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Une interviewe en 2010, à l'occasion du meeting annuel de Rimini. "Je pense que c'est ma communauté profonde avec son point de vue, qui l'a poussé à me confier cette grande tâche" (il parlait de sa fonction de responsable de l'Opera Omnia) (3/7/2012).

Benoît XVI vient d'une tradition universitaire avec derrière lui tout l'horizon du développement de la pensée européenne, depuis les Grecs.

>>> Cf.
Un nouveau préfet à la CDF

     



Tous les ans, pendant la seconde quinzaine d'août, depuis 1980, se déroule ce qu'il est convenu d'appeler le "meeting de Rimini": une manifestation organisée par le mouvemment "Communion et Libération", qui propose une réflexion sur des thèmes culturels, religieux, politiques et artistiques, à travers une série de rencontres, d'expositions, de débats, d'évènements sportifs, littéraires, musicaux.

La liste des participants peut d'ailleurs susciter une certaine perplexité, et il n'est pas exclu que certains viennent pour être vus: par exemple, en 2009, on notait (en vrac!) Remi Brague, Fabrice Hadjadj, mais aussi Yves Coppens, Tony Blair, Mario Draghi, Giulio Tremonti, James Murdoch (le plus jeune fils du magnat des medias propriétaire du réseau Fox news qui va fournir au Vatican son premier conseiller en communication)...
Cette année, le thème retenu est "La nature de l'homme est le rapport avec l'infini" (19-25 août).
En 2010, il s'agissait de "Cette nature qui nous pousse à désirer des choses grandes est le coeur".
L'un des participants, Mgr Müller, répondait aux questions de Il Sussidiarrio.

L'interviewe pourrait avoir été faite hier, s'adressant au nouveau préfet de la CDF.

* * *

Interviewe de Gerhard Ludwig Muller
Il Sussidiario (ma traduction)
Lundi 23 Août 2010
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« Seul le principe d'amour, comme unité interne inséparable de la raison et de l'émotion, de l'intelligence et de l'affection, peut surmonter les contradictions de la raison moderne».

Propos de Mgr Gerhard Ludwig Müller, évêque de Ratisbonne, hier, lors du Meeting de Rimini, pour présenter en avant-première pour l'Italie, le premier volume des œuvres complètes de Benoît XVI, consacrée à la liturgie.
C'est l'occasion d'approfondir avec lui l'intitulé du Meeting, et de parler de «cette rencontre du christianisme avec la modernité qui sait être pleinement catholique et totalement moderne», qui est le magistère de Benoît XVI.

- Mgr Müller, «cette nature qui nous pousse à désirer de grandes choses est le cœur», dit l'intitulé du Meeting. Une affirmation que le monde moderne n'aurait pas signé.

«Le développement culturel de la modernité a mis en opposition la rationalité et l'homme intérieur, sa sensibilité. Mais dans le christianisme, le cœur n'est pas en contradiction avec la raison. Au contraire. La réalité - tout comme la raison elle-même - est créée par Dieu et ne devient pleinement intelligible que par rapport à son fondement trinitaire. Comme toute la réalité créée, la raison a elle aussi été voulue par Dieu par amour, et sans amour nous ne parviendrions pas à la comprendre: seul le 'principe' d'amour, comme unité interne inséparable de la raison et de l'émotion, de l'intelligence et de l'affection, peut surmonter les contradictions de la raison moderne.

- Comment le cœur de l'homme contemporain peut-il retrouver sa dimension originelle?

« En brisant ce que la modernité a mis en entre le cœur et la réalité: l'idéologie. Il y a des penseurs de l'époque moderne qui, se réclamant d'une conception réduite de la raison et la vérité, veulent dominer la réalité. Mais la vérité a son fondement ultime dans la Vérité qui est Dieu. Ce n'est que dans cet horizon de vérité que l'homme comprend son essence et son chemin. La vérité de l'homme est sa relation avec Dieu. Et cela n'est pas et ne peut pas être quelque chose d'a-passionnel: l'homme est un être personnel, fait à l'image de Dieu et c'est pourquoi seul l'amour infini de Dieu peut accomplir l'étendue de son désir.

- La vulgate dominante voit en Jean-Paul II un Pape plus consciemment «moderne», et en Benoît XVI, plutôt le représentant d'une rencontre avec la modernité encore douloureuse et pas totalement accomplie. Est-ce exact?

« Non. On le dit parce que trop souvent, on oublie la différence de ces deux grandes personnalités. Benoît vient d'une tradition universitaire avec derrière lui tout l'horizon du développement de la pensée européenne, depuis les Grecs. Jean-Paul II était un grand intellectuel européen, mais d'une manière différente, que la brièveté de cet exposé ne nous permet pas d'expliquer. Enfin, oui, plus connecté à la communication publique, tandis que Benoît est plus une figure de penseur théologique dans le sens classique du terme; mais tous deux expriment le résultat d'une rencontre du christianisme avec la modernité qui sait être pleinement catholique et totalement moderne.

- Vous êtes évêque Ratisbonne. A Ratisbonne, Benoît XVI a prononcé un discours considéré à ce jour comme un des plus importants de son pontificat. Pourquoi?

« Parce que dans ce discours, il a parlé de l'unité intérieure de la raison, sans oublier les exigences qui animent de l'intérieur la raison contemporaine. Il était nécessaire de souligner le lien profond entre la rationalité humaine et la foi, contre ces penseurs critiques du XIXe siècle (Marx et Nietzsche, par exemple) qui ont dit que la foi est quelque chose à archiver, qui n'a plus rien à voir avec la vie de l'homme et le développement du monde moderne.
Le cours de l'histoire s'est chargé de montrer que la foi, loin d'être une aliénation, en tant que relation personnelle et amitié de l'homme avec Dieu est pour l'homme son premier et unique facteur de vraie libération.

- Vous êtes curateur des œuvres complètes de Benoît XVI: que signifie cette tâche pour vous?

« Je suis très honoré par cette grande responsabilité. Moi et le pape, nous nous connaissons depuis longtemps, nous avons tous deux enseigné la théologie dogmatique, et ma façon d'aborder les défis de l'Eglise et de la foi au monde contemporain est identique à la sienne. Je pense que c'est ma communauté profonde avec son point de vue, qui l'a poussé à me confier cette grande tâche.

- En vous plongeant dans l'immense masse des écrits de Joseph Ratzinger, qu'est-ce qui vous a le plus impressionné et fasciné?

« Le Pape, ou le théologien Ratzinger, n'est pas seulement un théologien dogmatique, mais aussi un grand expert en théologie fondamentale. Le pape comprend et sait parfaitement traduire la réponse du christianisme aux questions fondamentales, existentielle, de l'homme du monde d'aujourd'hui: son travail théologique tout entier montre de façon extraordinaire que le christianisme est la réponse à la question existentielle de son cœur: non pas à la question que l'homme «a», mais à la question que l'homme «est». Benoît XVI montre la profonde modernité de la foi, acceptant pleinement l'exigence moderne de l'homme comme demande inconditionnelle de sens.

- Pourquoi avez-vous décidé de commencer la publication par le livre consacré à la liturgie?

« Par un souhait exprimé par le pape lui-même. La liturgie est au cœur de la foi chrétienne, parce que Dieu n'est pas un objet ou un concept à comprendre, mais une personne qui nous parle à travers certains gestes. Jésus-Christ est Logos, la Parole de Dieu en personne, et justement, la liturgie atteste que l'Église de Dieu n'est pas faite de philosophes qui parlent de lui comme d'un principe abstrait. Dans la liturgie nous entrons dans une relation avec la Pprésence réelle de Dieu, dans un geste par lequel il nous donne sa propre vie.

- À la lumière de ce qui s'est passé avec le scandale de la pédophilie, quel est selon vous le sens profond, à partir d'un point de vue chrétien, de cette grande épreuve que Dieu a demandé à son peuple?

« La pédophilie est un péché mortel et un acte criminel. Mais c'est aussi un drame qui pose à chacun de nous une question, unique et radicale, sur la façon dont nous concevons le sacerdoce. Le prêtre représente le Christ comme Bon Pasteur, c'est donc un scandale que quelqu'un puisse vivre devant Dieu, comme prêtre, en commettant des actes aussi horribles. D'autre part, il faut dire aussi qu'il y avait - et qu'il y a - une campagne faite par des pouvoirs contraires à l'Église, des pouvoirs qui ne s'intéressent à ces phénomènes que pour attaquer l'Église. Nous ne pouvons surmonter ces scandales qu'au sein de l'Eglise, qui est et sera toujours le Corps du Christ sur la Terre.