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Benoît XVI à Malte

Entretien avec son secrétaire particulier maltais, Mgr Xuereb, sur l'OR. Traduction (5/5/2005)

Depuis septembre 2007, Mgr. Alfred Xuereb (biographie en anglais dans le Malta Star), maltais, jusqu'alors en service à la Préfecture de la Maison Pontificale dirigée par Mgr James Harvey, est devenu le second secrétaire personnel du Pape Benoît XVI.

Il a accompagné Benoît XVI à Malte, et vient d'accorder un entretien à l'Osservatore Romano du 5 mai.
(Source: Raffaella)
Ma traduction:

Mgr Xuereb raconte la rencontre poignante avec les victimes d'abus à Malte.
Benoît XVI a aussi apprécié leur courage.

Une conversation avec Mgr Alfred Xuereb, secrétaire particulier du pape

Paul, Benoît et le cadeau des maltais

Les mains du pape ont serré celles des victimes d'abus

Gianluca Biccini
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"Des nuages sombres, puis brillants descendent pour toi des gouttes de cristal".
Une sagesse antique, que celle du peuple maltais, habitué à lire des signes d'espoir même dans les difficultés. C'est arrivé avec le naufrage de saint Paul, qui s'est transformée en une occasion providentielle pour l'évangélisation du petit archipel; et d'une certaine façon, cest arrivé à nouveau avec le voyage de Benoît XVI les 17 et 18 avril dernier, pour célébrer le 1950e anniversaire l'accostage de l'Apôtre sur l'île.
Parole de quelqu'un qui connaît aussi bien Malte - où il est né il y a cinquante ans et où il fut ordonné en 1984 - et le Pape, dont il est affecté au secrétariat prticulier. Et de ce point de vue privilégié, Mgr Alfred Xuereb offre à notre journal une relecture de la visite du Pape; une visite qui s'ouvrait sous «le sombre nuage» causé par le volcan d'Islande, qui a paralysé le ciel européen, et sous celui des attaques des médias pour des cas d'abus sexuels par des membres du clergé. Mais qui s'est achevé avec les "gouttes de cristal" d'un succès qui est allé au-delà des prévisions les plus optimistes. Timide et réservé, tel que requis par l'office qu'il recouvre depuis Septembre 2007, dans cette interview, Mgr Xuereb raconte les coulisses du quatorzième voyage international de Benoît XVI.

OR: À l'audience générale du mercredi 21 avril le Pape a comparé l'accueil réservé par Malte avec l'expérience que fit 1950 années auparavant Saint-Paul après le naufrage. Vous qui l'avez accompagné de près, pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé?

Mgr Xuareb: L'hospitalité chaleureuse que Paul a reçue des habitants de l'île est décrite dans le chapitre 28 des Actes des Apôtres. Dans les deux premiers versets, il est dit que "une fois sain et sauf", Paul et les siens ont su que l'île s'appelait Malte et que "les indigènes" traitaient les nouveaux arrivants "avec une humanité rare". Cette belle phrase est très importante pour les Maltais. Et peut-être que le texte en langue allemande des Actes est encore plus éloquente quand il explique que les maltais ont témoigné une amitié et une cordialité peu commune en l'accueillantaccueillir: ungewönliche freundlichkeit. Nous savons que Paul avait fait de nombreux voyages avec Luc au cours desquels ils avaient à plusieurs reprises expérimenté l'accueil des populations visitées. Mais la réception de Malte doit avoir été spéciale au point de les inciter à laisser un témoignage écrit de cette expérience. Pour ce que j'ai pu constater personnellement, je pense que nous pouvons dire que la même chaleur a été réservée le pape: en commençant par les paroles de bienvenue du Président de la République, M. George Abela, jusqu'au chant des cinq mille enfants sur la place devant le palais présidentiel à La Valette, qui lui ont souhaité un bon anniversaire en maltais, anglais et allemand.

Benoît XVI s'y attendait-il? Et vous, personnellement, étant donné que vous connaissez vos compatriotes, étiez-vous optimiste à ce sujet?

Le Pape a plusieurs fois parlé en privé de cette belle rencontre avec la population de Malte: la foule enthousiaste qui l'a rendu heureux, le surprenant par sa chaleur. J'étais confiant dans la réussite du voyage parce que je savais qu'il y avait eu un grand effort d'organisation, tant ici au Vatican, de la part des services compétents, sous la direction du secrétaire d'État, qu'à Malte par l'Eglise et le gouvernement. La Nonciature apostolique à Malte a coordonné le tout avec beaucoup de soin, abordant et résolvant les différents problèmes qui se présentaient. Personnellement, je dois admettre toutefois que je craignais que les attaques médiatiques injustifiées qui s'étaient déchaînées contre la personne du pape ne puissent d'une certaine façon brouiller son message. Et puis, vivant dans une ère technologique, mon inquiètude était aussi que la population maltaise préfère le confort de la maison et suive les événements à la télévision plutôt que de descendre dans la rue pour l'accueillir. Au contraire, de ce point de vue, le voyage a été un grand succès parce qu'il y a eu une réaction opposée: le long du trajet de la papamobile il y n'avait pas une rue qui ne fût remplie d'hommes, femmes, jeunes et enfants en fête; tous agitaient des drapeaux aux couleurs du Vatican et de la République de Malte; les fanfares jouaient sur les places devant la quarantaine d'églises rencontrés le long de la route. Plusieurs paroisses ont exposé la statue du saint patron, comme une expression de bienvenue, en invoquant la bénédiction du Pape.

Vous avez été l'un des rares témoins de la rencontre du Pape avec les victimes d'abus. Pouvez-vous décrire l'atmosphère?

Ce fut un moment très touchant et d'une grâce spéciale. Dans la chapelle de la nonciature, pour commencer, l'évêque de Gozo, Mgr Mario Grech, a introduit la rencontre par une courte prière dans une atmosphère de grand recueillement qui me ramène par la pensée à l'expérience de la Pentecôte, quand l'Esprit descendit sur les Apôtres réunis au Cénacle avec Marie. Par dessus-tout, la paternité singulière de Benoît XVI a émergé. Il suffit de rappeler que le porte-parole des victimes a déclaré aux journalistes qui l'ont interrogé: "Lorsque j'ai rencontré le Pape, j'ai réalisé que j'avais devant moi une personne très différente de ce qui est décrit par les médias".
Il a été touché par le fait que le Pape était visiblement ému et sincèrement désolé pour ce qui leur était arrivé. Benoît XVI a aussi apprécié leur courage à dénoncer ceux qui ont commis les abus. En outre, les victimes ont été frappées par le fait que le Pape ait prit leurs mains dans les siennes. Ce moment me rappelle le geste miséricordieux de Jésus, qui touchait et guérissait. Cette fois aussi, nous avons eu une guérison, peut-être pas physique mais certainement spirituelle et psychologique. Tant et si bien que l'un d'eux a affirmé: "Maintenant, c'est un chapitre clos pour moi. Maintenant, je peux recommencer avec une confiance renouvelée dans l'Église et dans les membres de l'Église qui sont fidèles à leur ministère sacerdotal". La rencontre a duré environ une demi-heure, mais les personnes présentes ont eu le sentiment que s'ils avaient parlé plus longuement, le Pape aurait pris tout son temps pour les écouter. Et ce, malgré qu'il était fatigué et très en retard sur l'horaire prévu.

Alors, quand il prit congé, les présents nous ont demandé à plusieurs reprises, avec insistance, leurs vifs remerciements au Pape. Et on pouvait lire beaucoup d'émotion sur leur visage. Je voudrais ajouter que cette réunion avait été bien préparé par les évêques de Malte et leurs collaborateurs. L'archevêque, Mgr Paul Cremona, avait rencontré les victimes à son domicile privé. Cette réunion avait duré plus de deux heures, dans un climat d'émotion particulière.

Au-delà du Protocole et des discours officiles, pouvez-vous souligner quelques détails de la visite du Pape?

Plusieurs fois, avant le voyage à Malte, Benoît XVI avait exprimé le désir de visiter un site Paulinien. C'est pourquoi, lorsque seul, et à genoux, il put prier dans le lieu qui était la maison de l'Apôtre au cours des trois mois de son séjour à Malte, c'est comme si il avait pu s'immerger, plonger dans cette réalité et rencontrer personnellement le grand évangélisateur des Gentils. C'est comme si il avait pu toucher de la main l'apôtre dont il avait fait la connaissance à travers ses lettres.

Et puis il y a eu la messe de dimanche, à Floriana.

Ce fut le cœur du pèlerinage. Je pense que lors de la célébration de l'Eucharistie, le Pape a été en mesure de percevoir la foi mûre des présents, exprimée à travers une dévotion sincère, qui n'était pas seulement extérieure: les 50.000 personnes sur la place des Greniers ont écouté ses paroles avec attention et participé de façon consciente à la la liturgie eucharistique. Au cours de l'action de grâces après la communion, il y avait un tel silence qu'on pouvait entendre le chant des oiseaux dans les arbres environnants. De cette expérience d'une Eglise vivante, qui célèbre la victoire du Christ ressuscité sur le péché et la mort, le peuple de Malte est reparti, renforcé dans la foi.

L'exact opposé du bruit assourdissant des jeunes au port de La Valette?

Oui, vous le savez, les jeunes sont comme ça. Mais il était clair qu'il s'agissait d'une joie intérieure. Tant au cours de la navigation sur le catamaran que sur le quai où le podium avait été installé, Benoît XVI a fait l'expérience de la fraîcheur de cette Eglise qui continue à croître, notamment avec les nouvelles générations qui veulent connaître le Christ. Ceci se reflète également dans les communautés paroissiales, où les jeunes participent activement aux célébrations et à des sessions de formation. Beaucoup de touristes de retour de Malte, s'étonnent que, tandis que dans beaucoup d'églises en Europe on voit surtout des personnes âgées, dans les paroisses de l'archipel, il est normal de trouver beaucoup de garçons et de filles.

Les Maltais semblent être un mélange original de rigueur britannique et de "chaleur" (solarità) méditerranéenne. Vous reconnaissez-vous dans cette définition?

Il me semble que les Maltais sont d'une pâte bien différente. Malgré un demi-siècle de domination par l'Empire britannique, nous autres maltais n'avons pas appris à à observer la ponctualité, ni la précision typique des anglais; au contraire nous sommes beaucoup plus bruyants et spontanés, pour ne pas dire un peu trop insoucieux des formalités et du protocole. Mais en revanche, comme vous le dites, nous sommes un peuple radieux (solare). Et cela a été également remarqué par certains membres de suite du pape, qui ont apprécié la fraîcheur des visages et la chaleur sincère.

Vous êtes l'un des nombreux prêtres maltais qui vivent loin de leur patrie.

Depuis que j'ai le privilège de vivre dans l'appartement pontifical, le Pape Benoît XVI a témoigné à maintes reprises sa surprise et sa satisfaction que tant le nombre de prêtres et de religieuses maltaises soint présents dans différentes parties du monde. Ce sont principalement les évêques visite ad limina qui l'en ont informé. Ce n'est cependant pas seulement une question de générosité de notre part, dont évidemment nous sommes fiers, mais cela a également un impact positif sur la communauté ecclésiale locale. Elle est resté une Eglise vivante car missionnaire; quand ces missionnaires rendent visite à leur famille à Malte, ils organisent des rencontres ou des messes, et racontent leur expérience. Et la population se sent impliquée dans la mission pastorale: non seulement pour recueillir des fonds et des vivres qui sont ensuite envoyés à ceux qui en ont besoin grâce à "leur" missionnaire, mais les gens suivent les projets , il se rendentsur place pour donner un coup de main. Justement pendant le voyage du pape, j'ai découvert avec plaisir qu'l y a de plus en plus de groupes, surtout chez les jeunes qui vont avec leurs prêtres faire des séjours avec une expériencr missionnaires en Inde, au Brésil, len Albanie, en Éthiopie, au Guatemala, au Pérou, et d'autres parties du monde où oeuvrent nos missionnaires. Le Saint-Père, comme nous le savons, en a rencontré plus de deux cents dans l'église de St Paul à Rabat, le soir de son arrivée à Malte.

A quoi est dûe cette générosité?

Normalement, les missionnaires maltais sont capables de s'adapter et de bien s'intègrer dans l'environnement où ils sont. Pour eux, le sensus Ecclesiae compte beucoup, c'est pourquoi travailler pour l'Église en Australie ou en Afrique ou au Brésil, c'est comme travailler pour l'Eglise de Malte. Je viens du diocèse de Gozo: vingt-sept mille habitants, quinze paroisses, une centaine de prêtres. Au cours de leur formation, les séminaristes sont envoyés faire une expérience de travail à l'étranger, ils interrompent leurs études pendant une année entière. J'ai vécu cette année intermédiaire en travaillant dans un hôpital en Allemagne. Il est également prévu que, après l'ordination sacerdotale, ils consacrent au moins deux ans de ministère hors de Malte pour faire l'expérience de l'universalité de l'Eglise.

Et vous avez été envoyé à Rome?

En réalité, comme jeune prêtre, je voulais être missionnaire, peut-être au Brésil, parce que mon évêque d'alors, Mgr Nikol Joseph Cauchi, maintenant à la retraite, nous avait encouragés à former au séminaire un groupe missionnaire dont j'étais le secrétaire. Je voulais partir dans un territoire de mission, attiré par le beau témoignage de prêtres de mon diocèse qui travaillaient à l'étranger depuis des années. Ce n'est que lorsque j'ai exprimé mon désir que l'évêque m'a dit qu'il ne voulait pas me détourner de cette bonne intention, mais qu'avant, il serait utile de m'endurcir (farmi le ossa) en Europe, parce que l'expérience missionnaire bien que fascinante est tout aussi difficile. Ainsi, dans deux paroisses romaines, j'ai fait de riches expérience pastorales, où j'ai appris à exercer mon ministère, offrant mon assistance dans la catéchèse des adolescents et des adultes, ou bien la soupe populaire où, avec les immigrants de langue arabe, j'essayais de les faire se sentir acceptés avec des phrases de bienvenue en maltais, puisque les idiomes sont similaires. Par la suite, la Providence m'a conduit sur une «nouvelle route».

Le droit maltais ne légalise ni l'avortement ni le divorce. Estimez-vous que ce modèle puisse être exporté ou bien que tôt ou tard Malte aussi finira par s'aligner sur le reste du monde?

De nombreux pays, particulièrement en Europe, considèrent que dans la législation maltaise, il y a un déficit de démocratie. Mais ici, la loi reflète les sentiments de la majorité de la population qui adhère à l'Évangile plutôt qu'à la mentalité du monde sécularisé d'aujourd'hui. Et de cette façon, les maltais, pour utiliser l'allégorie de l'Evangile, constituent cette lumière qui est placée non pas sous le lit, mais sur le candélabre; une cité sur la montagne, qui est là comme un témoignage pour tous ceux qui veulent l'accueillir. Evidemment, si les choses devaient changer, je considérerais qu'il s'agirait d'un pas en arrière, certainement pas d'un progrès.

Carrefour entre l'Europe et l'Afrique du Nord, l'archipel est souvent un passage obligatoire pour les désespérés à la recherche de nouvelles possibilités. Mais les politiques maltaises en matière d'immigration attirent de nombreuses critiques. Peuvez-vous nous aider à comprendre comment les choses sont vraiment?

Je crois qu'il s'agit d'une fausse impression. Les faits démontrent le contraire: depuis 2002, quand les débarquements d'Afrique du Nord ont commencé, au moins treize mille immigrants ont été reçus. C'est énorme pour une population de seulement 443 000 personnes qui pourtant détient le record d'Europe, et la troisième place dans le monde pour la densité de population. Aujourd'hui, les immigrés sont environ 4.000, accueillis dans de nombreuses structures, assistés d'un côté par le gouvernement, qui assure une petite aide économique, et renforce les lois contre l'exploitation, traitant les immigrants comme les employés maltais; et de l'autre par l'Eglise, qui a mis en place 14 maisons d'accueil et leur offre alimentation, vêtements, et essaie de les aider à obtenir des papiers ou un emploi. En outre, ils n'ont pas l'intention de rester à Malte: leur destination est l'Europe continentale pour être réunis avec leur famille et les amis qui les ont précédés.

Concluons en revenant au voyage. Avez-vous eu des échos de la part des maltais?

A mon retour au Vatican, j'ai été inondés d'e-mail, SMS et d'appels téléphoniques de personnes ayant été particulièrement touchées par les expressions douces et paternelles de Benoît XVI. Ils ont écrit pour exprimer leur gratitude au Pape. L'un de ces messages disait: «Il nous est arrivé la même chose qu'aux Apôtres lorsque Jésus est monté au ciel: le pape est parti, mais nous parlons encore de lui avec un cœur plein de joie." Un autre a dit: "Ça m'a déchiré le coeur de le voir partir, mais le pape a laissé derrière lui une effluve de sainteté."

Le Pape a dit quelque chose à ce sujet?

Il reparlait volontiers de l'expérience enthousiasmante vécue à Malte, et quand je lui ai confié la gratitude infinie pour le grand don qu'il nous a fait en choisissant de visiter Malte, parmi les nombreuses invitations qu'il reçoit chaque jour, il a répondu: "Le cadeau, c'est moi qui l'ai reçu!".
Il m'est resté dans le cœur le sentiment que, de même que saint Paul, après avoir connu une furieuse tempête, repartit de l'île encouragé par la bonté «inhabituelle» des habitants à qui il avait offert le don de la foi chrétienne, cela s'est produit aussi pour notre bien-aimé Pape Benoît XVI.

(© L'Osservatore Romano - 5 mai 2010)

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