Changements au sommet de la com' du Vatican

Le Père Lombardi quitte son poste à la tête du CTV, et aura désormais un adjoint à la Salle de presse, chargé des "accréditations". Explications (24/1/2013)

     

Le Père Lombardi appartient d'une certaine façon à l'histoire du Pontificat de Benoît XVI, et de nombreux articles se réfèrent à lui sur ce site. (http://tinyurl.com/a2tfnvt ).
Pour connaître un peu mieux son rôle - et sa personnalité, celle d'un homme extrêmement cultivé, polyglotte, car il maîtrise à la perfection au moins trois langues en dehors de la sienne, mathématicien de formation, et cela se voit - il peut être intéressant de relire ces interviewes.

     

Lu sur Radio Vatican en français:

Créé en 1983 afin de contribuer, comme le faisait déjà Radio Vatican, à l’annonce universelle de l’Evangile, le Centre de Télévision du Vatican change de directeur. Le Pape a nommé ce mardi 22 janvier Mgr Dario Edoardo Vigano de l’archidiocèse de Milan, directeur et secrétaire du conseil d’administration du CTV. Il succède au père Lombardi arrivé là en 2001 et qui est déjà et reste directeur de la salle de presse du Saint Siège et directeur de Radio Vatican.
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Le Père Lombardi peut compter sur l'aide d'un nouveau vice-directeur de la Salle de Presse. Le Pape a nommé un laïc italien, Angelo Scelzo, jusqu’ici sous-secrétaire du Conseil pontifical pour les Communications sociales. Il travaillera aux côtés de l'actuel vice-directeur, le Père Ciro Benedettini, et s'occupera des accréditations des journalistes.

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Les (mêmes) déclarations du Père Lombardi à la presse suscitent généralement deux types de réactions, venant évidemment de milieux bien différents.
D'un côté, elles sont confondues avec des prises de position du Pape (encore qu'il s'en soit toujours défendu, avec une honnêteté qu'il convient de saluer).
De l'autre, ses sorties sont jugées ambigües, et on leur reproche de ne représenter en rien la pensée du pape.
Je n'ai pas d'expérience directe, mais j'imagine qu'il n'est pas facile de faire face au harcèlement des journalistes, quand ils vous pressent de questions sur les sujets les plus polémiques.
Quant à des erreurs, qui n'en fait pas?
Personnellement, je persiste à croire qu'il est loyal au Pape, et qu'il essaie de le protéger (c'est le point essentiel), tout en préservant les intérêts du Saint-Siège, en ne se mettant pas à dos les différents rouages de la Curie, et en restant cordial avec "ses chers confrères" journalistes. Autant dire la quadrature du cercle, et il faut admettre qu'il ne s'en tire pas si mal. J'ajouterais avec une pointe de malice: sa condition de jésuite n'y est peut-être pas étrangère. Mais il lui arrive d'avoir le sang chaud, et je me souviens d'une video où on le voyait remettre vertement à sa place, geste à l'appui, un journaliste français dont j'ai oublié le nom - en le tutoyant - un peu trop insolent, il me semble que c'était à propos des préservatifs.

Bref, l'annonce d'un réorganisation de la Communication du Vatican, au sommet, avec l'abandon par le Père Lombardi du CTV, et la nomination d'un directeur adjoint de la salle de presse, appelle plutôt des commentaires techniques, et n'est pas forcément une disgrâce.
C'est ce que met bien en évidence cet article d'Andrea Gagliarducci (I) - qui apporte par ailleurs une curieuse information sur l'article du Pape dans le Financial Times (cf. http://benoit-et-moi.fr/2012(III)/la-voix-du-pape/le-pape-ecrit-au-monde.php ).
Le second article est d'Angela Ambrogetti (II). Inutile de dire qu'il est de grande valeur, car de la plume d'une journaliste qui connaît vraiment de l'intérieur le monde de la communication du Vatican.
Je partage surtout sa conclusion, qui résume tout:

Il semble clair, cependant, que dans tout ceci, la pensée du Pape sur les médias n'a pas une grande importance. Comme elle n'en a sans doute pas eu dans l'utilisation de Twitter, un moyen d'expression qui ne correspond absolument pas à la façon de s'exprimer et à la personnalité de Joseph Ratzinger. Et les tweets postés jusqu'à maintenant le prouvent.

Explications de deux journalistes italiens de confiance
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L'évolution du monde de la communication du Vatican
Le Père Lombardi quitte la télévision, Scelzo à la Salle de presse

ANDREA Gagliarducci
(Source)

La nouvelle organisation de la communications du Vatican, est-ce la mort douce pour le père Federico Lombardi? Le directeur du bureau de presse du Vatican a perdu depuis hier la direction du Centre de Télévision du Vatican, et aura un autre vice-directeur, qui se consacrera uniquement aux accréditationss. Et les deux nouvelles nominations s'ajoutent à celle de Greg Burke comme consultant de la communication du Vatican, intervenue avant l'été. Comme pour faire passer le père Lombardi à une nouvelle fonction, non plus directeur du bureau de presse du Vatican, mais peut-être président de quelque dicastère du Vatican, avec la dignité épiscopale.

Il y a beaucoup à comprendre, dans les nouvelles nominations annoncées hier par le Bureau de presse du Vatican. Le nouveau directeur du Centre de Télévision du Vatican (CTV) est Mgr Dario Edoardo Viganò. Président de l'"Ente dello Spettacolo" - Société du Spectacle - (la fondation de la CEI en charge du cinéma), directeur de la revue "Il Cinematografo", il est probable que Viganò a été appelé pour apporter de nouveaux langages à la télévision du pape, de plus en plus destinée à se spécialiser vers le documentaire. Simultanément, c'est Angelo Scelzo (avec la compétence spécifique des crédits vidéo), jusqu'à présent sous-secrétaire du Conseil pontifical pour les communications sociales, qui a été nommé directeur adjoint du bureau de presse du Vatican. Jusqu'à présent, c'était précisément le Conseil pontifical pour les communications sociales qui s'occupait des crédits de l'audiovisuel. Désormais, les crédits seront gérés dans une structure unique, comme c'était le cas auparavant, et comme Joaquin Navarro Valls - qui dirigeait le Bureau de Presse du Saint-Siège avant Lombardi - n'avait jamais voulu le faire

Reste cependant à comprendre comment cela va changer les équilibres du Vatican . La présence de Greg Burke (journaliste liée à l'Opus Dei) a en quelque sorte mis à l'écart le père Lombardi. Qui continue à se montrer quand il s'agit de faire des briefing et de parler aux journalistes. Mais qui s'est trouvé déconcerté en face de certaines initiatives. Comme de publier un texte du Pape dans le Financial Times. Le journal britannique - le temple de la pensée laïque - a publié le texte à la page 7, comme si le pape était l'un des nombreux commentateurs de la vie quotidienne. Une opération étrange, aussi parce que le texte du pape n'était pas original (en grande partie tiré de son dernier livre "Jésus de Nazareth") et anticipé d'un blog en anglais, quatre jours avant) et que Lombardi n'en avait rien su.
Ainsi, la communication du Vatican avance par à-coups. Il y a - dit-on - le projet de tout mettre sous le contôle du Conseil pontifical pour les Communications sociales, qui devrait devenir une référence pour le Bureau de presse du Vatican (aujourd'hui, il est sous le contrôle de la Secrétairerie d'État) et pour les communications de tous les dicastères du Vatican. Mais de qui sera composé le Conseil pontifical? Angelo Scelzo parti, que va devenir Mgr. Giuseppe Vincenzo Scotti, qui, à la fonction de secrétaire, ajoute celle de président de la Fondation Joseph Ratzinger et Président du Conseil de surveillance de la Libreria Editrice Vaticana?

© Copyright La Sicilia 23 Janvier 2013

Communication du Vatican, qui dirige?
Angela Ambrogetti
23 Janvier 2013
Korazym.org
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Tout d'abord, félicitations à mes collègues et amis. Angelo Scelzo et Dario Edoardo Viganò nommés par le pape, le premier pour une fonction nouvelle, en tant que directeur adjoint de la presse chargé des accréditations, et le second en tant que directeur du Centre de Télévision du Vatican.
Ensuite, essayons de comprendre ce que signifient ces changements pour la communication du Vatican. Non que ce soit facile, vu que depuis le mois de Juillet, où un nouveau poste a été créé au sein de la Secrétairerie d'État, celui de conseiller en communication, et qu'il a été confié à un journaliste américain de «l'Opus Dei», il semble que la situation médiatique soit en état d'ébullition, mais le «plan éditorial» reste plutôt fumeux.

Commençons par le Centre de Télévision du Vatican, dirigé par le Père Federico Lombardi depuis qu'en 2001 le directeur d'alors, Don Ugo Moretto quittait le sacerdoce pour vivre avec la femme dont il attendait un enfant. Le père Federico Lombardi, déjà directeur des programmes de Radio Vatican prit ses fonctions. Année après année, le CTV continue son travail de documentation de l'activité du Pape et de transmission à travers différents satellites, et Internet. En 2005, la direction de Lombardi affronte les derniers jours du pontificat, puis la mort de Jean Paul II, le conclave et l'élection de Benoît XVI, distribuant des images à toutes les télévisions du monde. Puis tout revient à la normalité, à la routine et journalistiquement parlant le produit le plus intéressant est l'éditorial hebdomadaire (Octava Die) du directeur de la rédaction, toujours repris par les organismes internationaux.
Alors pourquoi ce changement au sommet?

Compte tenu du profil professionnel de Don Edoardo Viganò, on pourrait penser que le CTV misera sur les documentaires pas seulement auto-produits, mais surtout sur la vente d'images et l'utilisation d'opérateurs et monteurs internes associés à des externes, pour des productions. Quelque chose qui se fait déjà, mais don Eduardo a sans nul doute un curricalum très spécialisé et surtout l'énergie et la créativité. Ce pourrait être une opportunité pour dépoussiérer les très riches archives de la CTV et rendre les images du Vatican plus exploitables pour tout le monde. Avec aussi l'ajout d'un bon rendement économique.
Du reste, depuis 2006, le père Lombardi porte le fardeau de trois fonctions loin d'être légères, et le libérer de l'une pourrait signifier que l'important, c'est le poste de directeur de Radio Vatican et de porte-parole (même si il n'a jamais voulu être défini comme tel ) de la Salle de Presse. Et la Salle de Presse acquiert une autre compétence et un nouveau directeur adjoint, un nouvelle figure dans l'organigramme. Angelo Scelzo, un journaliste qui compte une présence à l'Osservatore Romano et à l'Avvenire, après plusieurs années au sein du Conseil pontifical pour les communications sociales, est muté à la Salle de presse pour faire face à l'accréditation des journalistes, tant de la presse papier que des médias audiovisuels.

Le projet était en chantier depuis un certain temps, unifier l'accréditation était une idée que Navarro-Valls avait toutefois refusée. Aujourd'hui, après quelques expériences faites pour la béatification de Jean-Paul II, par exemple, le projet devient réalité.
En même temps, le Conseil Pontifical se lance de plus en plus dans les réseaux sociaux et la communication via Internet, devenu un des chevaux de bataille de Radio Vatican qui, dans de nombreuses zones, ayant abandonné les ondes courtes, utilise le réseau pour l'audio, les textes et la vidéo. Vidéo produites par la CTV. Jusqu'à présent, sous une direction unique, celle du Père Lombardi. Quelle sera la ligne désormais suivie par le professeur Viganò?
Il n'est pas facile de savoir si les nominations d'aujourd'hui arrivent tard, dans un projet d'emcemble du Saint-Siège pour les médias, ou bien s'il s'agit des premières d'une réorganisation qui entraînera également un nouveau porte-parole.
Il semble clair, cependant, que dans tout ceci, la pensée du Pape sur les médias n'a pas une grande importance (autrement dit, il ne s'en occupe pas!). Comme elle n'en a sans doute pas eu dans l'utilisation de Twitter, un moyen qui ne correspond pas absolument pas à la façon de s'exprimer et à la personnalité de Joseph Ratzinger. Et les tweets postés jusqu'à maintenant le prouvent.