Quelques réflexions sur le fardeau de Benoît XVI

Mon amie Teresa passe en revue, avec sensibilité et finesse, les immenses défis du pontificat, et constate l'échec (ou plutôt le refus) d'une grande partie des vaticanistes à le déchiffrer correctement. Une analyse que je partage en profondeur. (26/1/20132)

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Benoît XVI... reste le seul leader mondial capable de conduire la défense de la civilisation et de ses institutions et valeurs traditionnelles".

Quelques réflexions sur le fardeau de Benoît XVI
Teresa
Texte en anglais: freeforumzone.leonardo.it/
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On a assez répété, au point que c'en est presque dénué de sens, que Benoît XVI et l'Église sont confrontés à un monde complètement nouveau par rapport à celui de Jean-Paul II. Mais on n'a jamais fait remarquer que la différence n'est pas seulement les inévitables changements progressifs apportés par les décennies qui séparent 1978, quand Jean-Paul II est devenu pape, et 2005 quand ce fut au tour de Benoît XVI.
Les changements galopants apportés par le progrès technologique et l'influence croissante des médias, anciens et nouveaux, à façonner la pensée et les mœurs publiques, ont produit une mutation quantique dans l'évolution naturelle de la société, telle que les trois dernières décennies du 20e siècle semblent tout à fait rétrogrades et pittoresques par rapport au présent. Les défis rencontrés par Benoît XVI et l'Église d'aujourd'hui ne sont pas seulement générationnels - comme, par exemple, le marxisme et le communisme l'ont été dans le monde, et la crise du sacerdoce dans l'Eglise, au cours de la deuxième moitié du 20e siècle - mais «civilisationnels», pour utiliser un terme par analogie.
L'islam défie ouvertement le christianisme non seulement comme religion dominante dans le monde, mais d'une manière visant à le soumettre, lui et le monde entier, sous un califat universel. Non pas que le marxisme-communisme n'ait pas visé la même chose (sauf que le village global aurait été une communauté-goulag géante, plutôt qu'un califat), ni que le matérialisme athée ait été moins fanatique que l'islam. Mais le marxisme-communisme n'a pas eu la durabilité séculaire de ce dernier - il lui fallait résister à l'épreuve du temps, en quelque sorte, et comme on l'a vu, il a échoué de façon spectaculaire après moins d'un siècle.

Dans le même temps, les forces du sécularisme contre la civilisation-telle-que-nous-l'avons-toujours-connue, ont avancé sans répit et, à ce qu'il semble, à pas de géants, dans leur assaut déterminé contre les institutions de base du mariage et de la famille.
Les concepts de nature, et de loi naturelle, qui n'avaient jamais été remis en question auparavant, dans aucune culture au monde, sont désormais menacés d'être renversés, ou ont déjà été renversés dans certains pays européens et dans certains états des Etats-Unis. La honte, c'est que ceci se passe dans les pays qui étaient autrefois fièrement chrétiens (Europe et Amérique latine) ou encore majoritairement chrétiens (Etats-Unis).

Benoît XVI, qui ne peut être démis de ses fonctions par le vote, mais qui est mortel et qui aura bientôt 86 ans, reste le seul leader mondial capable de conduire la défense de la civilisation et de ses institutions et valeurs traditionnelles. En même temps, il doit également restaurer la primauté de Dieu, et un sens de l'éthique dans les sociétés occidentales, tout en cherchant à reconstruire et à renouveler l'Eglise qui a été si érodée au cours des cinq dernières décennies. Dans tout cela, il a pris l'initiative constamment, systématiquement, sans équivoque. Sans autres armes que la vérité et sa force d'expression, mais avec l'autorité du Vicaire du Christ, la grâce et la protection du Seigneur lui-même.

Mais les médias, à commencer par les Vaticanistes, ne parviennent pas à voir l'immensité du panorama que Benoît doit traiter, dans leur souci de présenter les futilités mondaines, et les frissons bon marché tels Vatileaks ou les prêtres pervers, comme étant la «crise» ou «le principal problème de Benoît».
Une vue aussi bornée est épouvantable et inexcusable.

C'est comme s'ils résistaient inconsciemment à l'idée que Benoît XVI doit réellement faire face à des défis bien plus grands que tout ceux auxquels Jean-Paul VI a dû faire face pendant 26 ans. Comme s'ils ne pouvaient accepter la réalité que cet octogénaire, aux manières si douces, tellement modeste (en dépit de tous ses grands dons si évidents, et de ses réalisations déjà considérables en tant que Pape), ce "grand-père du monde", était capable de laisser sa marque dans l'histoire - une marque qui sera, au minimum, non moins importante que celle de son grand prédécesseur.

En somme, il semble y avoir une fuite délibérée de l'idée que l'adjectif «grand» pourrait jamais être utilisé pour Benoît XVI, comme il l'a tellement été pour Jean-Paul II, même de son vivant. Un préjugé évident dès le début, que je ne pourrais jamais comprendre, étant donné que Joseph Ratzinger a le CV le plus brillant de tous les cardinaux dans les deux derniers siècles avant de devenir pape.

Contre une telle perversité des médias, au-delà de toutes les adversités globales qui alourdissent la Croix qu'il doit supporter jour après jour, Dieu veuille accorder à notre Saint Père de nombreuses autres années fructueuses, et puisse-t-il faire émerger de nouveaux leaders capables de le soutenir.