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La fronde des théologiens allemands

Le texte de la lettre, traduite grâce à Témoignage Chrétien (7/2/2011)
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Lu sur internet:

Plus de 140 théologiens catholiques allemands, autrichiens et suisses ont appelé à une réforme de fond de l'Eglise demandant notamment la fin du célibat des prêtres, a rapporté vendredi (4 février) le quotidien "Sueddeutsche Zeitung". Dans leur pétition intitulée "Eglise 2011: un renouveau indispensable", ils appellent aussi à l'ordination des femmes, à l'acceptation par l'Eglise des partenariats homosexuels et à la nomination des évêques par les fidèles. Ils justifient ces mesures pour mettre fin à la "crise sans précédent" que traverse l'Eglise catholique depuis les scandales des prêtres pédophiles.

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Allemagne : les évêques répondent à la pétition de 140 théologiens
(Radio Vatican)

« Pour faire face aux graves défis auxquels l’Église est confrontée en Allemagne, la simple disponibilité des évêques ne suffit pas ». La Conférence épiscopale allemande a répondu au mémorandum très critique signé par 143 théologiens catholiques, pour la plupart enseignants dans des universités germanophones. Intitulé : « un renouveau nécessaire », le texte demande une réforme en profondeur de l’Église catholique, alors que Benoît XVI est attendu en Allemagne en septembre prochain.
Dans leur réponse les évêques estiment que cette démarche est un signal positif car elle démontre le désir des signataires d’offrir leur contribution au dialogue sur l’avenir de la foi et de l’Église en Allemagne, un dialogue que les évêques eux-mêmes ont appelé de leurs vœux. Mais ils constatent que certaines demandes, déjà fréquemment débattues, vont à l’encontre de convictions théologiques et de définitions ecclésiales fortement contraignantes et que des éclaircissements urgents s’imposent.
Parmi les demandes présentées par les signataires figurent la suppression du célibat sacerdotal et le sacerdoce des femmes mais aussi la participation des fidèles aux nominations d’évêques et la fin du « rigorisme » moral de l’Eglise, notamment par rapport aux couples homosexuels et aux divorcés remariés.
Les évêques reconnaissent qu’on ne pourra pas éluder les questions qui fâchent. Car la peur est mauvaise conseillère. La prochaine assemblée plénière de la Conférence épiscopale allemande préparera à son tour des propositions stimulantes et constructives.
Le débat est donc ouvert et il s’annonce difficile. En 2010, un nombre sans précèdent de fidèles, en Allemagne, a quitté l’Église catholique [ndlr!! Il convient aussi d'ajouter que les raisons de quitter l'Eglise sont en partie très prosaïquement... fiscales: voir ici].

La version originale est ici: http://www.sueddeutsche.de/..
Le manifeste a été traduit en français par Témoignage Chrétien qu'il convient de remercier pour le travail, et la contribution essentielle à l'information.

Indépendamment du contenu du texte (au pays de Luther, il ne faut pas l'oublier!), j'observe le timing de ce qui apparaît pour le moment comme une pièce en trois actes:
- Février 2010: D'Allemagne, massives révélétations d'abus sexuels sur des enfants commis par des prêtres (il faut relire ici le portrait du Père Klaus Mertes, le directeur du collège Canisius de Berlin, dont tout est parti. Et aussi cette "chronologie d'une attaque planifiée")
- Janvier 2011: exhumation d'une vieille pétition signée par le théologien Joseph Ratzinger en 1970: c'est l'instrument du futur chantage
- Février 2011: Publication de la pétition
L'acte suivant, qui est aussi la circonstance propice, est la visite du Saint-Père dans sa patrie, en septembre prochain.

D'autre part, le "manifeste" (qui présente d'ailleurs, et c'est sa force, des points qui peuvent paraître légitimes) a un côté "révolutionnaire" (au sens non pas de nouveauté, mais de contestation), qui apparaît au moins dans trois passages:

-> Sur les structures participatives (§1): "«ce qui concerne tout le monde doit être décidé par tout le monde» ... Les fidèles doivent participer aux nominations des principaux ministres (évêque, curé)"
-> Paroisses (§3): L'Église a aussi besoin d’hommes mariés et de femmes aux ministères ecclésiaux.
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Sur la "liberté de conscience", qui se réduit en fait à l'ouverture au divorce et au mariage homosexuel (§4): "La haute considération dans laquelle l'Église tient le mariage et le célibat n’est pas en question. Mais cette considération ne doit pas avoir pour conséquence d’exclure ceux qui vivent de manière responsable l'amour, la fidélité et l’attention réciproque au sein d’un couple de même sexe ou divorcé-remarié".

S'agit-il des prémisses d'un schisme?
Au moment où l'oecuménisme fait des progrès, côté orthodoxe, veut-on empêcher le Saint-Père d'accomplir la promesse faite au début du Pontificat, "de réaliser la pleine et visible communion de tout le peuple chrétien"?
Il est évidemment trop tôt pour le dire. Toutefois, ceux qui suivent les catéchèses du mercredi peuvent être certains que Benoît XVI, qui connaît fond l'histoire de l'Eglise, ne peut pas être pris au dépourvu.

Église 2011 : un renouveau indispensable

Le manifeste "Kirche 2011, Ein notwendiger Aufbruch" (" Église 2011 : un renouveau indispensable") a été publié le 3 février dans le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung. Plus d'un tiers des 400 professeurs de théologie catholique enseignant dans les universités allemandes l'ont pour l'instant signé. Le dernier mouvement de ce type date de 1989 ("Déclaration de Cologne").
(Témoignage Chrétien)
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Cela fait maintenant un an que des cas d'abus sexuels commis sur des enfants et des adolescents par des prêtres et des religieux au collège Canisius de Berlin ont été rendus publics. L'année qui a suivi a plongé l'Église d'Allemagne dans une crise sans précédent. L'image qui se donne à voir aujourd'hui est ambivalente : beaucoup a été fait pour rendre justice aux victimes, réévaluer le mal qui leur a été fait et remonter aux causes qui ont conduit aux abus, au silence et au double discours dans nos propres rangs. Après un premier mouvement d'effroi, l'idée s'est imposée à de nombreux chrétiennes et chrétiens responsables, ordonnés ou non, que des réformes de fond étaient nécessaires. Cet appel à un dialogue ouvert sur les structures de pouvoir et de communication, sur la forme des ministères et la participation des fidèles à la responsabilité ecclésiale, ainsi que sur la morale et la sexualité, a suscité des attentes, mais aussi des inquiétudes. Va-t-on, par attentisme et minimisation de la crise, laisser passer ce qui est peut-être la dernière chance de s’arracher à la paralysie et à la résignation ? Le tumulte que peut susciter un dialogue ouvert et sans tabous peut inquiéter certains, surtout à quelques mois d’une visite papale. Mais l’autre solution, un silence de mort qui serait la conséquence d’un anéantissement de tous les espoirs, n’est pas acceptable.

La crise profonde que traverse notre Église exige de traiter aussi les problèmes qui ne paraissent pas au premier abord directement liés au scandale des abus sexuels et à leur étouffement durant des décennies. En tant que professeur(e)s de théologie, nous n'avons pas le droit de nous taire plus longtemps. Nous avons la responsabilité d’apporter notre contribution à un véritable nouveau départ : 2011 doit être l’année du renouveau pour l'Église. Il n'y a jamais eu autant de chrétiens qui sont sortis de l'Église catholique que l'année dernière ; ils refusent de suivre la hiérarchie de l’Église ou bien entendent vivent leur foi dans la sphère privée afin de la protéger de l'institution. L'Église doit comprendre ces signes et s’extraire elle-même de certaines structures sclérosées afin de regagner sa crédibilité et une nouvelle vitalité.

La rénovation de structures ecclésiales n’aboutira pas si l’Église s’isole et a peur de la société. La rénovation ne pourra se faire que si l’Église a le courage de l’autocritique et si elle accepte d’être critiquée, même de l'extérieur. C’est une des leçons de l'année passée : la crise des abus sexuels n'aurait pas été traitée de manière aussi résolue si elle n’avait pas eu un caractère public [ndlr: on comprend mieux la connivence medias/catholiques libéraux qui crevait déjà les yeux l'an dernier!]. L'Église ne peut regagner la confiance qu’elle a perdue que par une communication ouverte. L’Église ne sera crédible que si l’image qu’on a d’elle à l’extérieur ne diverge pas trop de celle qu'elle a d’elle-même. Nous nous adressons à tous ceux qui n'ont pas encore abandonné l'espoir d'un nouveau départ pour l'Église et qui s'engagent dans ce but. Nous voulons saisir les signes de renouveau et de dialogue qui ont été émis ces derniers mois par quelques évêques dans des discours, des homélies ou des interviews.

L'Église n'est pas en elle-même un but. Elle a pour mission d'annoncer Jésus-Christ, le Dieu libérateur et aimant, à tous les êtres humains. Elle ne peut remplir cette mission que si elle est elle-même un lieu et un témoin crédible du message libérateur de l'Évangile. Ses paroles et ses actions, ses règles et ses structures – toute sa relation avec les hommes à l'intérieur et à l'extérieur de l'Église – sont soumises à l'exigence de reconnaissance et de promotion de la liberté de l'homme comme créature de Dieu. Le respect inconditionnel de toute personne, l’égard pour la liberté de conscience, l'engagement pour le droit et la justice, la solidarité avec les pauvres et les opprimés : ce sont là des principes théologiques essentiels qui découlent de l’Évangile et que l’Église doit s’obliger à suivre. C’est à travers eux que l'amour de Dieu et du prochain deviennent concrets.

Le rapport différencié à la société moderne découle du message libérateur de la Bible : sous de nombreux aspects, la société est en avance sur l'Église, lorsqu'il s'agit de la reconnaissance des libertés et de la responsabilité des individus. L'Église peut en tirer des leçons, comme l'a souligné le concile Vatican II. Sous d’autres aspects, la critique de cette société selon l'esprit de l'Évangile est incontournable, par exemple lorsque les êtres humains sont jugés selon leurs performances, lorsque la solidarité mutuelle se délite ou lorsque la dignité de l'homme est méprisée.

Mais dans tous les cas, c’est le message libérateur de l'Évangile qui constitue le critère d'une Église crédible, de son action, et de sa présence dans la société. Les défis concrets que doit relever l'Église ne sont pas nouveaux. Pourtant, on a du mal à voir advenir les réformes préparant l’avenir.
Le dialogue ouvert à propos de ces réformes doit être mené dans les domaines d’action suivants :

1. Structures participatives
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Dans tous les champs de la vie ecclésiale, la participation des fidèles est une pierre de touche de la crédibilité du message libérateur de l'Évangile. Selon un vieux principe juridique, «ce qui concerne tout le monde doit être décidé par tout le monde» : il faut donc plus de structures synodales à tous les niveaux de l'Église. Les fidèles doivent participer aux nominations des principaux ministres (évêque, curé). Ce qui peut être décidé localement doit être décidé localement. Et les décisions doivent être transparentes.

2. Paroisse
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Les paroisses chrétiennes doivent être des lieux dans lesquels l’on partage des biens matériels et spirituels. Mais la vie paroissiale est en train de s’éroder. Sous la pression du manque de prêtres, on met en place des unités administratives de plus en plus grandes – des paroisses XXL -, dans lesquels la proximité et l'appartenance peuvent à peine être ressenties. Les identités historiques et les réseaux de sociabilité construits au cours du temps sont abandonnés. Les prêtres sont «envoyés au casse-pipe» et s’épuisent. Si on ne leur fait pas confiance, les fidèles ne se décident pas à participer aux responsabilités et à prendre leur place au sein de structures plus démocratiques de direction de leur communauté. Le ministère ecclésial doit servir la vie de la paroisse, et pas l'inverse. L'Église a aussi besoin d’hommes mariés et de femmes aux ministères ecclésiaux.

3. Culture du droit

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La reconnaissance de la dignité et de la liberté de chacun se manifeste particulièrement lorsque des conflits sont gérés de manière juste et dans le respect réciproque. Le droit de l’Église ne mérite d’être appelé «droit» que si les fidèles peuvent effectivement faire valoir les leurs. La protection des droits et la culture du droit dans l'Église doivent être améliorés d’urgence. Un premier pas en ce sens est l’établissement d'un système juridictionnel administratif.

4. Liberté de conscience

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Respecter la conscience individuelle, cela veut dire croire à la capacité de l’homme à être responsable et à décider lui-même. Soutenir cette faculté est un des devoirs de l'Église ; mais ce soutien ne doit pas se transformer en paternalisme. Cette question devient très concrète lorsqu’on aborde les grands choix de vie des personnes et leurs modes de vie. La haute considération dans laquelle l'Église tient le mariage et le célibat n’est pas en question. Mais cette considération ne doit pas avoir pour conséquence d’exclure ceux qui vivent de manière responsable l'amour, la fidélité et l’attention réciproque au sein d’un couple de même sexe ou divorcé-remarié.

5. Réconciliation
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La solidarité avec les pécheurs suppose de prendre au sérieux le péché qui existe aussi dans nos propres rangs. Le rigorisme moral péremptoire ne sied pas à l'Église. L'Église ne peut pas prêcher la réconciliation avec Dieu si elle ne fait pas elle-même en sorte de créer les conditions d'une réconciliation avec ceux envers qui elle s'est rendue coupable par la violence, par le refus du droit, et par le renversement du message libérateur de la Bible en une morale rigoriste et impitoyable.

6. Le culte
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La liturgie vit de la participation active de tous les fidèles. Les expériences et les formes d'expression contemporaines doivent y trouver leur place. Le culte ne doit pas se figer en traditionalisme. La diversité culturelle enrichit la vie cultuelle et cette diversité n’est pas compatible avec la tendance au centralisme unificateur. Le message porté par l’Église ne touchera les gens que si la fête de la foi prend en compte la vie concrète des fidèles.

Le processus de dialogue qui s’ouvre aujourd’hui dans l’Église peut conduire à la libération et au renouveau si tous les participants sont prêts à traiter ces questions pressantes. Il s'agit, par l'échange libre et honnête d'arguments, de rechercher des solutions qui tirent l'Église de cette obsession d’elle-même qui la paralyse. Il n’est pas question que le calme suive la tempête de l’année dernière ! Dans la situation actuelle, ce calme pourrait être mortel. La peur n'a jamais été bonne conseillère en temps de crise. L'Évangile invite les chrétien(ne)s à affronter l'avenir avec courage en gardant à l’esprit les paroles de Jésus lorsque Pierre a été invité à marcher sur l’eau : «Homme de peu de foi, pourquoi doutes-tu ?»

Prêtre et célibataire Sociologie de l'islam, par Massimo Introvigne