Quand les corbeaux se prennent pour des zouaves

A propos des Vatileaks, reprise d'un article d'Andrea Tornielli de mai denier (mais d'une actualité intacte) sur le portail espagnol Region en Libertad. Traduction de Carlota (24/8/2012)

L'image ci-contre est celle choisie par Andrea Tornielli pour illustrer son article

Il m’avait échappé, mais au moment où le livre de Gianluigi Nuzzi « Suà Santità » (à traduire par Votre Sainteté, et non Sa Sainteté, selon la troisième personne de politesse en usage en italien et qui est l’en-tête du courrier adressé au pape, nous dit mon amie Teresa: cela donne un aperçu différent des intentions de l'auteur... disons, un peu moins négatif) est sur le point de sortir en France, entouré, n’en doutons pas du maximum de publicité (cf. www.leparisien.fr) il n’a vraiment pas vieilli.
Il apporte en bonus un très beau et émouvant témoignage personnel.
Et il permet de vérifier que la note du Saint-Père au cardinal Re sur le cas de l’évêque australien (cf. Benoit XVI, un Pape qui gouverne), attestant à que point Benoît XVI gouvernait, n’était pas passé inaperçue aux yeux du professionnel qu’est Andrea Tornielli.

Quand les corbeaux se prennent pour des zouaves (*)
Texte en espagnol ici: http://www.religionenlibertad.com
(et en italien: 2.andreatornielli.it, du 28 mai 2012)
Andrea Tornielli
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Dans le cas du « corbeau » ou mieux dit des « corbeaux » du Vatican, il reste beaucoup, encore trop, de côtés sombres. Dans les pages du début de son livre, Gianluigi Nuzzi, fait référence aux motifs pour lesquels la source « Maria » aurait décidé de sorti du Vatican une quantité tellement énorme de papiers, mémoires, notes et documents.

Les raisons alléguées par les voleurs sont la « transparence » pour combattre les comportements illégaux à l’intérieur du Vatican, « aider le Pape », et arriver à un changement de Secrétaire d’État. Les intéressés affirment même qu’ils agissent avec un esprit évangélique.

Et comme il est assez difficile de penser que ce qui est arrivé a surgi d’un accord entre quatre amis dans un bar, qui d’un coup ont décidé de vider les archives auxquelles ils avaient accès, il doit y avoir un cerveau, ou plus d’un, de haut niveau qui a organisé les vatileaks. Surtout à l’heure de décider des documents dont il fallait provoquer la fuite et vers qui.

Je n’arrive pas à imaginer que les « corbeaux » puissent vraiment croire qu’ils ont agi pour aider le Pape et faire le ménage. J’ai toujours eu de la méfiance envers les moralisateurs qui s’autoproclament ainsi, également parce que l’histoire montre que toujours il y aura quelqu’un qui se proclamera plus propre, disposé à « moraliser » les moralisateurs. En outre j’ai du mal à croire que les acteurs, pour le moment dans l’ombre de cette opération, n’aient pas calculé les conséquences de leurs actions.

Je ne crois pas qu’il était nécessaire d’être expert dans l’Histoire de l’Église, ni chroniqueur issu de grandes écoles avec une longue expérience (je ne suis ni l’un ni l’autre) pour comprendre que le succès des vatileaks serait dévastateur pour l’Église et pour le Pape. Le Vatican est troué commeune passoire, le haut magistère de Benoît XVI, - qui déjà souffre d’interprétations restrictives qui visent à l’acculer à droite - est rendu silencieux, la correspondance en relation avec les questions internes (comme la note du Pape au cardinal Giovanni Battista Re sur les réponses qu’il fallait donner à un évêque australien, plus tard écarté de sa charge) violée, bien qu’elle n’ait eu rien à voir avec des épisodes de corruption, d’argent ni des action illégales.

En un mot, il suffit de parler avec des fidèles d’une paroisse pour comprendre les dommages qui en résultent. Hier, durant quelques heures j’ai pu sortir de cette abjection. Mon plus jeune fils a fait sa première confession et pour ma famille ce fut un moment de grâce, voir la préparation qu’il avait reçue avec l’aide de bons catéchistes, les réponses qu’il donnait durant la simple cérémonie qui a précédé le sacrement individuel, voir que les enfants pleins de vie et remuants, chantaient et récitaient les formules de l’acte de contrition, a été un témoignage de l’action du Saint Esprit.

La confession fut précédée d’un repas au niveau de la paroisse auquel ont participé les familles de ces enfants. Je peux vous assurer qu’elles se sont rapprochées de moi, incrédules et peinées par les nouvelles de ces jours derniers. Je peux vous assurer qu’il y avait une grande souffrance, une véritable souffrance, et que personne n’a dit : « Eh bien, finalement l’on découvre la pourriture et l’on fait le ménage ! ».


Alors que se précisent les responsabilités du maître d’hôtel arrêté et que l’on découvre la nature et l’origine des documents qu’il gardait chez lui, exposant sa famille, espérons que les protagonistes de la semaine qui commence soient d’autres familles, et pas celle du souverain pontife.

Giuliano Ferrara dans son éditorial du « Il Giornale » a de nouveau mis en avant son rêve : que le Pape présente sa démission pour donner un signal fort à l’Église ? Une secousse, qui lui fasse consentir à guider sa succession. Durant les mois passés j’avais déjà manifesté mes doutes quant à la proposition de Ferrara. Aujourd’hui je ne peux qu’ajouter que la dernière personne qui devrait démissionner sur l’autre rive du Tibre en ce moment c’est Benoît XVI.

Notes complémentaires de Carlota :
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(*) Zouaves : Est-ce aussi une allusion aux courageux zouaves pontificaux qui défendirent jusqu’au bout le Pape en 1870. Créé le 1er janvier 1861 sur le modèle des troupes de zouaves de l'armée française -, au départ régiments formés en Afrique du Nord, les formations de zouaves pontificaux étaient constituées de volontaires, majoritairement français, belges et hollandais, venus défendre l'État pontifical dont l'existence était menacée par la réalisation de l'Unité italienne au profit du Piémont. Leur histoire s'identifie avec la dernière décennie de l'État du Saint-Siège (1860-1870). Le régiment sera licencié le 21 septembre 1870 à la suite de la disparition des États pontificaux ».

Il serait également intéressant de faire une chronologie parallèle entre les différents points forts de l’affaire « vatileaks » et des évènements ou des annonces à caractère international émanant de certains pays…Je ne crois pas au hasard ni au action spontanée…surtout à ce niveau !