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L’Irak : un exode passé sous silence

Un texte bouleversant de José-Luis Restàn, traduit par Carlota. Une sonnette d'alarme à l'adresse des "cathobuonistes" (9/12/2010)

Pour réfléchir à la naïveté de certains, y compris, et surtout parmi les catholiques, alors que la cathophobie insidieuse vient encore de s'exprimer à Lyon, à travers la censure appliquée à la prière du Je vous salue Marie (cf. 8 décembre, fête de l'Immaculée ) par un journal gratuit, à la laïcité (?) sourcilleuse.
Les "cathobuonistes" réagissent comme réagissent ceux qui, toujours les premiers à dénoncer l'islamophobie et autres prétendues phobies des français, face aux profanations dont sont victimes les lieux de cultes catholiques, n'y voient systématiquement que des actes "isolés" de "déséquilibrés". Cette fois, un blog catholique (qui laisse passer sans censure des propos insultants contre notre religion - voir post n°3 - sans susciter la moindre réaction d'indignation!!!) affirme, sans rire: "Christianophobie? Ou plutôt crasse ignorance"

Tiens donc! C'est bien facile, de tout mettre sur le dos de l'ignorance. Mais les sicaires des dictatures sont rarement des érudits.
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Texte original en espagnol ici: http://www.religionenlibertad.com/articulo.asp?idarticulo=12609
Traduction de Carlota.

L’Irak : un exode passé sous silence
José Luis Restán
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Avec quatre cents dollars d’aumône gouvernementale et un baluchon qui réunit les biens les plus essentiels, peut-être quelque souvenir spécialement chéri. Étouffant ses larmes sur une histoire séculaire qu’on laisse derrière soi. C’est ainsi que cheminent quelques cinq cents familles chrétiennes irakiennes vers la région autonome du Kurdistan, où les autorités leur ont promis protection. Ils ont fermé leurs maisons dans des quartiers autrefois populeux et heureux de Bagdad et de Mossoul, où durant des générations leurs ancêtres ont vécu peines et joies, ont construit et ont parlé avec leurs voisins, en conservant toujours fraîche la foi reçue des mains des apôtres.

Je ne pense pas qu’à Hollywood on fera un film avec leur histoire amère et héroïque, pour que le monde sache. Le leur sera un exode sans projecteurs ni premiers plans, parce que ce monde-là, tellement global, s’est rendu sourd et aveugle à l’injustice dont ils souffrent. C’est vrai qu’il y deux semaines le Parlement Européen s’est souvenu d’eux, grâce à la ténacité de députés comme Mario Mauro (ndt: italien, vice-président du Parlement européen) et Jaime Mayor Oreja (ndt: Espanol du Parti Populaire – droite modérée), mais c’est encore trop peu, trop peu pour affronter cette tragédie qui incommode les musulmans modérés, qui dérange les américains et leur expérience manquée de démocratiser l’ancienne Babylone, et qui couvre de fange les progressistes occidentaux, si attentifs à dénoncer l’islamophobie et à repousser les chrétiens aux marges de la vie publique européenne.

Dans le silence de la nuit de ce lundi-là, un couple de vieux chrétiens dans le quartier de Baladiyat à Bagdad a été assassiné. Les «pistoleros » sont entrés dans leur pauvre maison et leur ont donné la mort comme à des chiens. C’était des chrétiens et ils n’étaient pas partis. C’était des chrétiens et ils parlaient arabe, et la peau brune de leurs visages ne laisse pas de doute quant à leur origine. Ils étaient de la terre, de cette terre à l’époque douce et dure, irriguée par le Tigre et l’Euphrate, la terre des arômes et des chants mystérieux, la terre des premières générations des disciples de Jésus. Les scélérats n’ont pas voulu que les tuer, eux, ils ont voulu tuer cette histoire et peut-être que pour un temps et dans cette zone-là ils pourront y arriver. Parce qu’il n’est pas écrit que là, en Irak comme dans d’autres coins de la terre, va survivre cette présence incroyable des chrétiens, celle qui s’est aussi rendue dérangeante pour tant de gens à Madrid, Barcelone, Londres ou Berlin (*). Pourquoi devraient-ils s’en préoccuper ceux-là mêmes qui décrètent l’expulsion des catholiques de l’Université (**), ceux-là mêmes qui se battent pour la disparition des crucifix qui se dressent au carrefour de nos villages, ceux qui interdisent les crèches dans nos écoles ? Pourquoi devraient-ils s’émouvoir ces prêtres de 1968 qui ont décrété la Tradition chrétienne ennemie de la modernité et du progrès ? Ce silence dense et coupable est naturel. Parce que ces cinq cents familles qui la gorge sèche ont laissé derrière eux maisons, écoles et églises, nous le sommes tous aussi nous autres les catholiques d’Occident.

Il est impossible de ne pas rappeler notre ineffable ex-ministre des Affaire Étrangères Moratinos (ndt si ce politique espagnol était le seul !), déployant au vent la bannière de l’anti-islamophobie en Europe. Combien de millions d’euros, combien d’énergie diplomatique, combien de congrès pour dénoncer et débattre de ces fantasmes ! Mais même pas un mot de pitié pour ces chrétiens aux traits arabes, pour ces fils d’une histoire qui est la nôtre et que maintenant nous laissons errer dans le désert vers un incertain placement dans le Kurdistan inconnu iraquien (ndt d’autant que par le passé, les Kurdes ont aussi persécuté sans répit les chrétiens…). Pourront-ils recommencer une nouvelle vie là-bas ? Qui le sait.

Pour les calculs à l’échelle du monde tout ça c’est « peanuts ». Parler de ces cinq cent familles alors que les marchés financiers grincent, que la Corée du Nord menace d’une guerre nucléaire, que le chômage continue à s’emballer et qu’on rogne sur les prestations de notre ancien bien-être.
Et pourtant notre futur a à voir avec le sort de cet exode inconnu des grandes tribunes. Parce que si les chrétiens disparaissent du Moyen Orient, nous le payerons tous très cher, les pays musulmans sur lesquels plane une crise interne aux proportions brutales le payeront, et la sécurité de cet Occident sceptique et ignorant de ses propres racines - racines qu’il en est arrivé à abominer dans une large mesure -le payera. Nous devons déployer toute notre énergie, nos moyens économiques, nos relations politiques, nos alliances, pour protéger la vie de nos frères et accompagner leur futur. Nous devons le faire sans relâche, mais il y a quelque chose de plus à dire.

Il y a déjà eu une nuit ainsi. Une nuit inconnue pour les puissants de ce monde, durant laquelle un couple a quitté en cachette le petit village de Bethléem, avec un petit, sur le dos d’un âne, pour cheminer en direction de l’Égypte et échapper au décret royal qui demandait son élimination. Personne alors n’aurait parié la moindre pièce de monnaie sur leur sort, comme personne ne le fait aujourd’hui pour nos frères d’Irak. Mais l’histoire du monde a changé grâce à cette famille qui paraissait ne compter pour personne, parce qu’il existe un amour et un pouvoir sur la face de cette terre qui dépassent les équations des politiques et des médias. Un amour et un pouvoir que tant de fois nous ne comprenons pas et qui se prévalent de ce qui est désarmé et de ce qui est petit pour réaliser leur dessein.

Il faut revenir à ce qu’a dit Benoît XVI dans sa prodigieuse méditation au commencement du Synode sur le Moyen Orient: « La transformation du monde, la connaissance du vrai Dieu, la perte du pouvoir des forces qui dominent la terre est un processus de douleur… c’est un processus de transformation du monde, qui coûte du sang, qui coûte la souffrance des témoins du Christ. Et si nous regardons bien, nous voyons que ce processus ne s’est jamais terminé. Il se réalise aux diverses époques de l’histoire sous des formes toujours nouvelles, aujourd’hui aussi, en ce moment, celui où le Christ, l’unique Fils de Dieu, doit naître pour le monde avec la chute des Dieux, avec la douleur, le martyre des témoins ».

* * *

(*) Ndt merci de ne pas mentionner Paris, M. Restán, mais cette omission n’est-elle tout simplement parce que la France, n’existe même plus comme puissance protectrice naturelle et historique des Chrétiens d’Orient, malgré l’accueil a minima de blessés dans les hôpitaux parisiens. Heureusement qu’il existe par exemple l’Œuvre d’Orient, et des associations comme Chrétienté Solidarité (cette dernière organise notamment à Paris le 9 décembre à 19H30, place Saint-Augustin une veillée de solidarité et de prière avec les chrétiens d’Orient persécutés).

(**) Ndt Peut-être référence également au fait que tout récemment le cardinal archevêque de Madrid, Monseigneur Rouco, a du renoncer à prononcer une conférence dans une Université Publique madrilène, sur le thème « Le Dieu inconnu dans l’Espagne du XXIème siècle » du fait de menaces de perturbations avec violences par des groupes de pression minoritaires mais d’opposition laïciste radicale. Lors de la veillée d’aujourd’hui à l’occasion de l’Immaculée Conception, patronne de l’Espagne, l’archevêque a repris les mots de Benoît XVI sur l’anticléricalisme en Espagne (entretien dans l’avion vers St Jacques de Compostelle) et sur la vitalité de la foi porté dans le sang des Espagnols (Lumière du monde).

Une Eglise sans importance Le Pape érudit à la bibliothèque vaticane