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Ce que pense Ettore Gotti Tedeschi

Le président de l'IOR est dans l'oeil du cyclone. La vaticaniste Angela Ambrogetti l'avait rencontré au printemps dernier, et il parle du Pape, de Caritas in Veritate, et de ce que doit être une économie vraiment chrétienne. (30/9/2010)

La vaticaniste Angela Ambrogetti est une signature assez familière, et appréciée de ces pages...
Elle tient un blog fort intéressant, Il Portone di bronzo .

Elle avait interviewé Ettore Tedeschi au printemps dernier, lui demandant en particulier de commenter l'encyclique sociale.
Aujourd'hui que le banquier de l'IOR est sous les feux de l'actualité, il est intéressant de lire de sa bouche, et en termes simples, ce qu'il pense vraiment. Et ce que pense (probablement) le Saint-Père. Et on comprend que "tout se tient", dans les thèmes récurrents de ses discours, le sens du don, le respect de la vie, le développement intégral de la personne, l'urgence éducative, le relativisme....

Mais d'abord, un résumé des épisodes précédents:
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1. Septembre 2009: Ettore Gotti Tedeschi, représentant en Italie du groupe bancaire espagnol Santander, a été nommé jeudi 24 septembre 2009 président de l’Institut des Œuvres de religion (IOR), dit « banque du Vatican ».
Il prend la succession d’Angelo Caloia, qui dirigeait l’IOR depuis dix-neuf ans. Âgé de 64 ans, éditorialiste à L’Osservatore Romano et enseignant l’éthique de la finance à l’université catholique de Milan, Ettore Gotti Tedeschi est un proche du cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d’État.
Ancien consultant chez McKinsey, il aurait été l’un des experts consultés par Benoît XVI pour la rédaction de l’encyclique Caritas in veritate. (Source: Frédéric Mounier, La Croix)

2. 21 septembre 2010: La justice italienne soupçonne l'Institut des œuvres religieuses (IOR), la banque du Vatican, d'être impliqué dans des opérations de blanchiment d'argent et le parquet de Rome a ouvert une enquête, écrit mardi le quotidien La Repubblica. L'IOR, qui gère les comptes des ordres religieux et des associations catholiques, est une structure bénéficiant de l'extraterritorialité accordée à l'Etat pontifical, donc non tenue de respecter les normes financières en vigueur pour les établissements italiens. (Le Monde.fr !!!)
-> Voir aussi: L'IOR sous enquête: la note envoyée au Pape?

3. 23 septembre: Le Père Federico Lombardi envoie une lettre au Financial Times, dont est parti l'attaque, pour défendre Gotti Tedeschi (L'IOR sous enquête (2))

4. 28 septembre:
M. Gotti Tedeschi, accompagné de son épouse, a été reçu à l'issue de l'Angélus que Benoît XVI a célébré à Castel Gandolfo, a rapporté l'agence Ansa, précisant que le banquier a présenté au souverain pontife son livre "Argent et paradis. Les catholiques et l'économie globale".
"C'est un signe évident d'estime et de confiance. La rencontre devant de nombreux témoins a été une manière claire de souligner publiquement la proximité et le soutien du pape au banquier choisi il y a un an pour diriger l'IOR vers un chemin de transparence totale", ont déclaré à Ansa des sources vaticanes (Source: La Croix)

Ettore Gotti Tedeschi: voici sa pensée


(Source)
Angela Ambrogetti
30/09/2010
Ma traduction.
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Au printemps , j'ai rencontré dans son bureau de l' IOR le professeur Ettore Gotti Tedeschi . Nous avons parlé de Caritas in veritate , et la conversation est devenue une interviewe publiée dans le mensuel Inside the Vatican . Il me semble utile aujourd'hui d'en proposer à nouveau des parties au public italien

- Qu'est-ce que l'économie du don , l'économie de communion?
- Les relations économiques entre nous et les autres sont régies par des lois . Le Pape parle beaucoup dans l'encyclique d'exigence de répartition de la richesse . Il s'agit d'un Pape qui n'est peut-être pas un économiste, mais qui est tellement intelligent et préparé qu'il est familier avec toute la pensée logique , et n'oublions pas que jusqu'à Saint- Thomas l'économie était une branche de la philosophie .
Le rapport avec le prochain est essentiellement régi par des lois économiques auxquelles le Pape se réfère implicitement dans l'encyclique . L'une d'elles est la distribution . Si on ne distribue pas la richesse, on commet une erreur , non pas tant de manque de charité chrétienne et de solidarité, mais de caractère économique , car on ne permet pas à la couche la plus vulnérable de la population l'accès au développement économique et par conséquent de participer à la production , à la demande et à l'épargne. Donc, ne pas distribuer la richesse est une erreur à caracyère économique. Et du reste, c'est l'un des trois objectifs majeurs de l'économie que le Pape fait comprendre dans l'encyclique .

- Quels sont les devoirs de l'économie ?
- Traditionnellement , il sont trois, en commençant par la gestion des ressources naturelles sans les gaspiller. Et c'est une loi économique, et pas une fin morale en soi. Gaspiller les richesses naturelles crée la pauvreté au lieu de la richesse.

- Un principe qui semble très peu partagé dans le monde contemporain
- Certes. Quel est le plus grand bien ? L'homme. Eh bien, nous nous dégradons nous-mêmes , la vie , nous dégradons notre nature , alors imaginez un peu si nous ne maltraitons pas et ne dégradons pas les choses qui nous entourent .

- Et les autres objectifs?
- L'économie doit assurer un développement intégral de l'être humain , un développement pas seulement matériel, parce que l'homme n'est pas seulement matière. Le développement n'est pas seulement lié à la capacité de consommer , le nihilisme consumériste est un mal, ce n'est pas un développement plein . Ensuite, la richesse doit être distribuée, parce qu'on reste riche si tout le monde devient riche . On ne peut pas rester riche si beaucoup, ou trop, sont pauvres . Et ce sont là des lois économiques .
Le don, ensuite, comme le dit le Pape est le bien que nous nous faisons à nous-mêmes . Quand nous nous privons de quelque chose, même d'essentiel, nous prenons conscience du détachement des choses . Et le don, ce n'est pas seulement l'amour pour les autres , mais aussi bien sûr la compréhension que tout ce que nous avons , nous l'avons reçu . Même nos talents, la capacité de devenir riche , de bien s'exprimer , de comprendre les choses , c'est un don.

- Un concept peut-être spécifiquement chrétien . Est-il partagé par des économistes de formation différente?
- Je discute souvent avec des amis banquiers non-chrétiens , non-religieux , avec d'autres visions de la vie , et pourtant, sur ces principes, nous nous trouvons entièrement d'accord . La capacité de comprendre le détachement des choses a pour nous (chrétiens) une signification religieuse , c'est le détachement du "veau d'or" , mais une personne de bon sens comprend que l'attachement aux choses est une erreur parce qu'on finit par idolâtrer les choses et à leur donner une valeur plus élevée que celle qu'elles devraient avoir.

- Qui peut bien comprendre ce principe ?
- Les personnes qui réfléchissent et qui sont humbles et simples , qui n'ont pas peur d'affronter les autres et qui n'ont pas trop de préjugés .

- Au début de 2010, Benoît XVI a fait une référence toute particulière aux économistes, d'une manière inhabituelle : "Mais, grâce à Dieu, notre espérance ne tient pas compte de pronostics improbables, ni même des prévisions économiques, aussi importantes soient-elles. Notre espérance est en Dieu" (ndt: angelus du 3 janvier 2010).
- C'est un passage intellectuel sublime. Le Pape a expliqué que le futur n'est pas lié à l'évolution extrapolable de quelques variables , il y a toujours ce plus , cette variable en plus, qui est la Grâce . Et la Grâce, où se transmet-elle?
Elle ne vient pas de manière miraculeuse et bouleversante , mais plutôt, la Grâce est dans l'homme . C'est pourquoi l'homme modifie ses tendances, ses extrapolations et ses prévisions , avec son génie et son agir quotidien . Beaucoup de prédictions faites par des économistes impliquent des décisions de caractère économique, social , ou politique . Par exemple , en Chine, où on ne doit pas faire plus d'un enfant par couple , on s'est rendu compte au bout de 20 ans d'un vide générationnel impossible à combler . Voilà, la nature de l'homme a des lois non écrites qui s'appliquent à toutes choses .
Le Pape , donc, dans Caritas in Veritate ne dit pas ,"faites une économie bonne pour l'homme, qui soit morale" , mais plutôt "faites de l'économoie, car la vraie est effectivement bonne pour l'homme".

- Un appel qui est dans Caritas in Veritate , mais aussi dans de nombreux textes de Benoît XVI , c'est que nous devons enrichir notre réflexion ?
- Voici un autre thème essentiel: le défi éducatif . Si nous ne sommes pas forts dans la pensée , nous serons faibles dans le comportement , et peu à peu le comportement risque d'influencer aussi la pensée . En somme , si ce n'est pas la pensée qui détermine le comportement , c'est finalement le comportement qui détermine la pensée . C'est un risque typique de notre société . C'est pourquoi le Pape, avec une fréquence incroyable soulève la question de l'urgence éducative , met l'accent sur l'incapacité de nos générations à éduquer et à être éduqués . Un abîme éducatif qui signifie l'effondrement des idées fortes , de la pensée forte , et que le comportement mauvais chassera l'idée bonne et influencera la pensée .

- Nous en arrivons à nouveau au drame intellectuel que le Pape rappelle sans cesse, du relativisme et du nihilisme ?
- Le nihilisme, qui élimine toute référence absolue , toute vérité absolue , a conduit l'homme à penser quil est l'évolution d'un bacille , le résultat du chaos . Et alors, quelle dignité peut avoir un homme qui se sent le résultat de l'évolution d'un bacille? S'il en était ainsi , si l'homme n'était pas le résultat de la volonté de la divinité qui l'a créé , alors ils auraient raison, ceux qui disent que la science peut rendre l'homme heureux , le transformer , en enlevant la douleur et la maladie .

- Dans son discours au Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège , le Pape dit que la crise économique n'est pas encore terminée , d'autres disent le contraire . Mais qu'est-ce qu'une crise économique pour l'homme au-delà des tendances du marché ?
- Techniquement nous sommes encore dans la crise économique parce que, même si nous avons dépassé les seuils de risque à caractère financier que le système explose , toutefois, la gestion de ce risque est transféré à l'économie réelle . Quand les banques financent avec une approche plus prudente les demandes de crédit de l'industrie , les capacités productives s'en ressentent, la production se réduit et donc l'emploi de main-d'oeuvre . Cela signifie que les classes et les catégories les plus vulnérables , les jeunes qui ont juste commencé à travailler, risquent le chômage et ne peuvent donc pas faire de plans pour l'avenir , et le système se bloque . Donc, la crise signifie pour l'homme avoir peur du lendemain , ne pas pouvoirt planifier économiquement sa vie future . Cela bloque les projets, et bloque le travail de l'homme . Et l'homme qui ne travaille pas se perd lui-même, perd ses capacités intellectuelles .
Le monde du développement et de la mondialisation que nous avons bâti, nous devons, avec nos capacités, l'améliorer pour l'homme d'aujourd'hui, sans être utopistes , et nous ne pouvons même pas penser à créer un état éthique comme nous le souhaiterions . Nous sommes le sel de la terre , et nous essayons vraiment de le prouver .

Bienvenue, Monseigneur Burke Chanoine irrégulier