Les ravages de la pornographie sur les mineurs

Enfant triste

Image: olivierkaestle.blogspot.fr

illustrés par un jugement de la Haute Cour d'Edimbourg (article sur Corrispondenza Romana). Ou: il y a violence et violence... (27/7/2012)

La récente tuerie du Colorado, où un jeune type, ("roux", précisons-le tout de suite!!) a ouvert le feu dans un cinéma projetant en avant première le film Batman (1), a été une nouvelle occasion pour les moralisateurs des medias, de dénoncer le "terrible" lobby des armes à feu - la "puissante" (sic!) NRA - et de réclamer l'interdiction de la vente libre des armes, en contradiction, semble-t-il, avec le deuxième amendement de la Constitution américaine, qui garantit à chacun le droit de porter une arme.
Je ne veux pas engager le débat sur ce terrain complexe, tout au plus ferai-je remarquer que des tueurs comme Mohammed Merah, Anders Brevik et Richard Durn ont pu opérer dans des pays où les armes ne sont pas en vente libre.
Passons. Comme toujours, on voit l'issue, c'est-à-dire le passage à l'acte, tout en se gardant bien de rechercher les causes, autres que "mécaniques", comme la possession d'une arme. Une société hyper-violente, qui se reflète, comme dans un miroir, dans les films (dont Batman est un exemple!), les jeux video, internet, ne peut pas ne pas engendrer de violence. Heureusement, cette violence reste pour le moment marginale, cantonnée aux faits divers, dont certains assument des dimensions dramatiques et font les gros titres, comme celui-là.
Mais il y a d'autres formes de violence, tout aussi dramatiques, sur lesquelles les même moralistes restent en revanche totalement muets: comme par exemple la pornographie sur internet, et ses terribles conséquences, en termes de passage à l'acte.
Dans l'article qui suit, il est plus spécialement question de ses ravages sur les mineurs, et des avertissements prophétiques de L'Eglise, objet de sarcasme de la part des mêmes qui dénoncent aujourd'hui le "terrible lobby des armes à feu".

Internet et la pornodépendance des mineurs

(De Gianfranco Amato )
www.corrispondenzaromana.it
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Le procès devant le Haute Cour d'Edimbourg d'un garçon de douze ans accusé de viol et d'abus sexuels d'une fillette de neuf ans s'est déroulé à huis clos. Le jeune accusé, aujourd'hui âgé de quatorze ans, a plaidé coupable et a été ainsi évité la prison. Il sera soumis à une longue rééducation sous étroite surveillance.
Les circonstances particulières de cette affaire ne résident pas tant dans le jeune âge des protagonistes, que dans les motivations qui ont déclenché les événements. Le garçon a avoué, en effet, être dépendant de la pornographie "online", et avoir commencé à abuser de la petite fille d'un voisin après le visionnement d'un énième film hardcore. Il voulait «se sentir grand».

Le drame est venu à la lumière lorsque la fillette, se plaignant de douleurs abdominales, a dit à sa mère qu'elle avait peur d'avoir «un bébé dans son ventre». De là, la difficile confession de ce qui s'était passé. Les policiers ont alors constaté que les abus ont eu lieu sur une période allant du 1er Décembre 2010 au 31 Janvier 2011. L'avocat Sean Templeton, le défenseur du garçon, a parlé de l'affaire comme de «la pointe de l'iceberg» d'un phénomène bien plus répandu au Royaume-Uni, où il y a un très grand nombre, malheureusement, «de cas non connus, non déclarés et restés dans l'ombre». Le 18 Avril, 2012, une commission spéciale d'enquête parlementaire, la Independent Parliamentary Inquiry into Online Child Protection, a rendu publiques les conclusions auxquelles elle est parvenue dans un rapport final, dans lequel sont dénoncés les risques d'émulation et la relation entre violence et pornodépendance des mineurs.

Les chiffres officiels publiés dans le présent document sont glaçants. Presque un enfant sur trois, de moins de dix ans, a vu des images sexuellement explicites online, et la grande majorité des enfants ont libre accès à l'Internet sans le contrôle des adultes (il convient de considérer que le l'âge moyen du premier contact avec le monde du web est de huit ans en Grande-Bretagne), tandis que quatre adolescents sur cinq des deux sexes, allant de 14 à 16 ans, regardent chez eux sans être dérangés des images pornographiques en ligne.
Tel est le contexte qui a conduit à la triste affaire jugée par la Haute Cour d'Edimbourg, à laquelle on peut ajouter une considération.

Le 7 mai 1989, le Conseil Pontifical pour les Communications sociales publiait un document intitulé «Pornographie et violence dans les médias - Une réponse pastorale», où il analysait la relation entre la pornographie et la violence: « Il a déjà été dit qu'il exsterait un lien entre pornographie et violence sadique; un certain type de pornographie est nettement violente dans son expression et son contenu» , et «ceux qui regardent ou lisent des productions de ce genre, courent le risque de transférer ces attitudes dans leur comportement et peuvent arriver à perdre tout respect pour les autres, qui sont pourtant aussi enfants de Dieu et frères et sœurs de la même famille humaine».

Je me souviens encore des réactions de rage qui ont suivi ce document, et les accusations habituelles contre une Eglise sexophobe, incapables de réaliser les «temps qui changent», accrochée dans le Moyen-Age archaïque de son obscurantisme. C'était l'époque du mythe de l'éducation sexuelle, de l'émancipation du porno et de la nudité comme ingrédient nécessaire et indispensable dans tous les domaines de la connaissance humaine (presse écrite, publicité, art, cinéma, etc.).
Aujourd'hui, les faits que nous sommes contraints de commenter confirment combien étaient prophétiques, comme toujours, les admonestations de l'Église. Après les avoir contestés, à présent, tout le monde les partage, y compris le Parlement britannique. Avec vingt-trois ans de retard. (Gianfranco Amato)

Note additive: lien entre la tuerie et Batman?

(1) Dans le milieu des medias, il semble que certains aient pris conscience du danger d'un possible amalgame. D'où l'empressement à courir aux abris à coup d'arguments rhétoriques.
C'est dans ce sens que je comprends un article paru sur le site du Nouvel Observateur, qui est un véritable plaidoyer CONTRE le lobby des armes à feu, mais surtout POUR l'industrie du "divertissement" (dont j'imagine que la pornographie fait aussi partie):

C'est donc que le soupçon peut venir!
En tout cas, l'un des survivants de la tuerie perpétrée par James Holmes a l'intention de déposer une plainte "visant la violence prétendue incitative du film et la responsabilité de Warner Bros"
Tout en considérant la thèse comme "stupéfiante" (!!), mais pas inédite, l'auteur de l'article, Mathieu Davy, avocat spécialisé en droit des médias et de la propriété intellectuelle, soutient que "les œuvres cinématographiques, et l’imagination de leurs auteurs, sont souvent inspirées de faits réels, qui puisent dans l'histoire de la société. Ce sont finalement et simplement des relais du réel".

C'est une affirmation gratuite. En réalité, il est très difficile, et même impossible, de trancher sur le "quoi précède quoi": le réel inspire-t-il l'oeuvre, ou l'oeuvre, le réel?

L'avocat nous sert donc des arguments de tribunal, et l'on sait qu'il ne s'y dit pas toujours la vérité, et que les puissants du jour y ont souvent le beau rôle: "Un public normalement constitué fait parfaitement la différence entre ce qui relève du divertissement et ce qui relève de la propagande", affirme-t-il
Tout le problème est justement ce "public normalement constitué". C'est peut-être 99,999% des gens, mais quid du 0,001% d'"anormal" qui, lui, est susceptible de passer à l'acte? On n'a pas intérêt à croiser sa route! Dans une société qui cultive le soi-disant "risque zéro" au point de faire vacciner des millions de personnes pour prévenir une grippe inoffensive, ce risque-là doit-il être méprisé, et même provoqué?

Conclusion de ce plaidoyer en faveur de cette intouchable "industrie du divertissement" qui justifie toutes les déviances morales, et en fait le prosélytisme, au nom de la liberté d'expression:

Rejeter la responsabilité d'une tuerie sur un film de fiction est l’opportunité de désigner le suspect idéal, le bouc émissaire visible, immédiat, et surtout d’éviter d’affronter en face, la funeste réalité sociétale.
C’est éviter par exemple,
plutôt que de pointer le 1er amendement sur la liberté d’expression, d’évoquer le 2e, sur le port d’armes. N’est-ce pas plus concrètement, matériellement, cette "liberté", qui a pu permettre à James Holmes d'être armé jusqu'aux dents et de faire une soixantaine de victimes en quelques minutes ?
Que dire de
cette Amérique qui serait prête à condamner et donc censurer l’industrie du divertissement, mais qui en guise de réponse, voit sa consommation d’armes à feu exploser suite à la tuerie ?
Alors, si l'idée est de déceler des liens de causalité extérieurs aux mobiles du tueur, commençons peut-être par celui-ci.