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Becciu dit: c'est un peu curieux…

JL Restàn consacre son dernier billet à la ferme mise au point du n° 2 de la Secrétairerie d'Etat, à propos des rumeurs sur la réforme de Curie et de l'IOR. Traduction de Carlota (7/5/2013)

Lu sur RV

Réforme de la Curie : mise au point de Mgr Becciu
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« Il est absolument prématuré d’avancer une quelconque hypothèse concernant le futur aménagement de la Curie ». Mgr Angelo Becciu, substitut de la secrétairerie d’Etat, modère les ardeurs suscitées par la décision prise le 13 avril dernier par le pape François de créer un groupe de huit cardinaux pour le conseiller dans le gouvernement de l’Eglise universelle et pour étudier un projet de réforme de la constitution apostolique Pastor Bonus.

Dans une interview accordée mardi au quotidien du Saint-Siège, l’Osservatore Romano, Mgr Becciu rappelle que le pape « écoute tout le monde, mais d’abord et avant tout ceux qu’il a choisis comme conseillers ».
(RV en français)

     

Becciu dit: c’est un peu curieux…
José Luis Restán
07/05/2013
http://www.paginasdigital.es
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Le 1er mai dernier le Bulletin de la Salle de Presse du Saint Siège publiait un entretien accordé par le Substitut de la Secrétairerie d’État, Angelo Becciu, à L’Osservatore Romano. Les sujets abordés n’étaient pas de nature à laisser les vaticanistes indifférents, mais encore moins le procédé singulier, indicatif de l’importance et de la résonnance que l’on prétendait donner à cette pièce. C’est un cas où l’on pourrait dire même « le media est le message ».

La vérité est que l’interviewe est claire comme le cristal, et ne cache pas le désir de réfuter point à point, depuis le sommet de Vatican, une série d’interprétations idéologiques, de lectures fantaisistes et de projets personnels ou de groupe, qui ont accompagné comme un chœur désaccordé (ndt le mot espagnol a aussi le double sens d’inopportun) les dernières semaines au Saint Siège. Le grincement a été intense malgré ce que certains considèrent comme une « lune de miel » des grands médias avec cette première phase du pontificat de François.
Les thèmes abordés par l’archevêque Becciu font référence à l’annonce de la réforme de la Curie, la signification du groupe de huit cardinaux nommés pour conseiller le pape et le futur de l’IOR (connu avec une certaine simplicité comme Banque du Vatican). Des matières à ne pas laisser indifférents les faiseurs d’opinion (ndt : ‘opinion makers’, en anglais dans le texte original) du Vatican, très actifs ces deux derniers mois. Il est très possible que l’immense majorité du peuple fidèle ait vécu et vive avec une joie simple exempte de polémiques les événements de l’Église depuis février, mais il ne faut pas non plus écarter l’impact qu’à moyen terme peuvent avoir certaines rengaines.

Le style des réponses est franc et même ironique, quand, par exemple il est fait référence au déluge d’idées publiées sur la future réforme de la Curie, quelque chose que Mgr. Becciu considère « un peu curieux » car « le Pape n’a pas encore réuni le groupe de conseillers qu’il a choisis et déjà pleuvent les conseils… ». Des conseils que personne n’a demandés, ce que n'a pas diit le Substitut, mais on l’a compris. Et en outre il a laissé noir sur blanc un avis, parce que sa faconde a aussi atteint des membres notables de la Curie : tous les responsables des différents dicastères continuent à être en fonction jusqu’à nouvel ordre (donec aliter provideatur), puisque le Saint Père veut prendre son temps pour la réflexion et la prière, et comprendre ainsi mieux quelle est la situation. Par conséquent sur la Curie, il n’y a pas d’urgence, le Pape veut bien étudier les choses et ne désire pas que quelqu’un lui fournisse des recettes pré-cuisinées (et spécialement de la part de ceux à qui on ne les a pas demandées).

Le plus gros morceau, si c’était posible, c’est l’affaire que certains appellent déjà le G8 des cardinaux. Sur lui, le pendule a oscillé entre l’enthousiasme de ceux qui voient une redéfinition démocratique de l’Église et le scandale de ceux qui ne se cachent pas à l’heure d’accuser d’une démolition de la papauté. Mgr. Becciu répond : « il s’agit d’un organisme consultatif, non de prise de décisions et je ne vois pas comment le choix du Pape François pourrait mettre en doute la primauté ». Néanmoins il précise qu’ « il s’agit d’un geste d’une grande importance, qui veut donner un signal clair sur les formes dans lesquelles le Saint Père exerce son ministère ». Interrogé sur le fait de savoir si la fonction de conseil ne s’avère pas quelque peu générique, il répond : « elle doit être interprétée depuis une perspective théologique », et que dans l’histoire de l’Église, « l’action de conseil a une fonction d’importance absolue pour aider le supérieur a discerner… à comprendre ce que l’Esprit demande à l’Église a un moment déterminé ». À ceux qui sont fâchés, Mgr. Becciu réserve ce commentaire : « sans cette référence (au rôle du conseil), on ne comprend rien à la véritable signification du gouvernement dans l’Église ».

L’autre question abordée fait référence à l’IOR, l’Institut pour les Œuvres Religieuses, et à la légende qui court en ville, selon laquelle il pourrait être supprimé. Une fois de plus Becciu parle directement, au nom du Pape au cours de l’entretien, pour dire que François « s’étonne qu’on lui attribue des phrases qu’il n’a jamais prononcées et que l’on transforme sa pensée ». Sur l’IOR, le Pape a fait une mention au cours de l’homélie improvisée à Sainte Marthe, dans laquelle il a rappelé que « l’essence de l’Église consiste en une histoire d’amour entre Dieu et les hommes, et combien les différentes structures humaines, l’IOR inclus, sont moins importantes ». Il s’agit par conséquent d’une invitation à ne pas perdre de vue la nature essentielle de l’Église, en ce qui concerne l’IOR, car à la Messe participaient différents employés du dit institut. Mais en aucun cas il ne s’agissait de l’annonce d’une démolition. Mais c’est que dernièrement quelques démolisseurs confondent la réalité avec leurs pensées (*).

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Remarques de Carlota

(*) Nous en avons un exemple flagrant actuellement en France avec le combat que nous menons contre la loi dite Taubira. Une personne très médiatisée qui se présente auprès de Français pas vraiment au courant de la vraie doctrine de l’Église, comme étant une catholique engagée, déclare que le Pape François est pour le contrat civil (une revendication qui est également, et sauf exception, celle des politiques de l’ancienne majorité présidentielle), mais contre le « mariage » unisexe. Il s’agit évidemment d’une information fausse dont la diffusion à partir d’un journaliste argentin a été reprise, comme par hasard, par le New York Times (cf les excellentes mises au point, en français, de Jeanne Smits sur son blogue).[1]
Par ailleurs, je demande à mes éventuels lecteurs de regarder leur quotidien régional de France métropolitaine du lundi 6 mai 2013 et de chercher le nombre de lignes consacrées aux manifestations anti-loi Taubira de la veille dans toute la France. Un exercice salutaire ! Dans celui que j’ai eu sous les yeux, je n’en ai pas vu mentionné une seule ligne, mais j’ai appris qu’une manifestation d’un millier de personnes contre je ne sais plus quoi avait eu lieu à Moscou ! Étonnant quand l’on sait que dans les grandes capitales régionales françaises comme Lyon et Rennes, par exemple, plus de 20 000 personnes (grands-parents, parents et enfants) s’étaient déplacés…sans parler des initiatives plus locales : « Les démolisseurs confondent la réalité avec leurs pensées » ; les idéologies aussi.

NDLR

[1] Il en a été question ici: Une enquête de John Allen en Argentine
Tout ce que j'affirmerais, c'est qu'il s'agit d'une rumeur non confirmée, et que ce n'est pas la première fois que John Allen se tromperait!!