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Aparecida, document programmatique du Pontificat

Les décisions qui ont conduit à la synthèse finale, élaborée sous la responsabilité du cardinal Bergoglio, en 2007 ont été prises « de bas en haut »… et non l’inverse. Une analyse intéressante d’un site autrichien catholique libéral.(27/7/2013)

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Le pape est retourné dans le sanctuaire où s'est tenue l'ultime Conférence du CELAM (la Conférence épiscopale d'Amérique latine), dont le document final est presque devenu un programme de pontificat, titrait Andrea Tornielli dans un billet intitulé "Bergoglio et le secret d'Aparecida", précisant que cette étape a Aparecida ne figurait pas dans le programme prévu initialement pour Benoît XVI.

Et il ajoute:
Un document fondamental pour la mission dans ce qui fut défini comme "Le Continent de l'espérance" mais qui, spécialement après l'élection de François, a une valeur que ne se limite pas à ses seuls confins: il reflète en effet son regard prospectif sur l'évangélisation.

     

Le Pape actuel a donné son empreinte au document d'Aparecida
Katholisce Presseagentur Österreich
(http://www.kathweb.at/)
Ma traduction, d'après la traduction en italien sur le site finesettimana.org.

24 juillet 2013
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Mercredi, Aparecida, ville située dans l'Etat brésilien de Sao Polo, était totalement absorbée par la visite du Pape qui, dans le cadre de son voyage au Brésil, s'est rendu au plus grand centre brésilien de pèlerinage marial.
Il y a six ans, durant trois semaines, en mai 2007, dans la même ville, les évêques de la Conférence épiscopale d'Amérique latine (CELAM), durant leur assemblée générale, s'étaient affrontés durement sur un texte. Au terme de la rencontre d'Aparecida fut présenté un document qui devait établir le cours de l'Eglise pour le sous-continent.
C'est le cardinal Bergoglio, l'actuel Pape François, qui fut responsable de l'élaboration de ce document.
Dans une interview à la revue "30 Giorni" (1) en novembre 2007, Bergoglio indiquait comme caractéristique de ces travaux qu'ils s'étaient déroulés "du bas vers le haut, et non l'inverse".

Et c'est justement pour cette raison que l'Assemblée générale du CELAM (la cinquième) était considérée comme "un moment de grâce pour l'Eglise latino-américaine" - une indication de comment l'Eglise en général pourrait parvenir à prendre des décisions et à se poser des objectifs.
Au-delà de la fraternité qui s'était décantée entre les 160 évêques et les 100 représentants de congrégations, organisations laïques, autres confessions et religions des plus de 20 états brésiliens, il y eut forcément des oppositions de contenus.
"Il faut certes lutter pour défendre sa propre position" disait alors l'évêque austro-brésilien Erwin Kräutler. Lui s'intéressait surtout aux droits des populations indigènes, l'environnement et les communautés de base. A la fin, on est parvenu à un consensus sur 120 pages, subdivisé en trois parties et dix chapitres.
Ils traitent de pastorale des prisons, d'écoles catholiques, de dignité humaine et de médias.
Le document donne à chaque chrétien individuel la responsabilité d'annoncer sa propre foi et de la vivre au quotidien. Selon les évêques, ceci comporte que les laïcs au service de l'Evangile jouent un rôle dans la société, dans la politique et dans l'économie. Particulièrement remarquables, les affirmations sur la femme dans l'Eglise et dans la société: classiquement, les évêques en soulignent le rôle de mère, mais ils demandent en même temps une meilleure compatibilité entre la vie de famille et le travail. Et à leur avis, les femmes doivent aussi participer aux décisions dans l'Eglise. Toutefois, le document ne se rapproche pas non plus de l'ordination des femmes.
En compensation, il affronte un autre thème qui continue à être d'actualité: l'écologie. Il invite expressément à la défense de la région amazonienne. En outre, il réclame le respect de la culture des populations indigènes, il parle même d'une Eglise "au visage indigène". En prémisses, il y a une analyse de la situation: les évêques énumèrent les problèmes et les défis, comme la pauvreté croissante, les inégalités sociales et les migrations. Comme causes, il reconnaissent la consommation croissante, et une société déterminée par la mondialisation.

Le document d'Aparecida suit le parcours en trois phases: "Voir - juger - agir". Il s'agit d'une méthode pour assumer les décisions qui est en étroite relation avec la théologie de la libération. A "l'option préférentielle pour les pauvres" - principal slogan de la théologie de la libération depuis la seconde conférence de la CELAM à Medellin en 1968 - le texte consacre même une section spécifique d'un chapitre.
Le théologien de la libération Paolo Suess, d'origine allemande, évalua ce point comme un fait encourageant, même si, pour d'autres aspects, il trouvait le document "tiède". C'est pourquoi, naturellement, il y eut des critiques: le document était de loin moins pointu dans l'analyse et moins courageux dans les requêtes que celui de Medellin. Et à la fin, il y eut aussi des contrariétés de la part du Vatican.

Benoît XVI avait ouvert la conférence durant son voyage au Brésil et donna, avec sa signature, le feu vert pour la publication du document (1).
Seulement qu'entretemps, après les évêques, d'autres ré-élaborateurs étaient intervenus (ndt: ce n'est pas ce qui ressort de l'interviewe de Bergoglio à "30 Giorni"). Dans 127 des 554 paragraphes, beaucoup de formulations, par exemple relativement aux communautés de base, furent changées, en atténuant la portée. Qui avait rédigé ces changements, si c'étaient des latino-américains ou des gens des bureaux du Vatican, on ne le sait pas. La confiance entre les responsables de l'Eglise du sous-continent et celle centrale, à Rome, n'a de toutes façons pas renforcé l'action.
A présent, c'est un "de là-bas", c'est-à-dire Jorge Bergoglio lui-même, l’auteur d'Aparecida, qui est, en tant que Pape François, responsable pour la doctrine et pour le style de la direction de l'Eglise universelle.

Note

(1) 30 giorni (novembre 2007):

BERGOGLIO: Le document final, qui est un acte du magistère de l’Église latino-américaine, n’a subi aucune manipulation. Ni de notre part, ni de celle du Saint-Siège. Quelques petites retouches de style, de forme, ont été apportées et un petit nombre de choses ont été enlevées d’un côté et réintroduites de l’autre. La substance donc est restée la même, elle n’a absolument pas changé. Et cela, parce que ce document a été rédigé dans un climat de collaboration authentique et fraternelle, de respect réciproque et que le travail a suivi un mouvement de bas en haut et non l’inverse. Pour comprendre ce climat, il faut considérer ce qui constitue à mes yeux les trois points-clefs, les trois “piliers” d’Aparecida. Le premier va précisément du bas vers le haut. C’est peut-être la première fois que notre Conférence générale ne part pas d’un texte de base pré-confectionné mais d’un dialogue ouvert. Celui-ci avait d’ailleurs déjà commencé auparavant entre le CELAM et les Conférences épiscopales et s’est poursuivi par la suite.

Q. :Mais les directives de la Conférence n’avaient-elles pas déjà été indiquées par l’intervention d’ouverture de Benoît XVI?
BERGOGLIO: Le Pape a donné des indications générales sur les problèmes de l’Amérique latine mais a laissé ensuite la voie libre: faites, vous, faites, vous! C’est très grand cela, de la part du Pape. La Conférence a commencé par les exposés des vingt-trois présidents des différentes Conférences épiscopales qui ont préludé à la discussion sur les thèmes dans les différents groupes. La rédaction du document a elle aussi été ouverte à la contribution de tous. Au moment de recueillir les “versions” pour la deuxième et troisième rédaction, il en est arrivé 2.240! Notre position était de recevoir tout ce qui venait d’en bas, du peuple de Dieu, et d’en faire non pas une synthèse mais plutôt une harmonie.