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Ratzinger face aux monstres

Carlota a traduit un article d'un philosophe espagnol connu, Gabriel Abiac (24/3/2010)

Je ne suis pas une « fan » de Gabriel Albiac (*), un philosophe espagnol qui n’a rien du catho-tradi. Il a pourtant fait paraître un bel article sur le journal ABC (quotidien espagnol plutôt conservateur quoique les lignes de partage d’opinion des journaux, comme en France, soient désormais beaucoup moins tranchées qu’autrefois. Tirage à peu près équivalent à celui du Monde en France), Certaines de ses phrases sont de véritables leçons de morale à certains grands qui nous gouvernent, et à d’autres qui se croient au dessus des lois. Il en devient même un héraut du Saint Père dans la cour des Gentils.

Ratzinger face aux montres par Gabriel Albiac – 24 mars 2010 –
Original ici
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« Nous avons refusé ce que voulait en nous la bête : Malraux à propos de la grandeur humaine ; celle de l’animal qui se sait à un millimètre du monstre et qui combat désespérément contre lui-même pour ne pas l’être. M’est revenu à l’esprit Malraux alors que je lisais le dernier texte d’un grands intellectuels européens actuels et l’un de ses rares sages : Joseph Ratzinger, aujourd’hui Pape, mais aussi grand en ce qui concerne la théologie depuis ses années de professorat à la fin des années 50. Il n’est pas nécessaire de croire en quelque chose si ce n’est en l’intelligence pour apprécier l’élégance conceptuelle de Benoît XVI. Il se peut que cela soit même plus simple.
La Lette Pastorale aux catholiques d’Irlande du 19 mars est un traité sur les monstres. Plein de sagesse. Et de pitié.. Toutes les deux sont une même chose. Et qui ne se rappelle pas la peine de la créature de Frankenstein dans le film prodigieux de James Whale: «Je suis méchant parce que je souffre», je suis un monstre parce que je souffre, je suis un monstre parce que je suis humain ?
Les monstres sont le signe de ce qu’il y a de plus enfoui dans l’âme humaine: « monstre des songes » comme dit Malraux en parlant de l’âme. Signe de ce qu’il y a de plus obscur. Mais aussi, de ce qui nous fait le plus horreur parce que nous savons nous le connaissons comme coût ténébreux de l’être humain. Le monstre est la partie de notre humanité que personne ne supporte de voir. Et face à laquelle nous affirmons notre surprise, car il nous est trop dure d’affronter la honte qui nous guette d’avoir renoncé livrer une âpre bataille.
L’abus sexuel sur mineurs, - au sujet autour duquel dans l’Église d’Irlande tourne la douloureuse lettre de Ratzinger, est l’une des horreurs les plus universelles qui nichent dans l’inconscient humain. Nous savons depuis Freud jusqu’à quel point ce cauchemar accompagne, - comme menace ou comme réalité, les terreurs enfantines. Et, depuis Freud, nous savons combien il est difficile de séparer en elles cauchemar et veille. Et de la même façon les incurables amputations qu’elles laissent dans l’âme de l’adulte, que l’adulte en soit ou non conscient. Le vieux maître Althusser décrivait d’une manière élégiaque, il y a un demi-siècle, cette douleur sans soin de l’homme, ce « survivant de l’unique guerre sans mémoire, ni mémoriaux » , qui seulement vit de toutes les blessures, auxquelles tant bien que mal il arrive à résister.

Benoît XVI qui en tant que Pape écrit au troupeau dont il a la charge, le fait avec tout le savoir de Ratzinger. Il ne cache pas le pire : que la rupture psychique que l’agression infantile impose ne guérira jamais à l’état adulte. Et que la consolation spirituelle n’exempte pas de la justice. « Vous avez trahi, - interpelle-t-il les religieux violeurs, la confiance déposée en vous par les jeunes innocents et par leurs parents. Vous devez répondre de cela devant Dieu Tout Puisant et devant les tribunaux dûment constitués ». Dieu, doit nécessairement penser un Vicaire du Christ, pardonne. La loi des hommes, non. C’est ainsi qu’il faut que cela soit, ce sont les règles du jeu qui distinguent le divin de l’humain. Les transgresser c’est rendre pire encore le mal qui a été fait : « Il a eu une tendance, - regrette le Souverain Pontife, motivée par de bonnes intentions, mais erronée, d’éviter les enquêtes pénales de situations canoniquement irrégulières». La loi doit primer maintenant, et l’Église se charge du poids de ne pas avoir veillé suffisamment sur ses pasteurs. C’est dur d’accepter cette faute. Et c’est admirable qu’un Pape ose le dire: «Nous tous souffrons des conséquences des péchés de nos frères qui ont trahi une obligation sacrée et n’ont pas affronté d’une façon juste et responsable les plaintes concernant les abus ».
Et dans la prise en charge de cette faute collective, Benoît XVI persévère dans la rigueur théologique de Ratzinger. Admirable. Y compris pour celui qui ne croit pas. Pour lui, surtout.

Note de Carlota

(*) Gabriel Albiac (référence: wikipedia en espagnol )

Né en 1950 à Utiel (région de Valence – Levant – Espagne) est un philosophe et écrivain espagnol qui collabore également à différents médias écrits et parlés. Professeur puis titulaire d’une chaire de philosophie à l’Université Complutense de Madrid, il a reçu en 1988 le Prix National de Littérature – catégorie essais.

D’abord proches des penseurs marxistes comme Louis Althusser (dont il fut l’élève), Michel Foucault et Toni Negri, il se déclare désormais comme un « communiste mort » considérant que le vrai socialisme cache en fait un totalitarisme qu’il rejette. Admirant profondément la culture hébraïque, c’est un ardent défenseur de la légitimité de l’existence de l’État d’Israël (et de sa politique de défense) qu’il considère comme l’unique démocratie du Proche et Moyen Orient.

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