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La langue de l'Empire

Carlota a traduit un article de l'historien espagnol atypique Pio Moa - souvent rencontré dans ces pages - qui dénonce un penchant de nos voisins ibériques que nous partageons largement: la colonisation linguistique (31/5/2013)

     

Lu ces jours-ci sur internet:
Le projet de loi sur l’enseignement supérieur et la recherche, qui vise à améliorer la réussite étudiante et élargit l’enseignement en anglais, a été adopté mardi à l’Assemblée nationale, avec les voix des seuls socialistes et radicaux de gauche.
Le texte défendu par la ministre Geneviève Fioraso a recueilli 289 voix pour et 248 voix contre, associant l’UMP et l’UDI, mais aussi les écologistes et le Front de Gauche, opposés au texte pour des raisons différentes.

     

La résistance est aussi linguistique

La Résistance, c’est aussi par rapport à sa culture et sa langue.
L’acculturation est une arme de guerre du Nouvel Ordre Mondial et de son empire. Cela ne date pas d’hier et nous, peuples aux parlers d’origine latine, nous savons ce que cela veut dire, même si cette langue qui fut imposée à nos ancêtres a finalement, grâce à l’Eglise, permis que notre civilisation demeure face aux Grandes Invasions et aux multiples aléas de l’histoire. Mais malheureusement nous sommes en train de vivre actuellement un phénomène peut-être plus grave encore car nous avons en plus rejeté le « bouclier » mental issu de cet héritage chrétien.
L’acculturation, un sujet brûlant d’actualité au moment où l’État français sous prétexte d’avoir des étudiants étrangers (et de rentabiliser ses universités), va autoriser la généralisation de l'enseignement en langue étrangère (examens compris) et donc en anglais !
L’historien espagnol Pío Moa revient sur cette acculturation qui est considérable en Espagne, tant à l’époque du triomphant PSOEisme (notre PS) et son alternance PePeiste (notre UMP), des partis frères « siamois » dans ce domaine comme dans tant d’autres.

Original du texte de Pío Moa sur son blogue « Présent et passé » hébergé ici
http://www.intereconomia.com/blog/presente-y-pasado/aculturacion-espana-neutralidad-informativa-20130522

(Carlota)

L’Acculturation en Espagne
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Par acculturation, on entend un processus par lequel une société perd totalement sa propre culture ou d’une façon importante, au profit d’une autre étrangère. Ce processus se trouve en marche en Espagne depuis pas mal d’années, dans une progression chaque jour plus accélérée au bénéfice de la culture anglo-saxonne et de langue anglaise. Cela se manifeste dans des phénomènes comme les suivants :
- Pour la jeunesse et leurs parents, la culture et l’histoire espagnoles, ou bien sont inconnues à un degré surprenant, ou bien sont méprisées. Communément l’ignorance et le mépris vont ensemble. L’héritage culturel s’enseigne dans les écoles, généralement d’une façon très partielle, avec une pédagogie ennuyeuse qui l’éloigne de la réalité et des préoccupations actuelles des jeunes.
- La jeunesse et la population souffrent majoritairement d’une banalisation intense et systématique, de sorte que son (in)culture, à part les connaissances techniques professionnelles, se limite au football, aux cancans, au vedettariat, au cinéma (presque toujours anglo-saxon), à la discothèque, aux jeux d’ordinateurs (généralement en anglais), à la télévision en priorité télé-poubelle,, aux cuites ou à la sexualité envisagée « zoologiquement » comme disait le philosophe espagnol Julián Marías (mort en 2005). Une grande partie de ces influences se reçoivent en anglais.

- L’anglais est devenu omniprésent dans la publicité des tous les médias et sur la voie publique (presque toujours accompagnée d’un érotisme banal et homosexuel avec une fréquence croissante).
- L’anglais se présente comme une langue « indispensable » sans laquelle « on ne peut rien faire », en reléguant chaque fois plus l’espagnol à des niveaux familiaux ou sous - culturels.
- Sur les réseaux sociaux on apprécie cette bigoterie pour l’anglais: l'elspanglish (ndt écrit ainsi dans le texte d’origine comme nous disons le franglais) écrase, l’espagnol s’écrit avec des fautes continuelles d’orthographe et de syntaxe, les messages et communications sont habituellement extrêmement vulgaires ou de mauvais goût. Beaucoup s’y présentent avec des textes en anglais, bien qu’ils soient écrits pour des Espagnols. La perte de conscience de sa culture propre se manifeste dans le très fréquent usage du mot « Spain » (ndt: cf chez nous le « Made in France »), y compris pour une partie des personnes qui se considèrent patriotes. L’usage de tournures et des phrases en anglais est constant, qu’elles soient ou non à propos, en se substituant même à des expressions espagnoles courantes, et on fait à peine un effort pour en traduire beaucoup d’autres qui arrivent en avalanche.
- Les politiques stimulent ces tendances et les imposent, comme Hope Aguirry (ndt: comprendre Esperanza Aguirre, Parti Populaire, qui fut notamment ministre de l’Education Nationale, président du Sénat, président de la Communauté de Madrid jusqu’à tout récemment) à Madrid, moyennant l’enseignement de l’anglais non pas comme langue étrangère mais en l'assimilant institutionnellement à l’espagnol et en le présentant comme la langue de la haute culture (les sciences, la pensée, l’art, etc. le commerce aussi). De façon négligée l’espagnol reste pour les manifestations inférieures de la culture, très souvent, sur un plan grossier : l’essor des gros mots et des expressions simplistes et maladroites avec des références sexuelles s’est généralisé parmi les jeunes des deux sexes et chez leurs parents, formés eux aussi par la télé-poubelle.
- Les entreprises espagnoles prennent l’habitude de mettre des noms en anglais, y compris en renonçant à des marques accréditées en espagnol. Le pays est l’un des moins inventifs d’Europe, mais les quelques inventions qui sortent reçoivent un nom anglais.
- Quelques formateurs d’opinion, avec une tromperie délibérée dans certains cas ou inconsciente dans d’autres, présentent cette acculturation comme un bénéfice qui dans un « monde mondialisé » nous rend plus « cosmopolite » ou améliore notre « compétitivité ». La réalité est la satellisation à la culture anglo-saxonne, en convertissant la culture espagnole en une parodie d’elle-même, alors que la culture espagnole s’est progressivement stérilisée. Le processus est lié à un « européisme » béat et faux de la pensée.

L’effort que font beaucoup d’Espagnols pour défendre cette acculturation comme un fait positif est surprenant. Surprenant parce que, en général, ceux qui en bénéficient, les Etats-Unis et l’Angleterre, ne les paient en rien. Les Anglomanes travaillent gratis avec le même enthousiasme servile et snob que celui qu’ils emploient pour mépriser et ignorer leur propre culture, qui ainsi s’ankylose.
Les données et les exemples peuvent se multiplier. Et le pire de tout est que presque personne ne paraît conscient de ces processus incomparablement plus graves que les tentatives à la longue vaines, des séparatistes pour annuler l’espagnol dans leurs régions. Mais finalement de la reconnaissance du problème peut sortir la solution.