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Fatima et ses secrets

Le secret de Fatima: l'apostasie dans l'Eglise?Autour d'un article paru sur Il Foglio (22/5/2010)

Sur ce sujet

 


Les propos du Saint-Père dans l'avion vers le Portugal ont fait couler beaucoup d'encre, et la grande majorité des journalistes n'en ont voulu retenir qu'un "mea culpa" de l'Eglise pour les crimes de pédophilie. Dans un réflexe d'auto-absolution, ils se sont empressés de se défausser de toute responsabilité dans l'exagération des scandales, et même de se féliciter de l'excellence de leur "travail" d'enquête, qui a permis à la vérité d'éclater enfin - tout en démolissant l'Eglise et sa hiérarchie, uniques coupables.
Beaucoup de catholiques, surtout progressistes, se sont à leur tour hâtés de répéter (ce que le Saint-Père a vraiment dit!) que les souffrances de l'Eglise étaient en son sein, pour affirmer ensuite que ceux qui avaient vu un complot contre l'Eglise dans les attaques croisées contre elle et la personne du Pape étaient au mieux des ignorants, au pire de dangereux extrêmistes. La recherche d'arguments (comme par exemple ceux de Massimo Introvigne, et sa "panique morale") était même devenue aussi déplacée que suspecte.

Une autre analyse, issue de milieux mieux informés, a tourné autour des "secrets" de Fatima, en particulier le troisième, voire un hypothétique quatrième.
Il s'en est suivi une mini-polémique, spécialement italienne, entre "fatimistes", allant jusqu'à impliquer Messori, et même le Cardinal Bertone, sur le thème: les révélations de 2000 n'étaient pas exactes... et donc le préfet de la CDF d'alors avait menti.
Selon eux, le fameux "secret", contrairement à ce qui avait été affirmé (et là, on retrouve comme par hasard le cardinal Sodano, co-responsable en 2000 avec le cardinal Ratzinger de la présentation du troisième secret!) ne concernait pas des éléments du passé, mais bel et bien du futur.

Commençons par souligner, et c'est très important, que les "secrets" de Fatima ne consistent pas en révélations au sens sensationnaliste du terme, mais en interprétations d'un langage qui reste en partie à décoder, et donc qu'"aucun grand mystère n'est révélé; le voile de l'avenir n'est pas déchiré" (selon le commentaire théologique du cardinal Ratzinger, en 2000)

Relisant attentivement ce même commentaire théologique, on lit:
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Nous devons affirmer avec le Cardinal Sodano: «Les situations auxquelles fait référence la troisième partie du "secret" de Fatima semblent désormais appartenir au passé». Dans la mesure où des événements particuliers sont représentés, ils appartiennent désormais au passé. Ceux qui attendaient des révélations apocalyptiques excitantes sur la fin du monde et sur le cours futur de l'histoire seront déçus. Fatima n'offre pas de telles satisfactions à notre curiosité, comme du reste en général la foi chrétienne ne veut pas et ne peut pas être une pâture pour notre curiosité

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Comme il est exclu que le cardinal Ratzinger ait menti, et qu'il est par ailleurs évident que sa tournure d'esprit est éminemment rationnelle, qu'il me soit donc permis d'émettre simplement l'hypothèse (pour moi certitude) que le Saint-Père a très naturellement évolué dans son interprétation des révélations. Il a en effet dit aux journalistes qu'"elles indiquent des réalités du futur de l'Eglise qui se développent et se révèlent peu à peu. Autrement dit, il est vrai qu'au-delà du temps indiqué dans la vision, on évoque, on voit, la nécessité d'une passion de l'Eglise, qui naturellement se reflète dans la personne du Pape, mais le Pape est dans l'église et donc ce sont des souffrances de l'Eglise qui sont annoncées".

Il y a eu quelques articles très intéressants dans la presse italienne (nous en reparlerons peut-être) que je n'ai pas traduits, car ils me paraissaient un peu trop polémiques sur le moment.

Voici un texte qui me paraît une bonne synthèse, et qui ne cède pas trop à la "diétrologie" (je ne trouve pas en français de mot satisfaisant pour traduire le très éloquent terme italien dietrologia).
Le troisième "secret" concernerait l'apostasie dans l'Eglise.
La prise de conscience progressive par notre Pape de cette lecture permettrait alors de jeter un oeil différent sur la fameuse méditation de la Via Crucis de 2005, puis la ligne de ce Pontificat dans son ensemble. Par exemple, pourquoi une année sacerdotale. Et on peut trouver troublant que la tempête se soit déchaînée justement durant cette année. Et aussi, la bouleversante prière prononcée devant la Vierge de Fatima, de consécration des prêtres au Coeur Immaculé de Marie:

L'auteur, Francesco Agnoli, écrit dans Il Foglio, il contribue à un blog catholique "Libertà e personna" qui me paraît, en première lecture contenir beaucoup de textes dignes d'intérêt, et, pourquoi pas, de traduction.
Un lecteur avait déjà traduit pour ce site un article de lui intitulé La pédophilie est un cadeau de mai 68.

Le secret de Fatima: l'apostasie dans l'Eglise?
http://www.libertaepersona.org/..
Francesco Agnoli

Fatima est un endroit qui m'est cher: un lieu de prière où l'on respire un air particulier et où l'on peut ressentir la présence du mystère. Ici, en 1917, la Vierge est apparue à trois pastoureaux alors que le pays était sous un gouvernement farouchement ennemi du Christ. Quelques mois plus tard, en Russie, allait éclater la révolution bolchévique.
Parmi les choses que la Vierge prédit aux trois voyants il y avait aussi cela: la Russie répandra ses erreurs à travers le monde. Pour Lucie, la Russie était une dame qu'il fallait convertir; pour le monde, un pays sans intérêt, marginal, dans lequel tout semblait s'écouler lentement depuis des siècles, sans rien de nouveau. Mais la Vierge ne s'était pas trompée ...
En plus de parler de la Russie, du rosaire, de l'enfer, elle délivra un troisième secret, écrit par Lucie en 1944 et confié en 1957 au Saint-Office. Pie XII ne le lut pas. Le premier pape à le faire fut Jean XXIII, mais il refusa de le révéler, tout comme Paul VI, qui le lut en 1965. Depuis lors, beaucoup se sont demandés: pourquoi ce que Vierge a révélé, la hiérarchie l'a-t-elle caché?
D'où une hypothèse dominante: que le secret concernait une crise imminente dans l'Eglise, l'apostasie prédite par saint Paul. Comme on le sait, le secret aurait dû être révélé après 1960, car alors, il aurait été plus clair. Le Cardinal Silvio Oddi, qui avait été secrétaire de Jean XXIII, lui dit un jour: «Très Saint Père, il y a une chose que je ne peux pas vous pardonner". "Quoi?" répondit le pape. "D'avoir tenu le monde en attente depuis tant d'années et de n'avoir pas révélé en 1960, le secret que tout le monde attendait". Le pape répondit à deux reprises: "Ne m'en parlez pas".

Pourquoi? L'idée que se faisait alors Oddi, comme beaucoup d'autres importants dirigeants de la Curie, dont le cardinal Ottaviani, c'était que le secret concernait justement une grande crise dans l'Église.
Je pense, dit Oddi, que le secret «prédisait quelque chose de grave que l'Eglise avait faite ... Peut-être le secret dit-il que dans les années soixante, malgré les meilleures intentions, l'Eglise ferait quelque chose dont les conséquences seraient très douloureuses ...". Mais "s'il en était vraiment ainsi - conclut-il, ce secret est déjà connu, parce que la crise de l'Eglise est sous les yeux de tous" (30 jours, n ° 4, 1991).

À ce stade, nous pouvons faire quelques hypothèses: le pape Jean XXIII était le Pape de l'optimisme. Il ne voulait pas entendre parler les "prophètes de malheur" et il avait imaginé à plusieurs reprises que la modernité verrait un «nouveau printemps» de l'Église grâce au Concile. On peut comprendre que le troisième secret, si c'est celui prévu par Oddi, n'était pas pour lui faire plaisir. La même chose peut être dite de Paul VI, qui déclara toutefois en 1969: «L'Eglise se trouve dans une heure d'angoisse et d'auto-critique; on pourrait même dire d'auto-destruction ...".

Pie X, dans l'encyclique Pascendi Dominici Gregis , dix ans avant Fatima, n'avait-il pas dit que les ennemis de l'Eglise "se cachent dans le sein même de l'Eglise"? Et Pie XII n'avait-il pas dit craindre les «novateurs» qui voulaient démolire la liturgie et la théologie bimillénaire de l'Eglise?

A la mort de Paul VI, Albino Luciani est devenu pape, sous le nom de Jean Paul 1er.
Le patriarche de Venise avait eu une conversation avec Lucie, à la demande expresse de cette dernière, le 11 Juillet 1977. Après cette rencontre, comme nous le savons par de nombreux témoignages, Luciani est sorti bouleversé, changé. Le Pape du catéchisme aux enfants et d'une éventuelle réforme de l'IOR (Istituto per le Opere Religiose, la "banque du Vatican", ndt) de Marcinkus puis de De Bonis, décéda après 33 jours de pontificat, dans des circonstances pas tout à fait claires.

Cela nous amène à 2000, quand le troisième secret est «révélé». Le Cardinal Sodano explique qu'il se réfèrerait à des événements ayant déjà eu lieu, conclus, passés. Jean-Paul II affirme que la prophétie de la Vierge concernerait son attentat de 1981. Pourtant, quelque chose ne colle pas: le texte publié par le Vatican parle d'un pape tué, pas blessé. Et puis, quel rapport y aurait-il entre le requête de la Vierge de ne révéler le secret qu'après 1960, et les événements de 1981? Quelle résonance a eu dans l'histoire de l'Eglise, ce fait isolé? Et pourquoi attendre, après 1981, 19 autres années?

Enfin est arrivée la révélation de Benoît XVI au Portugal: le Pape a lié le secret de Fatima à l'actuelle "passion de l'Eglise", insistant sur le fait que les pires ennemis de l'Eglise sont "en son intérieur". Il a fait ensuite allusion à la pédophilie, mais quel que soit le secret, on ne peut que reconnaître que celle-ci n'est pas une cause mais un effet: de la perte de la foi, de la dévotion et du sens de la liturgie, qui infestent l'Église des années soixante. Les années du Concile et de l'après-Concile.

Martin Mosebach, auteur d'un texte magnifique, L’eresia dell’informe (ed. Cantagalli) pour défendre la liturgie de toujours, a déclaré: "Nous devons nous demander comment, dans des collèges catholiques, ont pu survenir des crimes sexuels commis par des prêtres dans les années suivant immédiatement le Concile Vatican II. On ne peut alors qu'en arriver à la conclusion amère que l'expérience de l'"aggiornamento", l'adaptation de l'Eglise au monde a massivement échoué. Après ce Concile, la plupart des prêtres se sont débarassés de leur tenue, ont cessé de célébrer la messe quotidienne et de lire leur bréviaire. La théologie post-conciliaire a tout fait pour oublier l'image du prêtre transmise par la tradition".

La voie, alors, n'est pas un Vatican III, comme le voudraient les ennemis de l'intérieur de l'Eglise, toujours "sponsorisés" par des ennemis extérieurs (voir des prêtres comme Kung, Mancuso, Gallo, ou des cardinaux comme Martini, omniprésents dans les médias), mais un Trente II. Pas un aggiornamento, mais un retour aux racines.

Il Foglio, le 20 mai 2010

Martin Mosebach Immigrationnisme et xénophobie (II)