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Le mystère François

... vu par Monique T., qui s'interroge sur les raisons d'un engouement par certains aspects surprenant. (19/4/2013)

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Le mystère François
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Comment expliquer la vague d'enthousiasme qui porte aux nues le Pape François? On ne peut que se réjouir qu'un pape ait la chance inouïe - refusée en toute injustice à Joseph Ratzinger - de pouvoir asseoir son autorité sur une telle popularité, pour le plus grand rayonnement de l' Eglise.

Mais cet engouement me paraît suspect quand il émane de milieux qui ont toujours été hostiles à l'Eglise et à la papauté et qui méprisent les catholiques. C'est encore plus suspect si les thuriféraires du nouveau Pape sont des catholiques qui ont toujours contesté l'autorité des papes et ridiculisé le Magistère de l' Eglise.
Comment donc expliquer cet enthousiasme suspect? Je peux me tromper, mais j'entrevois deux explications principales.

En premier lieu, je dirais qu'encenser François au delà du raisonnable (alors qu'il n'a encore rien fait de substantiel) est une manière de prendre une revanche sur Benoît. Lors des révolutions, on aime bien humilier ceux du premier rang en les rétrogradant au dernier. Si la cible est un intellectuel, qui a écrit tant de livres et ébloui plusieurs parlements, on n'en sera que plus satisfait. Déboulonner le fort en thème procure une certaine jouissance aux cancres et aux adorateurs de l'Egalité, mus plus souvent par l'envie que par le sens de la justice. On ne pardonne pas à Benoît d'avoir dominé son époque. Quel leader, dans le monde, pouvait l'égaler?
Sa simplicité touchante, sa pureté d'âme au service de la vérité n'ont été perçues que par une partie des catholiques. La plupart, trop paresseux pour lire une ligne de lui ou le regarder agir, endormis par l'indifférence du clergé (sauf exceptions) envers l'enseignement papal et copieusement intoxiqués par les médias, se sont crus surplombés par un esprit supérieur et hautain qui, d'après eux, ne les comprenait pas.
Tous ces gens se vengent aujourd'hui, plus ou moins consciemment, en lui signifiant: "comme vous avez eu raison d'abdiquer (d'où le concert d'éloges parfois suspects, après la renonciation), et voyez avec quelle facilité on vous a remplacé par quelqu'un de tellement mieux que vous!"
Le phénomène d'identification des foules avec François, que l'on estime proche des gens, complète le tableau. Rejeter Benoît et s'identifier à François, c'est tout un. Pour le moment, les trois notions qu'on associe à François sont la liberté (les journalistes disent qu'il est un homme libre parce qu'il envoie promener la pompe et les convenances), l'égalité (le Pape des pauvres, le Pape comme tout le monde) et la fraternité (mot employé par le Pape depuis le balcon de St-Pierre). On croirait que François est à la tête d'une société séculière, qui devra absolument se démocratiser, si elle veut se faire accepter par le monde. Je ne crois pas que ce soit la vision de François mais on nous conditionne à accepter l'effacement de la hiérarchie et la relégation du dogme.

En second lieu, certains milieux projettent sur François des attentes démesurées et irréalistes. Les groupes hostiles à l'Eglise et désireux de la voir disparaître croient avoir trouvé en François l'homme qui va l'affaiblir et la mener au déclin: d'où leurs applaudissements hypocrites. Il y a aussi ceux qui se disent catholiques (du style Vatican III), qui ne recherchent pas consciemment l'affaiblissement de l'Eglise mais qui prônent des mesures qui y conduisent. Ces deux groupes sont des alliés objectifs, ravis de l'élimination de l'obstacle-Ratzinger et de l'élection de François. Je crois qu'ils se trompent du tout au tout mais ils nourrissent le secret espoir que François prendra tout un arsenal de mesures propres à couler l'Eglise ou du moins à la transformer en une église protestante de plus: pousser la collégialité jusqu'à des extrémités non prévues par Vatican II, décentraliser au point de faire élire les évêques par le peuple, qui aurait aussi son mot à dire sur les options morales et les sacrements, "marier" les prêtres, ordonner des prêtresses, modifier la morale sexuelle et familiale et... toute la kyrielle bien connue des revendications qui reviennent continuellement dans le courrier des lecteurs d'une certaine presse catholique.
Tous ceux qui rêvent ainsi devraient se pencher sur les écrits du cardinal Bergoglio. Je crains (pour eux!) qu'ils ne soient fortement déçus, mais, pour le moment, on prête à François une générosité sans bornes. Il y a un mois, la couverture de Paris-Match titrait: "François, le Pape de l'espérance". Son prédécesseur ayant été probablement le Pape du désespoir... dont François a sauvé le peuple! Le fort investissement des gens sur François peut devenir lourd à porter pour lui, surtout si les médias continuent à l'entretenir. L'enthousiasme actuel des foules pour François peut procéder de motivations pures comme l'amour pour un père, l'attente d'un renouvellement de l'Eglise, mais pas uniquement.

Monique T.