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Martyrs catholiques du communisme

Benoît XVI en a parlé en Croatie. Carlota a traduit un texte d'un prêtre espagnol publié par Religion en Libertad, sur les martyrs catholiques albanais (6/6/2011).

S’exprimant devant les évêques, prêtres et religieux croates lors des vêpres à la cathédrale de Zagreb, le Saint-Père a évoqué en ces termes la figure du Bienheureux Alojzije Stepinac, béatifié par JPII (voir Vêpres avec les religieux ) :
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Son martyre marque le sommet des violences perpétrées contre l’Église durant la terrible période de la persécution communiste. Les catholiques croates, en particulier le clergé, ont été l’objet de vexations et de brimades systématiques, qui visaient à détruire l’Église catholique, à partir de sa plus haute Autorité locale. Ce temps particulièrement dur a été caractérisé par une génération d’Évêques, de prêtres et de religieux prêts à mourir pour ne pas trahir le Christ, l’Église et le Pape. La population a vu que ces prêtres n’ont jamais perdu la foi, l’espérance, la charité, et sont aussi restés toujours unis. Cette unité explique ce qui est humainement inexplicable: qu’un régime aussi dur n’ait pu soumettre l’Église.
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Pour prolonger la réflexion suscitée par les propos du Saint-Père, Carlota a traduit ce texte d’un prêtre espagnol publié par Religion en Libertad, sur les martyres catholiques albanais.

Carlota

Le voyage du Saint Père en Croatie m’amène à poursuivre mes traductions sur les martyrs catholiques du communisme de l’Europe Centrale (dont la Croatie comme l’a rappelé le Saint Père) et Orientale dont les Balkans et notamment l’Albanie {Voir Stepinac et Wyszynski, 2 victimes du communisme}.
Ce pays, en particulier, dont la culture fut aussi latine, vénitienne et catholique, a été soumise pendant près de cinq siècles à la terrible occupation musulmane (avec pour conséquence l’interdiction totale d'écoles en albanais, ce qui faillit presque faire disparaître la langue. C’est un prêtre catholique qui réintroduit l’alphabet à la fin du XIXème, pour cette langue indo-européenne d’aujourd’hui parlée par environ 7 millions de personnes dont la moitié hors frontières de l’actuelle Albanie). Le grand héros de l’ultime résistance aux Turcs au XVème siècle fut Gjergj (Georges) Kastrioti dit Skanderbeg (ou dans les textes latins de l’époque Georgius Skanderbek), déclaré « Athleta Christi » par le Pape Nicolas V.

Ces exemples héroïques sont là aussi pour nous rappeler que la barbarie, malheureusement n’a pas de frontières ni dans le temps ni dans l’espace, et que les totalitarismes peuvent prendre bien des formes plus ou moins physiquement brutales mais aussi perversement, insidieusement, maléfiquement, plus « spirituelles ». Mais revenons à l ‘Albanie moderne (reconnaissance de son indépendance vis-à-vis de la Turquie en 1912, soit deux ans après la naissance d’une très célèbre enfant du pays, la future Mère Teresa).

Original de l’article du Père Jorge López Teulón ici: www.religionenlibertad.com/...

L’Eglise est de retour, elle sort des catacombes
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Ces paroles furent prononcées dans la cathédrale de Shkodra (Shkodër) - Albanie, par le Bienheureux Jean-Paul II, durant la consécration épiscopale de quatre nouveaux évêques avec lesquels la hiérarchie catholique était rétablie dans ce petit pays des Balkans. Le Souverain Pontife passa exactement douze heures au Pays des Aigles. Ce dimanche 25 mars 1993 le Pape faisait l’un de ses voyages internationaux les plus brefs de son pontificat. Le prêtre et journaliste Antonio Pelayo a commenté l’évènement en déclarant qu’il s’agissait « d’une revanche de l’Histoire contre ceux qui, il y a peu d’années, se vantaient en proclamant cette minuscule république des Balkans comme le premier pays absolument athée du monde ».

Le premier martyr de Shkodër
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Le 16 août 1944, à l’occasion de la fête de Saint Roque qui était célébrée à Shiroka, localité située au bord du lac de Shkodra (Shkodër), durant la procession, le Père Ndre Zadeja adressa au peuple et aux jeunes un bref discours:
« Je veux vous dire aujourd’hui deux mots à vous et plus spécialement à vous les jeunes: un nuage noir, chargé d’une idéologie rouge, menace au dessus de votre tête. Il a l’intention de se déverser sur vous. Si cela se passe ainsi, vous ne pourrez rien faire contre lui, seulement le supporter avec tous ses maux, et parmi eux, la négation de Dieu».
Le Serviteur de Dieu Ndre Zadeja (né en 1892), prêtre plein de ferveur et de courage, a prononcé ces mots trois mois avant que l’Albanie ne soit dominée par le communisme le plus sauvage. Sept mois après cette annonce, il sera fusillé derrière le mur du cimetière catholique de Shkodër. Le dimanche 25 mars 1945 tombait le premier prêtre de la ville. Depuis le 9 novembre 2002 son nom a été ajouté au procès de béatification de 40 martyrs albanais.

Á la mort du dictateur Enver Hoxha en 1985 {Enver Hoxha, né le 16 octobre 1908, homme politique albanais, fonda en 1941 le Parti communiste d'Albanie et fut le dirigeant de la République populaire d'Albanie de 1945 jusqu'à sa mort, en 1985. Sa dictature est considérée comme l'une des plus répressives de l'histoire contemporaine de l'Europe
Il proclama en 1967 l'Albanie « premier État athée du monde »}, Ramiz Alia est devenu le dirigeant de rang le plus élevé d’Albanie. Malgré son affirmation aux funérailles d’Hoxha (« L’Albanie sera toujours forte, toujours rouge, comme tu l’as souhaité, Camarade Enver ») il a mené à bien une série de réformes qui ont culminé avec la privatisation de l’économie et la convocation d’élections multipartistes en 1991. De ces élections Ramiz Alia a été élu Président de la République, mais il démissionnera en 1992 à la suite d’une grève générale. La même année il est arrêté et accusé de génocide et de crimes contre l’humanité, et il restera en prison jusqu’en 1997. Durant ces premières années (1985-1990), des formes camouflées de dictature n’ont pas manqué contre les différentes religions et spécialement contre la religion catholique.
Mais tout s’est terminé, ou mieux dit, tout a recommencé le 4 novembre 1990. Dans le cimetière de Shkodër, où gisent quelques uns des martyrs du communisme albanais, où se trouvait la tombe du proto-martyr, Ndre Zadeja, un prêtre diocésain se dispose à célébrer la Sainte Messe.

La messe du 4 novembre 1990
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Le Père Simon Zef Jubani a été condamné huit fois pour « agitation et propagande contre le communisme » et pour cela a été emprisonné du 15 janvier 1964 au 12 avril 1989, soit un total de 26 ans ! Après avoir été libéré il est parti vivre dans sa famille et a commencé à exercer son ministère. De jour il restait à la maison et ce n’est que la nuit tombée qu’il rendait visite aux familles et administrait les sacrements. C’est alors qu’est arrivé le 4 novembre 1990.
Il le raconte lui-même de la façon suivante:

« Une ambulance s’est arrêtée devant la maison de ma belle-sœur. Le chauffeur m’a dit qu’il fallait aller au cimetière de Shkodër parce que quelques quatre à cinq mille personnes qui désiraient entendre la Sainte Messe m’y attendaient . J’ai répondu que j’étais prêt. Une petite table m’a servi d’autel. Après l’Évangile j’ai prononcé un sermon improvisé dans lequel j’ai remercié les personnes présentes de m’avoir appelé pour rappeler ensemble durant la Sainte Messe la mémoire des défunts. Le dimanche suivant, le 11 novembre, j’ai calculé que sont venus au cimetière, de cinquante à soixante mille personnes en provenance de toute l’Albanie, des catholiques mais aussi des musulmans. Il y avait beaucoup de jeunes qui voulaient me protéger. Si j’avais été attaqué il y aurait eu un déchaînement d’altercations. La police consciente de cela n’est pas intervenue et s’est mêlée aux fidèles. Dans l’homélie j’ai cité une phrase de notre héros nationale Skanderberg: « Je ne vous apporte pas la liberté, je la trouve dans vos cœurs » Ensuite j’ai dit aux fidèles : « Je ne vous apporte pas la religion, elle rayonne déjà dans vos cœurs comme le démontre votre présence ici pour prier le Seigneur et lui rendre grâce ».

Mais tous ces gens qui peu à peu ont rempli les messes du cimetière de Shkodër ne pouvaient imaginer que, seulement deux ans et demi après, le pape Jean-Paul II parcourrait les rues de leur ville.
En ce matin-là de consécrations le Pape dira aux Albanais : « L’Eucharistie revient dans votre patrie. L’Eglise revient, elle sort des catacombes comme au temps de l’antique empire romain et débordant de joie pour la liberté retrouvée, elle annoncera : « C’est vrai ! Le Seigneur a ressuscité ! »

Le 13 février 1991 le Père Jubani s’est trouvé avec le Pape à Rome, à une audience privée. Il a été le premier à inviter le Pape à rendre visite à l’Albanie. La surprise finale est arrivée le jour de Noël de l’année suivante quand le Pape Jean-Paul II signa la nomination des quatre nouveaux évêques et annonça qu’il viendrait lui-même pour la consécration et ainsi restaurer la hiérarchie catholique en Albanie.

Sans Dieu, un peuple n’avance pas
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Le supplément religieux de la revue «La información de Madrid » ([…] devenu aujourd’hui « Alfa y Omega ») a publié dans son septième numéro du 20-11-1994, un entretien en exclusivité entre Antonio Allen et le père Jubani. Voici son impressionnant témoignage:

L’évêque m’a nommé curé de la paroisse de Mirdita, la zone la plus catholique et la plus pauvre. Il m’a ordonné de ne pas prêcher, mais seulement d’administrer les sacrements, pour ne pas finir en prison, mais moi je prêchais chaque jour et tous les deux ou trois mois la police me convoquait. Six mois plus tard on m’a arrêté. Le premier interrogatoire a duré quatre mois. Toujours on me crachait dessus et on me rouait de coups. D’autres fois on m’attachait les mains et les pies, on me faisait dormir à même le sol, on me maintenait en survie au pain sec et à l’eau. Le plus terrible c’était quand on me mettait dans un cercueil. Auparavant, à moi et à d’autres soumis à la torture, on nous avait arraché les dents pour que nous nous coupions pas la langue. C’était aussi terrible quand on nous attachait un cercle de bois autour de la tête et qu’on commençait à serrer. Moi, à leurs questions, je leur disais toujours la même chose : que la doctrine catholique était contraire à la leur, athée et marxiste, et que l’unique chose que j’avais fait et que je continuerai à faire c’était de prêcher l’Évangile.

On me condamna aux travaux forcés dans les mines. Le travail y était de 14 à 15 heures par jour et c’était si dur que de pauvres prisonniers se cassaient les bras ou les jambes seulement pour aller à l’hôpital et se reposer. On nous torturait également en nous appliquant du courant électrique dans les oreilles ou avec de l’eau bouillante. Parfois on nous mettaient des épines de pin sous les ongles puis le feu y était mis. Et c’était la normalité de recevoir des coups de bâton, des coups de pied sur la bouche et des claques. Il faut mieux ne pas se le rappeler. Le sort considéré comme le meilleur c’était la déportation mais beaucoup auraient préféré faire partie des fusillés.J’ai refusé de travailler car je ne me considérais pas comme un prisonnier de droit commun, et même je n’avais commis aucun délit. Alors on m’a mis en cellule pendant deux ans. Parfois je devais dormir dans des cellules pleines d’eau. Fréquemment on me laissait au pain sec et à l’eau, on me maintenait attaché par les pieds et les mains à une colonne ou on mettait un haut-parleur pour que je ne puisse pas dormir. Et tous les jours on venait me demander si je m’étais décidé à aller travailler avec eux.

Quand ils ont été convaincus que j’avais vraiment la tête dure, ils m’ont envoyé à la prison de Burrelli où j’ai trouvé écrites les paroles de Dante : « Laissez toute espérance, vous qui entrez ». Là on nous a mis dans des cellules de huit mètres sur quatre où nous étions toujours 25 à 36 personnes, tassées comme des sardines. On ne pouvait dormir de tout notre long et le moindre mouvement signifiait déranger l’autre. Là on préparait les repas. On se lavait. On faisait tout. Il y avait une saleté et une odeur insupportables. C’était une prison destinée à éliminer toutes les valeurs qui nous donnent une dimension humaine. Selon eux c’était un « centre d’éducation ». Un jour je leur ai dit que nous étions traités comme des bêtes mais que cela changerait quand Hohxa mourrait. On m’a alors condamné à 10 ans de prison de plus. Aller au tribunal était une façon de sortir, voir un arbre, un enfant. À l’intérieur nous ne pouvions rien voir.

À la demande du journaliste sur « comment a-t-il pu supporter tout cela » », il répond :

« Dieu m’a donné deux qualités très grandes : une tête très dure et un grand sens de l’humour, et en plus une très bonne santé. Mais à dire la vérité, je crois que j’ai pu dépasser toutes ces souffrances grâce à la prière…Plus est grande la persécution plus est grand l’aide de Dieu et de la Très Sainte Vierge. Durant toutes ces années, je n’ai jamais cessé de réciter les quinze mystères du Rosaire ».

Simon Zef Jubani est né le 8 mars 1927 (un mois avant le Pape Benoît XVI). Il a 84 ans. La vidéo est en albanais mais vous pouvez voir la chapelle du Cimetière de Shkodër où plus de 50 000 personnes ont obligé le gouvernement à ce qu’il leur concède la liberté religieuse. Le communisme s’est consacré à l’irrigation de la haine dans le pays, à le pervertir, à le dégénérer, à le corrompre. Le Christ a vaincu après une telle obscurité.
Bien sûr, les difficultés pour parler du Père Jubani, ne sont pas liées à la langue (l’albanais) ou à son âge…N’oubliez pas qu’on lui a arraché toutes ses dents.



Video


Note finale du traducteur.
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L’une des caractéristiques des pays totalitaires ou à tendance totalitaire, c’est d’effacer l’Histoire ou de la réécrire, hier comme aujourd’hui. C’est tout le contraire pour l’Église de Rome, dans son obligation évangélique de Vérité, et de par ses archives bi-millénaires, et ce n’est donc pas par hasard si l’on veut la faire taire. Nous, Européens de l’Ouest, malgré les aléas de nos passés respectifs plus ou moins lointains, nous avons n’avons pas été presque totalement ensevelis comme certains de nos frères de l’Europe centrale et orientale, pendant des siècles, sous la domination de puissances qui d’abord les ont privés du Christ, Père, fils et Saint Esprit, puis d’un dieu tout court. Comment aurions-nous réagi ? Comment serions-nous devenus ? Comment réagirons-nous aujourd’hui à des situations qui ne sont pas sans similitude avec celles du passé?
Sans le Christ, un peuple ne peut pas avancer.

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