Nouvelle évangélisation
Le Pape a reçu hier lundi 30 mai les participants à la première assemblée générale du Conseil pontifical pour la nouvelle évangélisation, institué en octobre dernier et confié à Mgr Salvatore Fisichella. Traduction de son discours (31/5/2011).
"La mission est la même, les circonstances changent" (Massimo Introvigne).
-> A propos du Nouveau Dicastère, on relira avec intérêt le commentaire de Vittorio Messori pour il Corriere della Sera, en juillet 2010: benoit-et-moi.fr/2010-II/... et une interviewe de Mgr Fisichella dans l'Avvenire, datant elle aussi de juillet dernier (ici)
-> Texte original du discours du Saint-Père en italien: http://press.catholica.va/...
Ma traduction.
Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Chers frères et sœurs,
Quand, le 28 Juin, aux Premières Vêpres de la Solennité des Saints Pierre et Paul (cf benoit-et-moi.fr/2010-II/... ), j'annonçai vouloir établir un Dicastère pour la promotion de la nouvelle évangélisation, je donnai une issue opérationnelle à la réflexion que j'avais conduite depuis longtemps sur la nécessité d'offrir une riposte particulière à un moment de crise dans la vie chrétienne qui se vérifie dans de nombreux pays, en particulier ceux d'ancienne tradition chrétienne. Aujourd'hui, avec cette rencontre, je note avec plaisir que le nouveau Conseil pontifical est devenu une réalité. Je remercie Mgr Salvatore Fisichella pour les paroles qu'il m'a adressées, en me présentant le travail de votre première séance plénière. Un salut cordial à vous tous avec l'encouragement pour la contribution que vous donnerez au travail de la nouvelle Congrégation, en particulier en vue de la treizième Assemblée générale ordinaire du Synode des Evêques qui, en Octobre 2012, abordera le thème de la nouvelle évangélisation et la transmission la foi chrétienne .
Le terme «nouvelle évangélisation» renvoie à l'exigence d'un nouvelle modalité d'annonce, en particulier pour ceux qui vivent dans un contexte comme celui actuel, où le développement de la sécularisation ont laissé de lourdes traces dans les pays de tradition chrétienne.
L'Evangile est l'annonce toujours nouvelles du salut opéré par le Christ afin que l'humanité prenne part au mystère de Dieu et de sa vie d'amour, et s'ouvre à un avenir d'espérance fiable et forte.
Souligner le fait qu'en ce moment de l'histoire, l'Eglise est appelée à accomplir une nouvelle évangélisation, signifie intensifier l'action missionnaire pour correspondre pleinement au mandat du Seigneur. Le Concile Vatican II rappelait que "souvent, pour des raisons diverses, les groupes parmi lesquels se trouve l'Eglise changent radicalement, ce qui peut conduire à des situations tout à fait nouvelles" (Décret Ad Gentes , 6). Avec un regard clairvoyant, les Pères du Concile virent à l'horizon le changement culturel qu'il est aujourd'hui facile de vérifier. C'est justement cette situation nouvelle, ayant créé une situation inattendue pour les croyants, qui nécessite une attention particulière à la proclamation de l'Evangile, pour rendre raison de sa propre foi dans des situations différentes du passé. La crise que nous vivons porte avec elle les signes de l'exclusion de Dieu de la vie de la population, une indifférence générale à la foi chrétienne, allant jusqu'à la tentative de la marginaliser de la vie publique.
Dans les dernières décennies, il était encore possible de trouver un sens général chrétien qui unifiait le sentiment commun de générations entières ayant grandi à l'ombre de la foi qui avait façonné la culture. Aujourd'hui malheureusement, on assiste à la tragédie de la fragmentation, qui ne permet plus d'avoir une référence unifiante; en outre, on voit souvent le phénomène de personnes qui souhaitent appartenir à l'Église, mais sont fortement influencées par une vision de la vie en contradiction avec la foi.
Proclamer Jésus-Christ, l'unique Sauveur du monde, semble aujourd'hui plus complexe que dans le passé, mais notre tâche demeure la même qu'à l'aube de notre histoire. La mission n'a pas changé, de même que n'ont pas changé l'enthousiasme et le courage que montrèrent les Apôtres et les premiers disciples. Le Saint-Esprit qui les poussa à ouvrir les portes du Cénacle, faisant d'eux des évangélisateurs (cf. Actes 2:1-4), est le même Esprit qui anime l'Eglise d'aujourd'hui pour une annonce renouvelée d'espérance au peuple de notre temps. Saint Augustin affirme qu'il ne faut pas penser que la grâce de l'évangélisation se soit étendue aux Apôtres, et qu'avec eux, cette source de grâce ait été épuisée, mais "cette source se révèle quand elle coule, pas quand elle cesse d'être versée. Et c'est ainsi que la grâce, à travers les Apôtres, en rejoignit aussi d'autres qui furent envoyés pour annoncer l'Évangile ... et même, elle a continué à appeler jusqu'à ces derniers jours le corps entier de son Fils unique, c'est-à-dire l'Eglise répandue par toute la terre" ( Sermo 239,1). La grâce de la mission a toujours besoin de nouveaux prédicateurs capables de l'accueillir, parce que l'annonce salvifique de la Parole de Dieu ne doit jamais manquer, dans les conditions changeantes de l'histoire.
Il existe une continuité dynamique entre l'annonce des premiers disciples et la nôtre. Au cours des siècles, l'Église n'a jamais cessé de proclamer le mystère salvifique de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ, mais cette même annonce a aujourd'hui besoin d'un nouvel élan pour convaincre l'homme moderne, souvent distraits et insensible.
La nouvelle évangélisation, par conséquent, aura à trouver des moyens de rendre plus efficace l'annonce du salut, sans lequel l'existence personnelle reste dans ses contradictions et privée de l'essentiel. Même chez ceux qui restent attachés aux racines chrétiennes, mais qui vivent une relation difficile avec la modernité, il est important de faire comprendre que "l'être" chrétien n'est pas une sorte de vêtement à porter en privé ou dans des occasions spéciales, mais que c'est quelque chose de vivant et de totalisant, capable d'assumer tout ce qu'il y a de bon dans la modernité. J'espère que dans le travail de ces jours, vous pourrez définir un projet en mesure d'aider toute l'Église et les différentes Églises particulières, dans la tâche de la nouvelle évangélisation; un projet où l'urgence d'une annonce renouvelée prenne en charge la formation, en particulier pour les nouvelles générations, et se conjugue avec la proposition de signes concrets capables de préciser la réponse que l'Eglise entend offrir en ce moment particulier.
Si, d'une part, la communauté tout entière est appelée à revigorer l'esprit missionnaire pour donner l'annonce nouvelle que les hommes de notre temps attendent, on ne peut oublier que le style de vie des croyants a besoin d'une véritable crédibilité, d'autant plus convaincante que la condition de ceux à qui elle est adressée est plus dramatique. C'est pourquoi nous voulons faire nôtres les paroles du Serviteur de Dieu Paul VI, quand, à propos de l'évangélisation, il affirmait: "C'est avant tout par sa conduite, par sa vie que l'Eglise évangélisera le monde, c'est-à-dire par son témoignage vécu de fidélité au Seigneur Jésus, de pauvreté et de détachement, de liberté face aux puissances de ce monde, en un mot, de sainteté "(Exhortation apostolique. Evangelii nuntiandi , 41).
Chers amis, invoquant l'intercession de Marie, Étoile de l'évangélisation, afin qu'elle accompagne les porteurs de l'Evangile et ouvre le cœur de ceux qui écoutent, je vous assure de mes prières pour votre service à l'Eglise et je donne la Bénédiction apostolique à vous tous.
