Le Pape, le Concile et la réponse de Fellay

Deux articles de Tornielli... (16/7/2012)

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: benoit-et-moi.fr/2012 (II)/

La dernière idée qui me viendrait à l'esprit dans cette affaire serait de commettre une indiscrétion par anticipation, mais dès que Tornielli a parlé de quelque chose, l'information est reprise partout, avec plus ou moins de fidélité à l'original, il ne s'agit donc plus d'un scoop, mais plutôt d'un retour à la source de l'info.
Si les choses tournent comme il l'annonce (avec prudence, car il s'est déjà pas mal trompé...) , cela me rendra triste pour le Saint-Père, sans me surprendre outre mesure. Et de toutes façons, un grand pas aura été fait, et rien ne sera plus comme avant...

Voici donc ma traduction des deux articles de Tornielli, le premier écrit "à chaud" sur son blog, le second, le lendemain, pour Vatican Insider.

¤ Le premier fait état d'une indiscrétion de José Manuel Vidal, un blogueur espagnol particulièrement malveillant que nous connaissons bien, grâce à Carlota (voir par exemple ici: benoit-et-moi.fr/2012(II)): un catholique adulte de synthèse, qui fait semblant de défendre le Pape pour attaquer plus perfidement l'institution romaine.
D'après le site infocatolicà, Vidal va recevoir un démenti écrit de la part du Supérieur lefebvriste pour l'Espagne et le portugal, qui exigera de sa part un rectification écrite.

¤ Dans le second texte, il me paraît intéressant que le Pape se soit écarté de son texte (les journalistes accrédités le savent, puisqu'ils reçoivent à l'avance une version écrite des homélies) pour insister sur l'"énorme richesse" des documents du Concile et la nécessité de relire le catéchisme. Cela n'est probablement pas par hasard.

Enfin, tant que les choses ne seront pas écrites noir sur blanc, aucune hypothèse ne pourra être écartée. Cela fait maintenant 3 mois que nous vivons au rythme de "un pas en avant, trois pas en arrière", puisque le 14 avril dernier, Jean-Marie Guénois annonçait, sur la première page du Figaro (cf. ici): Réconciliation imminente entre Benoît XVI et les intégristes.

Le Pape, le Concile et la réponse de Fellay

http://2.andreatornielli.it/?p=4578

"Les documents du Concile contiennent une richesse énorme pour la formation de nouvelles générations de chrétiens, pour la formation de notre conscience. Donc lisez-les ... Redécouvrez la beauté d'être Eglise, de vivre le grand «nous» que Jésus a formé autour de lui, pour évangéliser le monde: le «nous» de l'Église, jamais fermé, jamais repliée sur elle même, mais toujours ouverte et tendu à la proclamation de l'Evangile" (ndt. cf. 15 juillet, Frescati: homélie du Saint-Père).

C'est un passage de l'homélie que ce matin, Benoît XVI a prononcée à Frascati, durant la messe qu'il a célébrée au cours de sa brève visite dans le diocèse dont l'évêque est un des ses anciens collaborateurs de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Mgr Raffaello Martinelli, dont le titulaire dans l'ordre des évêques, est le secrétaire d'État Tarcisio Bertone.

Le pape a parlé à nouveau du Magistère conciliaire, alors que l'on est désormais à trois mois du cinquantième anniversaire du Concile, comme d'une «énorme richesse», attribuant à Vatican II un rôle important aussi pour les nouvelles générations . Il est significatif que cela se passe le jour où à Ecône, en Suisse, s'est terminé le chapitre général de la Fraternité Saint-Pie X fondée par Mgr Marcel Lefebvre.

Selon une anticipation rapportée par José Manuel Vidal sur le site Religión Digital (ici), les lefebvristes ont préparé un document-déclaration dans lequel ils diraient sans doute «non» à la proposition d'un retour à la pleine communion avec Rome, tout en remerciant le pape pour ce qu'il a fait dans cette perspective et pour la possibilité qu'il a donné à la Fraternité de présenter ses vues.

Les lefebvristes auraient conclu qu'ils ne pouvaient pas accepter les enseignements de Vatican II comme demandé dans le préambule doctrinal remis à l'évêque Bernard Fellay par le cardinal William Levada, le 13 Juin, parce que la signature dans le préambule comporterait l'acceptation des «erreurs du Concile».

La publication du document de la Fraternité était attendue ce matin (ndt: donc le 15 juillet). En fait, la réponse sera d'abord envoyée aux autorités romaines, puis, au début de la semaine à venir, Fellay lui-même présentera la position prise par le chapitre général, dans une interview. Tous les signes publics -les déclarations de Fellay et d'autres responsables lefebvristes - ainsi que les indiscrétions publiées à ce jour suggèrent que la réponse sera négative. Bien qu'il soit possible que les lefebvristes demande à examiner de nouveau le texte du préambule doctrinal (ndt: c'est Tornielli qui a mis ce passage en gras).

Les fruits non désirés de la main tendue du Pape

Les traditionalistes à un pas de la déchirure finale
http://vaticaninsider.lastampa.it

Les documents du Concile contiennent une énorme richesse pour la formation de nouvelles générations de chrétiens.
Benoît XVI, à moins de trois mois du cinquantième anniversaire du Concile Vatican II, a souligné l'importance et la valeur de cet événement qui a marqué la vie de l'Eglise au siècle dernier, le jour même où s'est conclu le chapitre général de la Fraternité Saint-Pie X fondée par l'évêque traditionaliste Marcel Lefebvre.

On attend en ce moment la réponse du Supérieur de la fraternité, Bernard Fellay, à la proposition du Saint-Siège pour le retour à la pleine communion avec Rome de cette frange de prêtres et de fidèles pour qui les maux de l'Église, la sécularisation et la crise de la foi doivent être attribués précisément à Vatican II.
Après des années de contacts et en dépit de la main tendue de Papa Ratzinger, les perspectives ne semblent pas roses et il est probable que les lefebvristes diront 'non' au préambule doctrinal que le Vatican leur demande de souscrire.

Benoît XVI, considérant comme une priorité de son pontificat de réparer les déchirures historiques et d'essayer de guérir les blessures et les schismes, a concédé tout ce qu'il pouvait concéder aux traditionalistes: il a libéralisé l'ancienne messe, il a levé l'excommunication des évêques lefebvristes, il a consenti à ce qu'on se mette autour d'une table pour un dialogue doctrinal avec eux. Fellay lui aussi, le plus équilibré et autorisé des quatre évêques illégalement ordonnés par Mgr Lefebvre, a pris quelques mesures importantes, comme celle d'avoir destitué son «collègue» Richard Williamson, connu pour sa position négationniste sur les chambres à gaz ainsi que pour ses opinions radicales .

Mais les lefebvristes ne peuvent pas demander au pape d'être exemptés de l'acceptation du magistère conciliaire dans les parties qu'ils estiment ne pas reflèter la tradition de l'Église. Ratzinger est un théologien qui a vécu les travaux de Vatican II. Il n'a jamais considéré le Concile un «superdogme», il ne l'a jamais considéré comme le début d'une «nouvelle Église», mais il ne peut pas accepter que les documents qui ont été votés à l'unanimité par les évêques du monde entier et scellés par le Pape puisque être rétrogradés à un accident de parcours ou même une cause de la perte de la foi.

Dans l'attente de la réponse Fellay, Benoît XVI hier, s'écartant du discours préparé, a invité à lire, en plus des textes du Concile, le Catéchisme de l'Église catholique. Un soulignement qui n'est pas dû au hasard: dans le Catéchisme, qui a justement été supervisé par le cardinal Ratzinger, les documents de Vatican II sont présentés dans le cadre du magistère qui les a précédés et de celui qui les a suivis. Dans l'espoir que les lefebvristes sachent saisir l'occasion unique qui leur est proposée.