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Pour éviter un "condom-gate" au Bénin

Un article de John Allen. (6/11/2011)

John Allen consacre un long article au voyage au Bénin, du 18 au 20 novembre (cf. page spéciale Bénin ).
Il revient en particulier sur le voyage du printemps 2009 (cf. benoit-et-moi.fr/2009-I/ ).

Je ne partage pas son approche de la "catastrophe de communication", d'abord, parce que le Pape ne "communique" pas, et surtout parce qu'il est révoltant d'imputer à la communication défaillante du "Vatican" l'absolue mauvaise foi et la malveillance des medias.
De toutes façons, l'expérience nous a prouvé que pour être entendu, le Saint-Père doit "mettre les piegs dans le plat".

Ceci posé, John Allen souhaite que le reste - c'est-à-dire l'essentiel - du propos du Pape (le seul dirigeant qui s'intéresse vraiment à l'Afrique, et pas pour des raisons économiques) soit entendu par l'Occident. Et là, on ne peut qu'être d'accord avec lui.
Espérons donc qu'il n'y aura pas de brouillage.

J'ai traduit la première partie - celle qui donne son titre à l'article (j'essaierai de traduire la suite plus tard).
Certains passages qui me paraissent inutilement désinvoltes (voire irrévérencieux, et cela peut passer pour un procédé "facile") ont été mis par moi en italique.

Original en anglais: http://ncronline.org/...

Eviter un «condom-gate» en Afrique
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Dans deux semaines, le pape Benoît XVI effectuera sa deuxième visite en Afrique, se rendant du 18 au 20 novembre dans la nation ouest-africaine du Bénin. Personne au Vatican ne m'a demandé des conseils sur le voyage, mais je vais quand même en offrir plusieurs ici (on appréciera l'humour!!).

En un mot, voici: Essayez de gérer la question des préservatifs plus astucieusement. Ce serait bien que le deuxième voyage du pape en Afrique ne soit pas entièrement blackboulé par un nouvel épisode de «condom-gate».

Pour être concret, je vais donner à titre bénévole trois réflexions sur une stratégie de communication.

•Ne prétendez pas que le pape puisse aller en Afrique et éluder les questions sur les préservatifs et le sida, en particulier parce qu'il a lui-même brouillé les pistes avec quelques commentaires récents (!!!) Mais ne prétendez pas non plus qu'il pourra juste jeter quelques remarques fortuites sans susciter une frénésie médiatique.
•Assurez-vous que tout ce que dira Benoît sera présenté d'une façon, et à un moment, qui n'occulternt pas les autres 'storylines' sur l'Afrique méritant d'être enregistrés en Occident.
•Assurez-vous également que la présentation ne donnera pas l'impression que le pape est isolé, mais au contraire, fera comprendre qu'il reflète un large consensus religieux en Afrique, ainsi que les conclusions de nombreux experts laïcs. Les gens pourront toujours contester ce qu'il dit, mais au moins ils ne pourront pas le caricaturer comme un octogénaire européen farfelu.

Pour saisir la pertinence de ce conseil, faisons un petite promenade-souvenir dans le dernier voyage de Benoît XVI en Afrique, alors qu'il visitait le Cameroun et l'Angola en Mars 2009.

Comme grand titre à ce voyage, les officiels du Vatican disaient que Benoît XVI voulait l'utiliser pour raconter une histoire de «bonnes nouvelles» , en se concentrant en particulier sur la croissance du catholicisme sur le continent. Le pape voulait également se tenir aux côtés des catholiques africains dans leur lutte pour le changement social, notamment la lutte contre la corruption. Il l'a fait de façon mémorable au Cameroun. Sur une estrade, à côté de l'homme fort, le Président Paul Biya, ancien séminariste catholique, qui préside à un régime déjà désigné par 'Transparency International' comme le plus corrompu sur terre, le pape a dit, «Face à la corruption ou à l'abus de pouvoir, un chrétien ne peut ne jamais rester silencieux».

Pour les Africains, l'image du Pape adressant au pouvoir ces mots de vérité a été le moment clé du voyage. En Europe et aux Etats-Unis, cependant, la plupart des gens n'ont jamais su que cela avait eu lieu, parce que la couverture a été dominée par le «Grand Débat sur le Préservatif». (ndt: les majuscules sont dans le texte)

Pour mémoire, Benoît XVI a parlé brièvement aux journalistes à bord de l'avion papal, en route vers le Cameroun, et a pris la question inévitable posée à un pape dans un voyage en Afrique: Qu'en est-il des préservatifs et du sida? On connaît la réponse célèbre de Benoît XVI, «Le problème ne peut pas être vaincu par la distribution de préservatifs: Au contraire, ils l'augmentent».

En vérité, il a dit plus que cela. Sa réponse complète comptait 263 mots (!!), y compris l'importance de la solidarité avec la souffrance. Si on comprend l'argot (!!) papal, il s'en dégage comme un ton nuancé de compassion, par opposition à un exercice de moralisme de «juste dire non».

Néanmoins, la <petite phrase> citée ci-dessus a été battue comme un tambour bon marché, et de façon prévisible, a laissé la voie libre aux "chiens de guerre culturelle". Pour la première fois, un parlement européen (en l'occurrence en Belgique) a officiellement censuré le pape, et le gouvernement de gauche d'Espagne dirigé par le Premier ministre Jose Luis Rodriguez Zapatero a envoyé un million de préservatifs en l'Afrique en signe de protestation.

En conséquence de ce fracas, aucun autre thème du voyage n'a jamais vu la lumière du jour. On peut blâmer la presse d'avoir raté l'image principale, mais la vérité est que le Vatican devrait avoir vu venir (ndt: c'est facile à dire après!!!) Quelqu'un pouvait-il imaginer que si le pape disait ce qu'il a dit, sans aucun contexte ou arrière-plan, cela n'effacerait pas tout le reste du ciel?

À l'époque, le Vatican n'a fait pratiquement aucun effort pour souligner trois points clés (ndt: c'est là encore faire abstraction de la mauvaise foi des medias), de sorte qu'ils n'ont fait surface que beaucoup plus tard dans le cycle des nouvelles - trop tard pour faire une quelconque différence.

Tout d'abord, le pape a tout simplement donné une voix à ce que les évêques catholiques d'Afrique lui disaient depuis des décennies. Les prélats africains disent en général que les préservatifs qui arrivent en Afrique sont souvent bon marché et peu fiables, et que de toute façon, les faire passer, sans éducation ni formation morale, encourage parfois les gens à adopter des comportements encore plus risqués. On peut contester cela, mais c'est loin d'être un cheval de bataille propre au pape.

Deuxièmement, d'autres chefs religieux en Afrique sont du même avis. Le lendemain du jour où le «Grand Débat sur le Préservatif» a éclaté, j'ai interviewé l'imam de la mosquée nationale dans la capitale du Cameroun. Quand je lui ai demandé ce qu'il en pensait, l'imam a dit: «Mon seul regret est que le pape n'ait pas attendu pour le dire qu'il soit arrivé ici, sinon nous aurions pu le dire ensemble».

Troisièmement, certains spécialistes laïcs de la lutte contre le sida pensent que le pape a un marqué un point. Edward Green de Harvard a publié une tribune dans le Washington Post trois jours plus tard, avec des données montrant que les pays qui utilisent l'approche «ABC» (ndt: pour Abstinence, Be Faithful, Use a Condom), prônant l'abstinence et la fidélité à côté du préservatif ont plus de succès dans la diminution des taux d'infection.

En somme, le voyage de 2009 a produit deux catastrophes de communication: Le message complet que Benoît voulait délivrer en Afrique a été occulté, et une fausse impression de Benoît comme isolé et hors du coup sur une question d'une importance capitale a pu s'envenimer.

Il y a tout lieu de croire que la question du préservatif va revenir au Bénin. Le VIH / sida n'a pas vraiment disparu, et le pape a effectivement cultivé la confusion sur sa position. Dans un livre-interview de 2010, Benoît a déclaré que les préservatifs, bien que n'étant pas une «solution réelle ou morale» au SIDA, peuvent néanmoins être une «première étape dans la direction d'une moralisation».

Cette ligne, couplée à une clarification ultérieure du Vatican, a laissé de nombreux observateurs se gratter la tête sur ce que le pape essayait exactement de dire - sans parler des implications pour les catholiques sur le front de la lutte anti-SIDA dans des endroits comme l'Afrique .

Compte tenu de ce contexte, la question est clairement sur la table. Le "drame" réside dans la manière dont elle va être traitée.

* * *

Le fait d'encourager une approche plus efficace de communication n'est pas seulement, ni même principalement, une question de protéger l'image du pape. C'est un grand garçon, et peu de personnalités sur la scène catholiques ont plus d'expérience que lui sur la façon de gérer la fronde et les flèches de l'incompréhension du public.

En revanche, ce qui est en jeu, c'est ce que les économistes appellent «opportunity cost» (ndt: Le coût d'opportunité désigne la perte des biens auxquels on renonce lorsqu'on procède à un choix, autrement dit lorsqu'on affecte les ressources disponibles à un usage donné au détriment d'autres choix... Dans une situation où l'on est confronté à plusieurs choix, le coût d'opportunité d'un choix donné est le meilleur gain que l'on peut obtenir en choisissant l'un des autres choix- wikipedia). Un voyage du pape en Afrique est une chance précieuse, si elle n'est pas gaspillée, pour braquer les projecteurs sur un continent qui d'habitude n'est enregistré par l'Occident que quand il y a une famine ou une guerre. Et même alors, rien n'est acquis. La deuxième guerre du Congo et de ses conséquences ont coûté quelques 5,4 millions de vies humaines de 1998 à 2008, le conflit le plus meurtrier du 20ème siècle, après la Seconde Guerre mondiale, et il pourrait aussi bien avoir eu lieu sur Mars si on compte ce qu'en savent l'européen ou l'américain-type.

La question clé au sujet de la visite de Benoît XVI au Bénin n'est pas, par conséquent, comment la question des préservatifs va jouer. La question est: Si le Vatican parvient à éviter ce piège, quelles autres 'storylines' pourraient entraîner un certain intérêt?

Au moins trois viennent à l'esprit:
- Le catholicisme en Afrique
- Attirer d'autres croyants
- Inquiètudes pour la justice sociale

La suite à lire en anglais ici.
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