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Ratisbonne, une leçon déformée

Parmi les journalistes invités à s'exprimer lors du Congrés organisé par l'OR sur les rapports "difficiles" entre l'Eglise et les medias, il y avait le Père Antonio Pelayo, vaticaniste de la chaîne espagnole Antena 3 TV et collaborateur de Vatican Insider. Il a planché sur le discours de Ratisbonne, en septembre 2006, et il résume son intervention pour Vatican Insider (12/11/2011).

-> Voir aussi: Eglise et médias: histoire d'une incompréhension

-> Mon commentaire, à la fin:

Ratisbonne: Une contribution à la conférence pour célébrer les 150 ans de l'"Osservatore Romano" .
Antonio Pelayo
(Texte en italien: Vatican Insider; ma traduction)
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«Ratisbonne et la leçon déformée» (Ratisbona e la lezione stravolta) est le titre de l'exposé que j'ai présenté au Congrès convoqué mercredi 10 ovembre 10 par «L'Osservatore Romano», pour célébrer ses 150 ans d'existence. D'autres distingués professeurs et collègues ont présenté leurs réflexions sur quelques autres «cas» qui ont raconté la difficile coexistence entre l'Eglise et de l'information.

Celui de Ratisbonne est l'un des cas les plus frappants, et a conditionné alors (et continue de le faire encore aujourd'hui dans certains milieux) la figure de Benoît XVI, surtout dans certains aspects de son action, comme le dialogue avec la religion musulmane.

Les faits sont bien connus: du 9 au 14 Septembre 2006, Ratzinger a visité sa Bavière, et le 12, il a prononcé une "lectio magistralis", dans l'université qui a été la sienne pendant quelques années,sur le thème: «Foi, Raison et Université. Souvenirs et réflexions». Six pages très denses sur l'un des thèmes-axes de son pontificat, dans lesquelles Benoît citait une phrase de l'empereur byzantin Manuel II Paléologue sur l'islam et sur Mahomet. «Montre-moi, dit l'empereur byzantin à son interlocuteur persan, ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu y trouveras seulement des choses mauvaises, inhumaines, comme son commandement de défendre par l'épée la foi qu'il prêchait ».

Je ne me poserai pas la question de savoir si la citation était appropriée ou non, ni même si l'un des plus proches collaborateurs de Benoît XVI l'a mis en garde contre les «dangers» de cette citation (ndt: c'est la thèse de John Allen dans un fameux article "Qui dira non à Benoît XVI?": beatriceweb.eu/...). Il existe différentes opinions là-dessus, mais ce n'est pas le moment d'en parler.

La vérité est qu'à la lecture du discours, la citation n'était pas essentielle pour le raisonnement du pape et, sans doute, n'avait pas une grande importance, et ne pouvait même pas être considérée comme représentative de la pensée du pape sur l'islam, le Coran et le Prophète. Et c'est justement cela que le père Federico Lombardi a souligné devant un groupe de journalistes, quelques heures après le discours.

Explication inutile, car le lendemain, les journaux italiens ouvraient, avec une étrange coïncidence, leur information sur Ratisbonne avec des phrases comme celle-ci: «Le Jihad contre Dieu et la raison». Dans mes archives il y a au moins treize premières pages des journaux italiens qui, le 13 septembre, ont réduit à cette citation leur information sur ce discours important, sans approfondir la question posée par le pape. Plusieurs journaux étrangers n'ont pas fait la même chose, même s'ils ont cité la phrase célèbre, ils ne l'ont pas considéré comme une priorité et l'ont mise dans son contexte, sans la présenter comme l'expression de la pensée du pape sur l'islam.

Evidemment, les ambassades à Rome des pays arabes et les correspondants des médias de cette région, ont recueilli les titres, et, sans comparer avec le texte du discours, ont transcrit pour l'opinion publique que Benoît XVI avait attaqué le Prophète, les musulmans et le Coran. Les réactions ont été très violentes, du rappel des ambassadeurs à la menace plus ou moins cachée contre la personne du Souverain Pontife (ndt: et même le meurtre de chrétiens dans des pays à majorité musulmane...).

Dès le retour à Rome du Pape, les explications ont commencé; en effet, le père Lombardi et le nouveau secrétaire d'État, le cardinal Bertone, et Benoît XVI lui-même, ont en au moins cinq occasions différentes, cherché à clarifier la question, refusant surtout l'idée de considérer la citation de Manuel II Paléologue comme l'expression d'une opinion sur l'islam par Joseph Ratzinger. Avec beaucoup de patience, ils ont réussi à rétablir une plateforme pour la compréhension mutuelle, qui a été consolidée avec la visite pastorale (ndt: peut-on vraiment la qualifier de visite pastorale?) du pape en Turquie, et en particulier à Istanbul, où, dans la Mosquée Bleue, il s'est arrêté pour quelques minutes de contemplation.

Je pense objectivement, qu'il y a eu une panne (un dysfonctionnement) de l'information, non pas motivée par des mauvaises intentions, mais la tendance excessive aux titres spectaculaires, voire erronées. En Espagne, nous disons «ne laisse pas une nouvelle te ruiner un bon titre».

Commentaires

L'article du journaliste espagnol me semble pécher par excès d'indulgence voire d'angélisme, et être assez faiblement argumenté.
Il se trouve que j'ai suivi l'affaire du discours de Ratisbonne et que j'y ai consacré un dossier très détaillé ici: beatriceweb.eu/Blog06/; plus que mes opinions, il s'agit de documents recueillis au jour le jour, dès le 12 septembre 2006, dans la presse française et italienne.
C'est vrai que les italiens avaient attaqué les premiers (ici), mais les français n'avaient pas été en reste, et c'était devenu très vite la curée planétaire. En effet, comme c'est la cas à chaque fois que le Pape est attaqué, la presse internationale a réagi avec une belle unanimité, ayant pris sa proie en tenaille, bien décidée à ne pas la lâcher. Tout ramener à la facilité des "gros titres" procède donc d'une certaine désinformation par défaut, davantage destinée à dédouaner le milieu des journalistes qu'à rétablir la vérité des faits.

Relisant mon "dossier" 5 ans après, je trouve que l'article écrit alors par Serge de Beketch (avec une liberté de ton évidemment impensable dans une conférence prononcée au Vatican!!) posait la question pertinente (qui reste d'actualité): Qui manipule les fous d'Allah? (lire ici )

* * * *

L'OR d'aujourd'hui consacre un long article à la Conférence (http://www.news.va/).
Un compte rendu assez détaillé des différentes interventions y figure, dont celle de John Allen absent physiquement, mais dont le texte sur la crise de la pédophilie a été lu. Et celle de Jean-Marie Guénois (que nous espérons pouvoir lire en français sur son blog) sur le théme "Le berger allemand": ce qu'en dit l'OR laisse bien augurer de l'ensemble:

Dans son analyse, Jean-Marie Guénois du "Figaro", en partant du côté allemand de Benoît XVI - connotation toute autre que géographique, mais point précis d'attaque dont se sont servis les médias - a reconstitué comment le Pontife allemand , "amédiatique" (ndt: les guillemets sont de moi) et ancien préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi («une sorte de réaction chimique explosive») ayant succédé au Pape "super-médiatique" a réussi lentement au cours des années à inverser les choses. Grâce à sa timidité, à son humilité, grâce à sa lucidité intellectuelle, à la constance dans l'objectif, à la capacité à distinguer l'essentiel du détail, à sa façon de s'effacer individuellement pour servir le bien commun.

Le «fragile timmonier» a affronté le cauchemar médiatique de la crise de la pédophilie, obtenant le respect justement par la façon dont il a traité cette crise. "Ne s'agitant pas à travers de grandes déclarations, mais avec une gestion très calme, lente et finalement efficace". Benoît XVI, "le pape allemand, en est sorti plus grand parce qu'il fallait une grande force intérieure pour traverser cette tempête gigantesque" a conclu Jean-Marie Guénois


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