Les catholiques "adultes" américains.. et français

A propos d'un article paru sur La Bussola (de retour...) (30/11/2012)

     

La Bussola est de retour.

Parmi les premiers articles mis en ligne, j'en relève un qui traite des élections américaines.
L'évènement remonte à presque un mois, les gens ont la mémoire courte, l'intérêt médiatique est maintenant complètement retombé, mais c'est aujourd'hui qu'il est intéressant de commenter les résultats, et d'en tirer des leçons pour l'avenir, valables pour nous aussi, français (1).

L'article s'intitule, ce qui est déjà tout un programme: «Les catholiques américains sont "adultes"» (ici).
L'auteur, Marco Respinti, revient sur ce que les sites dont la principale activité n'est pas la désinformation systématique et la propagation de l'idéologie mondialiste pressentaient en 2008, et qui s'est amplement vérifié au cours des quatre dernières années: en termes de «valeurs non négociables», Obama a été le pire. Et «la violation de la liberté religieuse dont il s'est fait le héraut n'a vraiment pas de précédent dans l'histoire des Etats-Unis».

Défense de la vie, protection de la famille naturelle, liberté religieuse, liberté d'éducation. Sur chacun de ces points, le carnet du président réélu n'est pas mince: il est inquiètant. Sa volonté d'imposer à l'Amérique qui travaille l'accès plus que facile aux méthodes de contrôle des naissances (contraception, avortement et stérilisation), en le faisant passer en douce pour une assistance sanitaire à charge des employeurs ( à travers le fameux "Obamacare") représente à elle seule un affront à la dignité humaine sans égal. La faveur avec laquelle son administration a regardé, et même appuyé ouvertement, l'équivalence entre les unions homosexuelles et le mariage hétérosexuel monogamique a été plus qu'évident.
(...)
Jamais comme en 2012, le conflit entre l'Eglise et la Maison Blanche n'a été aussi ouvert, frontal, dur. Jamais avec la clarté et la précision d'aujourd'hui les Églises n'ont ouvertement dénoncé à plusieurs reprises, y compris en justice, la violation de la liberté religieuse (inscrite en toutes lettres dans la Constitution fédérale des Etats-Unis) perpétrée par le pouvoir exécutif de la plus grande démocratie du monde au détriment de ses citoyens par le biais de l'imposition à tous, par la loi, d'une mesure de gouvernance économique qui implique, et non pas comme un effet secondaire, la lutte frontale contre la vie humaine naissante... Et jamais comme aujourd'hui l'Église catholique américaine n'avait joué un rôle de leadership par rapport à d'autres confessions religieuses dans la défense de l'héritage national de liberté religieuse en termes absolument et véritablement laïques.

Mais cela n'a pas suffi. La grande masse du vote catholique américain a, avec désinvolture, tourné le dos à cette bataille de vraie civilisation, faisant exactement le contraire de ce que la hiérarchie catholique américaine indiquait en termes clairement électoraux, bien que sans jamais s'ingérer dans les détails de la lutte des partis.
Il n'y a pas que les votes de beaucoup, de trop de catholiques américains qui ont manqué à l'adversaire d'Obama, le mormon Mitt Romney, accompagné du candidat à la vice-présidence Paul Ryan, un catholique; mais à coup sûr, celles-ci lui ont fait défaut.
Beaucoup, beaucoup trop de catholiques américains ont en effet préféré voter en mettant au second plan (ou même entre parenthèses) l'affrontement sur les «principes non négociables». En temps de crise économique sévère, beaucoup, trop de catholiques américains ont pensé que le problème le plus urgent aujourd'hui était celui du portefeuilles, ou de l'«emploi» ou de l'«assurance maladie», peut-être même d'une nouvelle loi sur l'immigration, et pour ces raisons, ils ont ignoré les avertissements de l'Eglise catholique américaine et de nombreux autres organismes religieux organisés dans le pays, en pensant qu'après tout, au moins pour un moment, on pouvait s'en passer.

Mais ce n'est pas le cas. Tout d'abord, parce que les «principes non négociables», par leur définition-même, ne peuvent jamais glisser à la deuxième place dans les priorités politiques et électorales. Et aussi parce que, même sur un plan purement pragmatique, le coût de la lutte contre la liberté religieuse et le droit à la vie que depuis quatre années Obama poursuit, et que pour quatre années encore il poursuivra, pèsera sur les poches des contribuables, appauvrira davantage le le marché du travail, contraindra à faire fermer leurs portes à des institutions de charité qui ne voudront pas se plier aux diktats de la Maison Blanche...

La question sérieuse et profonde souligné par le vote américain du 6 Novembre, est en somme la «question culturelle des catholiques américains», lesquels, par calcul de basse boutique (et erroné), myopie politique et surtout ignorance profonde de la doctrine sociale de l'Eglise, snobent les indications de la hiérarchie et se prêtent à créer des dégâts socio-politiques incalculables.
Souvent, cette partie du monde catholique américain, qui aujourd'hui s'avère la majorité (au moins la majorité de ceux qui le 6 Novembre se sont rendus aux urnes) est celle qui a le plus de voix dans les médias, parfois la plus enracinée dans le territoire, malheureusement souvent infiltrée dans les paroisses, les différentes réalités culturelles et religieuses, et certainement liée au phénomène de l'immigration en provenance d'Amérique latine, en particulier du Mexique.

Ce qui a nui au vote anti-Obama, ce n'est pas seulement l'inaction du monde catholique de plus en plus ignorant de ce que signifie faire de la politique comme catholique, mais l'illusion, comme beaucoup le font, qu'il suffirait de s'ouvrir à l'immigration latino-américaine sans «si» et sans «mais» pour obtenir des structures politiques «plus catholique» que celles que peut offrir le Parti républicain anti-Obama de tradition (dit-on) «blanche protestante» (WASP): c'est une illusion que les Etats-Unis est déjà en train de payer au prix fort.

     

Commentaire

(1) Certes, la situation des Etat-Unis n'est pas en tous points comparable à celle de la France, la nature de son immigration (la nôtre est très minoritairement catholique) est structurellement différente.
Surtout, par rapport à l'Eglise aux Etats-Unis, notre épiscopat (au moins sa "tête") a préféré ce que certains nommeront la realpolitik (mais qu'on peut aussi appeler la frilosité) à l'affrontement: il n'a guère élevé la voix durant la campagne présidentielle du printemps dernier, préférant fermer les yeux sur les décisions dévastatrices qui figuraient en toutes lettres dans le programe socialiste, au profit de soi-disant mesures de justice sociale (lire: de razzia sur les portefeuilles modestement remplis par des générations de travail, et même de privations). Ces mesures dévastatrices ont d'ailleurs été volontairement déclassées, pour relativiser leur portée: de "mesures de civilisation", elles sont devenues de simples "mesures sociétales"!!!

Ce qui s'est passé aux dernières élections présidentielles américaines doit nous inciter à la réflexion, pour les prochaines échéances. S'il n'est pas trop tard.