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Si simple, mais si difficile à comprendre

François déroute. Sa démarche à Lampedusa oblige les commentateurs catholiques loyaux à faire le grand écart. Le (beau) commentaire de Riccardo Cascioli, le directeur de la Bussola, fait dire au pape des choses qu'il n'a pas dites... (8/7/2013)

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François à Lampedusa

Comme par exemple:
"Le Christ est la seule réponse qui retourne la situation d'Adam et de Caïn, il est le seul moyen de donner un sens à cette «épine dans le coeur» dont le Pape a parlé, il est l'unique consolation pour ceux qui vivent dans la souffrance. Il est la seule façon pour que les questions que le pape a adressées à chacun d'entre nous, ne nous poussent pas vers l'angoisse, mais nous ouvrent à un plus grand amour et à une activité joyeuse."

L'homélie contient certes 12 occurrences du mot "Dieu" (utilisé aussi dans le contexte de l'homme qui se prend pour Dieu), mais aucune de "Christ", et une seule de "Jésus" - seulement à propos de la parabole du bon Samaritain.

     

Les questions du pape: un défi à notre cécité

Riccardo Cascioli
www.lanuovabq.it
07/08/2013
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Si simple, mais si difficile à comprendre.
Le Pape François parle dans un langage simple, dit des choses élémentaires, parfois même - disent certains - banales. Pourtant, paradoxalement, il est difficile de le comprendre vraiment. Peut-être parce que ces mots simples, pour les comprendre, il faut d'abord démolir ce mur de préjugés et de choses prises pour acquises qui tiennent nos cœurs prisonniers.

C'est ce qui va aussi se passer, et qui est en train de se passer, avec ce geste merveilleux de la visite à Lampedusa qu'il vient d'accomplir.

Le pape François agit et parle, parce que là où nous voyons des nouvelles, lui voit l'homme. L'homme qui souffre, l'homme qui se réjouit, l'homme qui voudrait une autre vie. Dans le cas particulier des migrants, il voit des hommes et des femmes à la recherche légitime d'une vie meilleure pour eux et leurs enfants, qui, dans une tentative pour atteindre cet objectif passe par d'énormes souffrances et parfois perdent la vie. Et ces morts, a dit le Pape, sont «une épine dans le cœur». Pas avant tout un problème humanitaire à affronter, pas un problème politique à résoudre: en second lieu, il s'agit aussi de cela, mais d'abord et avant tout c'est «une épine dans le cœur». Comme celle qu'ont les parents quand leurs enfants sont engagés sur une mauvaise route ou tout simplement préoccupante. L'«épine dans le coeur», c'est ce qui arrive quand un homme s'intéresse au sort de l'autre, à son bien, et souffre avec lui, participe avec lui.

C'est pourquoi nous avons du mal à comprendre le Pape; il nous l'a rappelé lui-même dans son homélie, nous sommes devenus insensibles au cri de l'autre. Nous nous préoccupons trop de défendre avant tout des positions. Alors, nous essayons de comprendre si le Pape est progressiste ou conservateur, s'il est en continuité avec Benoît XVI ou bien représente une rupture. Et nous ne le laissons pas parler à notre cœur.

Il sera certainement insupportable d'entendre les commentaires de la présidente de la Chambre (ndt: Boldrini) sur cette visite, il sera certainement écoeurant d'entendre les dirigeants politiques de tous bords, la bouche pleine des paroles du Pape François condamnant ceux qui s'enrichissent sur la misère des autres et indiquant les causes socio-politique qui sont la cause de ces tragédies. Des jugements qui doivent être pris au sérieux, mais que l'on ne peut pas tirer à droite et à gauche.

Mais ce n'est pas là le centre de l'histoire.

Ce qui doit nous intéresser dans cette visite à Lampedusa, c'est cette capacité du pape, dans chaque situation, à regarder l'homme et sa vérité, et puis ces questions qu'il a répétées avec insistance au cours de l'homélie et qui sont adressées à chacun d'entre nous: «Adam, où es-tu?»; «Caïn: Où est ton frère?».
L'homme qui se prend pour Dieu est désorienté et finit par faire violence, construire un monde de violence. Chacun de nous est Adam, chacun de nous est Caïn, nous nous détournons devant les autres, même dans notre famille, même parmi nos amis. «Où est ton frère? La voix de son sang crie vers moi, dit Dieu».
Ce n'est que si nous laissons transpercer par ces questions que nous pouvons commencer à voir le monde, les autres, dans une lumière différente. Et surtout, être plus vrai, plus hommes.

Et nous ne devons pas oublier que, plus important encore que l'homélie, il y a le fait qu'à Lampedusa le pape a célébré l'Eucharistie. C'est le fait réel, concret, qui vaut mille mots. La vie ne change pas à travers les mots, mais parce qu'on rencontre quelque chose de vrai, parce qu'on expérimente l'appartenance à la Vérité. Le Christ est la seule réponse qui retourne la situation d'Adam et de Caïn, il est le seul moyen de donner un sens à cette «épine dans le coeur» dont le Pape a parlé, il est l'unique consolation pour ceux qui vivent dans la souffrance. Il est la seule façon pour que les questions que le pape a adressées à chacun d'entre nous, ne nous poussent pas à l'angoisse, mais nous ouvrent à un plus grand amour et une activité joyeuse.