Attentat à Beyrouth

Qui cherche à prouver que le message du "vivre ensemble" porté par le Pape au Liban il y a 5 semaines n'a décidément aucun avenir? (20/10/2012)

Les medias occidentaux sont très fort. En tout cas, champions de l'élucidation-éclair!
A peine la nouvelle de l'attentat qui a frappé hier le quartier chrétien de Beyrouth était-elle tombée que ce titre tournait en boucle sur les journaux, à la radio et à la télévision:

Damas accusé!

Je n'ai évidemment aucune information, seulement la conviction que sauter aux conclusions avant la moindre enquête (si tant est qu'il y ait une enquête et, le cas échéant, qu'elle permette d'identifier les auteurs, ce dont on peut douter!) relève d'une curieuse conception de la recherche de la vérité; et que dès lors, il n'est pas étonnant qu'à l'autre bout de l'échiquier, certains recherchent les explications dans la «théorie du complot», pendant tout aussi simpliste (mais pas plus!) que ce prêt-à-penser du médiatiquement correct.
Et surtout je ne peux m'empêcher de repenser à ce Pélerin de la paix tout blanc, venu il y a un mois, au prix de mille difficultés, témoigner que le "vivre ensemble" était possible, au Liban.
Comme si certains, même au prix du sang et de la dévastation, avaient à coeur de lui prouver qu'il a tort, et qu'il ne peut rien.

J'ai traduit, de la presse italienne, ces témoignages de deux évêques libanais.
Certains objecteront que ces hommes de Dieu cèdent à l'angélisme, moi, je crois surtout qu'ils veulent faire vivre sur place le message de paix de Benoît XVI. Le choc des civilisations ne passera pas par eux.

     

L'évêque de Beyrouth: la strategie de la terreur
Salvatore Izzo (AGI)
19 Octobre
------------------------
L'explosion a eu lieu dans le quartier chrétien de la capitale du Liban, «à une soixantaine de mètres du Siège du Parti phalangiste et à quatre cents mètres d'un autre siège. Il semble cependant qu'en fin de compte, la cible soit seulement des civils».
C'est l'archevêque maronite de Beyrouth, Mgr Paul Youssef Matar, qui le raconte au micro de Radio Vatican; il a entendu l'explosion depuis sa résidence.
«De l'archevêché - dit-il - j'ai entendu une grosse explosion, à 1800 mètres d'ici, elle a été très forte, elle a fait tremblé les fenêtres. Les conséquences sont tragiques: nombreuses victimes, entre tués et blessés, deux bâtiments à moitié détruits.. Cela a ébranlé le pays, l'équilibre psychologique des gens: c'est vraiment déplorable».
Selon l'archevêque de la ville, «les cibles de l'explosion en plein cœur du quartier chrétien étaient clairement les personnes, les civils. Et c'est cela qui le rend plus grave: en effet, ce n'est pas une guerre politique qui est en acte, ce ne sont pas des politiciens qui sont la cible de ces attaques, mais les pauvres civils dans leurs maisons... Cela entraînera encore plus dee terrorisme, encore plus de peur .. Nous allons maintenant attendre de savoir - si nous pouvons jamais savoir - qui est derrière cette attaque... Nous essayons de travailler pour que notre pays ne soit pas impliqué dans ce qui se passe en Syrie, mais il y a des gens qui veulent au contraire le pousser à la guerre. Je ne sais pas. Je sais qu'il faut beaucoup de force , beaucoup de sagesse pour sauver notre pays».

     

Attentat à Beyrouth.
L'évêque de Batroun: il n'efface pas l'amitié entre chrétiens et musulmans.
(Federica Ghizzardi)
ilsussidiario.net/ , ma traduction.
-------------------------
Liban, attentat à Beyrouth. Huit morts, dont le général Wissam Hassan, chef du service d'information de la police libanaise, environ quatre-vingts blessés. C'est le bilan de la violente explosion qui à Beyrouth a frappé en début d'après midi (hier), le quartier chrétien. De nombreux véhicules en flamme, ainsi que l'un des deux bâtiments résidentiels en partie détruit. C'est l'attentat le plus grave dans la capitale libanaise depuis 2008 et, selon les médias pan-arabes, il pourrait être lié au conflit syrien voisin. Place Sassine, le lieu de l'attentat, est la zone-symbole de célébrations chrétiennes et le quartier abrite également le foyer de l'Université américaine. «Nous ne savons pas, pour le moment, les véritables raisons de l'attentat. Nous ne parlons pas de motivations politiques », affirme Mounir Khairallah, évêque maronite de Batroun, l'une des plus anciennes villes du Liban, interviewé par Il Sussidiario. «Le point important est que le terrorisme est de retour au Liban et, malheureusement, nous n'aurions jamais voulu que cela se produise."

- Il y a seulement quelques semaines, le Pape Benoît XVI, en visite le pays, avait proposé le Liban comme un modèle de coexistence ...
-- Le Pape est venu à nous comme un messager, il a appelé tous les chrétiens du Moyen-Orient, en particulier les Libanais, pour construire ensemble la paix, et il a dit une phrase belle très belle: «S'il est possible de vivre ensemble au Liban, cela signifie que c'est possible partout»
. Notre passé est troublé et a été construit jour après jour, laissant derrière nous guerres, persécutions, destructions. Nous, comme l'a souligné le Pape, nous sortons de notre passé avec une leçon: vivre ensemble est possible. La cohabitation entre chrétiens, musulmans et juifs est réalisable. Le voyage du pape au Liban nous a insufflé un grand espoir.

- Malgré une existence quotidienne pas toujours tolérable?
-- Nous croyons en la coexistence, en dépit de tout. Nous savons que, surtout dans les dernières années de paix au Liban, le mal essaie toujours d'allumer un feu. L'étincelle, cependant, ne prend pas parce que les Libanais refusent la guerre. Nous luttons chaque jour pour que les conflits ne se fomententpas. Pas même l'attentat d'aujourd'hui, que nous condamnons par tous les moyens, n'allumera la guerre dans le pays. Nous condamnons toute forme de conflit et la violence autour de nous et dans le Moyen-Orient.

- Beaucoup en Occident, jugent les musulmans violents...
-- Les musulmans et les chrétiens, de la même manière et avec la même intensité, condamnent le terrorisme partout où il est pratiqué. Quand des faits violents se produisent, comme celui qui a dévasté Beyrouth aujourd'hui, il ne faut pas mettre une étiquette et dire «Les musulmans sont des fanatiques» ou d'autres phrases similaires. Le terrorisme est toujours à blâmer et nous ne devons pas le lier à une confession ou à une religion. Toutes nos fois condamnent, de la même manière et partout, la violence et le terrorisme.

- Le Liban est un modèle pour d'autres pays du Moyen-Orient?
-- Il l'est, et le Pape l'a confirmé. L'histoire l'a démontré. Il est un modèle pour la façon dont nous vivons côte à côte: il s'agit d'une mosaïque où cohabient les confessions, communautés, religions et cultures. En dépit de tout ce qui se passe autour de nous, nous continuons à aller de l'avant et rendre cet exemple vivant.

- Vous êtes l'évêque de Batroum, une des plus anciennes villes du pays: comment vit la communauté chrétienne au Liban?
-- Les chrétiens vivent bien, comme du reste les musulmans vivent bien, et à force d'être ensemble au cours des siècles, ils se connaissent, se reconnaissent et se respectent les uns les autres. Bien sûr, nous avons des problèmes, mais comme dans toute autre partie du monde: en Italie, il y a beaucoup de problèmes, mais cela ne veut pas dire que ce n'est pas un pays démocratique. La guerre au Liban a duré plus de 35 ans et quand nous en sommes sortis, nous avons admis, ensemble, que la responsabilité en incombait à la fois aux chrétiens et aux musulmans. Nous apportons l'espoir de demain. Nous sommes un peuple qui est capable de construire la paix dans le quotidien et dans la société; comme Benoît XVI l'a dit, nous sommes tous enfants du même Dieu qui nous réunit tous dans son amour, dans le respect de nos diversités et unis dans les valeurs communes à nos cultures.

- Ces jours-ci, vous étiez en visite à Milan. Comment avez-vous trouvé la ville?
-- Je connais Milan depuis 37 ans et j'aime beaucoup cette ville qui, comme toutes les autres, souffre aujourd'hui d'une crise économique et sociale. Milan, cependant, est spéciale car elle a un message à apporter au monde, d'ouverture, de tolérance et d'acceptation de toute les diversités possibles: beaucoup de gens viennent vivre dans cette ville pour y trouver la paix et le respect de leurs droits.