Qui est Pietro de Paoli?

Je me suis longtemps posée la question, et j'y avais récemment apporté la réponse (grâce à un ami plus perspicace que moi), au moins en ce qui concerne le nom. La réponse est désormais officielle. Mais, plus important, qu'a-t-elle écrit, au juste? Un non-évènement pas si insignifiant que cela (19/9/2012)

Voir aussi:
>>> Qui est Pietro di Paoli? (http://benoit-et-moi.fr/2009/)
>>> Pietro de Paoli serait... Christine Pedotti
>>> Pietro & Pedotti

Lu sur La Croix, hier:
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Pietro De Paoli ôte son masque
Dans son dernier ouvrage, l’éditrice Christine Pedotti révèle qu’elle est l’auteur de plusieurs succès littéraires mettant en scène les coulisses de l’Église.
« L’heure était venue de recoller les deux morceaux de ma vie », annonce-t-il d’emblée. Ou plutôt : annonce-t-elle. L’énigmatique Pietro De Paoli, auteur de six succès de librairie mettant en scène les coulisses de l’Église, était en réalité une femme, l’éditrice catholique Christine Pedotti. Vatican 2035, 38 ans, célibataire et curé de campagne ou encore Dans la peau d’un évêque (Plon), c’était donc elle.
Le public chrétien avait fini par s’attacher à cet auteur discret qui lui tendait un miroir dans lequel beaucoup se reconnaissaient. Des lettres, Christine Pedotti en a reçu des centaines. Notamment de prêtres : « À travers le personnage de Marc, j’opère une sorte d’assemblage de tout ce que pouvaient me raconter mes amis prêtres, comme ces réveillons de Noël passés seuls, dans un presbytère… Cela a touché le cœur de ces hommes », analyse la romancière âgée de 52 ans.

Au départ, le choix d’un nom d’emprunt lui a été dicté par la sagesse :
directrice du département religieux de l’éditeur chrétien Fleurus-Mame, elle craignait que sa production littéraire ne soit préjudiciable à son activité d’éditrice. (???)
La touche masculine, c’est son éditeur qui la lui a soufflée, estimant que cela donnerait plus de poids à ses écrits au sein du clergé. Peu à peu, le personnage de Pietro « s’est mis à vivre », tandis que Christine Pedotti continuait à publier des ouvrages sur la foi, l’Église…

Mais en 2008, piquée au vif par une expression mal comprise du cardinal André Vingt-Trois sur l’antenne de RCF, l’ancienne étudiante de l’École Cathédrale fonde le « Comité de la jupe » avec son acolyte Anne Soupa. Objectif : dénoncer le sexisme au sein de l’Église.
Un an plus tard, la « Conférence catholique des baptisé-e-s francophones » voit le jour. « À ce stade, je frisais la schizophrénie », explique l’admiratrice de Bernanos, qui assume sa liberté de parole. Convaincue que l’Église doit rester un lieu de débat, Christine Pedotti, aujourd’hui éditrice indépendante, compte bien « entretenir la voix de Pietro ».

C'est le moment de relire ce qu'elle écrivait du Pape Benoît XVI dans son ouvrage "Dans la peau d'un évêque", paru en 2009 (cf. "Qui est Pietro di Paoli?", http://benoit-et-moi.fr/2009/)

Attention, c'est "hard", détestable, dégoulinant de haine, je pèse mes mots... et malheureusement nécessaire!! Pour savoir qui est l'auteure de l'histoire du Concile encensée par la Croix, et même par radio Vatican en français!!!
Que ce soit bien clair: elle a le droit - en ce qui me concerne, car cela ne dépend pas de moi, et d'autres ont moins de droits qu'elle - d'écrire ce qu'elle veut, mais pas en revendiquant une position d'autorité spirituelle ou éditoriale dans l'Eglise. Et surtout, qu'elle n'invoque pas la censure et les croisades.


Insultes
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Incroyable ! Je n'ai décroché que huit jours et, vendredi dernier, je n'avais entendu parler de rien ! Peut-être, si j'avais été attentif, aurais-je pu entendre une rumeur jeudi. Mais le décret du Vatican est de samedi dernier. Et en tout juste une semaine, l'Église catholique est sens dessus dessous. Bravo, Benoît! Bel exploit médiatique !
Et m... déjà qu'il a fallu manger son chapeau autour du motu proprio, et maintenant, il va falloir s'expliquer, nuancer, pondérer, justifier. Tout ça pour des c... !
Comme première conséquence, au lieu de bavarder tranquillement autour d'un bon repas avec des copains, je me retrouve à « faire l'évêque » dans un dîner.
Au demeurant, les amis d'Antoine et de Bérengère sont tout sauf des personnes ordinairement agressives. Ce sont des « bons chrétiens », engagés dans leur paroisse. Ils veulent bien que le pape se préoccupe de l'unité de l'Église. Mais faire l'unité avec des gens qui n'ont pas l'air d'en vouloir? Pourquoi? Et que le pape n'ait pas perçu la portée politique de ce qu'il faisait, ou qu'il l'ait négligée, ça les révolte.
François, l'un des convives, médecin et gérontologue, est le plus définitif
- C'est de l'obstination sénile! Ce pape est un vieillard ratatiné dans ses nostalgies, regardez-le. Il ressort des oripeaux d'un autre âge, le bonnet ridicule en fourrure, les dentelles, la mitre de machin, la crosse d'un autre. Il se déguise en pape, il fait le pape, mais il n'est pas le pape. Sénilité et seuil d'incompétence, voilà la situation.
Sa femme, Anne-Marie, se gratte la gorge et me lance des regards gênés. Je parie que, sous la table, elle lui file des coups de talon dans les tibias. D'ailleurs, c'est elle que François regarde en concluant avec u ne fausse naïveté
- Je ne porte pas de jugement, je fais un simple diagnostic... médical. Évidemment, c'est moins grave quand ça arrive à une mamie ou à un brave paysan. Mais quand on élit un type de quasiment quatre-vingts ans, on prend des risques !
Son voisin, professeur de droit à l'université, essaie d'atténuer les propos.
- Tu exagères, François, tu vois trop de gens malades. J'ai quelques anciens collègues qui montrent à des âges plus avancés une grande verdeur et un esprit très alerte.
Mais François reste sur ses positions
- Robert, pour garder l'esprit alerte, il faut l'exercer tous les jours.
Sa femme Anne-Marie tente de nuancer le propos
- Quand même, le pape est un grand intellectuel, tout le monde s'accorde sur ce point.
Martine, la femme de Robert, ne laisse pas passer. Elle enseigne la philosophie en prépa, et collabore régulièrement à une grande revue (ndr: je ne peux m'empêcher de penser: rien que des intellos, ceux-là, et pas des intellectuels. En tout cas, si c'est ça, "l'Eglise du parvis", elle vit franchement sur une autre planète!!!). Elle a aussi publié un ou deux livres et l'évêque précédent lui avait confié une mission de formation des laïcs. Elle rectifie
- Pas un intellectuel, un intello, au pire sens du terme, enfermé dans ses idées et ses chères études, dans ses dossiers. Et maintenant, dans ses appartements du Vatican ! Depuis quand n'est-il pas entré en débat avec quelqu'un pour de vrai? Quand a-t-il admis la contradiction pour la dernière fois? Il y a combien d'années que quelqu'un a osé lui tenir tête? La vie intellectuelle, la vraie, c'est ça! C'est considérer le point de vue de l'autre, c'est se laisser dérouter par le raisonnement de l'autre.
Antoine rit
- Et tu crois que personne n'a dérouté le « panzer» depuis longtemps?
- «Panzer », ce surnom ne lui a pas été donné par hasard, en effet il ne doit pas être facile à arrêter.
Bérengère se tourne vers moi
- Et toi, Marc, tu le connais ?
Je sursaute. Je suis sidéré par ce que j'entends; quel charivari! Pourtant, j'avoue que ça ne me contrarie pas vraiment. C'est plutôt réconfortant, tous ces gens qui se réveillent, qui se sentent concernés par l'Église.
- Ratzinger? Je l'ai entendu deux fois en conférence, une fois à Rome, une fois à Paris. Je ne lui ai jamais parlé.
- Et depuis que tu es évêque et qu'il est pape?
Je secoue la tête avec amusement.
- Un pauvre petit évêque comme moi?
- Mais c'est quand même lui qui vous a nommé?
interroge Robert.
- Oui, c'est lui qui a signé la bulle. Je suppose qu'il a approuvé ma nomination en lisant la fiche qui lui a été transmise. Vous savez, il y a plus de trois mille évêques catholiques, il ne peut pas tous les connaître.


La lettre du saint-Père
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En plein milieu de la tourmente soulevée par l'affaire brésilienne, tombe une lettre du pape.
En parfait décalage avec l'actualité, le pape écrit aux évêques à propos de la levée de l'excommunication des prélats intégristes.
Sur le coup, j'ai bien du mal à accueillir l'initiative papale avec une totale bienveillance. Je ne puis m'empêcher de maugréer intérieurement qu'on aurait pu commencer par là, au lieu de prendre des décisions dans la solitude superbe du Vatican, et de s'étonner ensuite d'être incompris !
Avec ses airs de petit professeur tranquille, finalement, ce pape exerce le pouvoir avec violence. Il n'en est pas à son coup d'essai, c'était déjà le cas avec le motu proprio, sans compter les nominations d'évêques, en dépit de l'avis de tous. Là, il a l'air de découvrir avec stupeur que le monde ne peut plus accepter cela, et il écrit cette drôle de lettre. Enfin, drôle, façon de dire, car quand je lis d'un peu près, je n'ai plus envie de rire du tout.
Pas très honorable, cette façon de se dédouaner en imputant le défaut d'information aux défaillances de ses services. Qu'est-ce que c'est que ce chef qui se défausse de sa responsabilité sur ses collaborateurs?
Enfin, passe encore le pitoyable passage
: « Saint Google, priez pour nous », où il recommande à ses collaborateurs d'user des moyens d'information qu'Internet met à leur disposition. Mais quand je découvre le passage où le pape rapporte qu'il s'est senti blessé, j'enrage. Et allez, voilà que saint Paul est mis à contribution pour stigmatiser ceux qui déchirent et dévorent... Et le texte est adressé aux évêques ! Ce sont donc les frères évêques qui sont accusés d'avoir montré les dents et contribué à «persécuter» le Saint-Père !
Seul à mon bureau, je lis et relis. Je cherche en vain un mot pour ceux qui ont été blessés, ceux qui ont eu à porter solidairement la décision pontificale, sans qu'on ait même daigné les en avertir, et qui ont pris des coups venant de partout.
La colère fait trembler les feuillets dans mes mains. Il faut que je me reprenne. C'est le moment d'être exemplaire et d'être solidaire, là où le pape n'a pas su l'être. Et surtout, je ne dois pas traiter l'évêque de Rome, mon frère dans l'épiscopat, plus sévèrement que je ne le ferais pour n'importe quel vieil homme chargé de trop lourdes responsabilités. Après tout, les vrais responsables de ce fiasco sont les cardinaux qui, à la mort de Jean-Paul II, ont cru pouvoir se défiler. Ils ont évité de se poser les vraies questions sur l'avenir de l'Église et l'annonce de l'Évangile aux hommes et aux femmes de ce temps. Ils ont élu un «pape de transition », en se disant que ça leur donnerait le temps de voir. Et on voit ce qu'on voit! Mais il faut être juste; qui peut reprocher à un vieux professeur de théologie, enfermé depuis plus de vingt-cinq ans au Vatican, spécialisé dans l'examen tatillon des textes de théologie risquant de porter atteinte à la doctrine, de ne pas être prophète pour ce temps?
Quant aux objections spiritualo-béates sur le fait que le Saint-Esprit a guidé le choix des cardinaux, c'est compter pour rien la nécessaire coopération des humains au dessein de Dieu. Et à ce compte-là, on soutient qu'Alexandre Borgia aussi était le «choix de Dieu ».
Non, non et non, le choix de ce pape est un produit de la peur, et il n'est nul besoin d'être un grand spirituel pour savoir que la peur et le Saint-Esprit ne font pas bon ménage. Je relis une fois encore cette lettre aux évêques.


L'inversion des faits
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Il a suffi que je laisse entrevoir que je n'ai pas une totale unité de vue avec le pape pour que, aussitôt, certains m'accusent de contribuer à la déchirure de l'Église.
« On » ! Il s'agit bien d'un « on » indéfini, puisque la plupart des lettres sont anonymes.
Venimeuses et anonymes, comme les commentaires qui tombent sur les blogs de beaucoup de prêtres.
Laurent, le séminariste, tremble encore des paroles de haine déversées contre lui : « C'est le démon qui vous anime, je prie pour que vous ne soyez jamais prêtre », et aussi «Je fais copie de vos propos et me sens dans l'obligation de les faire connaître au nonce apostolique. Sa voix, plus que la mienne, contribuera peut-être à convaincre votre évêque de renoncer à ordonner un ennemi de la sainte Église catholique. »
La délation, toujours...
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Parfois, dans les courriers émergent des psychoses du complot, les ennemis de l'Église seraient prêts à fondre sur elle pour la détruire. Il faut donc serrer les rangs, présenter un front uni. On trouve abondance de métaphores guerrières. Ah, la tentation des croisades n'est jamais loin!
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