'Elvis Presley, et au maillots des footballeurs jusqu'à des objets qui ne sont même pas dignes d'être mentionnés.

«Icone», au contraire, du grec eikón, nous amène au sens d'image, même si la tradition byzantine en a fait quelque chose de plus (et de moins qu'une relique). Dans le livre de l'Exode (20:4) on lit l'interdiction: "Tu ne te feras point d’image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point..." mais il y avait quelques exceptions, comme en témoignent les chérubins de l'arche de l'alliance (Exode 25.18) ou le serpent d'airain (Nombres 21: 8-9).
Certes, au début du christianisme il y a les nombreuses peintures des catacombes, les sculptures des sarcophages; au cours des quatrième et cinquième siècles l'usage se répand partout, même si, dans un premier temps, le culte était adressé à la Croix. Entre autres, Eusèbe de Césarée dans son Histoire ecclésiastique (7,18), dit qu'il a vu de ses propres yeux des peintures des saints Pierre et Paul et de Jésus lui-même.
Le début de cette liberté apporta avec elle quelques cas d'idolâtrie envers certaines représentations (...) On sait qu'en 726, l'Empereur byzantin Léon III l’Isaurien fit enlever une icône vénérée du Christ, donnant le coup d'envoi au mouvement des iconoclastes. Depuis lors, même si les figures sacrées peuplent une grand partie de l'art occidental, la tentation de les abolir ne s'est pas éteinte et on invoque régulièrement le verset de l'Exode.

À l'époque des images numériques et des icônes médiatiques, Benoît XVI a été au-delà. Il a même peut-être repris en clé théologique la Théorie esthétique de Theodor W. Adorno. Selon elle, plus que de reproduire le monde, leur rôle est d'offrir "le contenu de vérité" sédimenté dans la forme même de l'image ou de l'icône. Et elle en constitue l'historicité immanente.

La "controverse de Turin" (1)

Les medias n'en démordent pas: ils voulaient une polémique. Ils ont même cru en dénicher une.
Mais leur artifice a fait long feu.
Par exemple, le Télégramme titrait: La controverse de Turin relancée.

Extrait:
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(...) en 1988, l'Eglise finit par autoriser une datation au carbone 14. Le verdict est sans appel : le « Suaire » de Turin a été réalisé à partir d'un tissu datant du XIVe siècle. Ce n'est rien d'autre qu'une mystification !
C'est la thèse que reprend à son compte l'association française pour l'information scientifique. Qui traque toute concession au sensationnalisme, à la désinformation et à la complaisance pour l'irrationnel. Et entend promouvoir la science contre ceux qui nient ses valeurs culturelles, la détournent vers des oeuvres malfaisantes ou encore usent de son nom pour couvrir des entreprises charlatanesques. (note de moi: Admirons la "science" infuse de ceux qui prétendent "traquer" la désinformation: y'a du boulot!!)

[ici, c'est Arte qui est pointé du doigt à travers un reportage, dont la diffusion est jugée "regrettable car son statut de chaîne culturelle lui confère, de fait, un crédit particulier, voire l’identifie comme une source de référence".
Ce qui est quand même assez comique, quand on sait que la chaîne "culturelle" s'est fait une spécialité de diffuser pendant la Semaine Sainte les délires blasphématoires de Mordillat/Prieur.
]

Mystification donc. Le linceul n'en reste pas moins une relique, ce qui n'ôte rien ni à la symbolique, ni à la ferveur du déplacement papal!
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L'auteur de l'article n'a pas dû lire le discours du saint-Père, qui lui, n'a pas voulu s'immiscer dans le "débat" scientifique, puisqu'au mot "relique", il a substitué "icône", qui a une toute autre portée spirituelle, laissant chacun libre de croire ou non en l'authenticité du Saint-Suaire. Même s'il est permis de deviner sa conviction personnelle.

Lettre ouverte de George Weigel à Hans Küng Dossier Küng (II)