Ainsi étaient-ils

" Un Dieu Interdit ": c'est le titre d'un film espagnol, antidote à ce que peut faire la télévision d'état française pour promouvoir ses séminaristes et prêtres cathodiques! Un exemple d'évangélisation grand public, dont nos pasteurs pourraient s'inspirer, en cette année de la foi. Article de Carlota. (9/11/2012)

Image ci-dessous issu du site du film: http://undiosprohibido.wordpress.com/

En lisant ce qui suit, on ne peut manquer de repenser à ce que disait Benoît XVI, répondant aux questions des journalistes de la télévision bavaroise le 16 août 2006 (cf. beatriceweb.eu/Blog06), à propos du rôle "pédagogique" des béatifications.

Je dirais que chaque Conférence épiscopale devrait choisir, voir ce qui est plus opportun, ce qui peut nous apporter réellement quelque chose et qu’elles devraient rendre ces figures plus visibles – il ne faut pas qu’il y en ait trop – des figures qui laissent des traces profondes. Elles peuvent le faire par la catéchèse, la prédication, on pourrait peut-être leur consacrer des films. J’imagine de très beaux films. Moi naturellement je ne connais bien que les Père de l’Eglise: un film sur Augustin, et un aussi sur Grégoire de Nizance et sa personnalité si particulière, sa façon de fuir sans cesse les responsabilités toujours plus grandes qui lui étaient confiées et ainsi de suite. Il faut essayer de réfléchir à tout cela: Il n’y a pas que les situations mauvaises auxquelles sont consacrés tant de films, il y a des figures merveilleuses de l’histoire, qui ne sont pas du tout ennuyeuses, qui sont très actuelles. Bref il faut essayer de ne pas trop peser sur les gens, mais de leur proposer les figures qui restent actuelles et dont on peut s’inspirer.

Le film Un dios prohibido semble la réponse idéale à la suggestion du Saint-Père.
En cette année de la foi, pourquoi nos pasteurs n'essaieraient-ils pas de s'inspirer de la démarche des clarétains espagnols?

Carlota, 8/11/2012

Je commence déjà à faire de la publicité sur un film en cours de tournage en Espagne et qu’on ne verra sans doute pas en France. Dans le même ordre d’idée, on attend toujours « Cristiadad » sur les écrans français, heureusement déjà disponible en DVD (version anglaise, avec doublage et sous-titrage espagnols – cf www.ignatius.com/)
Ce film espagnol intitulé « Un Dieu Interdit », c’est mon antidote à ce que peut faire la télévision d’état française pour promouvoir ses séminaristes et prêtres cathodiques!
* * *
Titre du film « Un Dieu interdit »
Thème : Le Séminaire martyr de Barbastro (province aragonaise de Huesca) – été 1936
Lieu de tournage : Province castillane de Ciudad Rodrigo (près de la frontière portugaise)
Réalisateur : Pablo Moreno qui a notamment déjà réalisé un film sur St Paul de Tarse
Production : Contracorriente Producciones
Budget : « petit », le confirme le réalisateur lui-même
Sortie possible du film: Printemps 2013
Suivi de la réalisation : Au jour le jour ou presque depuis septembre 2012 et avec plein de photos et de reportages sur le site dédié undiosprohibido.wordpress.com/. Un beau souci de transparence authentique !

Présentation (21 octobre 2012) du tournage par le Père Manuel Tamargo, supérieur provincial des missionnaires clarétains (Province Santiago – Madrid – voir ici le site en français concernant cet ordre: www.claretains.fr/)

Original de l’entretien ici.

     

Qu’est ce qui a motivé ce film?
Dans notre Congrégation le thème des martyrs, pas seulement ceux de Barbastro, a toujours été un motif important d’indentification de notre congrégation et une motivation, y compris vocationnelle pour beaucoup. Concrètement, ceux de Barbastro le sont d’une manière particulière, parce que le Séminaire Martyr est le cas le plus évident; en outre il s’agit des premiers béatifiés de 1993 et il y a toujours eu beaucoup plus de tradition de culte, dans la mémoire et le souvenir, que pour d’autres martyrs: durant la Guerre Civile, 271 membres de notre congrégation, 271 Clarétains, ont été tués, mais ceux de Barbastro sont les plus significatifs car leur histoire est la plus dure et la plus cruelle de toutes. Cela a été toujours un motif d’indentification vocationnel. L’année dernière, on a célébré le 75ème anniversaire du martyre, nous avons voulu lui donner une importance particulière, nous avons fait une énorme diffusion de matériel et d’informations sur les Martyrs. Nous savions que nous avions là beaucoup de martyrs, mais nous ne nous étions pas identifiés avec eux. Cela a permis de récupérer la valeur qu’a ce témoignage de Foi pour l’Église, de personnes jeunes - aujourd'hui où il semble que l'on ait dépassé l'étape de savoir qui sont les bons et les mauvais , dans la Guerre Civile. C’est un motif important d’identification, de motivation pour nous, faire connaître ces jeunes qui ont donné leur vie pour la Foi: c'est un exemple de la façon dont on peut vivre l’Évangile jusqu’à ses ultimes conséquences.

Comment arrive-t-on au projet cinématographique ?
Grace à la Providence et à Contracorriente Producciones. Depuis mes premières années comme provincial et cela fait déjà 6 ans, j’avais toujours entendu parler de cette idée que ce serait bien de faire un film sur les Martyrs, pour faire connaître leur histoire, un film qui serait suffisamment bon, "aseptique", ne chargeant pas trop le trait pour pouvoir être diffusé. Mais personne ne savait comment faire, parce qu’une maison de production normale ne va pas te faire un tel film, une maison de production de ce qui est commercial, va te demander un tas d’argent et nous n’en avions pas les moyens. Jusqu’à ce qu’arrive l’appel de Juan Carlos Sánchez (*). Ils avaient été à Barbastro, appelés par l’Évêque pour des Journées sur la Communication, ils avaient vu le Musée (ndt musée local sur les martyrs) et avaient dit ce que disent les gens était une histoire impressionnante. Et eux avec la vision qu’ils ont, la sensibilité qu’ils ont des moyens audiovisuels et de la production cinématographique, ont pensé qu’on pouvait faire un film extraordinaire. Et c’est ainsi que tout à commencé. Ils se sont mis en contact avec nous, nous avons vu l’offre, nous l’avons évaluée, elle nous a paru très intéressante. Et nous n’avons pas tardé à dire oui. Jusqu’à présent nous sommes enthousiasmés par le film.

Comment vous a paru le tournage ?
Il y a un travail énorme dans ce film. Ce qui m’a le plus impressionnée c’est la quantité de personnes qui travaillent ici, l’enthousiasme qu’il y mettent, et tout en sachant que la plupart d’entre eux sont des professionnels, ils ne sont pas ici pour précisément l’argent, ils sont là pour le Projet, parce que la production, parce que le style de cette œuvre, de cette aventure leur plaît et que qui m’impressionne le plus c’est la qualité que l’on peut voir, le travail que l’on peut apprécier et le résultat, pour ce que j’en vois, est brillant.

Pour votre congrégation quelle est la signification des Martyrs de Barbastro ?
Il y a une génération très importante de Clarétains, qui ont peut-être maintenant dans les 70 ans au moins et qui sont nés à l’ombre des Martyrs. C'est-à-dire dans les années 40 et 50, les Martyrs pour eux, ne sont pas seulement ceux qui les ont formés ou qui ont grandi près de Barbastro, les Martyrs étaient un motif de plus d’une approche de Dieu et d’une indentification vocationnelle. Ensuite est venue ma génération, la mienne, formée à partir des décennies des années 70 et 80, où la Guerre Civile était encore quelque chose dont on ne pouvait pas parler et des Martyrs non plus car ils étaient associés à l’affrontement et à tout ce qu’il y avait eu. Et maintenant nous sommes en train de récupérer de nouveau cela, avec beaucoup plus de sérénité, nous qui n’avions pas eu l’opportunité des générations qui s’étaient trouvées si près de l’exemple, des Martyrs, nous sommes en train de récupérer le témoignage des Martyrs comme un motif aussi pour nous. En voyant ce matin le tournage de quelques scènes, - en voyant, évidemment un acteur, mais que c’était un Clarétain celui qui avait été là, j’étais ému. C’est que moi aussi je suis Clarétain!

- Le scénario a été lu, supervisé par vous les Clarétains. Y –a-t-il un personnage qui appelle plus l’attention parmi tous ceux du film, et il y a beaucoup car il s’agit d’un film chorale?
D’une part, l’histoire que nous connaissions des martyrs (**), qui est très fidèlement reflétée dans le scénario. La figure de Faustino Pérez, le martyr t’impressionne toujours. Dans le scénario et dans le traitement qu’il donne aux événements, j'apprécie tout particulièrement le ton qu’on a donné à certains miliciens car, bien qu’en laissant tout à fait clair qu’ils étaient les assassins, ils sont assez humanisés. Les martyrs eux-mêmes ne sont pas des enfants niais qui ne se rendent compte de rien et qui vont à la mort parce qu’ils n’ont pas d’autre possibilité mais sont des jeunes missionnaires qui savent ce qu’il y a, qui ont leurs craintes…Ces moments, plus que les personnages dans le scénario, ces moments où il y a des doutes parmi eux, sont parlants, l’un se jette en avant, un autre recule, cette forme de voir les choses, c’est beaucoup plus humain que ce que peut être la littérature, qui logiquement écrite dans les années 50 est une littérature hagiographique, avec beaucoup de « comme ils étaient bons… ». Oui, c’est cela qui attire mon attention et m’attire particulièrement.

- Pour terminer, la sortie du film et surtout sa diffusion ultérieure
Je suis le premier ou le second à avoir reçu la proposition du film. Dès le début je l’ai soutenue et parfois, même, j’ai eu à en convaincre certains autres que c’était un très bon projet et ils s’en sont déjà convaincus. Non pas parce que je le dis mais parce qu’ils le voient. Je suis très enthousiasmé par le film, j’ai très envie de le voir dans les cinémas. Mais ce que j’espère le plus c’est d’avoir un film bien fait, un film authentique, non pas un documentaire ni un reportage, qui réécrit fidèlement ce que fut l’histoire pour pouvoir l’utiliser pour nous identifier à elle et pour en faire même notre diffusion vocationnelle dans toute la congrégation durant de nombreuses années. C’est vrai que d’ici 15 ou 20 ans les moyens techniques seront dépassés mais durant ces années comme le thème est éternel, ce qui est permanent c’est le contenu du film, j’ai très envie de pouvoir le diffuser en Amérique latin, de le sous-titrer en anglais et de l’emmener en Inde. Nous avons des séminaires dans les pays d’Asie qui s’appellent « Les Martyrs de Barbastro », parce que les jeunes de l’Inde (***) ont écouté l’histoire, elle les a enthousiasmés et ils ont donné ce nom au séminaire. Alors qu’ils puissent voir, - pas seulement lire dans livre qui peut ou non être traduit, un film de ce que furent les faits des martyrs et qu’ils puissent le raconter à d’autre, pour être ou non Clarétains, mais pour comprendre ce que c’est que d’être fidèle à l’Évangile et qu’ils puissent le savoir, c’est pour moi désir très fort.

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Notes de traduction

(*) Juan Carlos Sánchez est co-fondateur de KINEMA SIETE, une association espagnole qui a pour but de promouvoir et soutenir l’audiovisuel de la spiritualité et des valeurs ; promouvoir et développer des activités qui s’attachent à la promotion de productions audiovisuelles à caractère spirituel et dans le respect des valeurs ; promouvoir et former des professionnels techniciens et artistes dans la production et la distribution de produits audiovisuels de valeurs.

(**) Le martyre des 51 Missionnaires Fils de l’Immaculé Cœur de Marie de Barbatro eut lieu les 2, 12, 13, 15 et 18 août 1936. La communauté Clarétaine de Barbastro était constituée de 60 missionnaires: 9 prêtres, 12 frères missionnaires et 39 séminaristes sur le point de recevoir le Sacrement de l’Ordre Sacerdotal.
Le lundi 20 juillet 1936 (ndt le soulèvement a débuté le vendredi 17 avec des militaires basés au Maroc espagnol) le Séminaire est pris d’assaut et fouillé, sans résultat, sous le prétexte de trouver des armes entreposées. Sous arrêtés tous les membres de la communauté. Le Supérieur, le Père Felipe de Jesús Munárriz, le responsable des études, le Père P. Juan Díaz, et celui de l’administration, le Père Leoncio Pérez, sont emmenés directement à la prison municipal. Les vieux et les malades sont emmenés à l’Hospice ou à l’Hôpital. Les autres sont conduits au Collège des Frères des écoles Pieuses (en Espagne l’on dit les Escolapios de l’Ordo Clericorum Regularium pauperum Matris Dei Scholarum Piarum, Sch. P. o S. P.- Leur fondateur est Saint Joseph de Calasanz né en 1557, il fondera en Espagne et dans de nombreux pays sous influence espagnole, Italie et Europe Centrale, des écoles primaires grauites, comme fera près d’un siècle plus tard pour la France, Saint Jean-Baptiste de La Salle). Ils y resteront jusqu’au jour de leur exécution. Ils purent clandestinement recevoir l’eucharistie. Ils durent supporter de nombreux tourments tant physiques que moraux avec notamment des simulacres d’exécution. Des prostituées furent introduites parmi eux pour les provoquer. Ils reçurent à titre particulier différentes offres de libération. Aucun ne succomba.

(***) La liste des martyrs du XXIème ne cesse de s’allonger, même dans la plus grande démocratie du monde et qui n’est pas en guerre même civile – Un rappel de la situation des catholiques en Inde (dont l’évangélisation a commencé au premier siècle de notre ère) par l’AED (ici http://www.aed-france.org/pays/inde/ ) qui ne prend pas en compte tous les événements tragiques de l’année 2012 et notamment les derniers d’Orissa.