Au cœur de l'Église

José-Luis Restàn commente avec son habituelle sensibilité le dernier angélus de Benoît XVI. Traduction de Carlota (26/2/2013)

Alors que les ultimes attaques contre Benoît XVI se concentrent sur la présentation médiatique (particulièrement ignoble) d'un Pape accablé, contraint à la démission par la révélation des turpitudes de son entourage, une sorte de fuite pour échapper au scandale (interprétation qui présente l'avantage supplémentaire de discréditer par avance la décision du Conclave, comme le disait Monique, cf. Dernière campagne contre l'Eglise (II) ), le commentaire de José-Lui Restàn semble une bouffée d'air pur.

Voir aussi:

Le salut du Pape est une prière
Le Pape qui renonce serein

     

Au cœur de l’Église
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Une foule innombrable s’est rassemblée sur la Place Saint Pierre et dans les rues limitrophes pour donner l’avant dernière accolade à son Pape. Un Pape tranquille et confiant qui même a cherché à abréger son habituel commentaire sur l’Évangile du dimanche, peut-être pour éviter qu’il se reconstitue dans une possible exaltation.

Après avoir commenté la montée de Jésus au mont de la Transfiguration, accompagné de Pierre, Jacques et Jean, Benoît a dit qu’il ressent la parole de cet Évangile spécialement adressée à sa personne en ce moment : « Le Seigneur m’appelle à monter sur la montagne pour me consacrer encore plus à la prière et à la méditation ».
Des pleurs et des applaudissements se sont mélangés à Pierre en un moment d’émotion particulière, que le Pape a écourté doucement avec son sourire d’enfant, et un merci peut-être un peu plus intense que d’habitude. « Le Seigneur m’appelle ». Peut-être que c’est la clef que personne n’ose utiliser ces jours-ci, et c’est cependant la seule qui sert.

« Cela ne signifie pas abandonner l’Église », a ajouté Benoît, cette fois avec force, et un geste expressif de son index, comme en coupant court à tant de stupidités et de perfidies des heures présentes. Ce fut le moment le plus rempli de clameurs, quand son peuple l’a étreint avec plus de force, coupant jusqu’à trois fois son intention de poursuivre. « Si Dieu me demande cela c’est pour que je puisse continuer à le servir avec le même dévouement et le même amour que ce que j’ai essayé de faire jusqu’à maintenant, mais d’une façon plus en adéquation avec mon âge et mes forces ».
C'est avec cette simplicité qui désarme qu'a voulu parler l’un des grands théologiens de l’histoire, l’homme qui par obéissance chaussa à 78 ans les sandales du pêcheur et qui maintenant, par obéissance et par amour, entreprend la montée à ce mont d’où l’on pompe la sève à la trame de tout le corps d l’Église.

Ce corps qu’il a aimé en chacun de ses membres, pour lequel il s’est consommé, qu’il a embelli, soigné et dont il a pris soin sans épargner son temps, son intelligence, sa renommée et sa santé. Un corps duquel à tout moment il s’est su un humble ouvrier, et de qui il a reçu à chaque instant l’aliment, la chaleur et le paiement que lui a réservé son Seigneur.

En ces jours je comprends des choses et d’autres me restent opaques.
Je comprends par-dessus tout Benoît XVI, sa parole et ses gestes transparents.
Je comprends tous ces hommes et ces femmes de bonne volonté qui se sentent émus et déconcertées.
Je comprends très bien les ennemis de l’Église, qui en toute logique chargent leur artillerie en ce moment.
Mais je ne peux comprendre les catholiques qui sèment des doutes absurdes, ceux qui pour exalter Pierre dénigrent l’Église à laquelle il s’est remis ni ceux qui affirmant leurs propres préjugés et schémas se rendent aveugles à comprendre la grandeur de cet instant.

En terminant ses Exercices, accompagné par la Curie, le Pape a dit des mots que nous avons besoin de tenir présents les prochains jours: qu’en ce monde né de la bonté et de l’intelligence créatrice de Dieu, le malin cherche continuellement à salir la création pour contredire Dieu et rendre non reconnaissable sa vérité et sa beauté. C'est pourquoi en cette condition historique le Fils incarné doit apparaître comme « caput cruentatum » (ndr référence à la tête mise en sang du Christ) ; Lui et ceux qui le représentent à chaque moment doivent être couronnés d’épines. Et le plus terrible c’est que cette bataille ne se livre pas seulement à l’extérieur mais aussi à l’intérieur de la Sainte Église.

Comme il a dit en prenant congé de ses collaborateurs : « merci pour tout et continuons à cheminer dans ce mystérieux univers de la foi pour que nous soyons chaque fois plus capables de prier, d’annoncer, d’être des témoins de la Vérité qui est belle, qui est Amour ».
Lui n’abandonne pas, il s’introduit entièrement dans le cœur de l’Église.