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J'ai enfin (et à ma honte, seulement...) achevé ce matin la traduction de cette longue et extraordinairement riche improvisation du Saint-Père. (29/2/2012)

Je suis incapable de me livrer à un commentaire, mais il n'est pas vraiment nécessaire.
Il explique dans cette dernière partie le sens du sacerdoce comme charisme, et ce qui en résulte pour le célibat des prêtres.
Et, presque sans transition, les deux sens de l'expression "foi adulte": celui qu'il avait rappelé lors de la fameuse messe avant le conclave, et celui que lui ont donné les catholiques libéraux, comme cela avait été très bien mis en évidence par le résumé en italien de l'Agence SIR, traduit ici: Rencontre avec les prêtres de Rome

-> Voir ici la première partie:
Leçon aux prêtres de Rome



« Et puis, à partir de cette grande vision, Paul descend un peu aux détails, et dit du Christ: « Monté au Ciel, il a fait monter les prisonniers avec lui, il a donné des dons aux hommes » ( Ep. 4.8). L'Apôtre cite le Psaume 68, qui décrit de manière poétique l'ascension de Dieu avec l'Arche d'alliance vers les hauteurs, vers la cime du mont Sion, vers le temple: Dieu vainqueur qui a dépassé les autres, qui sont prisonniers, et qui, comme un vrai vainqueur, distribue des dons. Le judaïsme y a vu plutôt l'image de Moïse, qui gravit le mont Sinaï pour recevoir dans les hauteurs la volonté de Dieu, les commandements, non pas comme un poids, mais comme le don de connaître le visage de Dieu, la volonté Dieu. Paul, à la fin, voit là une image de l'ascension du Christ qui monte en haut après être descendu; il monte et tire l'humanité vers Dieu, il fait place à la chair et au sang en Dieu lui-même; il nous tire vers la hauteur de son «être» le Fils, et nous libère de la prison du péché, il nous rend libres parce que vainqueurs. Etant vainqueur, il distribue les dons. Et ainsi, nous arrivons de l'Ascension du Christ à l'Eglise. Les dons sont la charis en tant que telle, la grâce: être dans la grâce, dans l'amour de Dieu. Et puis les charismes qui concrétisent la charis dans les fonctions individuelles et les missions: apôtres, prophètes, évangélistes, pasteurs et maîtres, pour édifier ainsi le Corps du Christ (cf. Ep 4,11).

Je n'entrerai pas maintenant dans l'exégèse détaillée. On a beaucoup discuté sur ce que veut dire apôtres, prophètes ... En tout cas, nous pouvons dire que l'Eglise est édifiée sur le fondement de la foi apostolique, qui reste toujours présente: les apôtres, dans la succession apostolique, sont présents dans les pasteurs, que nous sommes par la grâce de Dieu et en dépit de toute notre pauvreté. Et nous sommes reconnaissants à Dieu de ce qu'il a voulu nous appeler pour être dans la succession apostolique et continuer à édifier le Corps du Christ.
Ici apparaît un élément qui me semble très important: les ministères - ceux qu'on appelle les ministères - sont appelés «dons du Christ», ils sont des charismes: c'est à dire qu'il n'y a pas cette opposition: d'un côté le ministère, comme une chose juridique, et de l'autre les charismes, comme le don de prophétie, vivant, spirituel, comme présence de l'Esprit et sa nouveauté. Non! Les ministères sont vraiment des dons du Ressuscité, et ils sont des charismes, ils sont des articulations de sa grâce; on ne peut pas être un prêtre sans être charismatique. C'est un charisme, que d'être un prêtre. Cela - il me seùmble - nous devons le garder à l'esprit: être appelé à la prêtrise, être appelé avec un don du Seigneur, avec un charisme du Seigneur. Et ainsi, inspirés par son Esprit, nous devons essayer de vivre ce charisme. Je pense que ce n'est que de cette manière que l'on peut comprendre que l'Eglise en Occident a lié inextricablement prêtrise et célibat: être dans une existence eschatologique vers l'ultime destination de notre espérance, vers Dieu. Justement parce que le sacerdoce est un charisme et doit être aussi relié à un charisme: si ce n'était pas cela, si c'était seulement quelque chose de juridique, il serait absurde d'imposer un charisme, qui est un vrai charisme; mais si le prêtre lui-même est charisme, il est normal qu'il vive avec le charisme, avec l'état charismatique de la vie eschatologique .

Prions le Seigneur qu'il nous aide à comprendre cela toujours plus pleinement, à vivre de plus en plus dans le charisme de l'Esprit Saint et de cette manière, à vivre aussi ce signe eschatologique de la fidélité à l'unique Seigneur, qui, justement à notre époque est nécessaire, avec la décomposition du mariage et la famille, qui ne peuvent se composer que dans la lumière de cette fidélité à l'unique appel du Seigneur.

Un dernier point. Saint Paul parle de la croissance de l'homme parfait, qui atteint la mesure de la plénitude du Christ: nous ne serons plus des enfants, ballottés par les vagues, emportés à tout vent de doctrine (cf. Ep 4,13 à 14). «Au contraire, en agissant selon la vérité dans la charité, nous cherchons à grandir en toutes choses, tendant vers lui» ( Ep 4,15). On ne peut pas vivre dans une enfance spirituelle, une enfance de la foi: malheureusement, dans notre monde, nous voyons cette enfance. Beaucoup, après la première catéchèse, ne sont pas allés plus loin: peut-être que ce noyau est resté, peut-être qu'il a aussi été détruit. Et d'ailleurs, ils sont sur les vagues du monde et rien d'autre; ils ne peuvent pas, en tant qu'adultes, avec compétence et une conviction profonde, exposer et rendre présente la philosophie de la foi - pour ainsi dire - la grande sagesse, la rationalité de la foi, qui ouvre les yeux, même des autres, qui ouvre les yeux sur ce qui est bon et vrai dans le monde. Il manque cet «être adulte» dans la foi et il reste l'enfance dans la foi.

Certes, dans les dernières décennies, nous avons aussi connu un autre usage du mot «foi adulte». On parle de «foi adulte», c'est-à-dire émancipée du Magistère de l'Église. Tant que suis sous ma mère, je suis un enfant, je dois m'émanciper, me libérer du Magistère, je suis enfin un adulte. Mais le résultat n'est pas une foi adulte, le résultat est la dépendance des vagues du monde, des opinions du monde, de la dictature des médias, de l'opinion que tous pensent et souhaitent. Ce n'est pas la véritable émancipation, que l'émancipation de la communion du Corps du Christ! Au contraire, c'est tomber sous la dictature des vagues, du vent du monde. La véritable émancipation est justement se débarrasser de cette dictature, dans la liberté des fils de Dieu qui croient dans le Corps du Christ, avec le Christ ressuscité, et voient ainsi la réalité, et sont capables de répondre aux défis de notre temps.

Il me semble que nous devons prier beaucoup Dieu, pour qu'il nous aide à être émancipés en ce sens, libre en ce sens, avec une foi vraiment adulte, qui voit, qui fait voir et puisse aussi aider les autres à atteindre la perfection vraie, l'âge adulte vrai, en communion avec le Christ.

Dans ce contexte, il y a la belle expression « aletheuein en te agape», être vrais dans l'amour (la charité), vivre la vérité, être la vérité dans la charité: les deux concepts vont de pair. Aujourd'hui, le concept de vérité est un peu l'objet de soupçons, parce qu'on associe la vérité à la violence. Malheureusement, dans l'histoire il y a eu des épisodes où l'on a aussi cherché à défendre la vérité par la violence. Mais les deux sont opposés. La vérité ne s'impose pas par d'autres moyens qu'elle-même! La vérité ne peut venir que par elle-même, sa propre lumière.
Mais nous avons besoin de la vérité: sans vérité, nous ne connaissons pas les vraies valeurs, et comment pourrions-nous ordonner le Kosmos des valeurs? Sans vérité, nous sommes aveugles dans le monde, nous n'avons aucun chemin. Le grand don du Christ est justement que nous voyons le visage de Dieu, et bien que de façon énigmatique et très insuffisante, nous connaissons le fond, l'essentiel de la vérité dans le Christ, dans son corps. Et en connaissant cette vérité, nous grandissons aujourd'hui dans la charité qui est la légitimation de la vérité et nous montre ce qui est vérité. Je dirais que la charité est le fruit de la vérité - l'arbre est connu par ses fruits - et s'il n'y a pas de charité, la vérité n'est pas vraiment appropriée, vécue; et là où est la vérité, naît la charité. Grâce à Dieu, nous le voyons dans tous les siècles: malgré les faits négatifs, le fruit de la charité a toujours été présent dans le christianisme et il l'est aujourd'hui! Nous le voyons dans les martyrs, nous le voyons dans toutes ces religieuses, ces moines et ces prêtres qui servent avec humilité les pauvres, les malades, qui sont la présence de l'amour du Christ. Et sont donc le grand signe qu'ici est la vérité.

Prions le Seigneur de nous aider à porter le fruit de la charité et donc à être témoins de sa vérité.

Merci.

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