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Le bien commun aujourd'hui

Sur Religion en Libertad, une interviewe - de grande actualité en ce moment en France - de Mgr Ignacio Barreiro Carámbula, un religieux urugayen délégué à Rome de " Vie Humaine Internationale ". Traduction de Carlota (16/4/2013)

     

La XIème Semaine pour la Vie organisée dans le diocèse d’Alcalá de Henares a vu l'intervention de Mgr Ignacio Barreiro Carámbula , ex-président et actuel délégué à Rome de « Vie Humaine Internationale », une des associations mondiales de référence dans la lutte contre la culture de mort. Ce religieux uruguayen a aussi participé l’année dernière en Espagne aux IVème journées hispaniques de Droit Naturel (avril 2012), traitant le concept du « bien commun » dans le magistère de l’Église (les actes ont été publiés ici).

Carmelo Gómez-Arías, de ReL a interrogé cet ecclésiastique uruguayen alors que le Sénat de son pays vient de donner un avis favorable au « mariage » homosexuel.
Extrait de l’article - original complet du texte ReL.

     

- ReL: S’agit-il d’une tendance irréfrénable ?
- Non je ne crois pas, c’est quelque chose de profondément contraire à la nature humaine. Comme disait Saint Thomas d’Aquin, ce qui est antinaturel ne peut durer.

- Mais la pression internationale est très forte…
- Cela fait partie de la doctrine erronée du genre, qui considère que chaque personne est libre de choisir son orientation sexuelle.

- L’Église est-elle seule dans la bataille?
- Non en Amérique ibérique il y a beaucoup de groupes protestants qui ont une position similaire. En même temps le développement de différentes sectes protestantes est déplorable (1)

- Que pensent les gouvernements populistes ibéro-américains?
- Le populisme de gauche qui prévaut aujourd’hui en Amérique latine tend à ne pas défendre la vie, mais en général il ne me semble pas qu’il existe une position commune en faveur du mariage entre personnes du même sexe.

- Pourquoi est-ce considéré comme des affaires privées et non pas comme faisant parti du bien commun ?
- L’origine de cette position est une vision libérale de l’existence qui fait prévaloir « le droit de choisir », ou les désirs subjectifs des personnes qui prévalent sur le bien commun.

- En quoi la culture de mort est-elle préjudiciable au bien commun ?
- D’abord, l’attaque au droit à la vie, qui est le droit le plus basique de tous les êtres humains, blesse gravement le bien commun. Ensuite je pense qu’il est évident qu’à travers l’avortement la société se prive de milliers de personnes qui pourraient contribuer d’une façon significative au bien commun à travers leurs vertus et talents.

- Et le divorce?
Si nous considérons que le mariage naturel est l’origine de la famille et que la famille est la cellule de base de la société, il est indubitable que l’introduction du divorce légal est profondément préjudiciable pour le bien commun.

- Et aussi l’adoption par des couples du même sexe ?
- C’est aller contre la nature humaine même, et par conséquent contre les droits fondamentaux de l’être humain en tant que personne. On ne respecte pas l’intérêt supérieur de l’enfant quand ce qui est mis en priorité c’est l’intérêt de celui qui adopte, car dans ces cas on « instrumentalise » ou on « chosifie » l’enfant en fonction du désir ou du vouloir des autres et l’on n’assure pas en réalité ce dont celui-ci a besoin.

- Et de quoi a-t-il besoin ?
- La première école de formation que reçoivent les enfants c’est à travers l’exemple des parents. Le fait de grandir et d’être éduqués par un couple homosexuel donne aux enfants un modèle qui est profondément antinaturel. Dans ses considérations de 2003 sur la reconnaissance légale des unions homosexuelles, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a rappelé qu’on les prive de l’expérience de la maternité ou de la paternité, et que l’intérêt supérieur qui vaut dans tous les cas, doit protéger celui de l’enfant qui en est la partie la plus faible et sans défense.

- Quelle est la situation actuelle du mouvement pro-vie au niveau mondial ?
- Un clair renforcement.

- Et votre organisation, Vida Humana Internacional ?
- Elle amplifie sa présence internationale devant l’augmentation croissance de nombres de demandes d’assistance dans de nombreux pays.

- Y a-t-il des avancées dans l’opinion publique ?
- Si l’on regarde les différentes manifestations pro-vie tant en Europe qu’aux Etats-Unis, on voit une augmentation significative du nombre de participants. En particulier l’on note une augmentation de la participation des jeunes.

- Mais la législation change peu…
- Aux Etats-Unis, différents états ont approuvé des lois qui limitent l’accès à l’avortement. L’État du Texas a fait passer des lois qui obligent les cliniques abortives à donner une information sur l’état de l’enfant, les risques de la procédure d’avortement et l’alternative pro-vie, pour que la femme qui demande un avortement puisse donner son consentement en connaissance. Le cas le plus récent et positif est la Loi de l’État du Dakota du Nord qui interdit tous les avortements dès que le cœur de l’enfant a commencé à battre. Cette loi dans les faits empêchera les avortements chirurgicaux.

- Pouvons-nous alors entrevoir un avenir meilleur?
- Nous pouvons clairement espérer un avenir meilleur, car les mesures des gouvernements contraires à la vie et à la famille sont antinaturelles et profondément préjudiciables au bien commun de la société. Dieu dans sa providence et comme Seigneur de l’Histoire nous aidera pour changer d’une façon significative la présente situation.

- Que proposez-vous concrètement contre la culture de mort?
- D’abord une sérieuse évangélisation, car on ne peut séparer la défense de la vie et de la famille de la présentation de la Foi. Ensuite, un plus grand engagement éducatif en expliquant comment la culture de mort détruit la société. Troisièmement, une plus grande persistance dans la vie politique, en exigeant des responsables politiques qu’ils se considèrent comme des « conservateurs » (ndt : à comprendre au sens de celui qui garde, qui protège, en opposition à l’idée progressiste de table rase du passé) ou qu’ils cherchent dans l’appui des secteurs conservateurs de l’opinion publique une plus grande cohérence dans la défense de la vie et de la famille.

- Nous avons parlé auparavant du bien commun. Quel rôle occupe ce concept dans la doctrine sociale de l’Église ?
- Le Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église du Conseil Pontifical Justice et Paix, publié en 2004, consacre au principe du bien commun une importante section. Et affirme qu’aucune forme expressive de la sociabilité (famille, groupes sociaux intermédiaires, entreprises) ne peut éluder la question autour du bien commun lui-même, qui est dit « constitutif de sa signification et authentique raison d’être de sa substance même ».

- Quel est le rôle de l’État dans son action pour le rendre concret ? Pourquoi, dans votre collaboration au volume sur « Le bien commun » nuancez-vous cette intervention ?
- L’État ne peut se limiter à être juge et gendarme. Il doit guider la vie économique de la société quand les privés ou les particuliers ne sont pas capables de pousser la croissance économique. Il doit veiller à ce que s’accomplisse le bien commun dans la vie économique. Or, en tenant compte de l’expérience historique de la croissance incontrôlée et apparemment incontrôlable des pouvoirs de l’état on doit interpréter ce principe dans la forme la plus restreinte possible.

- C’est à dire pas du tout de socialisme…
- Le socialisme croit que c’est un bien en lui-même que l’état contrôle l’économie. Plus encore : certaines formes du socialisme sont favorables à ce que l’état soit propriétaire d’importants moyens de production. Au contraire la position catholique est que l’État doit surveiller et guider la société pour assurer le bien commun, mais sauf cas rares l’État ne doit pas être propriétaire des moyens de production.

- Une autorité mondiale comme l’ONU peut-elle exiger le bien commun ?
- Ce serait théoriquement souhaitable qu’il existât une autorité internationale qui veille à l’application du bien commun international, mais c’est une évidence que l’ONU n’est pas capable de remplir ces fonctions-là. L’ONU est née sous une idéologie libérale et dans une certaine forme socialiste comme la Société des Nations (ndt :née avant la seconde Guerre Mondiale et installée à Genève). L’objectif final des « pères fondateurs » des Nations Unies est l’établissement d’un gouvernement mondial de nature démocratique, combinée avec une organisation socialiste de la société. Sur la base de cette idéologie, c’est l’un des forums principaux d’où l’on fait la promotion de la Culture de Mort.

- Dieu fait-il partie du bien commun temporel?
- C’est évident. D’abord parce que le Seigneur est le Créateur de la nature humaine et par conséquent de la société humaine. En conséquence, il a établi les normes sur la base desquelles la société doit être organisée. L’homme, de son côté, n’est que l’administrateur de la société sous la souveraineté et la dépendance de Dieu.

- Et la plus grande aspiration du bien commun dans la doctrine de l’Église n’est-elle pas la royauté sociale du Christ ?
- Oui. L’instauration d’un Royaume social du Christ implique que la société soit régie par les lois de l’Évangile. Nous devons avoir une vision précise de la société idéale où le Christ règne. Dans l’encyclique Quas Primas où Pie XI expose d’une manière splendide le dogme de la royauté social du Christ, il affirme que tous les hommes sont sous l’autorité du Christ, autant considérés individuellement que collectivement.

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Note de traduction
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(1) Exemple de l’activité de ces nouvelles églises »: en Équateur le 5 avril dernier, 200 évangéliques venant d’un quartier périphérique (El Guasmo) plutôt populaire, menés par le « pasteur » Eduardo Mora, ont brûlé dans le centre ville de Guayaquil, des photos du Pape, et celle du président du pays qui était à l’intronisation du nouveau Pape à Rome, aux cris de "idolâtres, idolâtrie" (cf ici). Ils ont été repoussés par des catholiques sortant de la messe alors qu’ils voulaient poursuivre leurs actions dans l’Église dédiée à Saint François. La police a du intervenir. Ce même groupe avait perturbé la semaine précédente une procession du vendredi saint. Cet Eduardo Mora apparaît dans de nombreuses vidéos sur internet où il est dit « apôtre ». Il aurait aussi des dons de guérisseur et une capacité d’exorciste.