Accueil | D'un Pape à l'autre | Retour au Vatican | Collages de Gloria | The hidden agenda | Lumen Fidei | Lampedusa | Benoît et les jeunes

Changement de "communication"

Des questions sur la (nouvelle) communication du Saint-Siège (30/3/2013)

>>> Image ci-contre sur le site de La Croix, illustrant un article "Y a-t-il encore un Pape à Rome?"

     

François à Casal del marmo

Des images (certes très belles et émouvantes) de la Messe de la Cène du Seigneur, dont le Père Lombardi nous avait pourtant annoncé qu'il n'y en aurait "naturellement" pas, pour préserver l'anonymat des jeunes protagonistes.

On se souvient que durant tout le Pontificat de Benoît XVI, la "communication" du Saint-Siège (lire: celle voulue par le Pape d'alors) a été présentée comme la pierre d'achopement contre laquelle ont buté toutes les tentatives des medias pour comprendre l'Eglise. Et elle a été la cause de toutes les crises, par son incompétence, sa maladresse, bref, elle était catastrophique.
Depuis le 13 mars, tout a changé, et c'est un autre sympôme de la rupture: elle devient chaque jour plus réactive, plus performante.
Le Père Lombardi commente quasiment en temps réel toutes les activités du nouveau Pape et désamorce avec la même célérité chaque début de polémique.
Ainsi en a-t-il été récemment du lavement des pieds administré le jour du Jeudi Saint, à la prison pour mineurs de Casal del Marmo, à 12 jeunes, parmi lesquels des musulmans et des filles; puis du fait que François ne s'agenouille ni ne chante durant les célébrations (ce qui serait dû à sa condition de jésuite, les jésuites sont peu attachés à la liturgie, fait confirmé par le Père Scalese) [1]; et encore de sa volonté de ne s'exprimer qu'en italien (il ne veut privilégier aucune langue). Etc.

Fort bien: mais pour en revenir à mon propos de départ, on peut juste regretter que le même zèle n'ait jamais été déployé pendant sept ans par le Père Lombardi (nommé, le 11 juillet 2006, directeur de la salle de presse du Saint-Siège, en remplacement de Joaquín Navarro-Valls), pour défendre Benoît XVI, lorsque des accusations autrement plus graves tombaient sur lui.

Continuité entre les deux papes
------

Plus préoccupante est ce qui me semble être l'utilisation (j'allais écrire l'exploitation, le mot est peut-être excessif) de Benoît pour justifier François, ou du moins pour accréditer une idée de continuité entre les deux Pontificats, dont le moins que l'on puisse dire pour le moment est qu'elle ne saute pas aux yeux.
Le but est peut-être louable, mais le procédé me gêne. [2]

Je m'explique: il est certain que tous ceux qui aiment Benoît XVI sont heureux de le voir, de l'entendre, et à défaut, d'avoir de ses nouvelles. Pour moi, d'un point de vue humain, la rencontre "des deux Papes", le 23 mars, fut une très grande joie.
Mais des gens malintentionnés pourraient trouver à redire au fait qu'alors que le Saint-Père Benoît avait annoncé qu'il serait désormais silencieux et caché au monde - et il n'y a absolument aucun doute que telle était bien son intention - il a déjà été filmé, dans des images qui ont fait le tour du monde. Plusieurs sites conservateurs ont à ce propos posé la question: "qui est le Pape?".
C’est une question qui ne me taraude pas - d’autant plus que Benoît avait lui-même, lors de ses dernières interventions publiques, levé toute ambiguïté - mais que l'on ait pu la poser, avec des éléments objectifs pouvant la justifier, me blesse beaucoup.

Un coup de téléphone
--------
Dernier épisode en date, lors d'un de ces briefings à la presse qui semblent désormais se multiplier [3], le Père Lombardi a révélé qu'hier, François avait téléphoné à Benoît. "Une conversation, très intense et significative", a-t-il dit. Etait-il présent? Devait-il faire état d'une conversation privée? Il ne peut pas ne pas venir le soupçon d'un geste de communication, dans un but précis (comme toute communication) et cela aussi me gêne profondément.
Benoît est un objet d'amour, de respect, de vénération, pas un instrument-alibi pour spin doctor en mal d'idées.

Je me permets donc très respectueusement de demander aux « communicants » du Saint-Siège de laisser le Saint-Père Benoît à l’écart de leurs opérations de marketing papal. La transparence si réclamée par le monde (essentiellement pour l'Eglise), s'arrête là où commence le Mystère, et pour moi, il n'y a pas de doute, la conversation entre les deux hommes en blanc devait rester secrète, je ne parle même pas de son contenu, mais de son existence. Sans compter que leur insistance risque à la longue d'être contre-productive: non pas pour Benoît, qui est bien au-dessus de tout cela, mais pour le Pape François, pour l'Eglise, et pour l'institution même de la papauté.
J'ai malheureusement peu d'espoir d'être entendue.

* * *

[1] "Les Jésuites ne chantent pas et ne sont pas des spécialistes des rubriques liturgiques".

[2] "Le sens de la communion entre le Pape François et le Pape émérite a été souligné par un coup de téléphone long, très intense et significatif, après la grande célébration communautaire du Jeudi Saint". Les mots du Père Lombardi, qui hier rapportait les impressions de Mgr Xuereb, ex-secrétaire de Joseph Ratzinger et à présent aux côtés de Jorge Maria Bergoglio, confirment que même dans le vif des célébrations pascale, une ligne directe fonctionne désormais entre la cité du Vatican et Castelgandolfo, la résidence papale qui, depuis le soir du 28 février, héberge le protagoniste du grand retrait. (source)

[3] http://paparatzinger6blograffaella.blogspot.fr