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Le nouveau style du Pape

Deux mois avec un Pape «du bout du monde»: Un premier bilan d'Andrea Tornielli (11/5/21013).

     

C'est clair, Andrea Tornielli a pour le Pape François les yeux de Chimène.
Ce n'est pas un reproche (on pourrait m'objecter que je suis mal placée, à la différence que je ne suis pas pas un faiseur d'opinion...), même si la différence de traitement médiatique avec Benoît XVI crève les yeux: on sent ici le souci de répondre par avance à toutes les critiques, au point qu'on s'interroge sur l'utilité de la cellule de communication du Vatican, puisque ce sont les journalistes eux-même qui l'ont prise en main!

Quoiqu'il en soit, l'article souligne à quel point les formes externes d'exercice de la papauté ont profondément changé en deux mois, avec en particulier une prédication devenue purement "orale", à la place des homélies, discours et catéchèses ciselés de Benoît XVI (j'avoue que je les perçois d'autant plus ainsi, aujourd'hui, par contraste, et qu'elles me manquent infiniment), et un ministère plutôt gestuel, où les audiences du mercredi consistent en grande partie, selon Tornielli lui-même, en la papamobile qui tourne dans tous les coins et recoins de la Place Saint-Pierre.
Mais combien ont accès à cette forme de prédication, de catéchèse, de ministère? Ce n'est pas une critique au Pape (qui finalement assume parfaitement son rôle d'évêque de Rome): juste une question.

     

Ce qui a changé et ce qui va changer avec le pontificat de François
http://vaticaninsider.lastampa.it/inchieste-ed-interviste/dettaglio-articolo/articolo/24747/
Deux mois après l'élection de François quel premier bilan peut-on tirer? Quel Pape a été dans ces premières semaines Jorge Mario Bergoglio?

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Sympathie et confessions
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Tout d'abord, la vague de sympathie pour le nouveau Pape est indéniable: les présences aux Angelus et aux audiences restent très élevées, avec un boom des demandes à la Préfecture de la Maison pontificale. Bergoglio semble vouloir beaucoup miser sur ce contact avec la foule, car il consacre la majeure partie de son temps à passer entre les fidèles sur la place Saint-Pierre, en commençant par les plus éloignés, s'arrêtant souvent et descendant de la papamobile pour saluer. Lors de l'audience de mercredi dernier, il a consacré près d'une heure et demie à ce contact personnel avec les fidèles.
Malgré la fatigue physique incontestable que cela implique, François prouve qu'il considère cette proximité comme un élément irremplaçable de son ministère d'évêque «avec le peuple». Il y en a qui regardent avec scepticisme et même dans certains cas, ennui, cette «lune de miel» avec la foule, en attendant le moment où les «hosanna» seront remplacés par les «crucifie-le», peut-être en raison quelque position forte sur les questions de morale sexuelle. Mais il serait erroné de qualifier ce qui se passe seulement comme un effet de nouveauté amplifié par les médias. Dès les premiers jours après l'élection de François, ses allusions et ses accents sur le thème de la miséricorde («Le message de Jésus est la miséricorde. Pour moi, je le dis humblement, c'est le message le plus fort du Seigneur», a-t-il dit la messe dans la paroisse Sainte-Anne, le dimanche 17 Mars) ont remué quelque chose de beaucoup plus profond qu'une vague de sympathie, étant donné que beaucoup de gens sont revenues à la confession, et même après des décennies de séparation de l'Eglise, citant explicitement les paroles du Pape. Un fait confirmé non seulement par des interviews sporadiques, mais aussi à partir d'une recherche plus systématique effectuée par le sociologue Massimo Introvigne (ndt: mais Introvigne a aussi parlé de l'effet Benoît, ce que Tornielli omet de rappeler).


Le cas de Sainte Marthe
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Le Pape François après l'élection a confirmé les collaborateurs et chefs des dicastères de la Curie «donec aliter provideatur» c'est-à-dire «aussi longtemps que rien n'est fait autrement», gardant ainsi les mains libres pour effectuer les changements quand et comment il les jugera nécessaires. Avec certaines décisions prises dès le début de son pontificat, François - qui est resté simplement lui-même, continuant à maintenir le style de son épiscopat à Buenos Aires - a contribué à modifier les protocoles bien établis et en même temps a donné un signal en direction de la sobriété et de simplicité, que les fidèles ont reconnu et apprécié. Et que certains, probablement piqués au vif, ont stigmatisé comme «paupérisme», car remettant en cause un certain usage de l'argent et une certaine ostentation des signes et des bijoux ecclésiastique.
Résolument novateur est le choix de rester vivre dans la Maison Sainte Marthe, la résidence où les cardinaux ont logé pendant le conclave. Dans ce cas, ce n'était pas une question de «sobriété» (l'appartement privé du pape dans le Palais apostolique n'est pas une demeure princière), mais plutôt une décision provoquée par le sentiment d'«isolement» que François a ressenti en visitant pour la première fois que ce qui devait être sa maison. Restant à Sainte Martthe, Bergoglio a démythifié l'«Appartement», entendu comme couronne et filtre de collaborateurs autour de lui. Sans compter que Sainte Marthe, en plus de lui permettre un meilleur contact avec les gens, est aussi l'occasion de rencontres et d'échanges fraternels avec les invités, comme dans le cas du patriarche œcuménique Bartholomée Ier, avec lequel le Pape s'est entretenu longuement et de façon informelle à plusieurs reprises, partageant le même toit que lui (ndt: comme si Benoît n'avait pas noué de liens magnifiques avec les orthodoxes, avec des bases infiniment plus profondes que de dormir sous le même toit!). Ou comme cela s'est produit il y a deux jours quand François est allé attendre à la porte de Sainte Marthe l'arrivée du nouveau pape copte Tawadros II.

Prédications simples
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Une autre nouveauté de la papauté est représentée par les brèves homélies (jamais plus de dix minutes) que François tient au cours de la messe du matin, célébrée dans la chapelle de Sainte Marthe, concélébrée avec des prélats de passage ou des membres de la Curie, en présence de groupes d'employés du Vatican et d'autres invités. Les synthèses proposées par Radio Vatican sont devenues un événement quotidien. Le pape prépare ces homélies chaque matin après s'être levé à 4h30 et avoir prié et médité sur les Écritures du jour pendant près de deux heures (ndt: je ne peux m'empêcher de trouver ce détail de "communication" superflu). Ses mots sont simples, faciles à comprendre. Plusieurs fois déjà, il a parlé de la maladie de l'autoréférentialité et du carriérisme dans l'Église - des thèmes très chers à Benoît XVI, approfondis lors de consistoires et d'ordinations épiscopales, bien que souvent ses paroles aient été négligées par ceux qui étaient autour de lui - de même qu'il a invité les chrétiens à sortir, à aller vers les «périphéries géographiques et existentiellee», à se laisser guider par l'Esprit Saint. Les transcriptions intégrales de ces homélies a braccio ne sont pas publiées (ce sont messes privées) ni ne sont transmises par radio (ndt: ce ne sont donc plus des messes privées, étant donné l'usage qui en est fait). Mais il n'est pas difficile de se faire une idée de leur style en écoutant les homélies publiques de François, qui laisse souvent de côté le texte écrit pour improviser, comme quand il a demandé aux nouveaux prêtres de Rome d'être «médiateurs» et «intermédiaires», ou quand il a mentionné sa grand-mère et ses précieux enseignements, ou quand il dit, citant saint François d'Assise: «Proclamez l'Evangile, si nécessaire aussi avec les mots», laissant entendre que l'annonce et le témoignage doivent être transmis avec sa vie.

Réformes sur réformes
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Dans les congrégations générales précédant le conclave, la requête est venue d'une réforme de la Curie, ainsi que de plus de collégialité et de partage de certains choix concernant le gouvernement de l'Eglise.
Le Pape François, le 13 Avril, exactement un mois après l'élection, a nommé un conseil de huit cardinaux à qui a été confiée l'étude d'une réforme de la «Pastor Bonus», la Constitution, qui régit la Curie romaine et ses structures. Le Conseil, composé de huit cardinaux - dont sept ne faisant pas partie de la Curie, mais archevêques dans les cinq continents - est également chargé de conseiller de façon permanente le Pape dans le gouvernement de l'Eglise. La réforme de la Curie sera donc étudiée par des cardinaux qui ne lui appartiennent pas. Toute prévision est pour le moment hors de propos: on sait seulement que cet organisme - pensé pour servir le pape et non pour le gouvernement central de l'Eglise catholique - doit être simplifiée, réduit, plus adapté aux besoins du temps présent, moins bureaucratique. Le pape a déjà rencontré de nombreux cardinaux et de nombreux membres de la Curie (en plus des audiences dont il est rendu compte, il y en a beaucoup d'autres l'après-midi à Sainte Marthe, qui doivent rester confidentielles) et a surtout écouté. Dans plus d'un cas, ceux qui étaient reçus, à peine sortis, ont cru bon de raconter le dialogue qui avait eu lieu (ndt: on peut supposer qu'ils ont été dûment sollicités!). Mais souvent, il s'agissait de leurs «desiderata», pas des indications du pape (ndt: il s'agit sans doute d'une allusion aux encombrants archevêques Paglia et Pero Marini). Bien entendu, la relation entre le Pape et les chefs de dicastère a déjà changé, auparavant, ils devaient attendre jusqu'à huit mois pour obtenir une audience (ndt: j'ignore si c'est vrai! mais il y avait certainement de bonnes raisons en cela, en particulier celles, pour le Pape, de ne pas prendre de décisions hâtives ou sous la presssion des évènements): elle sera plus directe, immédiate et constante.

Le portrait-robot du futur Pape, selon Bergoglio
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Le Père Angel Strada, fondateur du Mouvement international Schoenstatt (cf. fr.wikipedia.org), a raconté après l'élection à Evangelina Himitian, auteur du livre «Francisco el Papa de la gente» l'une de ses conversations privées avec Bergoglio qui a eu lieu trois jours avant son départ pour le conclave. Parlant du profil nécessaire au nouveau pape, l'archevêque de Buenos Aires avait déclaré que, selon lui, «d'abord il doit être un homme de prière, profondément uni à Dieu, secundo, il doit être profondément convaincu que Jésus est le Seigneur de l'histoire. Tertio, il doit être un bon évêque, capable d'accueillir, tendre avec les personnes et aussi capable de créer la communion. Enfin, il doit être capable de réformer la curie».
Les cardinaux, en moins de vingt-quatre heures, le 13 Mars, semblent avoir trouvé (ndt: pour le dernier point, on ne sait pas encore... et toutes les autres qualités, Benoît XVI les possédait au plus haut point, mais les "vaticanistes" eux-mêmes les lui ont systématiquement niées).