Voeux au corps diplomatique

Malheureusement, surtout en Occident, on trouve beaucoup d’équivoques sur la signification des droits de l’homme et des devoirs qui leur sont liés. Les droits sont souvent confondus avec des manifestations exacerbées d’autonomie de la personne, qui devient autoréférentielle, n’est plus ouverte à la rencontre avec Dieu et avec les autres et se replie sur elle-même en ne cherchant à ne satisfaire que ses propres besoins. (7/1/2013)

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Extrait

La construction de la paix passe toujours de nouveau par la protection de l’homme et de ses droits fondamentaux. Cette tâche, même si elle est menée avec des modalités et une intensité diverses, interpelle tous les pays et doit constamment être inspirée par la dignité transcendante de la personne humaine et par les principes inscrits dans sa nature. Parmi ceux-ci figure au premier plan le respect de la vie humaine, dans toutes ses phases. A cet égard, je me suis réjoui qu’une Résolution de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, en janvier de l’année dernière, ait demandé la prohibition de l’euthanasie, comprise comme un meurtre volontaire, par acte ou par omission, d’un être humain en état de dépendance. En même temps, je constate avec tristesse que, en divers pays, même de tradition chrétienne, on a œuvré pour introduire ou pour amplifier des législations qui dépénalisent ou libéralisent l’avortement. L’avortement direct, c’est-à-dire voulu comme une fin ou comme un moyen, est gravement contraire à la loi morale. Par cette affirmation, l’Église catholique ne manque pas de compréhension et de bienveillance, y compris envers la mère. Il s’agit, plutôt, de veiller afin que la loi n’en arrive pas à altérer injustement l’équilibre entre le droit à la vie de la mère et celui de l’enfant à naître, qui appartient à l’un et à l’autre de façon égale. Dans ce domaine, est également source de préoccupation le récent arrêt de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, relatif à la fécondation in vitro, qui redéfinit arbitrairement le moment de la conception et fragilise la défense de la vie prénatale.

Malheureusement, surtout en Occident, on trouve beaucoup d’équivoques sur la signification des droits de l’homme et des devoirs qui leur sont liés. Les droits sont souvent confondus avec des manifestations exacerbées d’autonomie de la personne, qui devient autoréférentielle, n’est plus ouverte à la rencontre avec Dieu et avec les autres et se replie sur elle-même en ne cherchant à ne satisfaire que ses propres besoins. Pour être authentique, la défense des droits doit, au contraire, considérer l’homme dans son intégralité personnelle et communautaire.

Poursuivant notre réflexion, il vaut la peine de souligner comment l’éducation est une autre voie privilégiée pour la construction de la paix. La crise économique et financière actuelle, entre autre, nous l’enseigne. Elle s’est développée parce que le profit a été trop souvent absolutisé, au préjudice du travail, et qu’on s’est aventuré sans retenue sur les voies de l’économie financière, plutôt que sur les voies de l’économie réelle. Il convient donc de retrouver le sens du travail et d’un profit qui lui soit proportionné. À cette fin, il est bon d’éduquer à résister aux tentations des intérêts particuliers et à court terme, pour s’orienter plutôt vers le bien commun. En outre, il est urgent de former les leaders, qui, dans l’avenir, guideront les institutions publiques nationales et internationales (cf. Message pour la XLVIème Journée mondiale de la paix, 8 décembre 2012, n. 6). L’Union Européenne a aussi besoin de Représentants clairvoyants et qualifiés, pour faire les choix difficiles qui sont nécessaires pour redresser son économie et poser des bases solides pour son développement. Seuls, certains pays iront peut-être plus vite, mais, ensemble, tous iront certainement plus loin ! Si l’indice différentiel entre les taux financiers constitue une préoccupation, les différences croissantes entre un petit nombre, toujours plus riche, et un grand nombre, irrémédiablement plus pauvre, devraient provoquer le désarroi. Il s’agit, en un mot, de ne pas se résigner au « spread du bien-être social » (ndt: il s'agit manifestement d'un message spécifique à l'Italie!!), alors qu’on combat celui de la finance.

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En poursuivant notre entretien d’aujourd’hui, je voudrais ajouter que la paix sociale est aussi mise en péril par certaines atteintes à la liberté religieuse : il s’agit parfois de marginalisation de la religion dans la vie sociale; dans d’autres cas, d’intolérance ou même de violence envers des personnes, des symboles identitaires et des institutions religieuses. Il arrive aussi que des croyants – et particulièrement des chrétiens – soient empêchés de contribuer au bien commun par leurs institutions éducatives et d’assistance. Pour sauvegarder effectivement l’exercice de la liberté religieuse, il est ensuite essentiel de respecter le droit à l’objection de conscience. Cette “frontière” de la liberté touche à des principes de grande importance, de caractère éthique et religieux, enracinés dans la dignité même de la personne humaine. Ils sont comme “les murs porteurs” de toute société qui se veut vraiment libre et démocratique. Par conséquent, interdire l’objection de conscience individuelle et institutionnelle, au nom de la liberté et du pluralisme, ouvrirait paradoxalement au contraire les portes à l’intolérance et au nivellement forcé.