Accueil | D'un Pape à l'autre | Retour au Vatican | Collages de Gloria | The hidden agenda | Lumen Fidei | Lampedusa | Benoît et les jeunes

13 mars 2013 (III)

"Du berger allemand au pittbull américain": Un article paru sur le site Papale Papale qui étudie les racines des attaques contre l'Eglise, et imagine l'élection comme Pape du cardinal Dolan. Troisième partie: l'amertume de Paul VI, et le chemin de Benoît XVI (28/3/2013)

>>> 13 mars 2013 (I)
>>> 13 mars 2013 (II)

     
Troisième partie
L'amertume de Paul VI et le chemin de Benoît XVI

... Il faut dire aussi que l'œuvre de démolition de nos racines culturelles a été assez aisée, parce que l'Eglise a réagi avec une excessive modération, avec une voix étouffée, comme c'est dans son caractère.
L'exemple le plus significatif de cette défense faible et étouffée fut le Pontificat du grand et incompris Paul VI, qui fut investi en plein par le tsunami idéologique et d'inculturation de la pensée "liberal".

L'amertume de Paul VI.

... Pourtant, lui aussi pouvait faire plus.
------

Par exemple quand en 1970 fut approuvée en Italie la loi qui instituait le divorce, Paul VI, dans un discours aux romains, manifesta de "l'amertume" pour le choix d'approuver une loi "malheureuse", et quelques semaines plus tard, parlant au clergé de la ville, tout en répétant son amertume pour la loi, n'alla pas au-delà d'une recommandation aux catholiques de "rester solidement ancré à leurs antiques et honorables traditions de respect aux valeurs chrétiennes de la famille", et durant la campagne pour le referendum de 1974, pour abroger la loi, il n'intervint pas dans le débat public, sauf ensuite, une fois la loi confirmée , se limitant à déclarer: "nous savons comment une large majorité du bien-aimé peuple italien s'est prononcée en faveur d'une loi qui admet une certaine facilité de divorce, c'est pour nous motif d'étonnement et de douleur, aussi parce que, en soutien de la thèse, juste et bonne, de l'indissolubilité du mariage, il a manqué la solidarité naturelle d'un nombre non négligeable de la communauté ecclésiale.

Egalement à l'occasion de l'approbation de la loi 194 sur l''interruption volontaire de grossesse de 1978, le message de Paul VI se limita à une exhortation aux catholiques à ne pas y recourir: "La vraie pitié pour les difficultés et les angoisses de la vie humaine ne consiste pas à supprimer ce qui est le fruit de la faute ou de la douleur humaine, mais à consoler, bénir la souffrance, la misère, la honte, la faiblesse ou la passion humaine: le tuer, jamais! A cela, nous devrions réfléchir devant le triste et ignoble recours à l'avortement légalisé".
En somme, davantage une prise d'acte du changement qu'une protestation, mais comme nous venons de le dire, ceci est dans le tempérament de l'Eglise Catholique, et n'est pas critiquable comme comportement, étant simplement la suite de l'Evangile et surtout la rémission dans les mains de Dieu, ce que Dieu lui-même permet, si l'on se confie à lui.

L'unique passage que je voudrais souligner est cette phrase, concernant le référendum sur le divorce: "aussi parce que, en soutien de la thèse, juste et bonne, de l'indissolubilité du mariage, il a manqué la solidarité naturelle d'un nombre non négligeable de la communauté ecclésiale"; une confirmation autorisée que la pensée théo-relativiste avait attaqué aussi sur ce terrain, celui ecclésio-catholique, qui aurait dû être réfractaire à cette vision de la société.

Je conclus ce passage en rappelant la fameuse phrase de Paul VI: "la fumée de Satan est entrée dans l'Eglise". Evidemment, lui aussi s'était rendu compte que la digue avait cédé, et serré l'Eglise entre les tournants historiques et les évènements sanglants, comme ceux du terrorisme de ces années; une Eglise était en pleine guerre eschatologique, guerre nullement finie, et même intensifiée dans les deux dernières décennies.

Benoît XVI a fait émerger la vraie âme de l'Eglise

----

Benoît XVI, après les années pyrotechniques de JPII, qui ont coïncidé avec des évènements historiques extraordinaires, s'est trouvé devoir reparcourir cette voie qui mène, à travers les "paroles dures" des valeurs non négociables, à la "porte étroite" de l'exercice de la vertu.
Pourtant, à la différence de Paul VI, le Pape émérite a eu affaire à une condition désormais diffuse et consolidée d'inculturation relativiste, en partie différente de l'idéologie soixante-huitarde et "gauche-caviar" du pape Montini. Il s'est retrouvé à parler à une société désormais complètement sécularisée, et à une Eglise - ou du moins à une grosse tranche de celle-ci - elle aussi complètement sécularisée; "inculturée" par une sorte de nouvelle religion humanitaire qui met au centre les besoins de l'homme, voire de la "chair de l'homme, plutôt que des nécessités de son âme.
Bien entendu, rien à redire: comme dit Saint Jacques, les œuvres sont importantes à l'égal de la foi, mais elles les conséquences de la foi, et non sa cause, et cela signifie que le salut, celui chrétien, est dans la foi, et non dans les œuvres, autrement il suffirait de faire partie de la Protection Civile pour se sauver.... mais ce n'est pas le cas! Et alors, voilà que Benoît XVI, au lieu d’entrer en duel sur le fil de la communication-confrontation avec l'intelligentsia, a fait sortir l'âme vraie de l'Eglise, remettant, avec sa renonciation, Jésus au centre, et éclipsant derrière le Christ, derrière le divin, l'homme séculier.

Un premier signe de cette realpolitik à la catholique, ce fut durant les Journées Mondiales de la Jeunesse à Madrid, durant l'adoration eucharistique. Je me souviens encore parfaitement de cette soirée, j'avais suivi le direct TV dès le début de l'évènement, et j'ai le souvenir très vif de cette figure frêle, ferme, sereine, toujours souriante, tandis qu'une tempête de vent et de pluie faisait sauter le programme de son intervention devant plus d'un million de personnes, pour la plupart des jeunes. Fermeté et sérénité devant cet évènement météorologique, inattendu et incontrôlable par la volonté humaine, qui tinrent à leur place ce million et plus de personnes sous le vent et la pluie; la force qui libérait cet homme, ou mieux qui "arrivait" à travers cet homme plein d'Esprit Saint, était tellement évidente qu'elle réconforta et soutint tout le monde.

C'est justement ce violent évènement atmosphérique, c'est-à-dire un évènement apparemment négatif, qui bouleversa le programme, empêchant le Pape Emérite de parler, qui mit en lumière d'où venait la force qui était en lui, comme en tous ceux qui ont la foi et qui ne regarde pas à leurs propres œuvres comme viatique de salut, mais à Jésus. Ce million et plus de personnes, sous la pluie battante, à l'arrivée de ces quelques grammes de farine et d'eau transformés en hostie, se mirent toutes à genoux dans la boue et dans un silence absolue adorèrent pendant vingt minutes ces quelques grammes de farine et d'eau, battus par la pluie et le vent, complètement insoucieux de l'évènement atmosphérique, parce tous avaient compris que là, il y avait beaucoup plus, il y avait... "la Présence".
Cette farine transformée en "pain vivant", en réalité, était et est Jésus, le Seigneur vivant, vrai et unique Roi de l'Univers, et en cet instant, il a été évident que la force de cet homme doux et tranquille, qui est en réalité un géant de l'histoire, est toute entière là, en Jésus, et en personne d'autre, et d'autant moins en lui-même, en son "moi".
Petite parenthèse, j'ai pleuré aussi en cette occasion.

Il ne pouvait pas y avoir meilleur message pour le monde: l'homme, même pape, disparaît devant le Seigneur. Nous sommes des "serviteurs inutiles" et nous devons seulement nous fier, nous confier, avoir foi en Jésus, le reste, c'est lui qui le fait. Le Pape théologien a dû renoncer à la catéchèse, mais il a trouvé également sa victoire dans le Très Saint Sacrement, se confiant à lui qui est le Christ, "... le Fils du Dieu vivant". Peut-être qu'aux yeux de ceux qui regardent seulement l'aspect séculier de l'histoire, ce succès n'existe pas, parce qu'ils ne parviennent pas à le voir; mais pour ceux qui, comme moi, cherchent à regarder l'aspect eschatologique, spirituel, de l'histoire et de la vie, ce qui est arrivée à la Veillée pour l'Adoration Eucharistique à Madrid, a une signification énorme. Ce bouleversement inattendu du programme a donné un sens à tout le reste, parce qu'il ne s'agissait pas d'un évènement sportif ou d'un spectacle, c'était une rencontre, une rencontre avec le Seigneur, et justement cette rencontre est devenue l'unique évènement, le vrai évènement.
Devant Jésus, tout disparaît.
Dieu est Amour, il est Bien absolu, et il est l'unique créateur, le reste de l'histoire, nous l'interprétons comme créatures, il n'existe pas de Dieu du Mal, il existe la haine, la méchanceté, l'envie, l'orgueil, il y a les inclinaisons négatives qui poussent l'homme à accomplir le mal, et existe un inspirateur de cette inclinaison négative, Satan, mais il existe aussi et surtout un triomphateur assuré de l'histoire: Jésus, parce qu'il est écrit, et que c'est la parole de Dieu, que "les portes de l'enfer ne prévaudront pas".
Cet évènement, faire s'élever Jésus-Eucharistie devant lequel tout disparaît, c'est exactement ce qu'a fait à nouveau le Pape Emérite quand il a décidé de renoncer: il a ôté l'homme et il a remis Jésus à la tête de l'Eglise, un message fort et clair à tous les "sécularisateurs" à l'extérieur et à l'intérieur de l'Eglise, un tweet, pour rester dans la modernité, sec et cassant: "c'est Dieu qui décide, c'est le Christ qui conduit l'Eglise, et pas vous!".
L'Eglise s'exprime ainsi sans slogan, sans titres d'information schizophrénique, faite seulement de superficialité, d'approximation, de banalité. L'Eglise, non. L'Eglise, la vraie, celle qui n'est pas sécularisée, rend un témoignage silencieux, élevant Jésus. Entre autre, que là soit la vraie Eglise, et tant pis pour les "catho-communistes", les "catho-révisionnistes", les "catho-modernistes", les "catho-liberal", cela nous vient de l'histoire: Sainte Claire d'Assise mit en fuite les sarrasins qui dévastaient Assise, prenant dans ses mains le Très Saint Sacrement, et l'élevant devant l'ennemi, les maures demeurèrent comme foudroyés et fuirent à toutes jambes, abandonnant le terrain: c'est l'histoire, pas la légende.

A suivre....