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Mon ami François H. me signale un article qu'il a écrit pour le site Contre-débat. Une série de très bons arguments à l'usage de ceux qui en ont assez de se voir imposer une simple opinion comme un dogme auquel tout chrétien est fermement prié d'adhèrer, sous peine d'excommunication (7/1/2012).

Sur le même sujet, sur ce site



jeudi 5 janvier 2012
A propos de la lutte contre le "négationnisme" climatique
(Texte original ici)

Il est de bon ton, chez certaines personnes qui s’intéressent à la question climatique, de dénoncer ce qu’elles appellent le « négationnisme climatique ». Il faut entendre par-là la position de ceux qui mettent en doute ou relativisent l’origine anthropique du réchauffement observé et contestent ainsi les thèses du GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat). Dernièrement, le cardinal Pell, archevêque de Sydney, pour avoir parlé de son « scepticisme sur la question du changement climatique[1] », a ainsi été accusé par un journaliste catholique (*) de soutenir d’obsolètes « négationnistes » américains.

Il ne s’agit pas ici de prendre position dans un débat scientifique complexe, exigeant des compétences et des savoirs multiples, mais d’examiner cette accusation de négationnisme telle qu’elle est appliquée au débat sur le changement climatique. En effet, la large diffusion dont elle a fait l’objet dans une certaine presse, dans un contexte occidental où les partis se réclamant de l’écologie politique bénéficient d’une certaine faveur dans l’opinion, ont fait oublier ce qu’en pareille matière elle a d’éminemment curieux. Mais il convient pour cela de mesurer tout d’abord la portée d’une telle accusation, qui, me semble-t-il, recouvre trois significations distinctes, mais parfois complémentaires : une signification scientifique ; une signification morale ; une signification juridique.

Dans le domaine de la connaissance, le négationnisme semble signifier tout simplement la négation d’un discours scientifique établi par les faits. Il s’agit d’un refus immotivé des preuves avancées par la communauté scientifique.
Cependant, tout refus mal fondé du discours scientifique, même celui qui paraît s’imposer par sa justesse et son adéquation aux faits, ne peut être désigné comme négationniste. Il y manque encore une portée morale. L’erreur ou l’ignorance ne suffisent pas. D’une part, le rejet des preuves avancées doit être manifestement malhonnête, d’autre part il doit toucher une matière grave et généralement polémique, par laquelle le négationniste se rend complice des crimes perpétrés contre une vaste population : c’est parce que les négationnistes de la Shoah sont suspectés de sympathie pour les crimes perpétrés par les nazis qu’ils sont généralement également accusés d’antisémitisme, le discours négationniste apparaissant comme la couverture d’un discours de haine qui sans lui ne pourrait s’exprimer. C’est pourquoi les « chevaliers de la Terre Plate » qu’aime tant à citer Rajendra Pachauri, porte-parole du GIEC, n’ont jamais été désignés comme négationnistes, en dépit de l’énormité de leurs erreurs : on ne voit pas à ces erreurs une grave signification morale.
Le négationnisme ne prend cependant sa pleine et entière signification qu’en tant que, du fait de l’indignation large et publique que provoque le caractère polémique des sujets où il se manifeste, la loi en vient à le sanctionner : le négationnisme est dès lors un discours tombant sous le coup de la loi. Par conséquent, le négationnisme reçoit une définition précise, qui ne tient plus seulement à la gravité des faits niés, mais également aux responsables des faits et à leurs victimes.

Pour être justifiée, l’accusation de négationnisme doit remplir ces trois conditions [2] : c’est le cas évidemment du génocide perpétré par les nazis à l’encontre des Juifs. En revanche, les chevaliers de la Terre Plate seront simplement dénoncés comme fous, tandis que tel professeur parisien réduisant les famines organisées par Staline en 1937 à de simples « disettes » tiendra un discours qui scandalisera bel et bien une partie, même restreinte, de la société, mais ne sera pas à proprement parler négationniste : il y manque la sanction de la loi. D’où il suit que, la France n’ayant pas adopté de lois contraignantes interdisant de mettre en cause l’origine anthropique du réchauffement climatique, il n’est pas possible de qualifier en toute rigueur de négationnistes les adversaires du GIEC. En utilisant ce terme, les journalistes ne font que trahir leur désir de voir la loi punir ceux qui les contredisent. On ne voit pas du reste quelle est l’immoralité foncière du « climato-scepticisme », à moins de rendre absolu le principe de précaution.
Mais, surtout, pour remplir ces conditions, il faut évidemment que les actes niés aient déjà été perpétrés, puis constatés, c’est-à-dire qu’ils appartiennent en quelque manière à l’histoire, même la plus immédiate. Personne ne prétend que Sartre, déclarant en août 1939 que l’Allemagne nazie bluffait, et en septembre de la même année que la guerre serait exempte de morts, était pour cela négationniste ; il se trompait simplement assez lourdement. Il n’y a pas eu de négationnisme de la Shoah avant la conférence de Wannsee, et peut-être même avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, le feu des événements ne se prêtant pas toujours à la constatation des faits.

C’est ainsi qu’apparaît avec une grande évidence l’absurdité de l’accusation de « négationnisme climatique ». En effet, nul parmi les personnes contre lesquelles elle est portée ne nie que la Terre ait connu depuis 1975 un réchauffement bénin. Ce que ces personnes contestent, à des degrés divers, c’est d’une part l’origine anthropique de ce réchauffement observé (dont il faut rappeler qu’il n’a en soi rien d’extraordinaire, le climat ayant toujours changé au cours des siècles), d’autre part la certitude qu’il se poursuivra ou que sa poursuite sera nécessairement catastrophique pour « la planète » et ses habitants. Car rappelons-le : pour que l’opinion des « climato-sceptiques » puisse être qualifiée d’incontestablement répréhensible, il faudrait que l’on puisse attribuer avec la certitude la plus absolue le réchauffement climatique au dioxyde de carbone émis par les activités humaines (alors que le GIEC lui-même admet une marge d’erreur de 5 à 10% dans ses travaux) et que l’on puisse dire avec une non moindre certitude que le réchauffement causé par ces émissions serait un désastre pour l’humanité. Or ni le premier point, ni le second (on sait que les périodes froides de l’histoire ont été généralement marquées par sécheresses et famines) ne remplissent une telle condition, comme l’admettent même des membres du GIEC : « Le système climatique n’est pas encore bien compris. La question scientifique n’est pas résolue », a ainsi récemment déclaré Roger Pielke, membre éminent de ce groupe de recherche [3].
Qu’à cela ne tienne. Pour certains journalistes, la question était résolue avant d’avoir été posée : il semble que pour quelques-uns d'entre eux, même chrétiens, le réchauffement d'origine anthropique ne relève plus de la science, mais du dogme de foi. C’est ce qu’illustre l’usage abusif qu’ils font de termes qu’ils s’abstiennent de définir et qui montrent assez ce qu’il y a de vicié dans certains débats actuels.

Louis-Marie Lamotte
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[1] http://benoit-et-moi.fr/2011-III/0455009f700cc020c/0455009fab127e013.html
[2] Il ne s’agit pas ici de se prononcer sur l’opportunité des lois punissant le négationnisme. En soi, les deux premiers critères suffiraient, s’il ne fallait à la réprobation morale dont il est frappé un caractère d’évidence impérieuse que la caution législative leur procure, dans un contexte où la moralité se réduit souvent hélas à la légalité.
[3] http://www.pensee-unique.fr/paroles.html#hiatus

Note de moi

(*) Je renvoie mes lecteurs à cette remarquable réflexion de mon ami le Suisse Romain (ici)

Il écrivait (entre autre):
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Il y a le domaine de la foi, de la vérité, ouvert pour tous et pour chacun. Il y a le domaine des opinions, des options, de goûts et des couleurs. Il faut savoir distinguer. C'est aussi le grand enseignement du Concile Vatican II: l'apostolat de laïcs, l'appel universel à la sainteté en plein monde, tout en étant conscient que l'Eglise ne propose pas de modèle politique, social ou économique, ni même culturel, car la foi féconde de milles manières, tel un fleuve d'eau pure, ces différents champs d'activités.

La profession de la foi est la base commune des catholiques
, au point que le symbole qui vient des contrats grecs où chacuns des deux contractants gardent une partie afin que leur réunion démontrent bien que les deux morceaux se rejoignent, que cela colle, que le courant passe bien entre les personnes, est devenu le concept retenu pour parler du Symbole des Apôtres, du Credo. La foi est le lien qui nous unit alors que les autre affaires nous séparaient.

Le malaise profond [que l'on ressent à la lecture du blog en cause ici] vient que le chrétien doit presque penser ainsi, sous peine d'être catalogué. Au fond, on ne peut plus distinguer les opinions légitimes du symbole de la foi. Le christianisme devient alors un prêt à porter, déjà formaté par le temporel qui doit entrer de force dans ce costume pourtant trop étroit. Une filliation avec une certaine théologie de la libération peut se lire en filigrane.