Le Figaro et l'obscurantisme du Vatican.

C'est si facile de dire du mal de l'Eglise! Mais l'Osservatore Romano, dénoncé pour sa critique du dernier film de Ridley Scott, n'est pas du tout "l'organe officiel du Vatican" comme le prétend le Figaro (26/9/2012)

(Merci à MJ)

Le Figaro du 26/9

http://www.lefigaro.fr/cinema/
Prometheus critiqué par le Vatican
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L'Osservatore Romano, le journal officiel du Vatican, n'a pas apprécié la remise en cause de l'origine du monde faite dans le film de Ridley Scott.
Le journal L'Osservatore Romano, l'organe de presse du Vatican, a violemment attaqué Prometheus. Dans un de ses articles, il dénonce la façon dont le film de Ridley Scott, Prometheus, sorti le 14 septembre en Italie, revisite les origines de l'humanité.

L'article semble en gros décalage avec la "critique" très modérée et courtoise de l'OR (ici).
Je ne veux pas entrer dans le débat, car je n'ai pas vu le film, et n'irai à coup sûr pas le voir.
Mais contrairement à ce qu'affirme le Figaro, l'Osservatore n'a nullement "dénoncé" (!!!), encore moins "violemment attaqué" (!!!) qui que ce soit, et je ne vois pas pourquoi son critique cinéma, Gaetano Vallini, n'aurait pas le droit de donner son avis sur un film qu'il n'a pas aimé - tout en lui reconnaissant par ailleurs certaines qualités.

Je veux juste faire une mise au point.
On parle de l'Osservatore Romano comme du "journal du Pape", ou, comme ici, de "l'organe officiel du Vatican" et on l'utilise (je dirais plutôt on l'instrumentalise) soit dans un sens (pour dénoncer l'obscurantisme de l'Eglise, comme c'est le cas ici), soit dans l'autre (pour s'attaquer à ceux qui ne suivent pas la ligne politiquement correcte du moment).

Je vais donner deux exemples, à la fois de cette instrumentalisation par les medias, et de la ligne très indépendante du journal. En essayant de prouver que l'OR est simplement la voix de son directeur (auquel, c'est vrai, le Saint-Père a donné carte blanche, cf. benoit-et-moi.fr/2010-I/).

1. En janvier 2011, en pleine polémique entourant des émeutes raciales à Rosarno, en Calabre, Il Giornale attirait l'attention sur un article signé d'une certaine Giulia Galeotti (détails ici: benoit-et-moi.fr/2010-I/), avec ce titre-choc

L'Osservatore Romano: "En 2010 les italiens sont encore racistes".
Le cas de Rosarno et les sifflets à Balotelli dans les stades.
Le quotiden du Saint-Siège attaque l'Italie: "La haine muette et sauvage envers une autre couleur de peau, que nous croyions avoir surmontée".

Et le Monde reprenait bien entendu: Le journal du Vatican dénonce le racisme des Italiens.

Plus tard, "l'Avvenire", par la plume du Président de la CEI chargé des phénomènes migaratoires, écrivait:
Je ne partage pas les analyses de l'Osservatore Romano.

2. Et Août 2011, sous la plume du directeur Gian Maria Vian, l'OR publiait un éloge appuyé du romancier Morris West, auteur de thriller "fanta Vatican" (benoit-et-moi.fr/ete2011) dans l'esprit de Vatican 2035.

Dans un de ses derniers romans Lazarus (Lazare, Laffont, 1990), West raconte un pape , Léon XIV - au siècle, Louis Gadda - qui dans un moment de grave crise du catholicisme, surmonte l'expérience de la chirurgie avec une émotion violente. Il entre dans le bloc opératoire comme gendarme de la foi, fermé à toute idée de réforme de l'enseignement traditionnel de l'Eglise. Et il en sort définitivement repenti, sachant que l'Eglise doit désormais changer. Et sur son lit d'hopital, pendant sa convalescence, il prend des décisions spectaculaires, abolissant le célibat des prêtres, le contrôle des naissances et s'ouvrant à la théologie de la libération.

Inattendu dans un "journal du Pape", c''est le moins que l'on puisse dire. Et bien entendu, personne n'avait songé à critiquer ce choix du directeur, pourtant surprenant.

Je conclus par cet extrait du rapport d'information d'une délégation du groupe d’études sur les relations avec le Saint-Siège qui s’était rendue à Rome du 14 au 17 septembre 2009 (benoit-et-moi.fr/2009):

Le Révérend Père Federico Lombardi, directeur de la salle de presse, et M. Giovanni Maria Vian, directeur de l’Osservatore romano, ont confirmé qu’ils n’avaient pas d’entretiens réguliers ni fréquents avec le Pape et qu’ils ne jouaient ni l’un ni l’autre un rôle de porte parole. M. Giovanni Maria Vian a par ailleurs expliqué que le journal qu’il dirigeait n’était pas la voix officielle du Vatican.

Un point confirmé par une interviewe de Vian au Corriere della Sera en décembre 2009. A la question "Vous le fréquentez?" (le pape), il répondait: "je le vois uniquement pendant ses voyages internationaux".